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H) II.4.1 Cas général

IV. EAUX MINERALES DU FOREZ

IV.2.2 Corrélations entre éléments

La relation entre Na et Cl indique pour toutes les sources minérales un enrichissement en sodium par rapport aux eaux de surface (Fig. 61). Cet excès est surtout sensible pour les eaux du faciès Na-HCO3. La tendance observée est similaire à celle des eaux du bassin de Vichy (Serra et al., 2003). Les eaux minérales du Forez sont donc peu enrichies en chlore par rapport aux eaux de surface de TDS supérieur à 100 (Tarentaise et St-Rambert ; Fig. 61), mais très enrichies en sodium. Les interactions eau – roche ont permis l’acquisition de cette concentration en Na dans des environnements peu riches en chlore, ce qui confirme bien l’absence d’évaporites.

Fig. 61 : diagramme Na vs Cl (mg/l) pour les eaux du Forez ; compositions des eaux du MCF (Serra et al., 2003) ; le pôle surface est représenté par St-Rambert et Tarentaise.

Comme leur faciès le suggère, les eaux Ca-Mg sont fortement enrichies en Ca et Mg relativement à la teneur en Na. A la teneur près, cet enrichissement les rapproche (Fig. 62) des proportions mesurées dans les eaux de Châtel-Guyon (contact socle/sédiments oligocènes), pourtant de faciès différent (Ca-Cl). Les eaux de Salt-en-Donzy présentent un rapport très stable, proche de celui de l’eau de mer (Taylor et McLennan, 1985). Sail-sous-Couzan (S/C) et Moingt (MGT), les deux pôles les plus minéralisés du Forez, ont des valeurs comparables à celles d’autres districts minéraux du Massif Central (Vichy, Mont-Dore, Cézallier). Seule Montrond, bien qu’émergeant en bassin sédimentaire pro-parte carbonaté (pile de sédiments

traversée par le forage : 500m), est appauvrie en calcium, tout comme certaines eaux de Vichy et de Royat (contexte de socle et surtout de bassin). Les deux sources thermales (MTD, SD) apparaissent donc peu riches en Ca (et Mg) et plus riches en Na par rapport aux eaux froides et plus minéralisées du bassin.

Fig. 62 : diagramme Ca vs Na (µmol/l) pour les eaux du Forez ; contour rond : eaux Na-Cl-HCO3 ; autre contour : eaux Ca-Mg-HCO3 ; compositions des eaux du MCF (Serra et al., 2003).

Fig. 63 : diagramme K vs Na (µmol/l) pour les eaux du Forez ; contour rond : eaux Na-Cl-HCO3 ; autre contour : eaux Ca-Mg-HCO3 ; compositions des eaux du MCF (Serra et al., 2003).

Ces diverses eaux ayant un trajet dans le socle granitique faillé, l’étude des variations des proportions en K et Na, issus de l’altération de phases silicatées (feldspaths, micas), est intéressante (Fig. 63). Les eaux Ca-Mg sont les moins riches en ces deux éléments, proche du

champ des termes les moins minéralisés du Cézallier. Tout comme pour la relation Na-Ca, la source thermale Na-Cl de Salt-en-Donzy admet des proportions très proches de celles de l’eau de mer. Par contre, de fortes disparités existent dans le comportement des 3 sources du faciès Na-HCO3. La source thermale de Montrond est pauvre en K, ce qui implique soit une circulation dans une roche mère libérant peu de potassium (élément chimique non échangeable de certaines phases argileuses et peu lessivable des phases micacées), soit un contact bref avec le socle et/ou une plus faible température de réservoir (peu vraisemblable ; cf IV.3). Au contraire, les pôles Na-HCO3 froids (MGT et S/C) circulant en contexte granitique, sont enrichis en K. Moingt admet des proportions similaires à celles relevées dans des sources reconnues comme d’origine profonde de l’Ouest de la Limagne de Clermont-Ferrand (Royat, Châtelguyon), tandis que Sail-sous-Couzan se rapproche des fortes teneurs des eaux du Cézallier – région Limagnes (Berthier et al., 1982).

Afin de déterminer les types de roches dans lesquels l’eau circule, on peut examiner les relations entre teneur en sulfates et teneur en calcium (Fig. 64). Salt-en-Donzy se distingue par un enrichissement en sulfates associé à une faible teneur en calcium. Comme les eaux minérales échantillonnées sont relativement protégées des contaminations extérieures (NO3 < 5 mg/l sauf pour SG entre 6 et 7), les sulfates proviennent en majorité de l’oxydation des sulfures du socle. SD serait donc plus sensible à ce processus que les autres sources minérales. Cela est peut-être l’effet d’une percolation dans les formations des Monts du Lyonnais, à lithologies plus variées que les Monts du Forez. Au vu de leur émergence, MTD et SG pourraient aussi être affectées par ce phénomène. Cependant, ces eaux étant des mélanges d’au moins 4 niveaux aquifères, il n’est pas possible de détecter dans ces deux sources une influence de lithologies caractéristiques des Monts du Lyonnais.

Fig. 64 : diagramme SO4 vs Ca (mg/l) pour les eaux du Forez ; contour rond : eaux Na-Cl-HCO3 ; autre contour : eaux Ca-Mg-HCO3 ; compositions des eaux du Cézallier (Négrel, 1997).

Les rapports Na/Li des eaux minérales permettent de distinguer deux groupes (Fig. 65). Le premier comprend les faciès Na-Cl et Ca-Mg-HCO3, à teneurs faibles en Na (< 10000µmol/l) et Li (<300 µmol/l). Le second correspond aux eaux Na-HCO3, plus riches en ces éléments mais moins concentrées en Li que certaines eaux du Mont-Dore (hors échelle sur Fig. 65) dépassant 2000 µmol/l. Le lithium étant un élément mobile, les trois sources du faciès Na-HCO3 sont plus représentatives des interactions en profondeur. MGT est plus concentrée, S/C et MTD moins, sans doute par effet d’une dilution avec des aquifères moins minéralisés.

Fig. 65 : diagramme Li vs Na (µmol/l) pour les eaux du Forez ; contour rond : eaux Na-Cl-HCO3 ; autre contour : eaux Ca-Mg-HCO3 ; compositions des eaux du MCF (Serra et al., 2003).

La présence de sulfates dans les eaux pose la question de leur origine. Pour essayer de déterminer le mécanisme de mise en solution, le diagramme Br/Cl en fonction de SO4/Cl est utilisé (Fig. 66). Faute de détection de brome, Chorsin et Montrond ne peuvent être représentées. Les sources présentent des rapports SO4/Cl élevés, SD et S/C un enrichissement en Br, cependant très inférieur à celui des saumures du graben rhénan (226mg/l ; Aquilina et al., 1997). Les eaux du faciès Ca-Mg ne présentent pas de mécanisme d’interaction prépondérant (Fig. 66). Les rapports Br/Cl et SO4/Cl de MGT pourraient être interprétés comme signant une interaction avec des formations plus riches en matière organique (Aquilina et al., 1997), mais ce mécanisme n’est pas reflété par sa signature en 13C (IV.4). S/C et SD paraissent plus influencées par une interaction avec une matrice silicatée. Pour éviter les problèmes liés à la dilution des eaux, on peut utiliser le rapport Cl/Br, reconnu pour varier en 100 et 600 dans les eaux issues d’interactions avec des granites (Fuge, 1972). Dans le cas présent, MGT, S/C, SD et SA ont des rapports entre 240 et 280, SG ayant une valeur très supérieure proche de 590. Ceci implique que cette dernière source circule soit dans un socle de nature différente, soit qu’elle interagit moins avec des minéraux riches en brome ou la matière organique.

Fig. 66 : diagramme Br/Cl vs SO4/Cl (mg/l) pour les eaux du Forez ; les analyses Mont-Dore se rapportent aux eaux de la haute vallée de la Dordogne (Baubron et al., 1979)

Les contenus en éléments dissous des eaux minérales du Forez indiquent des interactions en profondeur dans les formations encaissantes (enrichissement en sodium), soit lors de circulations dans le socle (S/C, MGT, SD), soit aussi lors de circulations en domaines sédimentaires détritiques (MTD). Les interactions avec la matière organique, même ancienne, sont limitées (MTD). Les sources les plus représentatives d’un pôle minéral profond sont celles du faciès Na-HCO3 (MGT, MTD et S/C). Pour préciser les interactions en profondeur, on utilise, comme pour les eaux de surface, les calculs d’indices de saturation.