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UNE MISSION BIEN IDENTIFIÉE POUR LES INSTITUTEURS L A CAMPAGNE , UNE PLACE ASSIGNÉE PAR LA P ROVIDENCE

Dans le document Vocation: régent, institutrice - RERO DOC (Page 158-165)

La mission politique assignée à l’École normale permet de saisir la portée générale de la formation des instituteurs organisée par les soins du DIP. Les attentes explicites des pouvoirs politiques, leurs préoccupations et les moyens mis en œuvre donnent exactement la direction dans laquelle doit s’engager l’institution et indiquent le rôle social qu’auront à jouer les instituteurs.

Le régent est pauvre de naissance, puis par vocation. Mais il est indéniablement maintenu dans cet état par les volontés conjuguées du gouvernement et du parlement qui s’accordent totalement sur cet objet. Pourtant, son instruction, supérieure pour les campagnes, eût pu lui faire espérer une meilleure position matérielle : rien n’y fait. Il reste confiné à la population rurale et à la vocation agricole de son canton. Cette vie ne se discute pas, ne se modifie pas. L’école est là pour confirmer le peuple de suivre la voie naturellement assignée par la Providence, et pour le convaincre de l’inutilité des connaissances propres au développement industriel que connaissent les gens des villes. L’État se fait un devoir de le rappeler et de souligner cet aspect de la mission des institutrices et des régents :

Il incombe à l’État le devoir d’élever le peuple au degré d’instruction indispensable au genre de vie que la Providence lui a assigné. C’est assez dire l’inadmissibilité d’un système qui voudrait placer tous les cantons au même niveau en matière d’instruction publique et formuler à cet égard les mêmes exigences pour des populations essentiellement agricoles et habitant les campagnes, que pour celles qui se vouent à l’industrie et habitent les villes. Des

connaissances, indispensables à ces dernières, ne seraient qu’un fardeau inutile pour les premières. Nous sommes toutefois bien loin de prétendre par là que l’industrie doive être bannie de notre canton, au contraire […] ; seulement,

[l’État] n’élargira pas le cadre de l’instruction obligatoire au point de pousser tout notre peuple hors de la voie qui lui a été naturellement tracée (RG CE, DIP, 1878, p. 2).

Les propos sont éloquents, mais ils ne sont pas exceptionnels. Ainsi que le rappelle Hameline (1986, pp. 41-52), le 19e siècle fut éducateur. Ceux qui en

contrôlent les pouvoirs chargés de mettre en œuvre la politique éducative aux intentions fondamentalement inégalitaires se sont posé la question : jusqu’où faut-il instruire le peuple ? La montée des masses obsède les autorités.135 L’instruction joue

un rôle de régulateur social dans le conflit opposant libéraux et conservateurs, en Valais, mais aussi ailleurs, à Genève136 ou en France137. Certes, il faut instruire, mais

pour mieux consolider l’ordre établi:

Ne refusez pas l’instruction aux masses, il vaut mieux partager à temps les privilèges que de se les voir arracher par la force. Et une éducation scolaire bien comprise, c’est-à-dire proportionnée aux besoins des classes sociales, loin d’être un danger pour l’ordre, ne peut que le consolider et instaurer la paix céleste

(Hameline, 1986, pp. 51-52).

Les instituteurs, formés à dessein, doivent par vocation se conformer à cette volonté. Et voici que, pour parfaire leur formation professionnelle, ceux du Valais s’assemblent en conférences autorisées par le DIP. Hélas, trop de formation nuit. Des idées se mettent à circuler. Elles ne sont pas destinées à la reproduction de l’ordre gouvernemental et mettent en danger la fonction sociale même du régent. Les députés conservateurs, soucieux de voir les deniers publics utilisés à bon escient, s’inquiètent de cette évolution politiquement contreproductive :

L’orateur a entendu des voix très autorisées se prononcer contre l’exagération de ces réunions. Des hommes d’État de ces cantons qu’on appelle avancés138 ont

trouvé qu’il pouvait y avoir danger, dans ces conférences, qu’on créait une classe de citoyens remuants139 qui peuvent devenir un danger dans l’État, un

péril pour la société, un classe d’hommes remplis de théories, mais qui ne connaissent pas assez la vie pratique (Bravos) (BGC, mai 1884, p. 64).

Une nouvelle polémique entre conservateurs et radicaux éclate, ceux-ci dénonçant ces déclarations élitaires et fustigeant le cercle vicieux dans lequel les régents sont enfermés : s’ils ont peu de connaissances, leur rémunération misérable les acquitte de tout souci de formation supplémentaire. En retour, leur faibles savoirs justifient leur salaire étriqué :

Vous sourirez quand l’on vous dira que certains régents de village ont un traitement de 250 fr. par an, pour faire entrer dans les cervelles rebelles de nos louveteaux montagnards, l’orthographe, l’arithmétique, l’histoire etc. […]

Quand on en fait l’observation, on vous répond bêtement : ils sont assez payés

135 Voir à ce propos Altermatt, 1994 ; Petitat, 1982a.

136 Voir à ce propos Hofstetter, 1998 ; Hofstetter & Périsset Bagnoud, 1998. 137 Petitat, 1982a.

138 Souligné dans le BGC.

pour ce qu’ils savent et les régents de répondre : nous en savons assez pour ce que l’on nous paye140 […].

Nos régents sont des campagnards, parce que les jeunes gens des villes haussent les épaules quand on leur parle d’École normale et d’enseignement. Ils se réservent une plus belle part dans les professions libérales ; ils veulent être notaires et nous en avons en Valais ! 250, quand il y en aurait trop de 50. Si les 200 autres s’adonnaient à l’éducation du peuple, quels services ils pourraient rendre ! (Gazette du Valais, 5.4.1893, p. 2)

L’École normale, le collège du pauvre, est au service de la masse. Les jeunes gens des villes et ceux de Sion en particulier ne s’y trompent pas. Ils n’y ont guère recours, préférant les positions plus avantageuses que leur naissance autorise. Aucune vocation d’instituteur chez les nantis. La leur est ailleurs. Remettre en cause la position sociale octroyée à chacun par la Providence légitimerait les revendications utopistes du socialisme et provoquerait un exode rural certain :

A quoi, du reste, servirait à ces enfants une instruction poussée aussi loin que dans les villes ? A leur inspirer le dédain de leur position sociale, le dégoût du travail des champs ; à les amener à abandonner leur village pour la ville où, la plupart, ils végéteraient dans la misère et dans le vice très souvent. L’homme aura beau faire, il y aura toujours inégalité dans l’instruction, comme dans les fortunes, et le socialisme égalitaire n’est pas moins une utopie dans le domaine de l’instruction que dans celui des biens matériels (Gazette du Valais, 13.7.1901, p. 2).

Les formations différentes s’imposent, dès lors, naturellement : les instituteurs, voués au peuple, s’instruiront selon les besoins déterminés par les élus, anciens étudiants des collèges et universités catholiques. Une formation commune, telle que proposée et rapidement oubliée en 1873, ne peut que relever d’une utopie égalitaire non praticable. Un quart de siècle plus tard, les rôles se confirment. Le peuple est assigné au dur labeur des champs et les instituteurs à son instruction pratique et éducation soumise. Ce corps de métier n’a pas été créé pour permettre aux enfants du peuple d’entrer en concurrence avec les enfants des dirigeants.

Comme nombre de leurs pairs européens, les maîtres d’école valaisans sont assurément appelés à « assurer l’éducation morale du peuple » (Hameline, 1986, p. 45), le « gouvernement de ses esprits »(Nique, 1991).Dans le Vieux-Pays, c’est dans le respect de la tradition catholique et sous la surveillance étroite du clergé que l’éducation agit, alors qu’ailleurs elle se substitue aux ecclésiastiques et se conforme à l’idéal républicain et laïque (Hameline, 1986, p. 45 ; Hofstetter, 1995, 1998 ; Nique, 1991; J. Ozouf, 1967 ; J. & M. Ozouf, 1992 ; M. Ozouf, 1982, 1984 ; Ognier, 1984; Prost, 1968). L’éducation proposée aux enfants de la masse populaire se doit d’être utilitaire : il faut répondre aux besoins de l’époque le plus rationnellement possible, en « introduisant les élèves dans une culture qui les arme et les motive ’’pour les tâches d’aujourd’hui’’ » (Hameline, 1986, p. 63). Ici, comme dans les autres cantons catholiques, une lutte « pour sauvegarder des valeurs culturelles » de cette société spécifique est engagée (Altermatt, 1994, p. 142). Ces valeurs, décrétées siennes, fondent la singularité politique et sociale d’une identité cantonale que l’industrialisation met en péril.

En Valais, le dernier recensement fédéral du siècle prouve la réalité d’un exode rural certain. Le gouvernement s’en inquiète et veut établir des mesures pour enrayer le phénomène. Les instituteurs sont appelés à devenir les instruments de cette politique d’attachement à la terre et au pays. Ils auront à éduquer et à instruire les enfants des campagnes dans l’amour de la terre et la science de sa culture puisqu’ils devront en tirer leur revenu d’adulte :

Afin de remédier à ce côté fâcheux, qui trouble l’équilibre nécessaire de la société et qui est surtout préjudiciable à un pays agricole, nous tenons à former nos instituteurs en pionniers d’une agriculture intelligente et raisonnée, et à inculquer ainsi le goût pour une occupation qu’on ne délaisse que parce qu’on ne l’envisage que comme un travail matériel (RG CE, DIP , 1888, p. 8).

L

ES VERTUS RELIGIEUSES ET CIVIQUES DE L

INSTITUTEUR

A semblable époque, la situation des instituteurs français, issus eux aussi de milieux ruraux modestes, est difficile. Prost (1968, p. 140) relève que leur « situation matérielle misérable n’était pas de nature à attirer vers l’enseignement des vocations nombreuses et de qualité […]. Ceux qui y sont entrés, reconnaissant qu’ils se sont fourvoyés, se hâtent de s’en éloigner. » Mais l’image que donne Courthion de l’instituteur valaisan n’est guère flatteuse :

Toute la considération du public étant ainsi accaparée par les légistes et par le clergé, il est aisé de comprendre que le personnel enseignant demeure confiné dans un ilotisme complet. Quel que soit en effet son degré de culture, l’instituteur portera toute sa vie la marque de son extraction plébéienne ; on lui fera même un crime de lutter collectivement en vue de l’amélioration de son sort. Tacitement appuyés par un clergé tout-puissant dans le domaine scolaire, les pouvoirs civils, issus de la classe aisée, se chargeront de perpétuer à tel point son asservissement qu’à peine entré dans la carrière il ne rêvera, s’il est intelligent, qu’au moyen d’en sortir (Courthion, 1903/1979, pp. 140 et 152).

Cependant, à cette image étriquée s’oppose la vision plus romantique que le gouvernement semble avoir du peuple valaisan. Bucolique, cette vue idéale s’alimente au mythe du bonheur originel lié à l’imagerie paysanne :

Le peuple de notre vallée est en général robuste, intelligent, sobre, persévérant, courageux au travail comme ailleurs. Il a la ténacité de ces ormeaux séculaires qui s’alignent le long de nos grandes routes, mais comme ces patriarches de la végétation, il a aussi besoin d’être stimulé, poussé par ce mouvement continu qui prévient la caducité ; il faut l’alimenter d’une sève toujours nouvelle par la vigueur d’institutions sagement progressives (BGC, 1872, p. 250).

Ce discours concernant les valeurs séculaires du Vieux-Pays, dont les propos redondants trouvent encore un écho jusque vers la fin du 20e siècle,141 reste gravé

dans les mentalités. Il ancre le système scolaire mis en place à la charnière du 20e

siècle dans une tradition prégnante. Les vertus du citoyen valaisan exemplaire, paysan, catholique et patriote, sont transmises par le régent et l’institutrice. Ces derniers les affermissent lors de leur formation à l’École normale, tenus qu’ils sont ensuite de « développer chez les élèves le sentiment de l’amour de la religion et de la patrie » (RG CE, DIP, 1881, p. 13) :

Messieurs, c’est à nos instituteurs que nous confions notre jeunesse, l’avenir de notre pays ; c’est eux que nous chargeons, non seulement de l’instruire, mais aussi et surtout d’en former des hommes de cœur et de caractère, des patriotes joignant à des convictions religieuses sincères un ardent amour de la patrie

(BGC, nov. 1887, p. 16).

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ES ATTITUDES PROFESSIONNELLES ET LES VALEURS ÉDUCATIVES

Dans ce contexte patriotique, les attitudes professionnelles et les valeurs éducatives posées par le gouvernement sont explicites. Outre les connaissances suffisantes à maîtriser, il leur faut faire preuve de « dévouement, d’énergie, de force de caractère, de constance etc. » Pour cela, le personnel enseignant doit être « bien suivi et contrôlé par les Commissions scolaires ». Seuls les sujets à la conduite « exemplaire », au « tact et dévouement requis pour la bonne direction d’une classe » seront gardés dans la profession :

De cette façon, on réussira peu à peu, nous l’espérons, à posséder un personnel enseignant digne de la confiance des parents et des autorités, et capable de faire honneur au canton en travaillant efficacement à l’éducation de la jeunesse (RG CE, DIP, 1882, p. 27).

Inspirer confiance aux parents et faire honneur au canton tout en éduquant les enfants du pays, la mission politique de l’instituteur est complexe. Afin de prouver aux confédérés les progrès de son instruction, l’exposition nationale de Zürich est l’occasion de montrer, parmi les sept productions cantonales, des cahiers de calligraphie remplis par les élèves des Écoles normales (RG CE, DIP, 1883, pp. 3- 4). Sur le plan intérieur, les qualités attendues des aspirants sont remarquables de permanence : les élèves sont formés au travail, à la vertu, à travers les habitudes d’ordre, de propreté, de travail, de régularité, d’économie et de bienséance,« qualités si précieuses pour tous ceux qui se consacrent à l’éducation des enfants ». Leur tenue et leur conduite irréprochables démontrent qu’ils sont « tout entiers aux études et [n’ont]généralement d’autres préoccupations que celles des examens qui les [attendent] à l’issue du cours ». La santé des normaliens est relevée, à laquelle contribuent les promenades fréquentes auxquelles tous les élèves prennent part, « à des récréations passées en plein air, autant que le temps le permet, et où l’on veille à ce que tous se donnent du mouvement ».142 La soumission et l’obéissance font figure

de préalables indispensables à tout apprentissage intellectuel. Ces valeurs éducatives suscitent les plus vives louanges :

Nous n’avons eu qu’à nous féliciter de la conduite de nos 50 élèves : dociles au règlement de l’École, très obéissants à tous ceux qui sont chargés de les conduire, de les instruire et de les surveiller ; respectueux à l’égard de toute autorité et sérieusement appliqués à tous leurs devoirs […]. Par suite de cette émulation soutenue et constante application, presque tous les élèves ont pu voir le programme prescrit et se familiariser avec les matières exigées aux examens de fin d’année (RG CE, DIP, 1887, pp. 80-81).

La lutte contre le patois (voir l’École primaire, n°6, mai 1882), considéré comme une « défectuosité », et la violence des instituteurs sont dénoncés au parlement (BGC, mai 1874). Les méthodes d’enseignement abusant de la mémorisation des contenus, cette « étrange habitude qu’ont les régents d’infliger à

leurs élèves de longues leçons par cœur de choses abstraites, de définitions créées par des mathématiciens » (BGC, mai 1876, p. 65)143 sont fustigées. Le problème de

l’alcoolisme est également soulevé : en 1888 sont encore rapportés des cas isolés d’enfants arrivant en classe « sentant l’eau-de-vie, d’où il est permis de conclure que ces malheureux ont dû se contenter d’une goutte de ce liquide malsain en guise de déjeuner » (RG CE, DIP, 1888, p. 7). Des traités destinés à lutter contre le fléau sont distribués aux frais de l’Étataux régents et aux élèves des cours de répétition (BGC, mai 1896, p. 93-94).144

Rien de ce qui touche aux régents, à leur conduite, que ce soit à l’École normale ou dans l’exercice de leur métier, n’est indifférent au parlement. Le contrôle social que le monde politique exerce à leur endroit est manifeste, soutenu. L’éducation de la jeunesse au moyen de l’instruction populaire obligatoire est une affaire d’État, politique avant d’être professionnelle, dont n’est exclu aucun des jeux de pouvoirs opposant le parlement et le gouvernement. Les régents, sous les feux de cette observation attentive, doivent obéir. Cependant, pour nombre d’entre eux, leur vocation personnelle rejoint exactement la vocation sociale qui leur est attribuée et à laquelle contribuent les professeurs des Écoles normales. Ces derniers dotent ainsi « le pays d’un certain nombre d’instituteurs et d’institutrices, bien formés sous tous les rapports à la belle mais pénible carrière qu’ils ont embrassée » (RG CE, DIP, 1884, p. 103).

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ES MOYENS MIS À DISPOSITION

:

LES CONFÉRENCES

Mais, malgré ces louanges, force est de constater que ce ne sont pas toujours les meilleurs éléments qui désirent entrer à l’École normale : « les mieux qualifiés » ne se décident pas « à embrasser la carrière peu lucrative de l’enseignement » (RG CE, DIP, 1880, p. 35). Aussi faut-il soutenir ceux qui en ont fait leur choix sans posséder toutes les qualités requises à l’issue de leur formation. Le département instaure alors certaines mesures destinées à soutenir la formation continue des régents.

Les conférences professionnelles de régents sont instaurées en 1874.145

D’abord bisannuelles, le Grand Conseil réduit leur fréquence en 1888, malgré leur bienfait officiellement reconnu, « parce qu’on a estimé que ces réunions trop fréquentes pouvaient nuire à l’instruction populaire en ce qu’elles distrayaient le régent de son école et occasionnaient des vacances aux élèves » (BGC, nov. 1888, p. 32). Mais le prétexte peut-il masquer la crainte exprimée au parlement de voir les régents s’organiser syndicalement lors de ces réunions et devenir des citoyens remuants (BGC, mai 1884, p. 64) ?

143 Voir aussi BGC, mai 1876, p. 65; mai 1878, pp. 46-47 ; mai 1877, p. 152; mai 1888, p. 87 ; nov.

1897, pp. 84-89.

144 Voir le manuel de tempérance de Jules Denis (1893), destiné aux instituteurs primaires et secondaires,

diffusé à l’école cantonale d’agriculture d’Ecône. Le Département de l’Instruction publique offre aux abonnés à son bulletin l’École primaire en 1895-96 un « manuel d’instruction populaire à l’usage des instituteurs », par M. Thierrin, rév. Curé de Promasens (FR).

145 Article 42 du règlement pour les écoles primaires du canton du Valais. Recueil des lois et décrets…

Cadrées, réglementées, les conférences, dont les thèmes sont attribués par le Département,146 « ont pour objet tout ce qui peut concerner les progrès de

l’enseignement primaire, et spécialement l’examen des méthodes et des livres employés dans les écoles ». Elles servent aussi « à donner à l’enseignement son caractère d’unité, et à resserrer les liens de confraternité qui doivent unir des hommes dévoués à la même œuvre » (L’École primaire, 1892-93, pp. 21-22). Le DIP, par l’intermédiaire du journal L’École primaire, donne des règles quant aux modalités à suivre par les instituteurs « pour que les conférences produisent ces heureux fruits ».147 Un contrôle strict est établi. Ainsi, les régents ont à produire des

devoirs de conférences, des leçons et des exercices portés au programme. Leur participation active est requise, dans un bon esprit : « Assister à la conférence avec le désir d’en profiter, se rendre compte des méthodes et des procédés suivis, les apprécier, les comparer à ceux qu’on emploie soi-même ». Le bon usage du pouvoir hiérarchique est rappelé. Lui seul peut rassurer un régent que le raisonnement aurait conduit sur le chemin du doute et la voie de la rébellion : « Soumettre ses doutes à ses supérieurs ou à ses collègues, être docile aux conseils et aux avis de l’inspecteur ». Se former et réfléchir, dans les limites de ses attributions politiques et sociales, sans jamais quitter sa place et se départir des attributs vertueux de sa fonction. Le DIP se hâte d’indiquer des limites claires. Peut-être est-il effrayé par la générosité de la mesure et bien conscient des possibles dérives sociales.

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A REVUE PÉDAGOGIQUE DU

DIP

Les conférences ne sont pourtant pas le seul moyen de perfectionnement envisagé par le DIP. Un inventaire de moyens autodidactes est prescrit aux régents : ainsi « l’étude en particulier », celle de toutes les matières d’enseignement mais aussi des matières étrangères au programme, la lecture d’une « bonne revue pédagogique et méthodologique », l’étude pratique de l’enfant ; la « visite des écoles de ses collègues », surtout celles qui sont renommées pour leur bonne tenue et leurs succès ; « les réunions d’instituteurs » entre quelques voisins, tenues à jours fixes et qui auront pour objet des questions d’enseignement et l’élaboration des devoirs de conférences ainsi que la « mise à profit de ses expériences journalières » :

L’école est le théâtre du zèle et de l’activité de l’instituteur. C’est là qu’il vit de sa

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