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La nécessité de l’appropriation du lexique pour la mémorisation : recopier, s’exercer,

Chapitre 3. Adapter des supports écrits de classe ordinaire aux difficultés des élèves allophones

3. La nécessité de l’appropriation du lexique pour la mémorisation : recopier, s’exercer,

L’adaptation d’un support écrit de cours de classe ordinaire aux difficultés des EANA post-alpha est ainsi supposée favoriser une plus grande compréhension de la leçon proposée. Une nouvelle question se pose désormais : comment passer de la compréhension à la mémorisation ? En effet, dans le contexte de mon stage, il est demandé aux élèves de restituer leurs connaissances au moment des évaluations.

Au-delà de la compréhension des informations et du lexique professionnel présents sur le support adapté, il est donc nécessaire que l’élève allophone se les approprie en étant actif dans son apprentissage. En ce qui concerne le lexique, les didacticiens (cf. par ex. Tremblay, 2004) distinguent classiquement le lexique passif (unités comprises par le locuteur mais non- utilisées) et le lexique actif (unités comprises et employées par le locuteur). Sont alors distingués deux niveaux d’acquisition d’un nouveau mot : comprendre un mot en situation de réception et utiliser un mot en situation de production écrite ou orale. Selon Lieury (cité par Scheidecker, 2011 : 26), « le lexique dont dispose un apprenant est beaucoup plus riche en reconnaissance qu’en production ». Néanmoins, en CAP APR, le lexique professionnel appris dans les matières théoriques doit pouvoir être réinvesti en situation de production écrite, lors

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des examens. Comment aider un élève allophone post-alpha à mémoriser ces nouveaux mots afin d’être capable de les restituer ?

Lieury (2003) distingue la mémoire lexicale de la mémoire sémantique. La mémoire lexicale « stocke tous les fichiers mots, mais seulement la carrosserie des mots ») alors que la mémoire sémantique « stocke le sens des mots » (Lieury, 2003 : 180). Dans un objectif de mémorisation et d’appropriation du lexique, il convient donc de travailler sur la morphologie et le sens du mot à connaître. Selon Lieury, c’est en répétant et en vocalisant que l’on retient la composante phonétique et graphique d’un mot. Pour un élève post-alpha, cette étape est essentielle : elle lui permettra de faire le lien entre graphie et phonie et de s’appuyer sur sa mémoire auditive. Lieury insiste également sur l’importance d’apprendre par cœur l’orthographe du mot : un exercice de copie pourrait par exemple aider les élèves post-alpha à mémoriser l’écriture du mot.

Un préalable indispensable pour un élève qui n’a pas été scolarisé antérieurement ou qui n’est pas familier de l’alphabet latin est de s’entraîner au geste graphique en français avant de s’engager dans une production autonome. La copie est alors une activité importante comme première étape avant la production écrite proprement dite (Eduscol, 2016b : 10).

Il semble donc judicieux de proposer aux élèves allophones (et cela pourrait aussi être utile aux élèves francophones, me semble-t-il), un exercice de copie des mots-clés à retenir. En permettant à l’élève de recopier les mots importants et donc de se les approprier, on favorise la mémorisation et, sur un plan strictement scolaire, on prépare la restitution des connaissances pour un futur examen.

Au-delà de la mémoire lexicale, il convient de travailler la mémoire sémantique. Selon Lieury (2003), la mémoire sémantique suppose un travail d’analyse et de compréhension. On trouve de nombreuses pistes pour mémoriser le sens d’un mot dans les travaux de recherche en didactique des langues : citons-en quelques-unes. L’approche actionnelle préconise par exemple l’usage du lexique en interaction et le CECRL la présentation des mots à connaître en contexte. Dans ce sens, les travaux pratiques de CAP APR, à travers la manipulation et l’interaction, favorisent le réemploi de ce nouveau lexique professionnel en contexte (les enseignants de biotechnologie s’efforcent le plus possible de faire le lien entre théorie et pratique). Bonthoux, Berger et Blaye (2004 : 5) soulignent également l’utilité de la catégorisation, qu’ils définissent comme « une activité cognitive conduisant l'individu à traiter de la même façon des objets différents, et donc à dépasser les spécificités au profit de la généralité ». On peut par exemple proposer aux élèves allophones post-alpha de créer des

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catégories sémantiques en manipulant des images. D’ailleurs, selon Lieury (2003), pour retenir le sens d’un mot, il est efficace d’utiliser la mémoire visuelle en associant des images aux mots. Il s’agira de choisir les stratégies qui semblent les plus adaptées au profil des élèves allophones post-alpha afin de leur faciliter l’accès au sens des mots à connaître.

Ces pistes pour adapter un support de cours de classe ordinaire aux difficultés d’un EANA post-alpha peuvent lui permettre de mieux comprendre le contenu d’un cours. En proposant des exercices de copie et de réinvestissement du lexique professionnel appris, on prépare l’élève allophone à utiliser ces nouvelles connaissances en situation de production écrite, pour répondre aux exigences institutionnelles : l’examen écrit. Il est néanmoins difficile, pour des élèves peu ou pas scolarisés antérieurement, de passer des étapes de compréhension et de mémorisation à celle de restitution. En effet, les modalités des examens écrits sont souvent trop complexes pour eux et ne leur permettent pas de restituer leurs connaissances en autonomie, sans lecteur-scripteur. Si ces modalités sont parfois aménageables, ce n’est pas le cas pour tous les examens et certains enseignants refusent aussi parfois de le faire. Il est alors nécessaire de distinguer compréhension et restitution. Ce n’est pas parce qu’un élève allophone a échoué à un examen écrit que les adaptations de supports proposées par l’enseignant ne sont pas pertinentes. Proposer des adaptations pédagogiques qui permettent aux élèves allophones post-alpha d’acquérir des compétences disciplinaires est déjà un très grand pas. En effet, selon Cornu (2017), pour les élèves non scolarisés antérieurement, l’inclusion dans les classes ordinaires a davantage pour objectif la découverte disciplinaire que l’acquisition de compétences disciplinaires.

Les éléments de cadrage théoriques convoqués ont permis d’identifier une stratégie particulière visant à favoriser la compréhension des élèves allophones post-alpha inclus dans une classe ordinaire : cette stratégie consiste à adapter pour ces élèves des supports de cours destinés aux autres élèves dits « ordinaires ». Reste à évaluer si ce type d’outil recueille l’adhésion des acteurs, à savoir l’ensemble des élèves de la classe et les enseignants y intervenant.

L’objet de cette étude est ainsi d’élaborer puis de tester l’outil dans le contexte précis de mon stage. La question à laquelle ce mémoire cherchera à répondre est donc la suivante : dans quelle mesure l’adaptation de supports écrits de cours existants, aux difficultés d’élèves allophones post-alpha, recueille-t-elle l’adhésion des élèves et des enseignantes de biotechnologie de CAP APR ?

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Partie 3

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Modélisation de supports de cours écrits adaptés aux

difficultés des élèves allophones post-alpha : élaboration,

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Chapitre

1.

Méthodologie

utilisée

pour

l’élaboration

et