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Étude de l’impact de la polarisation sur les résultats de l’inversion de données

Nous avons vu dans la section 2.4 que le concept instrumental MAGEAQ contenait un scrambler afin d’enlever la polarisation du rayonnement. En effet, le rayonnement, en par- ticulier le visible, en sortie de l’atmosphère est partiellement polarisé du fait des diffusions qu’il a subi lors de son parcours et de sa réflexion sur la surface terrestre. De plus, il est couramment admis que la composante circulaire, V, du rayonnement sortant de l’atmo- sphère est nulle. Le rayonnement en entrée de l’instrument à bord du satellite est donc partiellement polarisé rectilignement, et il va interagir avec les différents éléments optiques de l’instrument lors de la traversée de ce dernier, avant d’être mesuré par le capteur. Or, les éléments optiques sont sensibles à la polarisation lumineuse et conduisent ainsi à une variation d’intensité lumineuse mesurée. L’ajout d’un scrambler en entrée de l’instrument permet de s’affranchir de ces perturbations des mesures, en filtrant la polarisation. Cepen- dant, un scrambler n’est pas parfait et laisse passer une partie du rayonnement polarisé, plus ou moins grande en fonction de la qualité du scrambler. Le coût du scrambler étant propor- tionnel à la qualité de ce dernier, il peut souvent représenter une fraction non-négligeable du coût total de l’instrument si l’on souhaite filtrer drastiquement la polarisation.

Nous avons ainsi réalisé une étude sur l’impact de la polarisation, dans la bande visible, sur notre instrument simulé, pour déterminer quelle qualité l’instrument devait atteindre, vis à vis de la polarisation, pour que les mesures avec la bande visible permettent d’ajouter une information non négligeable à la mesure de l’ozone pour la qualité de l’air (c’est à dire pour la couche entre 0 et 1 km d’altitude).

Airbus Defence and Space nous a fourni le modèle nous donnant les radiances polarisées mesurées par l’instrument (Ip) en fonction des vecteurs de Stokes I, Q et U (la composante

circulaire V = 0) et du taux de polarisation lié à l’instrument p : Ip(λ) = I(λ)− ( � Q(λ)2+ U (λ)2× p 1 + p) + (Q(λ)× p 1 + p) (2.15)

où λ représente la longueur d’onde, entre 520 et 650 nm.

Les vecteurs de Stokes nous sont donnés par VLIDORT, pour chaque pixel de l’image, sur la grille MOCAGE (8000 pixels), à inverser. Cependant, nous rappelons que la modéli- sation ne prend pas en compte ni les aérosols, ni les nuages, et que la surface est considérée comme lambertienne. Ainsi la polarisation en sortie de l’atmosphère ne dépendra que de l’angle d’observation de la cible et du soleil, de la réflexion lambertienne à la surface, et de la diffusion Rayleigh dans l’atmosphère.

Pour l’inversion de données nous considérons que le modèle, calculant les radiances po- larisées mesurées par l’instrument, est parfaitement connu, et que le taux de polarisation liée à l’instrument, p, est également connu. Seul demeure une incertitude sur la polarisation rectiligne en sortie de l’atmosphère, c’est à dire une incertitude sur les vecteurs de Stokes

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2.6. ÉTUDE DE L’IMPACT DE LA POLARISATION SUR LES RÉSULTATS DE L’INVERSION DE DONNÉES

Q et U. Ces deux vecteurs de Stokes, dans la bande visible de notre étude entre 520 et 650 nm, sont modélisés par des polynômes d’ordre 2 (cf. Fig. 2.12). Les coefficients de ces polynômes, sur les vecteurs de Stokes Q et U, sont inversés simultanément avec le profil d’ozone, le profil de vapeur d’eau, le profil de température et les coefficients du polynôme de l’albédo de surface, lors de l’inversion de données (cf. section 2.5). L’a priori et la matrice de covariance d’erreur de l’a priori, pour les coefficients du polynôme sur Q (et respectivement U), sont choisis en prenant comme a priori le polynôme moyen sur l’image inversée, et la matrice de covariance d’erreur associée.

Figure 2.12 – Représentation d’un exemple des vecteurs de Stokes normalisés (Q

I et UI),

en fonction de la longueur d’onde, obtenus avec le RTM VLIDORT. En rouge sont tracées les interpolations polynômiales d’ordre 2 correspondantes.

Nous avons alors considéré 5 cas d’études différents :

— Le premier cas considère uniquement la bande TIR de l’instrument simulé, et ne prend donc pas en compte la bande visible et la polarisation. Ce cas nous sert ainsi de référence pour évaluer par la suite l’apport de la bande visible en fonction du taux de polarisation instrumental considéré.

— Le second cas utilise les bandes TIR et VIS de l’instrument, et considère un taux de polarisation instrumental p = 5 %, ce qui correspond à un instrument « standard », d’après Airbus Defence and Space.

— Le troisième cas utilise les bandes TIR et VIS de l’instrument, et considère un taux de polarisation instrumental p = 1 %, ce qui correspond à un instrument pour lequel un revêtement de surface spécifique a été appliqué sur les optiques.

— Le quatrième cas utilise les bandes TIR et VIS de l’instrument, et considère un taux de polarisation instrumental p = 0, 3 %, ce qui correspond à un instrument « standard », et en considérant l’ajout d’un scrambler.

— Enfin, le cinquième cas utilise les bandes TIR et VIS de l’instrument, et considère un taux de polarisation instrumental p = 0, 1 %, ce qui correspond à un instrument pour lequel un revêtement de surface spécifique a été appliqué sur les optiques, et en considérant l’ajout d’un scrambler.

Pour ces différents cas d’études, nous avons réalisé l’inversion d’une image « MOCAGE », prise arbitrairement pour la journée du 7 Juillet 2009 à 15h. Nous avons alors étudié, pour chaque pixel, les résultats de l’inversion de l’ozone dans la couche entre 0 et 1 km d’al- titude. En particulier nous avons tracé pour chaque image la corrélation, et l’écart-type, entre l’ozone inversé (c’est à dire l’ozone mesuré par l’instrument) et l’ozone vrai (c’est à dire l’ozone tel que simulé par le modèle MOCAGE, nous servant de réalité). Les résultats pour chaque cas d’étude sont donnés dans le tableau 2.3

Table 2.3 – Corrélation et écart-type obtenus, entre l’ozone inversé et l’ozone vrai, dans la couche entre 0 et 1 km d’altitude, pour les différents cas d’études sur l’impact du taux de polarisation instrumental. Plus de détails sur les différents cas d’études sont disponibles dans le texte.

Cas d’étude 1 Cas d’étude 2 Cas d’étude 3 Cas d’étude 4 Cas d’étude 5

p / 5 % 1 % 0,3 % 0,1 %

Corrélation 0,65 0,72 0,77 0,77 0,77

Ecart-type 10,03 10,67 9,88 9,57 9,51

Ces résultats nous montrent tout d’abord que quelque soit le niveau du taux de polari- sation de l’instrument (entre 5 % et 0,1 %), l’ajout de la bande VIS, par rapport à la bande TIR seule (cas d’étude 1), permet d’améliorer la corrélation. De plus, à part pour un taux de polarisation instrumental de 5 % (cas d’étude 2), l’écart-type est également amélioré. Enfin, le gain en corrélation et en écart-type, entre le cas d’étude 3 et le cas d’étude 4, est relativement faible, et est presque inexistant entre le cas d’étude 4 et le cas d’étude 5. Ainsi, on peut en déduire que l’utilisation de l’instrument dans le cas d’étude 3, c’est à dire d’un instrument pour lequel un revêtement de surface spécifique a été appliqué sur les optiques, est suffisant pour apporter l’essentiel de la contribution de la bande VIS lors de l’inversion. Il n’est donc pas forcément nécessaire d’utiliser un scrambler.

Cependant ces résultats doivent être pris avec précaution, car ils ne sont valides que dans le cadre des hypothèses qui ont été faites pour la simulation des mesures instrumentales et l’inversion de données. En effet, du fait des hypothèses prises dans la modélisation des vecteurs de Stokes en sortie de l’atmosphère (on ne prend pas en compte les aérosols, ni les nuages, et les surfaces sont supposées lambertiennes), cela conduit à sous-estimer la polari- sation du rayonnement en sortie de l’atmosphère. De plus, lors de l’inversion de données, on

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2.6. ÉTUDE DE L’IMPACT DE LA POLARISATION SUR LES RÉSULTATS DE L’INVERSION DE DONNÉES

considère avoir une connaissance parfaite du taux de polarisation instrumental et du mo- dèle calculant les radiances polarisées mesurées par l’instrument. On ne considère qu’une incertitude sur les vecteurs de Stokes Q et U. Il faudrait donc améliorer la modélisation pour pouvoir mieux prendre en compte l’impact réel de la polarisation sur l’instrument.

Dans la suite de ce travail de thèse, nous nous placerons dans un cas où l’on suppose avoir un scrambler parfait (c’est à dire qui annule complètement la polarisation) qui nous permet ainsi de nous affranchir des perturbations liées à la polarisation.

2.7 Conclusions du chapitre

En conclusion, nous avons pu voir à travers ce chapitre le détail de la chaîne de mo- délisation réalisée pour simuler les observations synthétiques d’un instrument, à bord d’un satellite géostationnaire, couplant une bande dans le visible et dans l’infrarouge thermique, dans le but de mesurer l’ozone, pour la qualité de l’air.

Nous avons ainsi tout d’abord vu le rôle du modèle de chimie transport MOCAGE qui nous a permis de créer une atmosphère « vraie » la plus proche possible de la réalité. En notant au passage les deux première hypothèses faites durant ce travail de thèse : on ne prend pas en compte ni les nuages, ni les aérosols.

Dans un deuxième temps, nous nous sommes intéressés aux modèles de transfert radiatif, KOPRA et VLIDORT, qui nous ont permis de calculer à partir de l’atmosphère « vraie » les radiances, dans l’infrarouge thermique et le visible, qui arrivent jusqu’à l’instrument à bord du satellite géostationnaire. À nouveau des hypothèses ont été réalisées, en particulier pour la bande visible, les surfaces sont considérées comme lambertiennes et ne sont représentées que par un albédo spectral modélisé par un polynôme d’ordre 3. Ce polynôme ne permet ainsi pas de prendre en compte les signatures spectrales liées par exemple à la végétation.

Dans un troisième temps, nous avons décrit le modèle instrumental utilisé, qui nous permet de passer des radiances en sortie de l’atmosphère aux radiances mesurées par l’ins- trument. Le modèle instrumental ne dépend que de la bande spectrale, de la résolution spectrale, et du rapport signal sur bruit de l’instrument. Nous avons également vu que l’on ajoutait à l’instrument un scrambler qui nous permettait ainsi de réduire les effets de la polarisation. L’impact de la polarisation a fait d’ailleurs l’objet d’une étude à la fin du chapitre.

Enfin, nous avons détaillé l’algorithme d’inversion de données utilisé, et comment nous avons crée le vecteur d’état et l’a priori pour l’inversion de données. Nous avons ainsi vu que sont considérés, dans l’inversion de données, l’inversion simultanée des profils d’ozone, de vapeur d’eau et de température, ainsi que les coefficients du polynôme de l’albédo spectral. En effet, ces paramètres sont les plus sensibles dans les deux bandes considérées (TIR et VIS). Tous les autres paramètres sont supposés (suffisamment bien) connus, et sont pris égaux à leurs valeurs « vraies » pour qu’ils n’interfèrent pas dans l’inversion de données. De plus, dans le processus de l’inversion de données, la chaîne de modélisation permet- tant d’obtenir les radiances « mesurées » est la même que celle permettant d’obtenir les radiances « calculées », on considère ainsi que l’on a une connaissance parfaite des proces- sus impactant le rayonnement dans l’atmosphère et de l’instrument de mesure. Enfin, nous avons également vu que l’inversion de données est coûteuse en temps de calcul et que pour réduire la consommation d’heures de calcul nous avons dû nous restreindre dans l’inversion d’images, prises par notre instrument simulé, avec un champ de vue et une résolution spa- tiale réduits.

108 2.7. CONCLUSIONS DU CHAPITRE

la polarisation, dans la bande visible, sur l’inversion de données d’ozone entre 0 et 1 km. Nous avons ainsi vu que l’information apportée par le VIS, pour la mesure de l’ozone entre 0 et 1 km, est loin d’être négligeable, comparé au TIR seule, car le VIS permet de gagner jusqu’à 0,12 en corrélation et de diminuer l’écart-type de 0,5 ppbv (soit environ 5 %). Ce- pendant le VIS est sensible à la polarisation, et peut ainsi donner de moins bons résultats si l’inversion est perturbée par la polarisation. Ainsi, dans notre étude, nous avons montré qu’en prenant un instrument avec un taux de polarisation de 1 %, ce qui correspond à un instrument pour lequel un revêtement de surface spécifique a été appliqué sur les optiques, on était capable d’extraire l’essentiel de l’information apportée par la bande visible.

Ce simulateur d’observations synthétiques aura été également utilisé pour réaliser deux autres études, présentées respectivement dans le chapitre 3 et 4.

Chapitre 3

Intercomparaison entre GEO TIR et

GEO TIR+VIS

Sommaire

3.1 Résumé long de l’article 1 . . . 112