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Expériences 3 HClO 4 oui oui

4.2 Vers une paramétrisation de la solubilité du fer et de son état redox en solution

4.2.2 Modélisation de la solubilité et de la spéciation redox du fer dissous

Idéalement, dans le but d’évaluer la solubilité et la spéciation redox du fer dissous à partir des données sur les minéraux purs obtenues dans cette étude, il serait nécessaire de disposer d’une analyse minéralogique quantitative des phases solides. Or, nous ne disposons ici que d’une analyse qualitative, et il faut noter qu’en général ce type de données est difficile à obtenir sur les échantillons d’aérosols. C’est pourquoi j’ai voulu vérifier, s’il est possible d’évaluer de manière satisfaisante la solubilité, voire la spéciation redox du fer dissous, à partir de la quantification de la part de fer libre et structurale sur des échantillons d’aérosol obtenue grâce à la méthode développée par Lafon et al. (2004) (voir annexe 5).

Afin de simplifier la calcul, j’ai supposé que 100% du fer libre est issu des (hydr-)oxyde de fer, de type goethite et/ou hématite, et que 100% du fer structural est issu de l’illite. A partir de là, il est possible de déterminer facilement la contribution de ces deux types de minéraux sur les quantités totales de fer et au final d’estimer la solubilité et la spéciation redox du fer dissous.

D’après le tableau 3.13, qui détaille les calculs effectués pour évaluer la solubilité et la spéciation redox du fer, on obtient des valeurs de solubilité tout à fait comparables à celles mesurées expérimentalement et qui reflètent de manière très satisfaisante la variabilité entre ces deux phases solides.

Par contre pour le %Fe(II)aq, on remarque que même si les calculs donnent des %Fe(II)aq du même ordre de grandeur que les valeurs expérimentales, ils ne reproduit pas la variabilité observée expérimentalement. En effet, avec nos hypothèses, on voit que le fer dissous est

112 essentiellement issu des illites, et donc que son état redox en phase aqueuse reflète majoritairement celui de l’illite quelle que soit la phase solide considérée. Or, dans le cas de la dissolution des sols, même si finalement le fer dissous est essentiellement issu des illites, la composition chimique de la phase aqueuse est forcement différente de celle obtenue suite à la dissolution de l’illite seule. On peut avoir d’une part, par la dissolution des autres minéraux, des éléments dissous capables d’agir sur la spéciation redox du fer, comme le cuivre ou le manganèse et d’autre part, des composés organiques, qu’on ne retrouve que dans les sols, qui eux aussi pourraient influencer l’état redox du fer.

fer libre fer structural SFe %Fe(II)aq

Fetot

total dissous1 réduit1 total Dissous1 Rédui1 cal. exp. cal. exp.

Niger 5,5 4,1 0,25.10-3 0,11.10-3 1,4 0,017 0,012 0,30% 0,24% 67% 45%

Chine 4,1 1,6 0,093.10-3 0,041.10-3 2,5 0,030 0,020 0,75% 0,72% 67% 65%

Tableau 3.13 : Paramétrisation de la solubilité et de la spéciation redox du fer dissous, à pH 2, à partir de la quantification en fer libre et en fer structural (sans unité : valeur en % massique par rapport à la masse

totale de l’aérosol). 1 calculé d’après la solubilité moyenne et le %Fe(II) moyen, égale respectivement à 0,006% et 44%pour les (hydr-)oxydes de fer et 1,2% et 68% pour les illites.

Finalement, ces travaux complémentaires montrent que, même dans le cas, plus réel, d’un mélange de minéraux, on observe les mêmes tendances, que celles dégagées à partir de minéraux pur, pour la solubilité du fer qui est beaucoup plus faible pour le fer libre que pour le fer structural. C’est pour cela, qu’on peut imaginer de paramétriser la solubilité du fer des aérosols désertiques à partir des quantifications de fer libre et de fer structural. On note d’ailleurs qu’une telle paramétrisation est adaptée pour les deux échantillons de sol étudiés ici, et pourrait donc au final permettre de refléter de manière assez satisfaisante la variabilité de la solubilité entre différents types d’aérosols désertiques non transportés.

Cependant, ce type de paramétrisation présente un certain nombre de limites, notamment par rapport à l’hypothèse faite qui dit que 100% du fer libre est issu de la goethite et de l’hématite. En effet, on a pu voir dans ce chapitre que certains minéraux silicatés, et notamment la kaolinite et l’oligoclase, pourraient contenir de faibles quantités de fer sous la forme de petites particules de (hydr-)oxyde de fer amorphe. Avec la méthode du CBD, on ne distingue pas le fer lire issu des particules bien cristallisées, de type hématite ou goethite, de celui issu des particules amorphes, considérées comme impureté dans les minéraux silicatés. Or, nous avons vu que lorsque le fer est dans des particules amorphes, sa solubilité est

113 beaucoup plus élevée (de 3 ordres de grandeur) que lorsqu’il est issu des particules bien cristallisées d’(hydr-)oxyde de fer. Finalement, on s’aperçoit que, même si la majorité du fer libre est issu de l’hématite et de la goethite, faire l’hypothèse que ces minéraux représentent la totalité du fer pourrait induire une sous-estimation de la solubilité du fer libre. La seconde hypothèse selon laquelle le fer structural est issu exclusivement de l’illite peut être adaptée pour affiner l’estimation. Il suffit de prendre en compte, quand cela est possible, la contribution relative de tous les minéraux aluminosilicatés qui contiennent du fer et de leur attribuer une valeur de solubilité.

Finalement, on peut calculer de manière relativement précise, à partir de la composition minéralogique de l’aérosol désertique et des résultats obtenus dans cette étude, la contribution de chaque minéral aux quantités de fer dissous. Pour illustrer cette idée, nous nous sommes basés sur une composition minéralogique moyenne d’un aérosol désertique saharien (voir figure 3.1). A partir de cette composition minéralogique, nous avons calculé la contribution moyenne pour chaque minéral ou groupe de minéral sur les quantités de fer dissous (voir le tableau 3.14). Ces calculs permettent de montrer que la contribution aux quantités de fer est largement dominée par l’illite et la montmorillonite et donc qu’il est important de prendre en compte la répartition relative de ces deux minéraux.

Composition Minéralogie2 (% massique) Contribution relative à la quantité totale de fer dissous Illite 45 67% Kaolinite 7 2% montmorillonite 15 28% Feldspaths 6 3% (hydr-)oxydes 4 <1%

Tableau 3.14 : Evaluation de la contribution de chaque minéral aux quantités de fer dissous. Ces calculs ont

été réalisés à partir de la composition moyenne d’un aérosol désertique d’origine saharienne (données de Glaccum & Prospero (1980) ; Johnson (1976) et Avila et al. (1997) et des résultats sur la solubilité des minéraux obtenus dans ces travaux (pH 2, temps de contact 60min ; charge particulaire 40mg/L).

Cependant, comme nous avons vu que la présence d’oxalate et de lumière pouvait favoriser de manière considérable la solubilité de l’hématite, et plus généralement de l’ensemble des (hydr-)oxydes de fer, il est nécessaire de se rendre compte si cela va inverser l’ordre des choses. Malheureusement, l’effet de ces deux paramètres sur la solubilité des minéraux aluminosilicaté n’a pas pu être étudié dans le cadre de cette thèse. On peut donc se placer dans un cas extrême, où on émet l’hypothèse que la solubilité des (hydr-)oxyde de fer est

114 multipliée par 40, comme nous l’avons mesuré ici, en présence d’oxalates et de lumières contrairement à celle des aluminosilicates qui ne serait pas affectée par ces paramètres, et alors réévaluer la contribution de chaque groupe minéralogique pour les quantité totale de fer dissous. Dans ce cas, la contribution des (hydr-)oxydes de fer passerait à environ 20% du fer total dissous, ce qui reste encore très inférieur à la contribution cumulée de l’illite et la montmorillonite à 80%.

En ce qui concerne l’état redox du fer dissous, nous avons vu qu’une estimation de ce paramètre en fonction de la part de fer libre et de fer structural n’était pas envisageable à ce stade. En effet, il est beaucoup plus difficile d’évaluer l’état redox du fer dissous qui dépend surtout, comme nous l’avons mentionné, de la composition chimique de la phase aqueuse. Or, comme ce paramètre dépend de la nature de la phase solide, il serait nécessaire de prendre en compte l’ensemble des éléments dissous par chaque minéral et d’étudier leur impact sur la spéciation redox du fer. De plus, contrairement aux minéraux purs, les sols et aérosols, peuvent contenir des composés organiques capables eux aussi d’influencer ce paramètre.

Finalement, les résultats obtenus au cours de ces travaux encouragent la réalisation d’expériences supplémentaires sur la dissolution de minéraux purs qui seraient à la base d’une nouvelle stratégie visant notamment à paramétriser la solubilité du fer des aérosols terrigènes mais aussi son état redox une fois dissous en fonction de la composition minéralogique de l’aérosol.

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CHAPITRE 4 : DISSOLUTION DES ECHANTILLONS