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Nouvelle génération d’hormonothérapie

IV. CHAPITRE IV : LES TAXANES

IV.4 LES MICROTUBULES : CIBLES DES TAXANES

Les microtubules (MTs) sont des composants du cytosquelette. Ils affectent un grand nombre de fonctions cellulaires vitales et déterminent la forme de la cellule. Ils constituent le squelette des cils et des flagelles et jouent un rôle important dans le guidage et le transport de matériaux intracellulaires, la sécrétion d’hormones, le transport de granules et l’accrochage de récepteurs à la membrane. Ils ont une fonction capitale dans la formation du fuseau mitotique permettant les mouvements des chromosomes lors de la mitose vers les deux pôles avant la division cellulaire (253). Ceci fait des MTs une cible thérapeutique potentiellement pertinente des traitements anticancéreux.

IV.4.1 LES MICROTUBULES : STRUCTURE ET DYNAMIQUE

Les microtubules sont des filaments dynamiques présent au sein de la cellule sous deux formes en équilibre : la forme monomérique, soluble et dispersée dans le cytoplasme (la tubuline) ou la forme polymérique, insoluble et organisée en filaments (les microtubules).

LA TUBULINE :

Il existe sept familles de tubuline : α, β, γ, δ, ε, δ et ε. Les plus étudiées sont les tubulines α, β et γ présentes chez tous les eucaryotes (254). Seules les formes α et β sont constitutives des MTs. Les autres formes sont associées aux MTs ou ont des fonctions servant aux MTs. Les tubulines α, β possèdent environ 450 aa et un poids moléculaire apparent de 50 kDa. Elles sont codées par plusieurs gènes et subissent des modifications post-traductionnelles.

La structure des tubulines α et β sont très proches. Elles sont constitueés de trois domaines fonctionnels (239) (Figure 12A) :

● Un domaine N-Terminal formé de 6 feuillets β (S1-S6) et 6 hélices (H1-H6), impliqué dans la liaison au (GDP/GTP).

● Un domaine central formé de 4 feuillets β (S7, S10) et 3 hélices (H8 –H10) impliqué dans l’interaction entre les deux monomères α et β pour former les protofilaments.

● Un domaine C-terminal constitué de 2 hélices α antiparallèles (H11 et H12) formant un domaine d’interaction avec les MAPs (microtuble associated proteins) tel que les protéines tau, MAP2, stathmin, Kinesin 7, KSP (kinesin spindle protein) (239)(255).

Figure 12 : Structure de la tubuline

A-Structure d’un monomère de tubuline.

B-Structure du dimère α-βtubuline et site de liaison des taxanes (Tx).

Les tubulines α et β s’assemblent par une liaison de faible énergie très stable pour former un dimère, capable de lier deux molécules de GTP : l’une est non-échangeable et non-hydrolysable en GDP et se situe au niveau de la sous unité α, l’autre est échangeable et hydrolysable en GDP et phosphate inorganique et se situe au niveau de la sous unité β (256). La structure du dimère de tubuline α et β se divise classiquement en trois parties : une partie amino-terminale contenant le site de liaison échangeable du GTP, une partie intermédiaire possédant le site de liaison du taxol et une partie carboxy-terminale qui expose les résidus carboxy-terminaux de l’α-tubuline (257)(258) (Figure 12B).

LES MICROTUBULES

Les microtubules sont des tubes creux d’un diamètre d’environ 25 nm, d’une lumière de 10 nm et d’une longueur variable pouvant dépasser plusieurs centaines de microns. La paroi du microtubule est formée de 13 protofilaments protéiques disposés en couronne (255)(259) résultant de la polymérisation d’hétérodimères de tubuline, lui-même composé des deux sous-unités α et β (260)(261).

Les protofilaments s’assemblent tout d’abord latéralement pour former des feuillets, puis se replient progressivement sur eux-mêmes autour d’un cœur central creux procurant au microtubule sa forme

tubulaire caractéristique. Les microtubules prennent souvent naissance au niveau des centres de nucléation situés dans la région centrale de la cellule d’ou ils irradient vers la périphérie.

Ils sont constamment en état dynamique de polymérisation et dépolymérisation (262). L’équilibre qui gère la polymérisation des microtubules est appelé instabilité dynamique. Au cours de ce processus, les microtubules subissent des périodes de transition très rapides entre croissance et rétrécissement, dues respectivement à l’association et la dissociation des dimères de tubuline aux extrémités des protofilaments. La transition d’une phase de croissance à un rétrécissement s’appelle une « catastrophe », l’inverse un « sauvetage » (263). La demi-vie moyenne d’un microtubule varie de 20 secondes à 10 minutes dans une cellule animale selon qu’elle est en division ou non. L’apport énergétique nécessaire pour l’équilibre entre polymérisation et dépolymérisation provient de l’hydrolyse du GTP. La molécule de GTP se lie à la sous-unité β d’un doublet de tubuline, cette liaison provoque l’hydrolyse de la molécule de GTP en GDP (260)(264).

Le microtubule est une structure polaire, dont l’une des extrémités croît environ trois fois plus vite que l’autre. Les extrémités de MTs à croissance lente proches du centre de nucléation sont désignées (-), celles qui en sont éloignées à croissance rapide sont désignées comme les extrémités (+) (261)(265). Lors de la polymérisation d’un microtubule, les doublets de tubuline s’ajoutent à son extrémité (+) pour permettre l’hydrolyse du GTP qu’ils portent, présentant ainsi une coiffe de GTP sur l’extrémité du microtubule. Cette coiffe de tubuline-GTP favorisera l’élongation de l’extrémité (+) par addition de nouvelles sous-unités. L’extrémité (–) du microtubule ne possèdant pas de coiffe tubuline-GTP est donc le siège d’une dépolymérisation continuelle (266)(267).

Cette instabilité dynamique est une caractéristique essentielle des microtubules, une perturbation de ce mécanisme conduit au blocage de la cellule dans l’une des phases de sa réplication, et peut aboutir à l’apoptose. Différents effecteurs permettent de contrôler le comportement de cette dynamique, notament les protéines stabilisatrices MAPs tel que MAP-2 (268) MAP/tau et MAP4. En général, la phosphorylation de ces protéines aboutit à leur dissociation des microtubules et/ou de la tubuline entraînant une instabilité des MTs (264).

Les protéines Kinases tel que la protéine Cdc2 qui contrôle la localisation des centromères (269), ou encore les protéines ERK et JNK qui contrôlent la migration cellulaire (270).

Les phosphatases qui régulent les MAPs comme les protéines PP1et PP2A(271).

Les protéines déstabilisatrices comme MCAK (Mammalian Centrosome-associated Kinesin (272) et l’oncoproteine 18/stathmin. La stathmin contrôle le fuseau mitotique en se liant aux extrémités des microtubules augmentant ainsi la catastrophe (264)(273).

MICROTUBULES ET MITOSE

La dynamique des microtubules et leur capacité à se polymériser et se dépolymériser est essentielle à la division cellulaire. In vivo, l’extrémité (-) des microtubules moins dynamique que l’extrémité (+), est généralement attachée au niveau des MTOCs (MicroTubule Organizing Centers) qui constituent les

sites de nucléation majeurs des microtubules (274)(275). Les Mts se polymérisent à partir du MTOC et forment des structures stables nécessaires pour le transport des vésicules et des protéines.

En prophase, la dynamique de l’extrémité (+) des microtubules est augmentée (276) et s’accompagne d’une augmentation de la nucléation de nouveaux microtubules entrainant la réorganisation du cytosquelette microtubulaire et l’établissement d’un fuseau bipolaire (277). Durant la prométaphase, les kinétochores se forment au niveau des centromères et l’extrémité (+) de certains microtubules du fuseau mitotique se prolonge et capture les chromosomes en s'accrochant aux kinétochores des chromatides sœurs (search and capture).

Pendant la métaphase, après la formation de la plaque équatoriale, les tensions subies par les kinétochores des chromosomes s'équilibrent progressivement et inhibent le point de contrôle du cycle cellulaire déclenchant ainsi le début de l’anaphase.

Durant l’anaphase, les chromatides sœurs se séparent brutalement après le clivage de la cohésine par la séparase. Elles se déplacent alors en direction du pôle sur les microtubules kinétochoriens qui se raccourcissent au fur et à mesure de la progression du kinétochore. Les microtubules polaires s'allongent, et les pôles du fuseau mitotique s'éloignent l'un de l'autre entraînant avec eux les chromatides. En télophase, les microtubules kinétochoriens disparaissent pour permettre la cytocinèse et la génération de deux cellules filles. Les différentes étapes de la dynamique des microtubules au cours de la mitose sont résumées dans la figure 13.

Figure 13 : Représentation schématique de la dynamique des microtubules (Mts) au cours de la mitose.

IV.5 MECANISME D'ACTION DES TAXANES AU NIVEAU DES MICROTUBULES DU