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1.4 Objectif et modèles d’étude

1.4.5 Les mirides du cacaoyer

Les mirides sont les ravageurs du cacaoyer les plus préjudiciables à la production mondiale. Environ 40 espèces de Miridae (de l’ordre des Hemiptera) se nourrissent sur le cacaoyer et se répartissent en deux tribus : les Odoniellini et les Monaloniini (Babin, 2009). Parmi les mirides Odoniellini, seules deux espèces ont un impact économique ma-jeur sur la culture du cacaoyer : Sahlbergella singularis et Distantiella theobroma (Figure 9). Ce sont des espèces proches à tout point de vue : aire de distribution, biologie, écologie, nature des dégâts et impact économique. Sahlbergella singularis est une espèce originaire de la zone forestière d’Afrique de l’ouest et d’Afrique centrale. Son aire de distribution comprend : la Sierra Leone, le Libéria, la Côte d’Ivoire, le Ghana, le Togo, le Bénin, le Ni-géria, le Cameroun, la République centrafricaine, la République Démocratique du Congo, la République de Congo, le Gabon, la Guinée équatoriale et São Tomé-et-Principe. Au Cameroun, D. theobroma est une espèce rare (moins de 1% des mirides observés dans des plantations de la région Centre) en comparaison à S. singularis qui représente plus de 90% des espèces observées (Babin et al., 2010). Les plantes hôtes de l’espèce S. singula-ris sont des plantes de la famille des Malvaceae appartenant à plusieurs genres tels que : Theobroma (e.g. T. cacao), Cola (e.g. C. acuminata et C. lateritia), Sterculia (e.g. S. rhi-nopetala) et Ceiba (e.g. C. pentandra) (Entwistle, 1972). Le cycle de développement de S. singularis comprend un stade adulte (Figure 9), un stade embryonnaire et cinq stades larvaires (Figure 10). La femelle insère ses œufs dans les tissus de la plante hôte. Chez le cacaoyer, les oeufs sont principalement insérés dans le cortex des cabosses ou sous l’écorce des jeunes branches, des gourmands et des pédoncules des feuilles et des cabosses

(Ba-Figure 9 – Miride de l’espèce Sahlbergella singularis adulte photographié sur une ca-bosse.

Figure 10 – Photographies des cinq stades larvaires de l’espèce Sahlbergella singularis du plus jeune A) au plus âgé E).

bin, 2009). Bien que les données de fécondité soient extrêmement variables, la fécondité moyenne serait comprise entre 30 et 50 oeufs par femelle et la fécondité moyenne journa-lière serait proche de 4 oeufs par femelle et par jour (Williams, 1954). Cependant, toutes les femelles ne porteraient pas d’oeufs au sein d’une même population (Babin and Bisse-leua, 2006). Le développement embryonnaire dure entre 15 et 20 jours avec un minimum de 9 jours (Youdeowei, 1973). Le développement larvaire comprend 5 stades (Figure 10) dont la durée croît sensiblement des jeunes stades aux stades âgés avec une durée totale du développement larvaires d’environ 20 à 25 jours (Babin et al., 2011). La dernière mue larvaire, ou mue imaginale, donne naissance à un adulte ailé, mâle ou femelle. L’espèce S. singularis aurait d’importantes capacités de dispersion, de l’ordre du kilomètre, et de localisation des plantes hôtes (Babin, 2009). S. singularis est un insecte piqueur-suceur qui s’alimente sur le cacaoyer en piquant les fruits à tous les stades de développement (chérelles et cabosses), les pousses aoûtées ou semi-aoûtées à l’extrémité des branches et les pousses orthotropes, appelées gourmands (Babin, 2009). Les populations de S. singu-laris sont fortement agrégées au sein des parcelles à cacaoyers ce qui serait en relation avec les conditions microclimatiques au sein de la parcelle (Babin et al., 2010).

Les conditions microclimatiques influencent la survie, l’installation et le développement de l’espèce S. singularis. Il a ainsi été montré que la lumière directe et le vent entrainaient des variations en température et en humidité relative qui pouvaient tuer les larves par dessiccation (Nwana and Youdeowei, 1977). Il est généralement admis que S. singularis est une espèce photophobique qui s’alimente principalement la nuit (Bisseleua, D H B, Vidal, 2008). En revanche, au sein d’une parcelle, il a été montré que S. singularis s’agrégeait sur les cacaoyers qui recevaient la plus grande quantité de lumière (Babin et al., 2010). L’une des hypothèses pour expliquer ce résultat étonnant du fait du photophobisme de l’insecte serait que la présence d’une ressource (cabosse, flushes, gourmands) plus abondante sur les cacaoyers situés dans les trous de lumière qu’à l’ombre attirerait les mirides. Au Cameroun, la présence des mirides suit une variation saisonnière et est à son maximum vers les mois d’août et septembre.

1.4.6 Conclusion

Nous avons choisi d’étudier les relations entre la structure de la végétation d’une parcelle et l’intensité d’attaque des bioagresseurs de la culture principale. Ce travail est appliqué aux cacaoyers et à ses trois bioagresseurs que sont la moniliose, la pourriture brune et les mirides. Le cacaoyer a été choisi puisque c’est l’une des rares cultures en-core gérées traditionnellement au sein de systèmes agroforestiers complexes, les agroforêts, dans la majorité des pays producteurs. Les trois bioagresseurs ont été choisis du fait de leurs différences en terme de mode de dispersion, de spécialisation dans la relation avec

l’hôte et de préférence microclimatique puisque ce sont les principales caractéristiques qui influencent les relations entre la structure de la végétation et les bioagresseurs. En effet, la moniliose (agent pathogène Moniliophthora roreri) est une maladie qui se disperse par le vent sur de grandes distances. C’est un agent pathogène que l’on peut considérer comme spécialiste de son hôte (peu d’hôte alternatif au cacaoyer). L’ombrage favorise la germi-nation du pathogène mais diminue sa dispersion. La pourriture brune (agent pathogène Phytophthora megakarya) se disperse via l’eau libre sur de courtes distances. Son spectre d’hôte est encore mal connu ; par contre l’intensité de la maladie est globalement favorisée par l’ombrage. Enfin, les mirides (espèce Sahlbergella singularis) ont une dispersion active sur de grandes distances. La spécialisation de S. singularis au cacaoyer est faible (nom-breux hôtes alternatifs de la famille des Malvaceae) et sa densité est réduite par l’ombrage au sein d’une parcelle.