• Aucun résultat trouvé

1.2 L’atmosphère terrestre

1.2.2 Les processus influençant la qualité de l’air

L’évolution de la qualité de l’air est influencée par des processus de transport et de chimie se déroulant dans la troposphère, et en particulier dans la couche limite atmosphérique, zone d’interface entre la surface et la troposphère libre (cf. Fig. 1.3).

On peut décomposer l’évolution de la qualité de l’air au travers de 4 processus : les émissions, les réactions chimiques, le transport et le dépôt. L’étude de la qualité de l’air, c’est à dire l’étude des concentrations de polluants dans la couche limite atmosphérique, passe par la compréhension de chacun de ces processus.

1.2.2.1 Émissions

Les émissions constituent le processus de rejet de polluants (cf. section 1.3) dans l’at- mosphère. On distingue différentes sources d’émissions :

Figure1.3 – Schéma représentant les processus dynamiques ayant lieu dans l’atmosphère et affectant la qualité de l’air. D’après P. Rekacewicz, July 2003.

— Les émissions anthropiques, c’est à dire les émissions produites par l’activité humaine, comme par exemple la combustion de ressources fossiles, l’emploi de pesticides pour l’agriculture, etc.

— Les émissions biogéniques, c’est à dire les émissions produites par des fonctions na- turelles d’organismes biologiques, tels que la décomposition microbienne des matières organiques.

— Les émissions inorganiques, c’est à dire produites par des sources non-vivantes, tels les éruptions volcaniques ou encore les tempêtes de poussières désertiques.

Ce sont les cycles biogéochimiques qui déterminent les concentrations des éléments en traces, dont les polluants, dans l’atmosphère terrestre naturelle. Les cycles les plus im- portants étant ceux de l’eau (H2O), du carbone, de l’azote et du soufre, puisque ce sont

ceux liés au vivant. La présence de ces constituants dans l’atmosphère est conditionnée par les processus d’émission (vue précédemment) et d’élimination (cf. section 1.2.2.2 et sec- tion 1.2.2.4) du réservoir atmosphérique. Actuellement les activités humaines perturbent de manière sensible l’ensemble de ces cycles biogéochimiques. L’étude des émissions ren- seigne donc sur l’état des cycles biogéochimiques et sur les impacts qu’ont les activités humaines sur ces cycles. Des bilans globaux des différentes sources d’émission de composés

36 1.2. L’ATMOSPHÈRE TERRESTRE

du carbone, de l’azote, du soufre et des aérosols, sont réalisés à partir de diverses méthodo- logies qui permettent de réaliser les cadastres d’émission nationaux, indispensables à notre compréhension du système atmosphérique et à tout exercice de modélisation de la chimie atmosphérique ou de la qualité de l’air.

1.2.2.2 Réactions chimiques

Une réaction chimique représente la transformation de la matière : les espèces chimiques (réactifs) constituant la matière sont transformées en de nouvelles espèces chimiques (appe- lées produits de la réaction). La plupart des espèces émises dans l’atmosphère sont éliminées par des transformations chimiques. L’atmosphère est un milieu oxydant et ces transfor- mations conduisent donc, pour l’essentiel, à une oxydation progressive des éléments (par exemple, du carbone en CO2, de l’hydrogène en H2O, de l’azote en HNO3, du soufre en H2SO4). L’oxydant majeur de l’atmosphère est le dioxygène O2. Du point de vue des méca- nismes réactionnels, cette oxydation atmosphérique suit des chemins complexes, passant par de nombreuses étapes, notamment de catalyse, et impliquant une multitude d’espèces. Une description complète de l’ensemble de ces étapes est une tâche considérable. Les processus impliqués sont en effet de natures très diverses : oxydation radicalaire en phase gazeuse initiée par le rayonnement solaire, oxydation en phase aqueuse au sein des gouttelettes nuageuses, chimie hétérogène à la surface des aérosols (particules en suspension dans l’at- mosphère). De plus, ces transformations impliquent des échelles de temps (donc d’espace) extrêmement variables, de quelques fractions de seconde pour les espèces les plus réactives à plusieurs années pour les moins réactives.

La compréhension de l’évolution de la composition chimique de l’atmosphère est donc loin d’être aisée, cependant elle reste une étape indispensable dans l’étude de la qualité de l’air. En effet le temps de résidence dans l’atmosphère des gaz ou polluants émis à la surface, naturellement ou par l’activité humaine comme les oxydes d’azote, les composés halogénés ou les composés carbonés, dépend en premier lieu de la réactivité chimique de la troposphère. Ces composés peuvent alors réagir pour former des polluants dits secondaires (cf. section 1.3.2), par exemple l’ozone (cf. section 1.3.3), qui vont directement jouer un rôle sur la qualité de l’air, ou alors ils peuvent également, après avoir été transporté, jouer un rôle notable dans la chimie stratosphérique et déterminer en partie le climat de la planète en contribuant à son bilan radiatif.

1.2.2.3 Transport

Un autre processus jouant un rôle considérable dans la chimie atmosphérique, et la qua- lité de l’air, est le transport de polluants ou de leurs précurseurs. En effet, l’atmosphère est en mouvement permanent, gouvernée par trois forces principales : la gravité, la force de gradient de pression et la force de Coriolis. Ces mouvements sont capables de trans- porter des propriétés physiques ou chimiques d’un point à l’autre du globe, ces propriétés régissant l’évolution chimique de l’atmosphère. Ainsi, le transport pilote les réactions des espèces chimiques atmosphériques : en absence de transport, la composition chimique de l’atmosphère tendrait vers un équilibre photochimique, où production et destruction locales

des espèces s’équilibreraient.

De plus, le transport et l’évolution chimique dans l’atmosphère forment une boucle rétroactive. En effet, les temps de réactions chimiques sont, en partie, déterminés par la pression et la température, elles-mêmes soumises au transport. La distribution des espèces chimiques est donc fortement conditionnée par les processus de transport, et en retour, la distribution de ces espèces chimiques atmosphériques et leurs caractéristiques radiatives vont impacter à leur tour les processus de transport.

Le transport s’effectuant dans la couche limite convective atmosphérique est turbulent le jour, et va fortement brasser l’air à petites échelles, contribuant à la dilution des polluants. Les espèces chimiques transportées dans la troposphère libre, voire même dans la strato- sphère, vont pouvoir être transportées sur des grandes échelles. C’est grâce, ou à cause, de ce transport à grande échelle que des polluants peuvent être retrouvés loin de leurs sources d’émission, si bien que les émissions dans une région peuvent provoquer des impacts en- vironnementaux dans une autre région plus éloignée. Le transport à longue distance rend complexe les efforts réalisés pour contrôler la pollution dans l’air, car il est parfois hasar- deux de distinguer les effets causés par des sources locales de ceux causés par des sources lointaines, rendant donc difficile de déterminer qui doit supporter les coûts de réduction des émissions. Du fait du transport à longue distance, la qualité de l’air est l’affaire de tous. 1.2.2.4 Dépôt

Enfin, le dernier processus participant à la dynamique de l’évolution chimique de l’atmo- sphère est le dépôt. Le dépôt, comme son nom l’indique, regroupe les processus permettant à la matière en suspension dans l’air et de certaines espèces chimiques gazeuses de former un dépôt, et de se retrouver ainsi sur la surface. Ces dépôts participent alors à l’enrichisse- ment ou à la pollution de l’éco-système en intégrant par exemple la chaîne alimentaire.

Le dépôt peut se produire soit par absorption ou captation directe à partir de réaction biochimique, comme la photosynthèse, soit également lors de phénomènes de condensation (dit processus de lessivage), tels que la pluie, la rosée, ou le givre. Les dépôts d’origine aérienne ou pluviale ainsi constitués, s’ils sont souvent discrets, peuvent localement lorsqu’ils sont chroniques (près de certaines industries polluantes, ports, mines, sources importantes de pollution routière, ou de zone d’agriculture intensive) être parfois une source majeure de pollution. Les quantités ainsi déposées par l’atmosphère participent significativement à la contamination des sols ou de l’eau, et donc de la biosphère. Les dépôts secs peuvent également, par ré-envol, se retrouver à nouveau dans l’atmosphère.