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Chapitre IV : Physique du critère

4.2 Caractérisation des ligaments

4.2.2 Mesures & résultats sur les coupes transversales

Afin de confirmer les résultats obtenus au 4.2.1, nous allons étudier l’évolution de la géométrie des ligaments en utilisant une autre méthode de mesure. Les ligaments sont plus faciles à repérer sur les coupes transversales, mais ce type de mesure nécessite des coupes successives assez proches afin d’obtenir les évolutions de la géométrie des ligaments au cours de la propagation de fissure. La procédure pour préparer les coupes transversales est la suivante :

• Garder l’état de l’éprouvette à la fin de l’essai sans l’ouvrir complètement.

• Vue la taille de l’éprouvette, nous ne gardons que la partie contenant la fissure. Cette partie est enrobée dans la résine. Cette opération permet de garder solidaires les deux parties de l’éprouvette de part et d’autre de la fissure pendant le processus de découpage. • En commençant par l’arrêt de fissure, la matière est enlevée progressivement

perpendiculairement à la direction de la propagation de fissure (Figure 4-18). Afin d’avoir les coupes transversales assez proches, nous enlevons la matière par polissage à la main. En effet, le disque à tronçonner dont nous disposons enlève au minimum 1mm de matière à chaque fois. Cependant, les ligaments non rompus sont répartis sur une distance d’environ 2mm en arrière du front d’arrêt (Bouyne, 1999). Afin d’obtenir le plus d’informations possible sur les ligaments, surtout à la phase d’arrêt, nous voulons que la distance entre deux coupes successives soit inférieure à 1mm. Le polissage à la main permet d’atteindre cet objectif et les coupes obtenues sont distantes d’environ 0,2 mm.

La coupe transversale est observée par le microscope optique (Alicona 2D) afin de relever la géométrie des ligaments sur cette coupe. Nous répéterons ensuite le processus pour obtenir la prochaine coupe transversale. Ce processus est répété jusqu’à ce que tous les ligaments soient rompus sur une coupe transversale.

Figure 4-18 : Préparation pour les observations sur les coupes transversales

Nous obtenons une série de coupes transversales pour une éprouvette à la fin de la procédure de préparation.

Afin d’évaluer l’influence de la température sur la géométrie des ligaments, nous effectuons les observations sur trois éprouvettes à trois températures différentes (Tableau 4-2). Les images des coupes transversales pour chaque éprouvette sont fournies dans l’annexe H.

Eprouvette Type Epaisseur (mm) T (°C) d’essai

520HO3B CT25 10 -150°C

520WA Anneau en compression

(mode mixte) 25 -125°C

520RX-BL CT25 15 -100°C

Tableau 4-2 : Eprouvettes utilisées pour les observations des coupes transversales

Figure 4-19 : Fissures sur les coupes transversales pour une éprouvette CT25 testée à -100°C (520RX-BL, B = 15mm)

La Figure 4-19 présente les fissures sur les coupes transversales pour une éprouvette CT25 testée à -100°C (520RX-BL). Nous remarquons que :

• La fissure principale n’est pas plane. Elle est formée par plusieurs fissures dans différents plans de propagation.

• Les ligaments non-rompus sont répartis sur une distance qui peut aller jusqu’à 10mm en arrière du front d’arrêt. Cette distance est plus grande que celle estimée numériquement par Bousquet (2013), qui est d’environ 2 mm.

• La longueur de recouvrement (R) entre deux fissures adjacentes augmente quand la fissure s’éloigne du front d’arrêt.

Afin de mieux comprendre la géométrie des ligaments en arrière du front d’arrêt, la longueur de recouvrement (R) ainsi que les hauteurs des ligaments (h) sont mesurées sur chaque coupe transversale (illustré dans la Figure 4-5). Ces mesures sont effectuées pour les trois éprouvettes à trois températures différentes : -100°C, -125°C et -150°C. Il faut noter que nous ne mesurons que les ligaments non rompus.

La Figure 4-20 nous montre les valeurs des recouvrements (R) sur les coupes. Nous utilisons deux types de repère pour l’axe horizontal (x) :

• Le front d’amorçage initial (pré-fissuration en fatigue) se trouve à a = 0, l’avancée de fissure (a) augmente dans le sens de la propagation de fissure. Ce type de repère est cohérent avec ce qui utilisé pour les mesures sur le faciès de rupture, il facilite la comparaison entre ces deux types de mesure.

• Le front d’arrêt se trouve à x = 0, la valeur x représente la distance au front d’arrêt. Ce type de repère est cohérent avec notre façon de la mesurer sur les coupes transversales. Comme nous l’avons déjà vu, nous obtenons ces coupes de l’arrêt vers l’amorçage. Il faut noter qu’il est difficile de définir avec précision l’endroit du front d’arrêt. En effet, le front d’arrêt n’est pas rectiligne, il est sous une forme de « doigts », nous allons détailler ce point dans la partie 4.2.3. En pratique, au cours de l’essai, nous observons la fissure sur la surface de l’éprouvette. Nous considérons donc que l’origine de notre axe x (x = 0) se trouve à la position du front d’arrêt sur la surface de l’éprouvette. En réalité, la fissure se propage plus loin au cœur de l’éprouvette que sur la surface. Par conséquent, l’origine x=0 utilisée dans cette partie du mémoire est définie avec une faible incertitude qui correspond à l’écart entre #)%" en front de fissure et #)%" en surface de l’ordre de quelque centaine micromètre. Cependant, ce n’est pas gênant pour les analyses.

Figure 4-20 : Evolution du recouvrement des fissures en fonction de l’avancée de fissure (a) pour trois éprouvettes à trois températures : (a) 520RX-BL, -100°C ; (b) 520WA, -125°C ; (c) 520HO3B,

-150°C.

Nous remarquons clairement que, pour chaque éprouvette, la longueur du recouvrement diminue vers l’arrêt. Par exemple sur l’éprouvette CT 520RX-BL testée à -100°C, le recouvrement (R) est entre -50μm et 300μm pour les ligaments proches du front d’arrêt (0,2mm du front d’arrêt). Il augmente quand les ligaments mesurés s’éloignent du front d’arrêt. La valeur des ligaments atteint environ 1300μm à 8,5mm du front d’arrêt. Nous observons le même phénomène pour les deux autres éprouvettes. La longueur de recouvrement est négative quand les ligaments mesurés sont proches du front d’arrêt : proches du front d’arrêt, les fissures ne se chevauchent pas entre elles. Ce point est plus évident sur l’éprouvette 520HO3B testé à -150°C, la valeur R est entre -136μm et -37μm. Ce phénomène sera illustré dans la Figure 4-24 et la Figure 4-25 dans 4.2.3.

La Figure 4-20 montre aussi que l’évolution de la longueur du recouvrement (R) augmente ainsi avec la distance au front d’arrêt (x). En excluant les points à l’arrêt qui ont des valeurs de R négatives, les courbes de tendance de ces évolutions peuvent être décrite par l’équation suivante :

‹ O (mm)

Équation 4-2 avec ‹ ≅ 0,2; 0,15 ¡ 0,1 pour respectivement

Cela nous laisse penser qu’au cours de la propagation, les fissures qui forment la fissure principale, se développent latéralement pour se chevaucher entre elles avant rupture complète des ligaments.

Par le même principe que pour les mesures de la hauteur des ligaments (h) sur les faciès de rupture, la Figure 4-21 nous montre les évolutions de h en fonction de l’avancée de fissure (a) (Figure 4-21(a)), de la vitesse de propagation (V) (Figure 4-21(b)) et de la vitesse de

déformation à la pointe de fissure (/01#)&20 ) (Figure 4-21(c)). Globalement, les points sont dispersés surtout à l’arrêt. Nous trouvons néanmoins une tendance d’augmentation de h avec la distance de l’arrêt (x).

Figure 4-21 : Evolution de la hauteur des ligaments en fonction de l’avancée de fissure (a), de la vitesse de propagation (V) et de la vitesse de déformation plastique à la pointe de fissure (œž !‡~"ž ) pour

trois éprouvettes : 520RX-BL, -100°C, 520WA, -125°C, 520HO3B, -150°C.

La Figure 4-22 compare la hauteur des ligaments issue de deux types de mesure : mesures sur le faciès de rupture et mesures sur les coupes transversales. Ces mesures sont effectuées sur un anneau sollicité en mode mixte testé à -125°C et cinq éprouvettes CT25 testé à quatre températures différentes : -75°C, -100°C, -125°C et -150°C. Parmi les cinq éprouvettes CT25, nous avons deux épaisseurs d’éprouvette différentes : 10 mm et 15 mm. C’est-à-dire que chaque éprouvette est différente des autres, les mesures sur de telles configurations sont délicates. En effet, la propagation de fissure de clivage étant relativement instable (voir Chapitre VI), la hauteur des ligaments varie d’une éprouvette à l’autre. Idéalement, il faut effectuer les mêmes mesures sur plusieurs éprouvettes de même géométrie, testées à la même température pour conclure sur la tendance de l’évolution des ligaments pour une configuration. Cependant, nous ne disposions pas de suffisamment d’éprouvettes pour chaque catégorie (géométrie, température). Les différentes méthodes de mesure de la hauteur des ligaments (h) et le recouvrement des fissures (R) ont donc été mises en place et validées sur les éprouvettes disponibles. L’étude des origines de ces dispersions pourra être une perspective à ce travail en appliquant les méthodes mises en place à plusieurs éprouvettes d’une même catégorie (géométrie, température). Avec toutes les données disponibles, nous pouvons néanmoins trouver sur la Figure 4-22 que :

• Les résultats des deux types de mesure : sur le faciès de rupture et sur les coupes transversales, sont cohérents car les points sont globalement superposés.

• La hauteur des ligaments (a) augmente avec la distance de l’arrêt (x), avec la vitesse de propagation (V) et avec la vitesse de déformation à la pointe de fissure (/01#)&20 ).

Figure 4-22 : Evolution de la hauteur des ligaments en fonction de l’avancée de fissure (a), de la

vitesse de propagation (V) et de la vitesse de déformation plastique à la pointe de fissure (œž !‡~"ž ) pour six éprouvettes : 520RX-C (-75°C), 520RX-BL (-100°C), 520WA et 520RX-AW (-125°C), 520HO3B et

520RX-M (-150°C).

La Figure 4-23 se concentre sur l’évolution de la hauteur des ligaments (h) avec la vitesse de déformation à la pointe de fissure (/01#)&20 ). Malgré la dispersion des points, nous proposons de tracer trois courbes de tendance qui représentent respectivement les courbes enveloppe maximale (1), moyenne (2) et enveloppe minimale (3) des points. Ces courbes peuvent être décrites par l’Équation 4-3 : la forme de l’équation ressemble à celle de notre critère. Dans la Figure 4-23, les différentes couleurs représentent les essais à différentes températures, nous remarquons que les points de différentes couleurs sont superposés, la température n’a pas l’air d’avoir une influence significative sur la hauteur des ligaments, au moins à partir des données actuelles.

Figure 4-23 : Evolution de la hauteur des ligaments en fonction de l’avancée de fissure (a), de la vitesse de propagation (V) et de la vitesse de déformation plastique à la pointe de fissure (œž !‡~"ž ) pour

six éprouvettes : 520RX-C (-75°C), 520RX-BL (-100°C), 520WA et 520RX-AW (-125°C), 520HO3B et 520RX-M (-150°C). ℎ = ℎ6 [1 + ;/01#)&20 < ] Équation 4-3 (1) ℎ6 80. 10L• yy, 0. 060, µ = 0,5 (2) ℎ6 = 80. 10L• yy, 0. 045, µ = 0,4 (3) ℎ6 = 50. 10L• yy, 0. 045, µ = 0,4