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Modèles de nucléation/croissance de nanocristaux

1.1 Nanocristaux ternaires

1.1.4 Modèles de nucléation/croissance de nanocristaux

Pour élaborer des nanocristaux avec une faible dispersion en taille, il est nécessaire de séparer l’étape de nucléation de celle de croissance des nanocris- taux. Si ces deux étapes ont lieu simultanément, il peut y avoir création de nouveaux germes alors que d’autres sont en train de croître, ce qui implique que les nanocristaux seront polydisperses. LaMer et Dinegar ont été les pre- miers à mettre en avant ce phénomène pour expliquer les résultats obtenus lors de la synthèse de particules de soufre [91].

Nucléation : Modèle de LaMer

Ce modèle permet d’expliquer la formation de particules monodisperses à partir d’une solution sursaturée (cf. 1.6). Celle-ci est alors décomposée en trois étapes : la pré-nucléation, la nucléation et la croissance. Durant la pré- nucléation, la concentration des espèces réactives dans la solution augmente et atteint les limites de solubilité puis la concentration critique de sursatura- tion. Quand cette concentration est atteinte la nucléation commence spon- tanément (nucléation homogène). Si la vitesse de nucléation est très rapide, la concentration en espèce réactive peut baisser en dessous du seuil de nu- cléation, la nucléation s’arrête. Dans ces conditions la nucléation est brève et suivie par une étape de croissance uniforme des germes. Cette étape de croissance uniforme peut avoir lieu tant que la concentration en espèce ré- active reste suffisamment élevée. Dans le modèle de LaMer, la croissance est contrôlée par diffusion du soluté vers la surface de la particule.

Une stratégie couramment utilisée pour obtenir des nanocristaux uni- formes, en passant par une nucléation très rapide et séparée de la croissance des nanocristaux est l’injection à chaud (hot-injection method). Cette mé- thode, exposée en 1993 par Murray et al. [92], permet d’atteindre la concen-

tration critique très rapidement par injection d’un des réactifs dans une so- lution déjà chauffée. Il a été également démontré par le groupe de Hyeon [93] que la théorie de LaMer est également applicable dans le cas de synthèse dite heating-up où tous les précurseurs sont mélangés à froid et chauffés simulta- nément dans le même ballon.

Figure 1.6 –Diagramme schématique illustrant les conditions de LaMer pour la nucléation dans le cas de la courbe rose, la concentration critique est rapidement dépassée (à partir de t1) et la nucléation commence à

partir de ce temps, elle est comprise entre t1 et t2. La nucléation est

rapide. Dans le cas de la courbe bleue, la nucléation a lieu entre t0 1 et t

0 2,

elle est plus lente [94]

Croissance des nanocristaux

Le processus de croissance est gouverné par deux facteurs :

– la diffusion, car les monomères doivent arriver à la surface des nano- cristaux ;

– la cinétique de réaction des monomères avec les nanocristaux.

Il a été montré par H. Reiss [95] pour des particules colloïdales de taille micrométrique que si la croissance des nanocristaux était limité par le phé- nomène de diffusion, il était possible d’observer un phénomène de diminution de la distribution en taille (size-focusing) au cours du temps de réaction. Le même phénomène a été démontré pour des nanocristaux par Peng et al. [96]. Cependant la croissance cristalline est aussi fortement influencée par la va- riation de l’énergie de surface avec la taille. Pour une concentration constante de monomère, dans le cas où la diffusion est le facteur limitant la croissance,

1.1 Nanocristaux ternaires

la dépendance en taille de la vitesse de croissance peut être expliquée en considérant l’équation de Gibbs-Thomson (1.4).

Sr = Sbexp(

2σVm

rRT ) (1.4)

Avec Sr : solubilité du nanocristal ; Sb : solubilité du matériau massif ; σ : énergie de surface spécifique ; r : rayon du nanocristal ; Vm : volume molaire

du matériau ; R constante des gaz parfaits ; T : température. Si

2σVm

rRT <<< 1

alors la vitesse de croissance dépend de la taille du nanocristal de la manière suivante : dr dt = K( 1 r + 1 δ)( 1 r∗ − 1 r) (1.5)

Avec K : une constante proportionnelle à la constante de diffusion du mono- mère ; δ : épaisseur de la couche de diffusion ; r∗ : rayon critique pour lequel

la croissance est nulle.

Figure 1.7 – Schéma de la vitesse de croissance en fonction de la taille du rayon critique r∗. Deux exemples d’évolution de la taille des NCs

sont présentés. Au cours de la synthèse, la concentration en monomère diminue et la taille critique augmente. Si celle-ci est suffisamment faible le système peut être dans un régime desize-focusing c’est à dire que sa distribution en taille diminue [97]

.

Pour n’importe quelle concentration en monomère, il existe une taille critique r∗ qui est à l’équilibre. Les nanocristaux plus petits que cette taille

se dissolvent et ceux qui ont une taille plus importante que la taille critique ont une vitesse de croissance positive dépendant fortement de leur taille. La diminution de la distribution en taille (size-focusing) a lieu quand les nanocristaux sont de taille légèrement supérieure à la taille critique. Dans ces conditions, les plus petits nanocristaux ont une croissance plus rapide que les plus gros (cf. Figure 1.7).

Quand la concentration en monomère diminue du fait de la croissance, la taille critique devient plus élevée que la taille moyenne des nanocristaux et la distribution en taille s’élargit car les nanocristaux les plus petits diminuent voire disparaissent au profit des plus gros. C’est le mûrissement d’Ostwald. Idéalement la synthèse sera stoppée avant cette phase.