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Une fois que l’on a simulé les radiances parvenant jusqu’à l’instrument à bord du sa- tellite, il faut leur appliquer ce qu’on appelle un modèle instrumental pour obtenir les radiances mesurées par l’instrument. En effet, les mesures réalisées par tout instrument sont empreintes d’une incertitude contrainte, entre autres, par la sensibilité et la résolu- tion des capteurs. Le modèle instrumental permet de tenir compte de ces incertitudes, ou erreurs de mesures, et ainsi de passer des radiances issues de l’atmosphère aux radiances effectivement mesurées par l’instrument à bord du satellite géostationnaire.

Figure2.7 – Courbes de SNR pour l’instrument TIR du concept MAGEAQ. En magenta

le SNR pour un cas de radiance issu d’un profil atmosphérique typique. En bleu un cas minimum, et en rouge un cas maximum. En gris le SNR pour un profil de radiance issu d’un corps noir à T = 280 °K. En vert est représenté le SNR modélisé utilisé dans ce travail de thèse.

Dans ce travail de thèse, nous avons modélisé les radiances mesurées par l’instrument à partir des bandes spectrales de ce dernier, de la résolution spectrale de l’instrument dans chacune de ces bandes, et du bruit de mesure de l’instrument. Ainsi, les radiances en sortie des modèles de transfert radiatif sont convoluées par une fonction de lissage gaussienne (représentée par sa largeur à mi-hauteur -FWHM-) permettant de simuler la dispersion spectrale de l’instrument. Ensuite, ces radiances sont filtrées par des fonctions « porte » cor- respondant aux bandes spectrales de l’instrument dans l’infrarouge thermique et le visible. Enfin, on ajoute à ces radiances (appelées Imod) le bruit instrumental modélisé par une

90 2.4. LE MODÈLE INSTRUMENTAL

variable aléatoire suivant une loi normale centrée réduite ( ˜N) et le rapport signal sur bruit (en anglais, Signal to Noise Ratio -SNR-), σSN R, de l’instrument :

Imeas= Imod+ (

Imod

σSN R × ˜

N ) (2.3)

Sachant que nous modélisons la variation du SNR en fonction de la longueur d’onde avec la formule : σSN R= a× λ + b, où λ est la longueur d’onde exprimée en nm, a et b sont des

coefficients obtenus à partir de l’étude détaillée du concept MAGEAQ réalisée par Airbus Defence and Space (cf. Fig. 2.7 et Fig. 3.1).

Figure 2.8 – Courbes de SNR pour l’instrument VIS du concept MAGEAQ. En magenta

le SNR pour un cas de radiance typique, et en bleu pour un cas de radiance minimum. En gras sont représentées les courbes de SNR issues de l’exigence scientifique. En trait fin sont représentées les courbes de SNR estimés par Airbus Defence and Space pour l’instrument. En vert est représenté le SNR modélisé utilisé dans ce travail de thèse.

Le modèle de SNR réalisé par Airbus Defence and Space tient compte de diverses sources de bruit, comme le bruit quantique, le courant d’obscurité, le bruit de lecture, le bruit thermique, etc. Il prend également en compte les différents éléments optiques, les plans focaux, la géométrie et le temps d’intégration, des deux spectromètres à réseaux (infrarouge thermique et visible). Au final, on obtient, grâce à ce modèle de SNR, le bruit de mesure (�λ)

de l’instrument dans chaque longueur d’onde (λ) qui nous permet de calculer Imeas, mais

également la matrice de covariance d’erreur liée à la mesure (S�, cf. section 2.5). En effet,

en considérant que pour une longueur d’onde donnée le bruit de mesure de l’instrument est indépendant des autres longueurs d’onde, on peut construire la matrice S� ainsi :

S� =           �2 λV IS,0 0 0 0 0 0 0 ... 0 0 0 0 0 0 �2 λV IS,n 0 0 0 0 0 0 �2 λT IR,0 0 0 0 0 0 0 ... 0 0 0 0 0 0 �2 λT IR,m          

où l’on tient compte du bruit instrumental dans la bande visible pour chaque longueur d’onde allant de 0 à n, et dans la bande infrarouge thermique pour chaque longueur d’onde allant de 0 à m. La matrice est diagonale et peut aisément être inversée pour ensuite être utilisée dans l’algorithme d’inversion de données.

Enfin un dernier point concernant l’instrument : ce dernier contient un « scrambler » en entrée. Un scrambler est un dispositif permettant d’annuler (ou du moins de réduire drasti- quement) la polarisation du rayonnement, et permet ainsi de s’affranchir des perturbations associées. En effet, la lumière polarisée, en interagissant avec les surfaces optiques de l’ins- trument, va produire une lumière parasite, d’autant plus importante que la polarisation est forte. Dans la section 2.6 nous présentons les résultats d’une étude réalisée sur la polarisa- tion, estimant l’effet parasite de cette dernière dans la mesure de l’ozone troposphérique, pour différents types de scrambler plus ou moins efficaces pour atténuer la polarisation. Dans les chapitres 3 et 4, nous avons considéré que le scrambler de l’instrument est parfait, et que l’effet de la polarisation est nul.

On peut s’intéresser maintenant plus en détails à la configuration des deux spectromètres modélisés, infrarouge thermique et visible, aux caractéristiques très proches de celles de MAGEAQ, que l’on a respectivement nommé GEO TIR et GEO VIS.

2.4.1 Caractéristiques du spectromètre infrarouge thermique

Table 2.1 – Configuration instrumentale du spectromètre infrarouge thermique.

Bande spectrale 1000 – 1070 cm−1

Résolution d’échantillonnage spectrale 0,1 cm−1

Résolution spectrale FWHM 0,2 cm−1

σSN R : coefficient a -1,374 nm−1

σSN R : coefficient b 13 940 (sans dimension)

Dans le tableau 2.1 sont répertoriées toutes les caractéristiques spectrales de l’instru- ment GEO TIR. La bande spectrale, allant de 1000 à 1070 cm-1, a été choisie dans le but

de maximiser l’information en ozone lors de la mesure. En effet, dans cette bande l’absorp- tion atmosphérique due à l’ozone est maximale (cf. Fig. 2.9), ainsi en déterminant l’écart entre l’émission de corps noir de la Terre et le spectre réellement mesuré dans cette bande on obtient de l’information sur la concentration d’ozone dans l’atmosphère. Cependant,

92 2.4. LE MODÈLE INSTRUMENTAL

la présence dans cette bande d’autres absorbants que l’ozone, comme par exemple H2O, va contaminer la mesure de l’ozone. Pour diminuer au maximum la contamination de la mesure par ces absorbants, on sélectionne dans la bande spectrale des micro-fenêtres. Les micro-fenêtres caractérisent les zones de la bande spectrale où la contamination par les autres absorbants est la plus faible. Au final, ce sont les radiances dans ces micro-fenêtres qui seront utilisées pour inverser le profil d’ozone. On utilise 21 micro-fenêtres, pour inverser l’ozone, dans la bande spectrale de GEO TIR (Claeyman et al., 2011b).

Les autres caractéristiques de l’instrument ont été choisies en accord avec Airbus Defence and Space dans le but de maximiser le SNR tout en gardant une contrainte sur la technologie utilisée et son coût.

Figure2.9 – Radiances dans l’infrarouge thermique mesurées en sortie de l’atmosphère, et comparaison avec les radiances prévues par la loi du corps noir pour diverses températures (courbes en pointillées). Les principaux absorbants d’une bande sont également donnés. D’après les données de l’instrument IRIS distribué par le Goddard EOS Distributed Active Archive Center (DAAC) et Hanel et al. (1971).

Le rayonnement infrarouge thermique, dans la bande spectrale de GEO TIR, est émis, suivant la loi de Planck, par la surface terrestre et l’atmosphère. Ce rayonnement traverse l’atmosphère en interagissant principalement avec l’ozone et atteint l’instrument à bord du satellite. L’avantage de la mesure du rayonnement, dans cette bande spectrale, est d’être très sensible aux concentrations d’ozone dans la basse troposphère jusque dans la stratosphère. De plus, l’émission thermique ayant lieu également la nuit nous permet ainsi de réaliser des mesures en continu, jour et nuit. Ces mesures sont cependant peu sensibles aux basses couches de l’atmosphère (cf. section 3.2.3.1), il est ainsi difficile de mesurer uniquement avec cette bande l’ozone proche de la surface (pour la qualité de l’air), même en bénéficiant

de conditions particulières, de très fort gradient thermique par exemple.

2.4.2 Caractéristiques du spectromètre visible

On trouvera dans le tableau 2.2 les caractéristiques spectrales de l’instrument GEO VIS. La bande spectrale a été choisie ici aussi de manière à maximiser l’information en ozone, en sélectionnant la bande dans le visible où la section efficace de l’ozone est maximum (cf. Fig. 2.6). Dans cette bande aussi la mesure est contaminée par la présence d’autres espèces chimiques, et ce d’autant plus que ces dernières forment un continuum dans la bande étudiée (par exemple, H2O et NO2), on ne peut donc pas les filtrer en utilisant des micro-fenêtres. Il nous faudra ainsi connaître les concentrations de ces espèces chimiques contaminantes de manière la plus précise possible, afin de décontaminer la mesure et ainsi extraire, à partir du spectre mesuré, le maximum d’information sur le profil d’ozone (cf. section 2.5).

Table2.2 – Configuration instrumentale du spectromètre visible.

Bande spectrale 520 – 650 nm

Résolution d’échantillonnage spectrale 0,3 nm

Résolution spectrale FWHM 1,2 nm

σSN R : coefficient a -5,83 nm−1

σSN R : coefficient b 5 616 (sans dimension)

L’instrument GEO VIS utilise la bande visible dans le but d’obtenir, lors de la me- sure, de l’information provenant de la surface. En effet, l’atmosphère (lorsqu’il n’y a pas de nuages) est transparente au rayonnement visible. Le soleil émet le rayonnement visible qui va traverser l’atmosphère, être réfléchi à la surface de la Terre, puis re-traverser l’atmo- sphère et atteindre l’instrument à bord du satellite. Tout au long de son parcours à travers l’atmosphère le rayonnement visible va interagir avec l’ozone (et avec les autres espèces chimiques contaminantes), ainsi ce rayonnement est en partie sensible aux concentrations d’ozone à la surface de la Terre (cf. section 3.2.3.1).

94 2.5. L’INVERSION DE DONNÉES