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C. Résultats : nanoparticules de palladium non supportées à distributions de tailles et de

III. Voltammétrie cyclique en milieu alcalin

2. Modification de surface par le bismuth

Il est connu que la modification du palladium par des métaux oxophiles du groupe p peut conduire à de grands changements de son comportement électrocatalytique, en

termes d’activité et de sélectivité111

, notamment lorsque le bismuth est utilisé71. Dans notre laboratoire, Mario Simoes a synthétisé des nanoparticules de Pd1-xBix/C par une

méthode de microémulsion inverse et a montré que ces catalyseurs possédaient une activité catalytique vis-à-vis de la réaction d’oxydation du glycérol équivalente à celle

d’un catalyseur Pt/C préparé de la même manière. L’équipe d’électrocatalyse de Claude Lamy s’est de plus beaucoup intéressée dans les années 1980 à l’action de la modification de surface de platine par différents taux de recouvrement d’adatomes

déposés en sous potentiel, dont des adatomes de bismuth, vis-à-vis de l’oxydation

d’alcools, et a constaté une très forte amélioration de l’activité dans certaines

conditions135,136.

Ainsi, l’étude de l’effet de la modification de nanoparticules de palladium à distribution de tailles et de formes contrôlées par des adatomes de bismuth a été entreprise avec l’espoir de déterminer de manière plus précise le rôle de ce métal dans le mécanisme d’oxydation du glycérol.

La surface des catalyseurs non-supportés a été modifiée en plongeant pendant différentes périodes de temps (15 secondes, 1 minute, 5 minutes, 10 minutes et 30 minutes) l’électrode d’or sur laquelle les particules de Pd ont été déposées selon la

méthode décrite dans la partie expérimentale, dans une solution d’acide sulfurique 0,5

M saturé en BiCl3. Le dépôt seproduit spontanément sans qu’aucun potentiel contrôlé

ne soit appliqué à l’électrode. Les voltammogrammes de la Figure 25 enregistrés sur les nanosphères, les nanocubes et les nanooctèdres de Pd montrent sans équivoque que

l’adsorption spontanée du bismuth se produit: les charges impliquées dans la région d’adsorption en sous potentiel d’hydrogène et de sa désorption diminuent avec le temps

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de contact de l’électrode avec la solution de bismuth et un pic d’oxydation à 0,9 V (attribué à la réaction d’oxydation du Bi augmente avec le temps de contact). Ceci indique que le recouvrement de la surface des particules de Pd par le bismuth augmente avec le temps de contact. Il n’apparaît ici aucune preuve d’une adsorption préférentielle du bismuth sur une structure de surface particulière puisque la totalité de la zone hydrogène semble affectée de la même manière par le dépôt des adatomes.

Un second aspect ressortant de ces voltammogrammes est le fait que

l’adsorption spontanée de bismuth est moins bien contrôlée dans le cas des

nanoparticules octaédriques que dans le cas de nanoparticules sphériques et cubiques.

Encore une fois, l’explication peut provenir de la plus faible énergie de surface des

domaines (111) par rapport aux domaines (100) et aux défauts (coins, arêtes, etc.) qui miment les domaines de surface (110)131, ce qui peut rendre l’adsorption du bismuth plus aléatoire. Pourtant, dans le cas de nanoparticule à formes contrôlées de platine,

l’adsorption du bismuth est utilisée pour déterminer la proportion de face (111). Une autre explication peut provenir de la plus forte hétérogénéité de forme de l’échantillon d’octaèdres en raison de la présence de tétraèdres et de fortes troncatures. En revanche,

les nanocubes de palladium, qui présentent une distribution de forme très étroite si l’on se réfère aux caractérisations par microscopie électronique à transmission, permettent quant à eux un meilleur contrôle du dépôt spontané de bismuth et ont donc été utilisés

pour faire une étude plus poussée du processus d’adsorption spontanée.

La Figure 26a présente la modification de la zone hydrogène enregistrée en fonction du temps de contact de l’électrode de nanocubes de palladium avec la solution acide saturée en BiCl3. La charge impliquée pour le processus de désorption d’hydrogène de la surface du palladium a été déterminée par intégration des courants de

désorption entre 0,1 V et 0,62 V après une correction du courant capacitif dont la valeur

a été estimée à un potentiel d’environ 0,62 V (dans la gamme de potentiel entre la

région hydrogène et la région de formation des hydroxydes/oxydes de surface).

L’évolution de la valeur de cette charge en fonction du temps de contact est représentée

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Figure 25 Voltammogrammes de (a) nanosphères, (b) nanocubes et (c) nanooctaèdres de palladium

modifiés par adsorption spontanée de Bi par immersion de l’électrode dans la solution saturée de BiCl3

dans H2SO4 0,5 mol.L-1, pour différentes durées (NaOH 0,1 mol.L-1, T = 20 ° C, v = 20 mV.s-1).

A partir de ces valeurs de charges impliquées dans la désorption de l’hydrogène,

le taux de recouvrement par le bismuth (

Bi) peut être déduit:

b

a

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(30)

H est le recouvrement de la surface de palladium par l’hydrogène adsorbé,

QH0 et QHt représentent respectivement les charges déterminées pour la désorption de

l’hydrogène du palladium pur et pour la désorption de l’hydrogène après contact

pendant un temps t avec la solution de BiCl3.

Figure 26 (a) Voltammogrammes de la zone hydrogène enregistrés sur un échantillon de nanocubes de

Pd après différentes périodes de contact avec la solution de BiCl3 (NaOH 0,1 mol.L-1 à v = 20 mV.s-1).

(b) Charge déterminée pour le processus de désorption de l’hydrogène de la surface du palladium après différents temps de contact de l’électrode avec la solution de BiCl3.

Comme il a déjà été dit, la charge impliquée dans la désorption de l’hydrogène

adsorbé diminue progressivement à mesure que le taux de recouvrement en bismuth augmente. Comme le montre le graphe de la Figure 27, la valeur de (θH)-1 décroît

linéairement avec le temps de contact t, ce qui suggère un ordre 2 de réaction par rapport aux sites libres de la surface de Pd avec une constante cinétique k = 1,17 10−2 s−1

qui peut être décrite par la loi de vitesse :

.

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Figure 27 Graphe représentant la droite (θH)−1 en foncion du temps de contact et de l’électrode de

nanocubes de palladium avec la solution acide de BiCl3.

La Figure 28 montre les régions hydrogène enregistrées sur les nanosphères et les nanoocatèdres de palladium pur et après modification par immersion dans la solution saturée de BiCl3, et l’évolution de la charge de désorption de l’hydrogène associée. Bien

que le contrôle du dépôt spontané de Bi soit plus difficile, la même tendance que celle observée sur les nanocubes semble se dessiner. La diminution de la charge de

désorption de l’hydrogène avec le temps de contact suit le même profil quelle que soit la

forme des nanoparticules, ce qui suggère que la cinétique de modification par le bismuth soit la même.

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Figure 28 (a,c) Voltammogrammes enregistrés sur des échantillons de nanosphère (a) et de

nanooctaèdres (c) de palladium en fonction du temps d’immersion de l’életrode dans la solution de BiCl3

(NaOH 0,1 mol.L-1, v = 20 mV.s-1). (b,d) Charge déterminée pour le processus de désorption de l’hydrogène de la surface des nanosphères (b) et nanooctaèdres (d) de palladium après différents temps de

contact de l’électrode avec la solution de BiCl3.

Il est aussi important, pour des raisons de compréhension du rôle du bismuth dans les réactions d’oxydation d’alcools et la proposition de mécanismes réactionnels, de

connaitre le degré d’oxydation des adatomes sur les nanoparticules de palladium. Cependant, cette détermination pose d’énormes problèmes en raison de la très faible

quantité de bismuth déposée par adsorption spontanée. Dans le cas de monocristaux de platine, Clavilier et al.137 ont proposé que le bismuth s’adsorbait spontanément sous

forme métallique (valence 0) et qu’une espèce de type Biads2+stabilisée par l’adsorption

d’ions hydroxyles OH- se formait à plus haut potentiels. Cette proposition permettrait

d’expliquer le pic d’oxydation observé à haut potentiel (vers 0,95 V pour les

nanosphères et nanocubes et vers 1,0 V pour les nanooctaèdres) sur les

a

b

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voltammogrammes de la Figure 25. Hamm et al.138 ont étudié le dépôt en sous potentiel de bismuth à la surface de monocristaux de Pt (111); les mesures d’XPS qu’ils ont réalisées leur ont fait conclure que la valence du bismuth de chaque côté du pic

d’adsorption en sous potentiel était de zéro, et que la charge observée entre 0,2 et 0,5 V

était probablement due à la coadsorption d’ion hydroxyles OH-plutôt qu’à un processus redox de surface. Des travaux menés par Gewirth et al.139,140 sur des surface d’or ont conclus que des espèces Bi–OH et Bi–O se formait dans la région de potentiel catalytiquement active à partir d’environ 0,6 V sur l’or en milieu alcalin, potentiel auquel ce métal devient capable d’adsorber les espèces hydroxyles56,141 et que des ions hydroxyles OH−

étaient coadsorbés avec le bismuth dans la région de dépôt en sous potentiel. Enfin, très récemment, sur la base de mesures XPS, Cai et al. ont proposé que les atomes de bismuth déposés spontanément sur la surface de nanoparticules de

palladium possédait préférentiellement le degré d’oxydation +III87

. Il apparaît donc que

l’état d’oxydation dans lequel se trouve le bismuth n’est pas encore défini avec

précision et que le débat est encore largement ouvert. Cependant, indépendamment de la valence du bismuth déposé spontanément ou en sous potentiel, une propriété liée à la

présence de bismuth semble faire l’unanimité dans la communauté, à savoir qu’elle favoriserait l’adsorption d’espèces OH soit à sa surface137

, soit sur les atomes de métaux nobles adjacents142.