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La « mission de régulation », une clause de compétence largement interprétée

Une acception hybride des autorités de régulation. Dans son rapport consacré aux

autorités administratives indépendantes, le Conseil d’État avait identifié deux acceptions possibles des autorités de régulation. Selon la première acception, « plus précise, plus neutre et

plus aisément assimilable par nos traditions juridiques »475 précise -t- il, l’autorité de régulation est un « intermédiaire entre le pouvoir qui fixe les règles et les opérateurs sur le

terrain » qui « se consacre au contrôle du respect des textes et, en cas de manquements marqués, engage immédiatement les procédures nécessaires pour les faire appliquer »476. Sous cette première acception, apparaît l’image d’une autorité de régulation « désincarnée », car dénuée de volonté propre et se bornant à appliquer mécaniquement (l’usage du terme « immédiatement » étant, à cet égard, significatif) les règles posées par le législateur et/ou le gouvernement. Selon la deuxième acception, davantage « politique », l’autorité de régulation aurait moins pour fonction de « qualifier des faits par rapport à des normes préétablies et

d’aboutir au respect de celles-ci par la sanction, que de chercher par tous moyens à susciter des standards de comportement dictés par l’observation attentive de la réalité et une capacité de réaction rapide et proportionnée aux déviances constatées »477. Sous cette seconde acception, apparaît l’image d’une autorité de régulation « émancipée », car dotée d’une forme de libre arbitre lui permettant de hiérarchiser les priorités et de choisir les instruments dont elle entend faire usage. La Haute juridiction relève que cette seconde acception est souvent défendue – ou devrait l’être ? – pour le secteur économique.

Or, le choix entre l’une ou l’autre de ces deux acceptions n’est pas purement théorique ; ce choix a des incidences bien tangibles sur le droit positif. L’étendue des pouvoirs du régulateur

475 Conseil d’État, Les autorités administratives indépendantes, rapport public pour 2001, La documentation française, p. 280

476 Ibid.

varie en effet sensiblement selon le modèle retenu. En particulier, dans la seconde acception, qui correspond plutôt au modèle anglo-saxon, le régulateur « doit se voir doter de l’ensemble

des pouvoirs qui lui sont nécessaires pour assurer sa mission »478 tandis que la première implique de restreindre le pouvoir de décision générale de l’autorité479, autrement dit d’exclure tout pouvoir discrétionnaire dans l’exercice d’une compétence réglementaire. Le Conseil d’État note que le modèle français privilégie plutôt la première définition, tout en « s’inspirant » parfois de la seconde. Cette hybridation des modèles – qui nous paraît davantage résulter d’une construction empirique que d’une réelle réflexion sur la place des ARI dans le système constitutionnel français – se répercute sur la clarté du cadre juridique de la régulation. Plus précisément, est laissée flottante la question de la marge de manœuvre dont doivent disposer les ARI pour l’accomplissement de leur mission.

Dans la dernière décennie, il convient néanmoins de remarquer la tendance nette du Conseil d’État à revendiquer le choix de la seconde acception et des conséquences contentieuses qui en découlent. Dans un arrêt du 30 novembre 2007, la section du contentieux énonce « qu’il

appartient à une autorité administrative indépendante qui dispose en vertu de la loi d’un pouvoir de sanction qu’elle exerce de sa propre initiative et dont l’objet ne se borne pas à punir certains comportements mais consiste, eu égard notamment à la nature des mesures susceptibles d’être prononcées, à assurer la sécurité d’un marché, de décider, lorsqu’elle est saisie par un tiers de faits de nature à motiver la mise en œuvre de ce pouvoir, et après avoir procédé à leur examen, des suites à donner à la plainte ; qu’elle dispose à cet effet d’un large pouvoir d’appréciation et peut tenir compte de la gravité des manquements allégués au regard de la législation ou de la réglementation qu’elle est chargée de faire appliquer, du sérieux des indices relatifs à ces faits, de la date à laquelle ils ont été commis, du contexte dans lequel ils l’ont été et, plus généralement, de l’ensemble des intérêts généraux dont elle a la charge ; que la décision qu’elle prend, lorsqu’elle refuse de donner suite à la plainte, a le caractère d’une décision administrative qui peut être déférée au juge de l’excès de pouvoir ; que les personnes qui interviennent sur le marché soumis au contrôle de l’autorité justifient d’un intérêt leur donnant qualité pour contester cette décision ; qu’il appartient au juge de censurer celle-ci en

478 Ibid.

cas d’erreur de fait ou de droit, d’erreur manifeste d’appréciation ou de détournement de pouvoir »480.

La solution a depuis été régulièrement réitérée, par des formules souvent plus générales et condensées. Il a ainsi été jugé « qu’une autorité administrative indépendante chargée de

missions de contrôle et de régulation dispose d’un large pouvoir d’appréciation dans la mise en œuvre des prérogatives qui lui sont conférées par la loi à l’égard des opérateurs qui manquent à leurs obligations (…) »481 ou encore « qu’une autorité administrative indépendante

qui dispose, en vertu de la loi, de pouvoirs de contrôle et de sanction qu’elle exerce de sa propre initiative de procéder, lorsqu’elle est saisie d’une demande tendant à la mise en œuvre de ses pouvoirs, à l’examen des faits qui sont à l’origine de cette demande et de décider des suites à lui donner. Elle dispose, à cet effet, d’un large pouvoir d’appréciation et peut tenir compte de l’ensemble des intérêts généraux dont elle a la charge »482. Avant 2007, les formules utilisées par le Conseil d’État n’atteignaient pas ce niveau de généralité. Surtout, la solution dégagée s’applique seulement et spécifiquement aux autorités administratives indépendantes chargées de mission de régulation ; elle ne vaut pas pour toute autorité administrative investie d’un pouvoir de sanction.

Cette solution emporte deux séries de conséquences. D’une part, sur le terrain de la recevabilité du recours, la décision de refus prise à la suite d’une demande faite à l’ARI de faire usage de ses prérogatives présente le caractère d’une décision susceptible d’être contestée devant le juge de l’excès de pouvoir483. Les opérateurs tiers intervenant sur le marché surveillé par l’autorité

480 CE, Sect., 30 novembre 2007, M. Tinez, n°293952. Pour une application à l’ARCEP, v. CE, 4 juillet 2012,

A.F.O.R.S.T., n°334062

481 CE, 7 février 2017, M. B, n°388621

482 CE, 7 décembre 2016, SCI Nefertari, n°390062. Pour une formulation légèrement différente, toujours à propos de l’Autorité de contrôle prudentiel : CE, 9 octobre 2013, SELAFA MJA, n°359161 : « Considérant qu’il

appartient à une autorité administrative indépendante investie d’une mission de régulation, qui dispose en vertu de la loi de pouvoirs de contrôle et de police, qu’elle exerce de sa propre initiative et dont l’objet consiste à assurer la sécurité d’un marché, de procéder, lorsqu’elle est saisie d’une demande tendant à la mise en œuvre de ses pouvoirs, à l’examen des faits qui en sont à l’origine et de décider des suites à leur donner ; qu’elle dispose à cet effet d’un large pouvoir d’appréciation et peut tenir compte de l’ensemble des intérêts généraux dont elle a la charge ; que la décision qu’elle prend, lorsqu’elle refuse de donner suite à la demande, peut être déférée au juge de l’excès de pouvoir ».

disposent d’un intérêt leur donnant qualité pour agir contre une telle décision. D’autre part, concernant l’intensité et le périmètre du contrôle du juge administratif, ce dernier limite les cas d’ouverture de sa censure à l’inexactitude matérielle des faits, à l’erreur de droit, à l’erreur manifeste d’appréciation et au détournement de pouvoir. Ainsi, s’il rend grâce au large pouvoir d’appréciation des autorités de régulation indépendantes, le juge administratif n’y prête pas pour autant allégeance dès lors qu’il exerce un contrôle sur la décision par laquelle elles refuseraient d’user des prérogatives mises à leur disposition par le législateur.

Même en dehors de la procédure de sanction, les juges du Palais royal reconnaissent le large pouvoir d’appréciation des ARI. Ainsi, par exemple, lorsque le CSA est saisi par un opérateur d’une demande de lancement d’un appel à candidature pour l’attribution d’une fréquence, le Conseil d’État estime que les dispositions de la loi de 1986 ne font pas obstacle à ce que le CSA « dans l’exercice du pouvoir de régulation que la loi lui reconnaît et compte tenu des marges

d’appréciation dont il dispose »484, focalise prioritairement des moyens de recherche des fréquences disponibles aux zones géographiques qu’il a lui-même préalablement identifiées comme étant prioritaires dans un document de travail. Dans la même logique, il a jugé que dans le cadre de son pouvoir d’attribution des autorisations d’utilisation des fréquences radioélectriques, il appartient à l’ARCEP de « définir la méthodologie afférente au contrôle des

conditions tenant au calendrier de déploiement précisées dans les décisions d’autorisation qu’elle délivre sur ce fondement aux opérateurs de communications électroniques » et que « la décision que prend dans ces conditions l’Autorité, qui dispose à cet effet d’un large pouvoir d’appréciation, a le caractère d’une décision administrative que le juge de l’excès de pouvoir peut annuler en cas d’erreur de fait ou de droit, d’erreur manifeste d’appréciation ou de détournement de pouvoir »485. En l’espèce, il en déduit que, dans la mesure où le Code des postes et télécommunication se borne à définir les conditions qui doivent être précisées dans la décision d’autorisation délivrée par l’ARCEP à un opérateur, l’invocation des dispositions du Code à l’encontre de la méthodologie définie par cette dernière en vue de contrôler le respect de ces conditions est inopérante. La Haute juridiction administrative semble ainsi stabiliser et systématiser sa jurisprudence, tout en alignant les solutions dégagées dans le cadre des fonctions administratives et contentieuses des ARI.

484 CE, 30 juin 2017, Association Oxygène, n°396842

Un pouvoir décisionnel subsumé. A partir des années quatre-vingt-dix, et

particulièrement dans le courant des années deux mille, une tendance à la multiplication des textes autorisant les autorités de régulation indépendantes à agir par la voie du droit souple s’est développée486. A la question de savoir si, à défaut d’un tel texte, ce mode d’action leur est proscrit, la réponse apportée par le Professeur Gaudemet est que « la part de pouvoir

discrétionnaire qui accompagne – peu ou prou – l’exercice de chaque compétence administrative inclut généralement l’appréciation du contexte et du moment de l’acte, et donc l’opportunité d’agir par voie de décision ou, au moins dans un premier temps, de procéder de façon informelle, sans décision obligatoire »487. Cette présentation nous semble néanmoins réductrice, en ce sens qu’elle tendrait à dissoudre le droit souple des ARI dans la catégorie des actes préparatoires. La compétence d’adopter des actes de droit souple ne saurait être adossée à celle de préparer sa décision, ne serait-ce que parce que certaines autorités de régulation économique ne sont pas dotées du pouvoir réglementaire. Par conséquent, il est illogique de considérer que leur compétence d’adopter des actes de soft law trouve nécessairement son fondement dans celle de préparer une décision qu’elles n’auraient parfois, en tout état de cause, pas le pouvoir d’édicter. En outre, dans le cas où l’ARI dispose d’un pouvoir normatif, cette justification présente le défaut de masquer l’idée qu’en « préférant l’édiction d’un acte non

obligatoire, telle ou telle autorité manifeste surtout une volonté de ne pas lier ses destinataires, volonté qui se manifeste dans la prise d’un acte en dehors des procédures normatives

486 Pour la CNIL : L’article 11-4 de la loi n°78-17 du 6 janvier 1978 modifié par la loi n°2004-801 du 6 août 2004 prévoit en son avant-dernier alinéa que « pour l’accomplissement de ses missions, la Commission peut procéder

par voie de recommandation et prendre des décisions individuelles et réglementaires dans les cas prévus par la présente loi » - Pour le CSA, l’article 3-1 modifié de la loi n°86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté

de communication prévoit depuis 2004 que le CSA peut adresser des recommandations aux éditeurs et distributeurs de services de communication audiovisuel « relatives au respect des principes énoncés dans la présente loi » - Pour l’AMF : L’article L. 621-6 du Code monétaire et financier énonce que l’AMF peut « publier des instructions

et des recommandations aux fins de préciser l’interprétation du règlement général ». Cette compétence existait

dès 2001, sous l’empire de la Commission des opérations de bourse. – Pour l’ACP-R, l’article L. 612-29-1, alinéa 2, du Code monétaire et financier, dispose que l’Autorité peut « formuler des recommandations définissant des

règles de bonne pratique professionnelle en matière de commercialisation et de protection de la clientèle ». – Pour

l’ARJEL, l’article 34, IV, de la loi n°2010-476 du 12 mai 2010 relative à l’ouverture à la concurrence et à la régulation du secteur des jeux d’argent et de hasard en ligne énonce que l’Autorité peut adresser des recommandations aux opérateurs agréés en matière de prévention du jeu excessif ou pathologique.

classiques »488. Plutôt qu’une compétence dérivée d’adopter des actes de droit souple (compétence qui dériverait donc du pouvoir réglementaire), c’est d’une compétence implicite – inférée de la mission de régulation – dont les ARI bénéficient.

Cette compétence implicite d’adopter des actes informels s’est d’ailleurs épanouie sous le regard bienveillant du juge administratif. Même lorsque le législateur s’est abstenu d’attribuer expressément la compétence d’adopter des actes de droit souple, le Conseil d’État considère que cette compétence doit « être présumée en raison de la mission générale confiée à l’AAI »489. Ainsi, « une sorte de clause générale de compétence normative souple habilite les AAI/ARI non

seulement à qualifier certaines de leurs interventions d’actes de droit souple, mais encore à en prévoir les modalités d’élaboration »490. Ces actes, destinés à compléter et à affiner la législation en vigueur, se voient ainsi confortés par l’interprétation extensive du juge qui reconnaît volontiers « l’existence d’une compétence implicite afin d’étendre le champ

d’intervention des régulateurs et, par-là, celui de son propre contrôle »491.

Suivant cette logique, le Conseil d’État a ainsi estimé que l’ARCEP était compétente pour édicter des lignes directrices relatives au partage des réseaux mobiles, en application de l’article L. 34-8-1-1 du CPCE492. Cet article issu de la loi Macron du 6 août 2015 dispose que « le

partage des réseaux radioélectriques ouverts au public fait l’objet d’une convention de droit privé entre opérateurs titulaires d’une autorisation d’utilisation de fréquences radioélectriques pour établir et exploiter un réseau ouvert au public. Cette convention détermine les conditions techniques et financières de fourniture de la prestation, qui peut porter sur des éléments du réseau d’accès radioélectrique ou consister en l’accueil sur le réseau d’un des opérateurs de tout ou partie des clients de l’autre (…) / La convention est communiquée, dès sa conclusion, à l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes. Lorsque l’Autorité constate que cela est nécessaire à la réalisation des objectifs mentionnés à l’article L. 32-1 ou au respect des engagements souscrits au titre des autorisations d’utilisation de fréquences radioélectriques par les opérateurs parties à la convention, elle demande, après avis de

488 Benjamin LAVERGNE, Recherche sur la soft law en droit public français, Thèse, Presses de l’Université Toulouse 1 Capitole, 2013, p. 190

489 Conseil d’État, rapport public pour 2013 préc., p. 162

490 Dominique CUSTOS, préc., p. 493

491 Jean-Pierre DUPRAT, « La soumission des régulateurs et à la régulation », AJDA 2006, p. 1203

l’Autorité de la concurrence, la modification des conventions déjà conclues, en précisant leur périmètre géographique, leur durée ou les conditions de leur extinction (…) ». En l’espèce, les

lignes directrices dont la légalité était contestée avaient pour objet de guider les opérateurs dans la conclusion de leurs accords de partage de réseaux mobiles afin que ces derniers soient conformes aux objectifs de la régulation et aux engagements figurant dans les autorisations dont les opérateurs bénéficient. Après avoir admis la recevabilité du recours dirigé contre ces lignes directrices, la Haute juridiction rejette l’argument de la société requérante selon lequel l’ARCEP aurait dû agir par voie réglementaire. Elle constate « qu’aucune disposition

législative ou réglementaire n’imposait à l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes d’adopter par voie réglementaire des règles encadrant le recours aux contrats de partage de réseaux mobiles », de sorte l’Autorité n’a pas méconnu l’étendue

de sa compétence en adoptant les lignes directrices susvisées.

Cette tendance est également perceptible en droit de l’Union européenne. La Cour de justice a entrepris d’élaborer une jurisprudence constructive destinée à « encadrer ce droit spontané »493

dont le développement s’est accéléré à mesure que prolifèrent les agences, et alors « qu’aucune

base juridique dans les traités ne prévoit leur existence ni a fortiori ne leur octroie de pouvoir décisionnel ou normatif »494. Dans l’arrêt Royaume-Uni c. Parlement européen et Conseil, la Cour a ainsi admis la légalité de l’attribution par le législateur de l’Union d’un pouvoir de décision générale à l’Autorité européenne des marchés financiers, qui trouve son fondement dans les « pouvoirs d’intervention » dont certaines instances de régulation devraient bénéficier lorsqu’elles « disposent d’un haut degré d’expertise professionnelle et collaborent de

manière étroite »495 à la réalisation d’objectifs d’intérêt général économique, tel que la stabilité financière internationale. Il ressort clairement des termes de cet arrêt que l’attribution d’un pouvoir décisionnel à l’AEMF préserve le régime de délégation prévu par le TFUE – qui réserve à la Commission la compétence déléguée d’adopter des actes d’exécution et des actes destinés à compléter la législation – dès lors que ce pouvoir relève d’un domaine « exigeant

493 Brunessen BERTRAND, « La compétence des agences pour prendre des actes normatifs : le dualisme des pouvoirs d’exécution », RTDE, janvier-mars 2015, p. 21

494 Ibid.

495 Jean-Claude BONICHOT, « A propos de l’attribution du pouvoir réglementaire à l’Autorité européenne des marchés financiers », note sur CJCE, 22 janvier 2014, Royaume-Uni c/ Parlement européen et Conseil, C-270/12,

l’articulation d’une expertise professionnelle et technique spécifique »496. Par une lecture téléologique et globalisante de la disposition du règlement en cause dans cette affaire, la Cour présente donc ce pouvoir décisionnel comme étant inhérent au système de régulation financière mis en place par le législateur497. S’il est ici question de droit « dur » et non de droit « souple », la motivation exposée nous semble a fortiori transposable lorsque les agences de l’Union entreprennent de compléter la législation existante par des actes simplement indicatifs. Une logique similaire imprègne la jurisprudence du Conseil d’État. A propos du CSA, il a considéré, après avoir constaté qu’aux termes de l’article 13 de la loi du 30 septembre 1986 le législateur a dévolu « à l’autorité de régulation la mission d’assurer la garantie, dans les médias

audiovisuels, de l’objectif de valeur constitutionnelle de pluralisme des courants de pensée et d’opinion, notamment politiques », que cette autorité « est tenue d’exercer pleinement sa mission, en veillant au respect de cet objectif par les services de radio et de télévision selon des modalités qu’il lui incombe, en l’état de la législation, de déterminer ; qu’elle dispose, à cette fin, d’un large pouvoir d’appréciation pour fixer, sous le contrôle du juge de l’excès de pouvoir, les règles propres à assurer une présentation équilibrée de l’ensemble du débat politique national »498.

Ainsi, la mission générale de régulation confiée par le législateur à une autorité administrative indépendante habilite implicitement cette dernière, dans le silence des textes, à définir les règles qui s’imposeront aux opérateurs pour atteindre ses objectifs. L’incise « en l’état de la

législation » tend à souligner qu’il s’agit néanmoins d’une compétence déléguée et non d’une

compétence propre ; le législateur peut par conséquent mettre fin à cette délégation à tout moment. Un raisonnement similaire inspire la jurisprudence de la Cour d’Appel de Paris.

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