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Les moyens de prévention généraux

Dans le document Les violences au travail (Page 149-153)

CHAPITRE I : DEFINITIONS ET QUALIFICATION LEGALE DES

CHAPITRE 3 : LES MOYENS DE PREVENTION LEGISLATIFS FACE AUX

I. Les moyens de prévention généraux

La politique de santé et de sécurité au travail a été élaborée sur deux périodes.

I.1. La première période : une volonté de protection et de réparation pour les travailleurs

La première période a débuté en 1892 par la loi créant l’inspection du travail et se caractérise par une volonté de protection et de réparation en faveur des travailleurs. Elle est notamment marquée par la reconnaissance de la mission de protection des pouvoirs publics. L’intervention de l’État dans le pouvoir de direction des employeurs concerne la liberté contractuelle, le droit de propriété et la liberté d’entreprendre.

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Durant cette période, de nombreux textes ont été adoptés. A titre illustratif, nous pouvons citer la loi du 9 Avril 1898 permettant la réparation forfaitaire et automatique des conséquences dommageables de la liberté contractuelle au regard de la santé et de l’intégrité physique des travailleurs. Par exemple, une personne blessée au travail à cause d’une mauvaise organisation du travail pourra prétendre à une indemnisation. Cette indemnisation sera fondée sur un barème forfaitaire qui sera fonction de ses blessures.

La loi du 12 Juin 1893 peut également être citée puisqu’elle impose en matière d’hygiène et de sécurité des obligations générales et des mesures techniques afin de prévenir les risques issus du milieu de travail.

I.2. La seconde période : une approche globale donnant lieu à des lois fondatrices.

La seconde période est dictée par une logique de politique globale de la protection de la santé et de sécurité au travail et est marquée par deux lois en France : la loi du 6 Décembre 1976 et celle du 31 Décembre 1991, transposée de la directive du 12 juin 1989.

La loi du 6 Décembre 1976 a posé le principe de l’intégration de la prévention des risques professionnels à l’ensemble des situations de travail, que ce soit dans les locaux, sur des machines ou par l’utilisation de produits.

La directive européenne du 12 juin 1989 (n°89-391) a instauré de grands principes de prévention et a permis une prise de consciente de la nécessité de prendre en compte les risques en entreprises et donc d’améliorer la santé au travail. Elle a imposé une approche globalisante de la sécurité dans l’entreprise en créant l’obligation de moyens renforcée du salarié. Notons que les institutions communautaires ont refusé d’établir un principe d’immunité du travailleur car, même en étant protégé, tout individu doit pouvoir répondre de ses actes. Cette directive européenne a exposé les principes de base visant à prévenir les risques professionnels, améliorer « l’environnement de travail » et éviter les accidents du travail et les maladies professionnelles. Elle introduisit le principe d’évaluation des risques et a rappelé que l’information et la formation étaient les bases d’une bonne prévention. La prévention y est définie comme «

l’ensemble des dispositions prises ou prévues à tous les stades de l’activité de l’entreprise en vue d’éviter ou de diminuer les risques professionnels » (Décret n° 2006-1256 du 15 novembre

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Elle préconise la « participation équilibrée en matière de sécurité et de santé sur le lieu de

travail entre les employeurs et les travailleurs ». Ainsi, les Institutions communautaires

considèrent que le salarié ne doit pas subir les conditions de travail mais contribuer à les améliorer.

L’article 13 de cette directive pose une nouvelle l’obligation de moyens renforcée dont la particularité porte sur son destinataire : le salarié. Ainsi, « il incombe à chaque travailleur de

prendre soin, selon ses possibilités, de sa sécurité et de sa santé ainsi que de celles des autres personnes concernées du fait de ses actes ou de ses omissions au travail, conformément à sa formation et aux instructions de son employeur. » L’alinéa 2 expose plus concrètement les

obligations de faire et de ne pas faire des salariés :

« Afin de réaliser ces objectifs, les travailleurs doivent en particulier, conformément à leur

formation et aux instructions de leur employeur :

a) utiliser correctement les machines, appareils, outils, substances dangereuses, équipements de transport et autres moyens;

b) utiliser correctement l'équipement de protection individuelle mis à leur disposition et, après utilisation, le ranger à sa place;

c) ne pas mettre hors service, changer ou déplacer arbitrairement les dispositifs de sécurité propres notamment aux machines, appareils, outils, installations et bâtiments, et utiliser de tels dispositifs de sécurité correctement;

d) signaler immédiatement, à l'employeur et/ou aux travailleurs ayant une fonction spécifique en matière de protection de la sécurité et de la santé des travailleurs, toute situation de travail dont ils ont un motif raisonnable de penser qu'elle présente un danger grave et immédiat pour la sécurité et la santé ainsi que toute défectuosité constatée dans les systèmes de protection; e) concourir, conformément aux pratiques nationales, avec l'employeur et/ou les travailleurs ayant une fonction spécifique en matière de protection de la sécurité et de la santé des travailleurs, aussi longtemps que nécessaire, pour permettre l'accomplissement de toutes les tâches ou exigences imposées par l'autorité compétente afin de protéger la sécurité et la santé des travailleurs au travail;

f) concourir, conformément aux pratiques nationales, avec l'employeur et/ou les travailleurs ayant une fonction spécifique en matière de protection de la sécurité et de la santé des travailleurs, aussi longtemps que nécessaire, pour permettre à l'employeur d'assurer que le milieu et les conditions de travail sont sûrs et sans risques pour la sécurité et la santé à l'intérieur de leur champ d'activité. »

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Cependant, la transposition de cette directive dans le droit français a été difficile. En effet, en France, la configuration du droit actuel est fortement marquée par l’histoire, le droit social s’étant développé dans une société qui séparait clairement le prolétariat des patrons. L’asymétrie de la relation est contractualisée puisque le salarié est subordonné à l’employeur, notamment de par son contrat de travail. La transposition de la directive européenne dans le système juridique français a donc dû accentuer la responsabilité de l’employeur. Par exemple, le droit de grève est un droit constitutionnel qui s’impose à l’employeur. Il est une manière de réduire le déséquilibre qui existe entre l’employeur et l’employé et vise à garantir la santé des salariés.

La directive fut adoptée le 31 décembre 1991 (loi n°91-1414) et a permis d’édicter les articles L. 4121-1 et suivants du Code du travail qui visent à prévenir les risques d’origine professionnelle pouvant être causés par l’activité de l’entreprise, par des matériaux ou des substances utilisés ou générés par l’environnement (tabagisme ou l’amiante par exemple). L’article L 4122-1 dit que :

« Conformément aux instructions qui lui sont données par l'employeur ou le chef

d'établissement, dans les conditions prévues, pour les entreprises assujetties à l'article L. 122-33 du présent code, au règlement intérieur, il incombe à chaque travailleur de prendre soin, en fonction de sa formation et selon ses possibilités, de sa sécurité et de sa santé ainsi que de celles des autres personnes concernées du fait de ses actes ou de ses omissions au travail. »

On remarque une particularité de la transposition française qui renvoie au règlement intérieur, par nature rédigé par l’employeur. La législation s’en remet donc une fois encore à l’employeur.

Patrick Chaumette21 disait que « les innovations de la loi du 31 décembre ne bouleversent

nullement les principes antérieurs du droit français ». En effet, l’obligation de moyens

renforcée découle de l’obligation plus générale qui incombe au salarié envers son employeur : respecter le règlement intérieur et les consignes de sécurité. Ces obligations proviennent de la loi Auroux (4 août 1982) énonçant que le règlement intérieur dicte « les mesures d’application

de la réglementation en matière d’hygiène et de sécurité dans l’entreprise ou l’établissement.

»

21 CHAUMETTE Patrick, « Commentaire de la loi du 31 décembre 1991 relative aux obligations de l’employeur et du salarié en matière de sécurité au travail », Droit social n°4, avril 1992, page 342

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