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Molécules anti-fibrosantes

2.8 Traitement de la fibrose hépatique .1 La fibrose à l’étude

2.8.2 Molécules anti-fibrosantes

Le traitement est surtout indiqué en cas de fibrose modérée (F2) et sévère (F3 et F4).

a- Les interférons

Les interférons sont des médiateurs impliqués dans de multiples fonctions, telles que l’établissement de la résistance à l’infection virale, la sécrétion de cytokines, le recrutement de cellules immunes et l’induction de différenciation cellulaire.

Les interférons sont classés en interférons de type I (alpha 1, alpha 2 et bêta) et interféron de type II (gamma) (80, 81).

Les interférons α et γ inhibent in vitro la prolifération des myofibroblastes hépatiques et leur synthèse de collagène, ralentissent le développement de la fibrose expérimentale et pourraient également avoir une action antifibrosante directe, indépendante de l’activité antivirale (18, 26, 50, 82, 83, 84). Les

résultats de l’équipe Mario ont démontré que l’IFN-α est utile contre la fibrose de foie induite par obstruction biliaire chez le rat (85).

b- Antagonistes des récepteurs des cannabinoïdes

Les cannabinoïdes présents dans la marijuana agissent par l’intermédiaire de deux récepteurs, CB1 et CB2, qui sont également activés par des molécules lipidiques endogènes, les endocannabinoïdes (86).

En effet, les récepteurs CB1 sont profibrogéniques et le rimonabant, un antagoniste du récepteur CB1, exerce un effet antifibrosant dans plusieurs modèles expérimentaux. À l’inverse, les récepteurs CB2 s’opposent à la progression de la fibrose en inhibant l’accumulation des cellules fibrogéniques (86, 87).

Egalement, un traitement combiné associant un antagoniste du récepteur CB1 et un agoniste du récepteur CB2 pourrait à l’avenir offrir une approche thérapeutique optimale (86, 87).

c- Autres antifibrosants

* Agents antioxydants: les agents antioxydants peuvent théoriquement

limiter l'activation des CEF en bloquant l'effet toxique des radicaux libres (18). La vitamine E agit en particulier en diminuant l'activité du facteur de transcription NFkB (94) et en réduisant l'expression des ARNm des procollagènes et du TGF bêta-1 dans les CEF (88). La S-adénosylméthionine, précurseur du glutathion, a été récemment expérimentée sur des rats traités par le CCl4. Elle réduit significativement l'apparition de fibrose (89).

* Tocophérol: l’α-tocophérol (vitamine E) limite le stress oxydatif et la

péroxydation lipidique, secondaires aux lésions hépatocytaires et connus pour stimuler la fibrogénèse. Chez l’animal, la vitamine E inhibe la synthèse de collagènes, la prolifération des cellules fibrogéniques et le développement de la fibrose; des essais sont en cours chez l’homme (26).

* Prostanglandines: leurs effets sont également controversés (90, 91). Les

effets semblent plus nets pour la phosphatidylcholine, qui prévient le développement de la fibrose hépatique chez l’animal et accélère sa régression, en inhibant l’activation des CEF (92), en stimulant la dégradation matricielle, mais aussi par son action antioxydante et antiapoptotique sur les hépatocytes (26).

* L’interleukine-10: il inhibe la synthèse de cytokines proinflammatoires, et

il a des effets antifibrosants chez l’animal (93). Chez l’homme, l’interleukine-10 semble également diminuer la fibrose chez des sujets atteints d’hépatite C (94).

* Œstrogènes: il a été observé que la progression de la fibrose non extensive

à la cirrhose était plus rapide chez l'homme que chez la femme (50). A partir de cette constatation, deux études japonaises in vitro et in vivo ont montré que l'administration d'œstrogènes réduisait l'activation des cellules étoilées et le développement de la fibrose hépatique.

* Hepatocyte growth factor (HGF): l'HGF a été choisi pour ses capacités de

administration pourrait donc permettre de faciliter la régénération hépatique (97).

Xue et coll., confirment l'effet antifibrosant de l'HGF dans un modèle expérimental. Ils montrent une diminution de la matrice extracellulaire chez les animaux traités (98). Les mécanismes qui peuvent être avancés sont l'augmentation de l'activité collagénase intrahépatique, qui permet la dégradation de la matrice extracellulaire et la diminution du taux d'ARNm du procollagène et de TGFß qui, en plus d'être un inhibiteur de croissance des hépatocytes, est un facteur important de fibrose hépatique (97).

* Antagoniser les cytokines profibrogéniques: la plupart des stratégies

cherchent à inhiber l’activité du TGFb1. Expérimentalement, de nombreuses stratégies sont efficaces y compris in vivo. La plupart de ces approches semblent encore être éloignées de la pratique clinique. Le développement récent de petites molécules inhibitrices de l’activité kinase du récepteur du TGFb1 pourrait ouvrir de nouvelles perspectives (28, 99).

* Méthylxanthines: les méthylxanthines inhibent l’activation des CEF de rat

en culture probablement par le biais d’une augmentation de la concentration en AMPc intracellulaire. La pentoxifylline, qui fait partie de cette classe pharmacologique, a fait l’objet d’études in vitro et in vivo. Elle réduit l’activation et la prolifération des CEF en culture et ralentit l’apparition de la fibrose chez des rats traités par CCl4. Elle pourrait agir en inhibant l’action de cytokines profibrogéniques telles que le PDGF (18).

* Essais en cours chez l’homme

- Prazor: cet essai clinique fait suite à la démonstration de l’efficacité du

blocage des récepteurs alpha-adrénergiques sur la fibrose hépatique expérimentale (100). Ces résultats ont été reproduits par une autre équipe, et il a été montré un bénéfice additionnel, l’augmentation par ce traitement du nombre de cellules progénitrices dans le foie, laissant suggérer un avantage régénératif (101). L’essai en double-aveugle contre placebo, compare la bithérapie interféron pégylé-ribavirine versus ce même traitement auquel est ajoutée de la prazosine. L’effet sera jugé sur l’aire de fibrose sur la biopsie (28).

- Fibrosar: les antagonistes des récepteurs de l’angiotensine ou les

inhibiteurs de l’enzyme de conversion peuvent retarder l’apparition de fibrose hépatique dans des modèles animaux (102, 103). L’essai de Fibrosar évalue l’efficacité d’un antagoniste du récepteur de l’angiotensine sur la fibrose chez des patients atteints d’hépatite C non répondeurs ou rechuteurs (28).

d- Enjeux thérapeutiques

Idéalement, compte tenu d'une durée d'administration prolongée, un traitement antifibrosant devrait être dénué d'effets extra-hépatiques, bien toléré et doit agir sur la matrice extracellulaire produite en excès, sans altérer la matrice extracellulaire normale. De ce fait, de nouveaux agents prometteurs antifibrosants sont actuellement en développement et pourraient entrer dans la pratique clinique au cours des prochaines années (28).

e- Thérapie génique

L’exploration du génome humain a évolué depuis quelques années, sa connaissance a permis de découvrir les processus donnant naissance aux maladies. Ce savoir génétique contribue à la conception et à la formation d’une nouvelle génération de médicaments qui permettra de traiter la maladie à sa base. L’identification d’un gène définit la cause du problème, donc ce ne seront plus les conséquences de la maladie qui seront traitées mais ses causes. Deux études récentes ont montré une amélioration de la fibrose chez le rat par transfert de gènes avec des vecteurs adénoviraux codant pour deux types de protéases matricielles, la MMP-1 et la MMP-8. La thérapie cellulaire par des cellules souches médullaires a donné aussi expérimentalement des résultats très intéressants en permettant une certaine réversibilité par stimulation de la dégradation de la fibrose (104).

f. Réversibilité de la fibrose

Dans la plupart des cas, la fibrose hépatique se constitue de façon irréversible. Cette irréversibilité est liée à la création de pontages à la fois intra et inter moléculaires entre ses différents composants. Ces pontages contribuent à former des noyaux centraux pyridinoliniques reliant trois fibres de collagène. Les fibres de collagène ainsi réticulées deviennent insensibles à la protéolyse et le noyau de pyridinoline apparaît comme un marqueur d'irréversibilité de fibrose (18).

La régression de la fibrose et même de la cirrhose à un stade précoce, a été décrite lors de l'éradication de l'agent causal de l'hépatopathie et tout

particulièrement dans le VHC chronique lors de réponse prolongée à un traitement d'IFN-α associé ou non à la ribavirine (105).