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Modifier l'image donnée par Saint-Etienne

« Modifier une image de marque nécessite deux étapes. D'abord travailler au changement en s'équipant et en construisant ; ensuite le faire savoir » (M Durafour 1976).

Le slogan " Saint-Etienne ville verte" fait son apparition dès 1959, il est censé faire connaître à l'extérieur que les anciennes activités disparaissent, que la ville se modernise. En 1971 la ville ouvre un Office d'accueil et d'information pour les congrès, le tourisme, l'information des investisseurs. A la mairie fonctionne désormais un service des relations publiques. C'est dans cette ligne qu'est proposée la disparition de l'Hôtel de ville remplacé par un ensemble fonctionnel que soulignerait une tour symbolisant la mutation de la ville. Ce projet est abandonné puis remplacé par la rénovation de la mairie entre 1970 et 75. L'image peut aussi créer un consensus autour des projets municipaux et alimenter le patriotisme local ; le football avec les "Verts" a mobilisé les Stéphanois et malgré le professionalisme du sport contemporain continue de les passionner.

Au total une période, celle des Trente glorieuses, marquée par le volontarisme, l'ampleur des investissements, la radicalité des changements et des solutions proposées, l'interventionisme dans tous les aspects de la vie de la ville. Le paysage urbain est profondément transformé, la ville bouleversée et très marquée par le modernisme à tout prix. Tout cela malgré un climat économique local déprimé dont nombre d’équipements portent la marque par leur réalisation médiocre ou l’absence d’ambition. Pendant que la France connaît une période très favorable Saint-Etienne, une fois de plus à contre-courant, subit la conversion des houillères, la disparition de la sidérurgie, la mutation du textile.

Un nouvel avatar de Saint-Etienne apparaît... une fois de plus

A partir du milieu des années 1970 les réalisations municipales - qui se multiplient dans tous les domaines - changent totalement de caractère par rapport à ce qu'elles ont pu être dans le passé. Avec la crise en arrière-plan, le plafonnement puis la baisse de la population, la désaffection pour le fonctionnalisme, dont les erreurs deviennent flagrantes, provoque un renversement des tendances. La complexité urbaine est mieux prise en compte. Enfin, qu'il s'agisse des opérations et plus encore de leur financement, l'échelle municipale n’est plus appropriée. Le regroupement de communes devient indispensable même si l'accord est loin d'être fait sur sa forme et ses compétences.

Transition, hésitations

L'opération Condamine (Saint-Victor-sur-Loire) est un bon exemple de ces nouvelles perspectives. Elle fut conçue en fonction du changement d'image de la ville avec son slogan

"Saint-Etienne sur Loire" et de la planification par grandes opérations structurantes. A la fois mal calibrée, le marché ne pourra pas absorber les 2000 logements prévus et de nombreux équipements ne seront jamais réalisés ; mal ciblée, la clientèle de cadres moyens et supérieurs n'est pas au rendez-vous ou bien préfère les sites traditionnels ; difficile à financer, l'endettement l'entrave. Aussi, lancée en 1970, elle est amorcée seulement vers 1975 puis la municipalité Sanguedolce la transforme en 1977 pour revenir à l'objectif plus modeste d'un ensemble pavillonnaire. C'est un quartier excentré où résident nombre de neo Stéphanois, chant du cygne d'une époque trop optimiste.

La politique de la municipalité s'oriente alors vers une reconquête des quartiers centraux populaires où les interventions précédentes sont loin d'avoir réglé tous les problèmes notamment ceux de l'équipement socio-culturel et de l'urbanisme à l'échelle du quartier. l'Etat finance la rénovation des logements et les équipements sociaux sont subventionnés. En même temps sont entrepris les équipements nécessaire à l'amélioration de la circulation : gare de

Carnot, ouverture d'un "axe lourd" pour désengorger la Grand'rue et encourager l’utilisation du tramway en mauvaise posture financière.

Les années suivantes, nouveau changement d'orientation d'abord sous F Dubanchet mais en grande partie grâce à l’action de son adjoint à l’urbanisme, M Thiollière, qui lui succèdera et aura ainsi marqué profondément la politique d’aménagement. Les actions de réhabilitation des quartiers sont poursuivies mais en ne cherchant essentiellement qu'à améliorer le nombre et la qualité des logements remis sur le marché car, sans être oubliés, les équipements urbains ne sont pas prioritaires. La promotion privée est encouragée. Maintenir la population dans les limites communales devient un souci constant y compris en faisant appel à l'habitat individuel en ville.

Les efforts financiers consentis pour le soutien à l’économie s’inscrivent dans le paysage par la multiplication des zones d’activité. Comme on pare au plus urgent on se contente de plaquer des zones industrielles, le plus souvent traditionnelles et en outre dispersées, selon les opportunités. Il s'agit aussi pour des raisons fiscales, et peut-être de prestige, de rester si possible dans les limites communales. Ainsi des efforts considérables sont consentis pour la zone industrielle de l'ouest stéphanois dont la justification se trouve aussi dans le maintien des emplois sur la commune.

Le Technopôle est l’emblème de cette orientation. Son aspect moderniste, qui efface heureusement les noirâtres friches de la sidérurgie dans des quartiers défavorisés, ne doit pas faire oublier que, comme dans de nombreuses autres agglomérations, la majorité des activités sont transférées et n'ont que peu à voir avec les industries de pointe censées s'y développer, à quelques exceptions près, fort heureusement.

Cependant, tout en répondant au cas par cas à des difficultés qu'il faut bien aborder, toutes ces actions manquent de perspectives, il serait bon de savoir où on va. Parmi ces problèmes à régler l’achèvement de Centre II dont une partie est abandonnée sans regrets (plusieurs tours de logements et des équipements, les investisseurs renaclent). La Sari qui opère sur le site Manufrance perd de l’argent et doit être renflouée par la Générale des Eaux, le futuriste Centre d’affaires Atria est abandonné. Après plusieurs tentatives d’implantations les plus Le groupe Sari-Seeri premier groupe français d’ingénierie, aménagement foncier, gestion d’immeubles emploie 1 300 personnes en 1987. Il est chapeauté par son principal actionnaire la Sté Générale de Eaux ; autre actionnaire la Société Générale. Le moteur de ses investissements est le tertaire supérieur dont à l’époque on attend beaucoup.

La Sari espère rentabiliser l’opération par la vente d’immeubles de haute qualité ; la mairie essaye de minimiser le risque en se désengageant par l’appel au privé. Au total l’opération est plutôt un semi échec ou une semi réussite…

Le tout dans la plus grande discrétion « une affaire de cette importance ne pouvait se traiter que dans le secret en cabinet restreint » selon le maire.

diverses et plus ou moins spectaculaires, le tènement prend son visage actuel assez hétéroclite il faut bien l’avouer : la galerie marchande ne voit pas le jour ni le super-marché, mais le Planétarium puis le Centre des Congrès y trouvent une place ainsi que plus tard l’Ecole de commerce et une partie de l’Ecole des Mines, le tout complété par des logements et des bureaux. Bien des Stéphanois regrettent de ne pas y trouver un grand Musée, une salle de spectacle qui auraient eu leur place dans un quartier bien identifié (la carte de repérage ci-jointe rend compte d’un saupoudrage inhabituel en la matière).

Plusieurs des réalisations municipales s'apparentent plus à des coups médiatiques qu'à un enchaînement d'opérations coordonnées, ainsi l'ouverture d'un golf sur la vieille décharge municipale de Momey. A la critique d’un architecte qui dénonce « une ville sans ambition, des réalisations médiocres » répond l'intervention de l’urbaniste Bofill (1992) censée définir un nouveau et cohérent programme d'action. Le maire souhaite donner à Saint-Etienne

« l’image d’une ville facilement identifiable en Europe » (presse locale 1991) et l’imposer sans conteste possible comme ville centre de l’agglomération. L'étude publiée par ce cabinet d'architecture est critiquée, à juste titre, mais elle va en fait servir de cadre très souple et très modulable pour la politique dite du "projet urbain" qui est ensuite adoptée à Saint-Etienne