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5. Critères de fatigue

5.2. Modèles de prise en compte des effets de gradient et d’échelle

Plusieurs fois dans cette étude, il a été fait mention de l’incapacité des critères purement locaux (type contrainte équivalente) à rendre compte des essais de fatigue en présence de forts gradients des contraintes. Ainsi, les essais sur entailles et les essais de fretting-fatigue nécessitent des critères plus élaborés prenant en compte des effets de gradient des contraintes voire d’effet d’échelle. Plusieurs de ces approches sont basées sur les contraintes équivalentes présentées ci-dessus. Une méthode de prise en compte des gradients des contraintes est ensuite ajoutée afin de définir un critère. Cette partie présentera 3 de ces approches

5.2.1. Approches par la théorie du gradient

Les approches du type théorie du gradient ont été développées par [Papadopoulos1996]. A l’origine, son critère se base sur la contrainte de Crossland qu’il modifie avec un terme de gradient. Ainsi, la formule ( I.11 )présente le gradient du premier invariant du tenseur des contraintes défini dans ce critère : G. Le critère est quant à lui développé dans l’équation ( I.12 ).

K = LMN@;$%CNO PA+ MN@;$%CNQ PA+ MN@;$%CNR PA

( I.11 )

?@A,%+ B ∙ @;$%C∙ M1 − E 〈@ K

;$%C〉 P < J ( I.12 )

On peut voir que ce critère demande deux paramètres de plus à identifier par rapport au critère de Crossland classique : n et β. D’après Papadopoulos, l’influence du gradient ne se ferait que sur J1max et le gradient à prendre en compte est régi par une définition purement locale.

Il existe d’autres définitions pour décrire le gradient et d’autres auteurs préfèrent utiliser le gradient d’autres quantités mécaniques. Citons par exemple [Gadouini2007] qui définit le gradient des contraintes de Crossland en présence d’un défaut d’une certaine aire par la Figure I-38

Chapitre I Bibliographie

Le critère utilisé par Gadouini est ensuite défini par l’équation( I.13 ). On peut voir sur cette équation que c’est l’ensemble de la contrainte de Crossland qui est impacté par le terme de gradient et que l’influence est définie comme linéaire (il n’y a plus le paramètre n).

#U% = #> ∙ V1 − ∙ 0K ##>

> 7W < EU%

( I.13 )

Ce Type d’approche s’appuie sur le paramètre de [Murakami1994] √ 2XY cette définition du gradient a l’avantage d’être un peu moins dépendante de ce qui se passe localement en fond de défaut mais a l’inconvénient de nécessiter la définition de défaut (qui est rarement automatique).

En résumé, de nombreux critères peuvent être décrits en utilisant la théorie du gradient. Ces critères différents selon 4 éléments :

►Définition du gradient

►Choix de la contrainte équivalente

►Choix de la contrainte dont on calcule le gradient

►Type d’influence du gradient sur le critère (influence linéaire ou à la puissance n)

Ce type d’approche permet donc de produire des critères prenant en compte les effets de gradient. Par contre, les effets d’échelles n’influent pas sur les prévisions du modèle.

5.2.2. Approches du type théorie de la distance critique

La théorie de la distance critique s’appuie sur les travaux récents de [Taylor2008] et [Susmel2008]. La base de cette théorie est la supposition que les amorçages ne sont pas seulement produits par un état de contrainte purement local mais qu’un petit volume autour du site d’amorçage participe à celui-ci. La théorie de la distance critique défini alors une longueur caractéristique L définie par l’équation( I.14 ). Il est intéressant de souligner que Taylor propose 2 définitions différentes selon que l’on travaille sur des essais quasi-statiques ou des essais de fatigue.

Z =[ ∙ M1 ] -P\> A ^ Z =1[ ∙ M∆\#H `5a

, PA ( I.14 )

Une fois cette fissure définie, il existe 4 méthodes différentes : ►Méthode du point

Le critère prévoit la rupture de l’éprouvette si la contrainte équivalente choisie dépasse une valeur seuil sur une distance supérieur à L/2

►Méthode de la ligne

Le critère prévoit la rupture de l’éprouvette si l’intégrale de la contrainte équivalente choisie sur une ligne de longueur 2L dépasse une valeur seuil

►Méthode de la fissure imaginaire

Le critère prévoit la rupture de l’éprouvette si les sollicitations sont suffisantes pour que la mécanique de la rupture prévoit une propagation d’une fissure (imaginaire) de longueur L

Chapitre I Bibliographie

Ce critère est basé sur une énergie de type Griffith. Le critère prévoit la rupture de l’éprouvette s’il y a une quantité d’énergie suffisante pour propager une fissure sur une distance L

Taylor souligne de plus que des méthodes d’intégrales sur des surfaces et des volumes ont été développées depuis et peuvent s’intégrer dans les critères de la théorie de la distance critique. La méthode du point et de la ligne sont les plus utilisés dans les études du fait de leur simplicité. On peut notamment citer [Lanning2004] et [Yamashita2010] ayant travaillé sur des éprouvettes en TA6V entaillées en utilisant la théorie de la distance critique. Ces deux auteurs ont travaillé avec une autre définition de la distance critique. Ainsi, au lieu de la calculer à partir de la formule ( I.14 ). Ces auteurs ont pris L comme une variable classique à identifier sur leurs essais. Ils en sont venus à la conclusion que la théorie de la distance critique permettait de rendre compte correctement des essais sur des petites entailles quand les paramètres du critère sont identifiés sur des essais sur ce même domaine. Les différents essais afin d’avoir une longueur unique capable de prévoir les limites de fatigue d’éprouvettes sans défauts et d’éprouvettes avec des petites entailles se sont révéler inefficaces. La théorie de la distance critique semble donc être un outil puissant afin de prendre en compte les gradients des contraintes dans un domaine donné mais lorsque le domaine de gradient devient trop large (typiquement d’une éprouvette sans gradient à une éprouvette avec une entaille aigue), elle est mise en échec. Ce problème peut être provoqué par la non constance de L en fonction des chargements locaux mais aussi par la non prise en compte des effets d’échelle dans ce type d’approche.

5.2.3. Approches probabilistes

Enfin, un dernier type d’approche va être présenté ici. Il s’agit des approches probabilistes. Ces approches sont basées sur la théorie développée par [Weibull1939]. Cette théorie s’articule autour de l’hypothèse du maillon le plus faible et une répartition probabiliste des défauts dans le matériau. Les différents éléments importants derrière cette hypothèse sont listés ci-dessous :

►Une structure est vue comme un ensemble de maillons mésoscopiques liés ensemble ►La rupture d’un maillon entraine la ruine de la structure entière

►Les probabilités de rupture de chaque maillon sont indépendantes

Pour le modèle, la probabilité de rupture d’un maillon est vu comme la probabilité pour un maillon soumis à une contrainte σ de posséder un défaut assez critique pour provoquer la rupture du maillon. Une fonction de distribution est utilisée afin de définir la probabilité de rupture d’un maillon en fonction de la contrainte appliquée. Plusieurs types de fonction de distribution existent comme le montre l’exemple des équations ( I.15 ). On y retrouve les probabilités de rupture de Weibull à 2 ou 3 paramètres. La seconde équation rajoute un seuil σ0 en dessous duquel la probabilité de rupture des maillons est nulle.

b`c9` = Y: de A∙fghgij ou b`c9` = Y: de A∙f〈gkgl〉gh ij ( I.15 )

L’hypothèse de l’indépendance des différents maillons permet ensuite de calculer facilement la probabilité de survie de la structure : il s’agit de la probabilité que tous les maillons survivent :

bH` m5H9 `>9` = n 1 − b$%5aao`c9` 9o`H a H $%5aao H

( I.16 )

La connaissance de la répartition des contraintes d’une structure (ou d’une éprouvette) permet donc de calculer sa probabilité de survie.

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Il est intéressant de noter que ce type d’approche peut être utilisé lorsque plusieurs mécanismes sont présents comme l’a montré [Pessard2013]. Il suffit alors de faire l’hypothèse que les différents modes de rupture sont indépendants et chaque maillon aura alors autant de probabilité de rupture que de mécanismes. Il suffit ensuite de calculer les probabilités de survie de la structure de chaque mécanisme par la formule ( I.16 ) puis de faire le produit de toutes ses probabilités. Cette approche permet donc de gérer simplement la présence de plusieurs mécanismes d’amorçage sur une structure. Par exemple la différence entre amorçage interne et amorçage en surface peut être faite. Néanmoins, cette démarche nécessite d’identifier les paramètres de la loi de probabilité de rupture pour chaque mécanisme ce qui peut être long.

Ces identifications sont généralement faites en utilisant des limites de fatigue et une dispersion expérimentale. Ainsi, le paramètre m des équations ( I.15 ). Est obtenu sur la base de la dispersion expérimentale comme le présente [Pessard2013] sur la Figure I-39. Et la σ0 à partir de la limite de fatigue (probabilité de rupture de 50 ou 63% selon les études).

Figure I-39 : Effet du facteur de forme (m) et de la contrainte seuil (σu) de la loi de Weibull sur (a) la

densité de probabilité de rupture et (b) la distribution des probabilités de rupture [Pessard2013] Ce type d’identification nécessite donc un grand nombre d’éprouvette du même type afin de définir proprement ces lois de distribution. D’autres auteurs comme [Lanning2003], utilisent l’effet d’échelle pour obtenir le paramètre de forme (m). En effet, ce paramètre pilote à la fois la dispersion des essais mais aussi l’effet d’échelle qui est pris en compte dans le modèle. Ce type d’approche accélère sensiblement l’identification des paramètres vu que 2 limites de fatigue suffisent mais le choix des essais utilisés pour l’identification peut fortement modifier le paramètre de forme. (de 11 à 35 dans l’étude de [Lanning2003]).

Les critères probabilistes sont donc prometteurs. Ils sont simples (peu de paramètres à identifier) et sont capables de prédire des effets de gradient et des effets d’échelle via le paramètre de forme.

À retenir

►Utilisation de contraintes équivalentes capable de prendre en charge les effets de charge moyenne et de triaxialité des contraintes

►3 méthodes de prise en compte des effets de gradient ont été présenté

►La théorie du gradient et la théorie de la distance critique permettent de créer une dépendance au gradient mais pas à l’effet d’échelle

Chapitre II Caractérisation des entailles : état de surface et état de contraintes

Caractérisation des

entailles : état de surface

Chapitre II Caractérisation des entailles : état de surface et état de contraintes