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H) II.4.1 Cas général

III.7 ESSAIS DE DETERMINATION DES TEMPS DE RESIDENCE MOYENS DANS LES AQUIFERES SUPERFICIELS DU BASSIN VERSANT AMONT MOYENS DANS LES AQUIFERES SUPERFICIELS DU BASSIN VERSANT AMONT

III.7.3 Modèles et paramètres utilisés

Comme souligné en préambule à cette partie, il est rapidement apparu lors du calcul de différents modèles que la seule voie permettant de lisser les variations isotopiques saisonnières enregistrées par les précipitations est l’emploi d’un modèle de dispersion. En

effet, les autres modèles ne permettent pas d’atténuer significativement les amplitudes des variations. Ces dernières ne s’atténuent qu’en employant des temps de transit de plusieurs années, qui ne sont pas compatibles avec les variations isotopiques annuelles observées les eaux des lavoirs (Clark et Fritz, 1997).

III.7.3.1 Lavoir de Rochetaillée

Pour ce point de prélèvement implanté à 800m d’altitude, on a déterminé cartographiquement une aire de recharge moyenne située vers 1100m. Pour les modèles δ18

O, ceci impose une diminution des rapports isotopiques des précipitations de St-Just-St-Rambert de 1,54‰ (700m de dénivelée positive). Dans un premier temps, on utilise directement les pluies corrigées du gradient d’altitude moyen en entrée de système et les mesures du lavoir en sortie. Ce qui revient à ne considérer aucune modification du signal pluviométrique lors du trajet canopée – sol puis lors du trajet sol – sous-sol – aquifère. Le calcul par modèle de dispersion (sur δ18

O), en ne prenant en compte aucune interaction avec des eaux pré-existantes, et avec un paramètre de dispersion fixé à 0,05 (cf III.7), donne des modèles à efficacité réduite (11%) pour des temps de transit de 11 mois (11,4 précisément). Ce calcul est donné en exemple dans la figure 49. L’augmentation du paramètre de dispersion donne des efficacités plus réduites mais toujours pour le même temps de transit. Il apparaît dès lors difficile d’obtenir de meilleurs résultats en conservant cette approche, le signal pluviométrique étant beaucoup plus variable que le signal du lavoir par effet d’atténuation lors du trajet souterrain. De même, l’emploi de cette procédure de calcul avec les gradients d’altitude minimal (–0,12‰ δ18

O / 100m) et maximal (–0,31‰ δ18

O / 100m) donne des temps de parcours similaires (11 mois), l’efficacité des modèles ne connaissant pas d’évolution notable.

Fig. 49 : modèle de dispersion pour le lavoir de Rochetaillée (oxygène) ; détails dans la figure.

On peut essayer de prendre en compte cette atténuation en introduisant une composante d’eau pré-existante dans le réservoir. Comme la majorité de la recharge s’effectue durant les mois d’hiver, une valeur de –10‰ δ18

O pour cette composante est raisonnable. En supposant un stock égal à 20% du flux entrant, le modèle donne une réponse efficace à 21% (dispersion : 0,05%) pour un temps moyen proche de 11 mois (10,8). L’avantage de cette approche n’est donc pas de trouver un temps de transit différent, mais d’améliorer l’efficacité du modèle.

D’autres approches ont aussi été envisagées : comme signalé en II.9.3, on peut essayer de quantifier l’influence de l’évapotranspiration (ETP) sur la signature isotopique de l’eau s’infiltrant. Dans cette optique, les rapports isotopiques ont été recalculés en soustrayant les quantités de précipitations non disponibles pour l’infiltration, en utilisant la formule d’ETP de Hargreaves. Comme déjà mentionné au chapitre II, l’influence se fait surtout ressentir durant la période estivale. Le meilleur accord modèle – observations est obtenu pour une durée de percolation de 10 mois, l’efficacité ressortant presque à 20%.

Fig. 50 : modèle de dispersion pour le lavoir de Rochetaillée (oxygène) avec prise en compte des précipitations perdues par évapotranspiration ; durant l’été 2003, l’ETP étant supérieure aux précipitations, aucun rapport isotopique n’est préservé ; les mois suivant ne sont en conséquence pas inclus dans le fichier entrée (rupture de

cyclicité temporelle) ; autres détails dans la figure.

Enfin, on peut aussi envisager de tracer les temps de parcours moyens en utilisant les données disponibles en hydrogène. Comme le fractionnement avec cet atome est plus sensible qu’avec l’oxygène, les variations sont plus franches et l’on peut s’attendre à une meilleure approche des variations lors de la modélisation. Le résultat présenté dans la figure 51 représente le meilleur accord possible entre fichier pluviométrique (recalculé à 1100m d’altitude avec un gradient de –1,09‰ δ2

H par 100m) et observations en sortie du système aquifère. Celui-ci est obtenu sans composante contaminante, qui, si elle est introduite (20% à –70‰), produit une forte dégradation de l’efficacité du modèle, au contraire des essais faits sur l’oxygène.

En conclusion pour le lavoir de Rochetaillée, l’aire de recharge se situe aux alentours de 1000 à 1100m d’altitude, les temps de transit moyens convergent vers 11 mois avec δ18

O et 8 mois avec δ2

H. Ces résultats sont en accord avec une circulation souterraine d’une durée proche de 10 mois, ce qui, dans un petit bassin versant (101 ha) en environnement cristallin métamorphique, paraît compatible avec les faibles minéralisations mesurées. Néanmoins, ce type de modèle ne peut pas prendre en compte la fracturation et les circulations fluides associées.

Fig. 51 : modèle de dispersion pour le lavoir de Rochetaillée (hydrogène) ; détails dans la figure.

III.7.3.2 Lavoir d’Essertines dauphin

Le processus de traitement est identique à celui employé pour Rochetaillée. On utilise les rapports O et H modifiés par le gradient d’altitude moyen (respectivement –0,22‰ et –1,09‰ par 100m d’élévation), ainsi que les modifications engendrées par l’hypothèse d’une recharge soumise à l’influence de l’évapotranspiration.

Les efficacités des différents modèles établis pour le lavoir d’Essertines dauphin sont meilleures que celles présentées en III.7.3.1. Deux exemples sont donnés dans la figure 52, avec des temps de transit moyens proches de 12 mois, avec dans un cas une aire de recharge prise à 1100m sans traitement supplémentaire (Fig. 52a), et dans l’autre cas les précipitations prises à la même altitude mais corrigées de l’effet de l’évapotranspiration (Fig. 52b).

Les tests effectués avec les rapports isotopiques en hydrogène ont conduits à une efficacité de 32% pour un temps de parcours de 10 mois (Fig 52c). Comme dans le cas de Rochetaillée, les modèles basés sur l’isotopie de l’hydrogène donnent un temps de transit plus bref que ceux construits à partir des isotopes de l’oxygène.

Fig. 52 : modèle de dispersion pour le lavoir d’Essertines dauphin (oxygène et hydrogène) ; a) graphe avec entrée pluies prises à 1100m d’altitude (cf Rochetaillée) ; b) graphe prenant en compte l’ETP ; c) modèle basé

sur les rapports δ2

H (les trois premières mesures sont retirées ; voir texte pour explications).

III.7.3.3 Lavoir d’Essertines

Tout comme pour le lavoir d’Essertines dauphin, les compositions isotopiques des pluies ont été recalculées à 1100m. L’accord des modèles avec les observations est le meilleur obtenu pour tous les lavoirs du bassin versant du Furan. Ainsi (Fig. 53a), l’utilisation en entrée des pluies juste modifiées par le gradient d’altitude moyen conduit à un temps de résidence moyen de 14 mois et une efficacité de 67%. En d’autres termes, les précipitations tombées dans la zone d’alimentation de cette source expliquent les 2/3 du signal isotopique enregistré au lavoir. Donc ce signal est peu sujet à modifications lors de son trajet souterrain : il est vraisemblable que l’aire de recharge se situe en milieu relativement ouvert (peu d’interception par la canopée) et bien drainé (faible influence de l’évapotranspiration).

La faible influence de l’ETP sur les compositions isotopiques peut être appréhendée en utilisant en entrée le fichier pluviométrique pondéré des effets de l’ETP. On obtient un temps de 13,9 mois et une efficacité de 71,6%, proches de ceux précédemment obtenus.

Enfin, les modèles basés sur les isotopes de l’hydrogène (Fig. 53b) donnent des temps de transit plus faibles, de l’ordre de 9 mois, avec une efficacité moindre (26%).

Fig. 53 : modèle de dispersion pour le lavoir d’Essertines (oxygène et hydrogène) ; a) graphe avec entrée pluies prises à 1100m d’altitude ; b) modèle basé sur les rapports δ2

H (voir texte pour explications).

III.7.3.4 Lavoir de Barbanche

Comme ce lavoir est situé plus en altitude que les précédents, une altitude de 1200m, compatible avec la topographie locale, est prise comme référence pour l’impluvium.

Les résultats principaux sont représentés dans la figure 54. L’utilisation des pluies brutes recalculées du gradient d’altitude (Fig. 54a) donne un temps moyen proche de 13,4 mois, l’efficacité étant faible (7,9%). Une légère amélioration est apportée avec les pluies retraitées de l’ETP (10,9%). En hydrogène (Fig. 54b), le temps de transit moyen ressort toujours avec quelques mois de moins qu’en utilisant l’oxygène, soit 10 mois (18,5% d’efficacité).

Fig. 54 : modèle de dispersion pour le lavoir de Barbanche (oxygène et hydrogène) ; a) graphe avec entrée pluies prises à 1200m d’altitude ; b) modèle basé sur les rapports δ2

H (voir texte pour explications).

III.7.3.5 Lavoir du Bessat

Ici, l’aire de recharge est recalculée à 1300m d’altitude, par correction des rapports isotopiques des pluies. On obtient un modèle donnant un temps de transit de 13,5 mois (efficacité 14,7% ; Fig. 55 a). L’application avec les précipitations retraitées de l’effet de l’ETP donne un temps de transit légèrement supérieur (14,5 mois) avec une efficacité doublée. Comme dans les précédents cas, l’utilisation de l’hydrogène (Fig. 55b) fournit un temps de transit inférieur (9 mois à 11,7% d’efficacité).

Fig. 55 : modèle de dispersion pour le lavoir de Bessat (oxygène et hydrogène) ; a) graphe avec entrée pluies prises à 1300m d’altitude ; b) modèle basé sur les rapports δ2

III.7.3.6 Lavoir de Tarentaise

Contrairement à ce que l’altitude du lavoir laisse présager (1086m), les meilleures corrélations sont obtenues avec une aire de recharge d’altitude moyenne 1200m et non 1300m. Cela est sans doute un effet de la topographie douce au dessus de 1000m dans le massif du Pilat. Le premier cas traité (mêmes conditions que pour les 5 précédents lavoirs) donne un temps de transit moyen plus long, proche de 15 mois (Fig. 56). Ceci paraît concevable puisque Tarentaise est la source possédant le plus fort TDS. Tous les essais avec la précipitations corrigées de l’ETP se sont révélés non productifs dans le cas de Tarentaise, de même que l’utilisation des rapports en hydrogène. Sans doute le fait que la chronique d’enregistrement sur Tarentaise soit plus courte d’une année n’est pas étranger à ce constat.

Fig. 56 : modèle de dispersion pour le lavoir de Tarentaise (oxygène).

III.7.3.7 Essais de percolation de lavoirs dans d’autres

Les tests précédents sont basés sur des pluies qui s’infiltrent, dont la signature isotopique est plus ou moins modifiée lors du trajet souterrain, et qui ressortent par un mécanisme de type dispersif. Le but de cette modélisation est d’estimer une composante d’eau "résidente", en

prenant comme eau originelle celle d’un lavoir d’altitude et comme résultante une eau plus chargée en éléments dissous, provenant d’un lavoir situé plus bas en altitude.

Cette approche permet d’appréhender la composante d’eau de l’aquifère qui restant en contact avec la roche, dont le relargage supposé constant permet à certains lavoirs d’acquérir une minéralisation plus importante pour des temps de transit à peine plus longs que ceux des lavoirs moins minéralisés. Cette composante résidente atténue les variations isotopiques des pluies, en lissant le signal.

On considèrera les cas suivants : Bessat "donnant" Tarentaise et Essertines dauphin "engendrant" Essertines. On a précédemment montré que les lavoirs d’Essertines avaient une zone d’approvisionnement d’altitude moyenne semblable (vers 1100m), alors qu’un écart d’une centaine de mètre semble exister entre Tarentaise et Bessat. Pour Tarentaise, les valeurs de Bessat ont été recalculées 100 mètres plus bas. Une différence de temps de transit d’environ 2 mois est utilisée dans ce modèle (Tab. 17).

La quantification de la composante à long temps de transit dans les comparaisons Bessat – Tarentaise n’est possible. Le cas des lavoirs d’Essertines est plus intéressant. Certes, on a pris Essertines dauphin donnant Essertines, mais pour tenir compte de l’enregistrement plus long sur le premier lavoir, la différence de TDS n’apparaissant pas rédhibitoire (20 mg/l). Pour un écart temporel plus proche de 3 mois que de 2, on obtient les efficacités suivantes, fonction des proportions de contaminant utilisées :

- 0% de contaminant : 76% - 40% à –10‰ : 28% - 20% à –10‰ : 68% - 20% à –11‰ : 49% - 20% à –12‰ : 29%

Les signatures isotopiques du contaminant présentées ci-dessus ont été déduites de plusieurs tests successifs, durant lesquels on a fait varier la signature de –8‰ à –12‰ δ18

O VSMOW (rapports isotopiques d’eaux potentiellement infiltrées en saison froide). Les meilleures corrélations sont obtenues pour des signatures plus négatives ou égales à –10‰. Il est donc possible de faire apparaître une certaine proportion d’eau de composition isotopique stable, à temps de résidence important (plus de 3 ans). D’autre part, la signature est plus négative, ce qui suggère toujours une recharge principale de ce contaminant en hiver.