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ÉTAT DE L’ART SUR LA TENUE AU FEU DES COMPOSITES STRATIFIÉS

I.3 Modélisation de la tenue au feu des composites

I.3.3 Modélisation de la réponse thermomécanique d’un composite soumis à un flux thermique

I.3.3.1 Modèles de comportement et rupture à l’ambiante d’un composite stratifié

Prise en compte du comportement visqueux à l’échelle du pli La prévision de la réponse méca-nique du composite passe souvent par la caractérisation et la modélisation du comportement élémentaire du pli et ensuite le passage à l’échelle macroscopique par la théorie classique des stratifiés (CLT) [64]. Il s’agit de la théorie la plus utilisée pour la prévision du comportement mécanique d’un composite stratifié soumis à un chargement mécanique. Sur le principe, il s’agit d’une méthode d’homogénéisation permettant de passer du comportement du pli à celui du stratifié.

Cependant, afin d’avoir une bonne estimation de la rupture du composite, il est nécessaire d’avoir une bonne prévision de la rupture dans les plis ou aux interfaces entre les plis. Pour cela, il faut étendre l’approche classique (CLT) à des comportements non linéaires (CLT non-linéaire). Le comportement du stratifié est donc déterminé à partir du comportement élémentaire endommageable du pli et de celui des interfaces entre plis.

Il est donc nécessaire de séparer les effets (linéaires et non linéaires) sur le comportement du pli, sur l’endommagement et sur la définition de critères de rupture. En ce qui concerne le comportement du pli, une approche basée dans la mécanique des milieux continus et dans un cadre thermodynamique-ment admissible permet d’assurer une signification physique aux non linéarités introduites, tels que des effets visqueux. Pour cela, nous trouvons différents modèles pour reproduire une tel comportement non-linéaire [84–88], tel que le modèle viscoélastique spectral proposé par Maire et al. [16,89,90]. Ce modèle nous sert de base pour la modélisation du comportement à l’échelle du pli dans un premier temps, afin d’intégrer plus facilement la dépendance à la température dans un deuxième temps. Cette approche sera donc utilisée dans la suite du manuscrit.

La formulation de ce modèle modèle est décrit par l’Équation I.5:

σ= ˜C : (ε − εth− εve) avec ˜S= ˜C1 (I.5) avec ˜C et ˜S des tenseurs d’ordre 4 correspondant aux tenseurs d’élasticité en raideur et en souplesse. ε,

εth et εve représentent les déformations totales, thermiques et visqueuses. Le tenseur des déformations thermiques est calculé par une approche thermo-élastique classique :

εth= (T − T0) αth (I.6)

avec εth le tenseur de dilatation thermique et T0 la température libre de contrainte. Le tenseur des déformations visqueuses εve est calculé à partir d’un modèle viscoélastique spectral dont le principe est de pondérer par un poids µi chaque mécanisme visqueux élémentaire ξiassocié à un temps caractéristique de relaxation τi [16]. Cela permet de définir la répartition complète des poids µi par une enveloppe de type gaussienne déterminée par la connaissance des deux paramètres de forme de la distribution, n0 et

nc, comme schématisé dans la FigureI.19.

Donc les temps caractéristiques et les poids des mécanismes visqueuses sont exprimés comme :

τi = eni µi = 1 n0π e ni−nc n0 2 (I.7) et la déformation visqueuse peut s’exprimer comme la somme de la contribution de tous les mécanismes visqueux élémentaires : ˙εve=X i ˙ξi τi˙ξ i+ ξi = µiS˜R : σ (I.8)

avec ˜SR le tenseur effectif de souplesse visqueuse [90]. Le tenseur de souplesse visqueuse initial n’a pour seules composantes non-nulles que les composantes transverses et de cisaillement. Le tenseur de souplesse

Figure I.19 – Réprésentation de la répartition des poids µi de chaque mécanisme visqueux élémentaire ξi en fonction de son temps caractéristique τi [16]

est formulé à l’échelle mésoscopique sur le principe que l’apparition d’endommagement à l’échelle de la fibre et de la matrice n’a pas un impact majeur sur le comportement élastique mais essentiellement sur le comportement visqueux par l’effet associé aux endommagements autour des fibres. Il est défini comme :

˜

SR= SR+X3

i=2

δiHδi (I.9)

avec δi deux variables d’endommagement à l’échelle microscopique dont les effets sont traduits au travers du tenseur d’effet visqueux Hδi. Sous l’hypothèse que l’endommagement matriciel à l’échelle microsco-pique ne peut se développer que dans les deux directions transverses aux fibres (sens 2 et 3), les forces thermodynamiques (y2, y3) pilotent l’évolution des variables d’endommagement associées (δ2 et δ3) à la déformation visqueuse dépendant directement de la partie positive des déformations dites élastiques. Chaque force thermodynamique a une contribution en mode ouverture (yn

i) et une autre due au cisaille-ment (yt i) : εe= ε − εve− εth δi= δc i " 1 − exp hyiy0 iipδi+yc i !# avec ˙δi ≥0 yi= yn i + yt i yni = C0 ii,iiεe+ ii avec i = 2, 3 yti = biC0 ij,ij εe+ ij + bipC0 ik,ik εe+ ik avec j = 1, 2 et k = 3, 1 (I.10) avec (bi, bip, y0

i, yci, pδi) des paramètres matériaux qui pilotent la cinétique d’endommagement et ses cou-plages selon le chargement.

L’étape suivante vise à adapter ce type des modèles de comportement en prenant en compte la température puis l’endommagement du matériau, ainsi qu’à formuler des critères de rupture du pli et des interfaces adaptés, comme nous le présentons dans le paragraphe suivant.

Prise en compte de l’endommagement Un modèle d’endommagement cherche à modéliser les conséquences des mécanismes de dégradation observés au sein du pli afin d’obtenir ensuite une prévision de la réponse mécanique du stratifié. Dans la littérature il existe entre autres des approches comme la

Progressive Failure Analysis (PFA) [91,92] et la Mécanique Continue de l’Endommagement (Continuum

Damage Mechanics-CDM) [93–95].

L’objectif de ce manuscrit n’est pas de rentrer dans les détails des modélisations classiquement utilisées mais seulement d’en rappeler les principes fondamentaux. Le principe de la PFA est de modéliser la

Figure I.20 – Schéma des mécanismes d’endommagement modélisés pour des matériaux composites

stra-tifiés [17]

rupture locale du matériau et sa conséquence sur la réduction des propriétés mécaniques apparentes du matériau. Cependant cette approche est basée sur des critères de rupture qui peuvent conduire à des comportements non thermodynamiquement admissibles [96]. La mécanique continue de l’endommagement considère quant à elle le pli comme un milieu continu endommageable. Le matériau est considéré être à chaque instant dans un état d’équilibre thermodynamique local [95]. Une exemple du modèle à l’échelle du pli formulé dans le cadre de la CDM est le mésomodèle proposé par Ladevèze [17]. Il s’agit d’un modèle très répandu dans la littérature pour la prévision de la rupture des pièces composites parce qu’il prend en compte trois modes d’endommagement au sein du pli ; à savoir : la rupture de fibre, la fissuration matricielle et la décohésion interfaciale fibre-matrice. De plus, le délaminage est modélisé entre les plis adjacents à l’aide d’un modèle de zones cohésives (plus de détails seront apportés spécifiquement sur ce point dans le paragrapheI.5). La Figure I.20montre un schéma des différents mécanismes considérés.

En combinant les principes de la CDM et de la PFA, l’ONERA a développé un modèle multi-échelle pour des composites à matrice céramique et à matrice organique [18,90]. Le modèle permet donc de trai-ter des chargements macroscopiques, calculer la contrainte au sein de chaque pli à partir des méthodes de changement d’échelle (CLT non linéaire ou autre) et prendre en compte ainsi l’évolution des endom-magements des plis et leur conséquence sur la tenue mécanique des pièces en composites. La FigureI.21 montre le principe de la démarche du modèle. La rupture à l’échelle du pli est basée sur les critères de Hashin [97] et quatre modes de rupture sont pris en compte dans le modèle ONERA [18,19] :

• 2 pour le mode fibre (rupture des fibres)

• 2 pour le mode transverse (fissuration de la matrice)

puisque l’on sépare pour chaque mode les sollicitations de traction de celles de compression. Les modes de rupture des fibres en traction ou en compression de la matrice sont dits catastrophiques, car l’appa-rition d’une rupture de ce type à l’échelle du pli conduit nécessairement à la rupture du stratifié. En revanche, les modes de rupture en traction de la matrice et l’apparition de fissuration transverse sont non catastrophiques.

Thermoélasticité pour la prise en compte des contraintes thermiques : vers une modélisation thermomécanique Un aspect important à traiter concerne la dilatation thermique longitudinale et transverse. Il est classiquement admis une description thermoélastique pour l’écriture de la déformation thermique, comme nous l’avons présenté dans l’Equation (I.6). Les déformations thermiques générées sont traduites comme des contraintes internes du matériau. Cela représente un chargement supplémentaire à considérer au sein du stratifié et qui dépend fortement de la stratification comme l’illustre la FigureI.22. Il est donc nécessaire d’étendre ces chargements thermiques à des chargements thermiques non homo-gènes dans l’épaisseur du stratifié et avec la prise en compte d’une éventuelle dégradation thermique du

Figure I.21 – Schéma de principe de l’approche progressive de la rupture pour des composites

strati-fiés [18]

Figure I.22 – Schéma de l’influence d’un chargement thermique sur un stratifié et explication de l’origine

matériau. Nous avons remarqué que les modèles de prévision à température ambiante prennent en compte déjà un grand nombre de mécanismes. Donc, il s’avère nécessaire de conserver une approche simplifiée dans le cadre de la tenue au feu.

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