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Chapitre I Contexte et synthèse bibliographique

I.2. i Microstructure des composites

Le paramètre le plus basique caractérisant un matériau multiphasé est la proportion de chaque phase, par exemple la fraction (massique ou volumique) de matrice et de charge dans un composite. Un certain nombre de propriétés (densité, etc.) du composite peuvent être prédite par ce seul paramètre dans un nombre limité de cas. Cependant, dans la majorité des cas et pour la plupart des propriétés, d’autres paramètres doivent être pris en compte pour obtenir une bonne description du matériau. Les propriétés intrinsèques (mécaniques, thermiques, morphologiques) des deux phases en font parties. Bien qu’il soit facile de caractériser la matrice avant incorporation de charges ou additifs, les propriétés mesurées ne sont plus nécessairement les mêmes dans le composite. La présence de charges peut modifier les propriétés (physico-chimiques) de celle-ci. De même, certaines propriétés des charges peuvent être modifiées par les étapes de transformation (en particulier morphologique). La morphologie du composite en lui-même est également importante et peut fortement influer sur les propriétés finales. Les paramètres

propriétés. Les modifications d’une matrice semi-cristalline pouvant être induite par la présence de charge sont également présentée.

La morphologie de charges quasi-indéformables (charges minérales) est un paramètre primordial ayant un impact fort sur les propriétés finales du composite, en particulier mécaniques. En effet, leur forme se retrouve dans la microstructure finale du composite. Ainsi, les charges couramment utilisées pour renforcer les polymères sont classifiées en fonction de leur forme. On peut citer les charges sphériques ou polyédriques (silice, carbonate de calcium), les charges aciculaires (en forme d’aiguille) (wollastonite), les charges lamellaires (talcs, argile, mica, alumine) et les charges fibrillaires (fibre de verre, végétal) [59].

Les premières sont nécessairement isotropes tandis que les autres, du fait de leur facteur de forme et de leur morphologie, peuvent induire une microstructure anisotrope dans le composite. Les facteurs de forme élevés associés à un degré d’orientation important des charges conduit généralement à des propriétés mécaniques élevées, en particulier en traction. C’est généralement le cas pour les fibres. L’augmentation du facteur de forme conduit à une augmentation du module et de la contrainte maximale des composites, jusqu’à une valeur seuil (Figure 25 et Figure 26) [60].

Figure 25 : Rapport de module

composite/matrice de composite en fonction du rapport de forme des charges, calculé avec

un modèle Mori-Tanaka [60]

Figure 26 : Rapport de module composite/matrice de composite en fonction du rapport de forme des charges, pour différentes rigidité de la charge,

calculé avec un modèle Mori-Tanaka [60]

Différents modèles permettent de lier le module d’Young du composite et la longueur des fibres et le degré d’alignement. Ils sont applicables dans une certaine mesure pour les charges aciculaires et lamellaires. Des propriétés moindres sont obtenues pour les charges à faible facteur de forme.

Au-delà de la forme et de l’orientation des charges, la microstructure de matériaux composites se caractérise également par l’état de dispersion et de distribution des charges. En effet, la granulométrie initiale de la charge ne se retrouve pas nécessairement dans le composite final. Selon les paramètres d’interactions charge/matrice, charge/charge, et les conditions de mise en œuvre, la phase dispersée peut se trouver sous forme d’agrégat ou d’agglomérat (état de dispersion). Même sous une forme dispersée, les charges ne sont pas nécessairement arrangées

Figure 27 : Illustration des états de dispersion et distribution possibles d’inclusions dans une matrice (a : bonne dispersion /distributionn ; b : mauvaise dispersion/bonne distribution ; c : bonne

dispersion/mauvaise distribution ; d : mauvais dispersion/distribution)

Un bon état de dispersion et distribution est généralement recherché dans les composites particulaires [61]. L’agglomération des charges tend à augmenter avec la diminution de leur taille et leur surface spécifique. Cela a un impact sur différentes propriétés, dont les propriétés mécaniques. Par exemple, la résistance d’un composite peut décroitre avec l’apparition d’agrégats (Figure 28).

Figure 28 : Résistance en traction de composite PP/CaCO3 en fonction de la surface spécifique de la charge (zone d’agrégation en pointillé pour les surfaces spécifiques les plus élevés) [61]

Sans traitement spécifique, les charges nanométriques (jusqu’à la centaine de nanomètre) se trouvent généralement sous forme d’agrégat. Ces phénomènes sont plus rares pour les charges micrométriques.

L’hétérogénéité de structure d’un matériau peut être dû à l’incorporation de charge, mais également être inhérent à celui-ci. Par exemple, les polymères semi- cristallins ne sont généralement pas des matériaux monophasés, ils possèdent au moins deux phases avec des propriétés distinctes. Le polypropylène standard se présente dans la plupart des cas sous la forme d’un matériau avec une phase amorphe et une phase cristalline . L’existence de cette dernière est due au degré de stéréorégularité des groupements méthyles les longs des chaînes qui peut permet un arrangement cristallin. Les polypropylènes atactiques ne possèdent pas de régularité et sont généralement pas ou peu cristallin, tandis que les polypropylènes syndiotactique et isotactique sont stéréo-réguliers et possèdent une phase cristalline.

La quantité de phase cristalline dans un polypropylène influe directement sur les propriétés mécaniques de celui-ci. Par exemple, il a été montré par Van der Wal

et al. [62] qu’en modifiant le taux de cristallinité en mélangeant des polypropylènes

faiblement et hautement isotactiques, les propriétés en traction étaient fortement modifiées (Tableau 8). Mélange Novolen/Eltex Χc (%) Module d’Young (MPa) Contrainte au seuil (MPa) Déformation au seuil (%) 100/0 31 601 19,5 17 67/33 38 962 25,4 11 33/67 43 1228 31,9 8,8 0/100 53 1650 41 4

Une augmentation de la cristallinité se traduit par une plus grande rigidité et résistance, et une plus faible déformabilité, soit un matériau plus fragile. Cela peut s’expliquer par la faible mobilité moléculaire des chaînes dans la phase cristalline.

Il existe également d’autres phases cristallines dans le polypropylène. La phase (monoclinique) est la plus commune et la plus stable, et se développe sous les conditions de transformation standard. La phase β (hexagonale) peut également se former sous des conditions particulières, en particulier via l’addition d’agents nucléants spécifiques [63]. La présence de cette phase est généralement associée à une meilleure résistance à l’impact. De façon générale, les chaînes polymériques sont arrangées sous forme de cristallites dans cette phase, elles-mêmes arrangées sous forme de superstructure. La plus commune est la sphérolite, dont la taille atteint plusieurs dizaines de micromètres. Des structures dendritiques peuvent également être obtenues. Plusieurs explications ont été proposées pour expliquer les différences de comportement mécaniques entre les différentes phases cristallines. Pour Sheng et al. [63], la morphologie des superstructures de la phase β est le principal facteur déterminant la résistance à l’impact, les structures dendritiques étant préférables.

Aboulfaraj et al. [64] ont montré que les sphérolites constituées de cristallites de type

et β se déformaient différemment, les premières ayant un comportement plus rigide, conduisant à un endommagement et des ruptures brutales, la phase β étant susceptible de se déformer via des mécanismes d’endommagement plus stables.

L’incorporation de charges (minérales par exemple) peut conduire à une modification de la cristallinité de la matrice, et donc de ses propriétés. Par exemple, la modification de la cristallinité du polypropylène par l’ajout de charge comme la calcite, le talc, la silice, l’argile et l’alumine a largement été étudiée [65–69]. Des résultats contradictoires sont obtenus concernant l’influence des charges sur le taux de cristallinité. Selon les auteurs, elles peuvent conduire à une augmentation de celle- ci [68][69], ne pas avoir d’effet [65], ou diminuer la cristallinité [66]. Différentes causes avec des effets contradictoires sont généralement évoquées, liés à la compétition entre l’effet nucléant des charges et les restrictions de mobilités des chaines aux interfaces, limitant la cristallisation [65]. La distribution de taille de particules influe également, une dispersion importante conduisant à un taux de cristallinité plus élevé qu’une distribution resserrée [69].

Les charges peuvent également modifier la cinétique de cristallisation et la morphologie des cristallites, via leur pouvoir nucléant. Ce dernier traduit la capacité d’une charge à initier la cristallisation (en agissant comme un germe pour celle-ci) et réduire la surfusion de la matrice, c’est-à-dire à augmenter la température de cristallisation. Certaines charges comme le carbonate de calcium, le talc et l’alumine augmente la nucléation lors du refroidissement [65,66], tandis que d’autres comme la silice et l’argile peuvent la ralentir [65]. L’effet nucléant est généralement attribué à la

une température de cristallisation plus importante est mesurée pour les granulométries resserrées que pour les granulométries plus étalées [69].

I.2.ii. Effet de charges rigides sur les propriétés en