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Chapitre I : Revue Bibliographique

1.5 Bifurcation de fissure

La bifurcation est un phénomène courant pendant la propagation de fissure en dynamique, surtout quand la vitesse de propagation est relativement élevée. Pour une éprouvette chargée en mode I, la fissure devrait logiquement se propager de façon rectiligne dans le plan de symétrie, mais ce n’est pas toujours le cas. La fissure peut dévier de son plan initial. Dans la littérature, il existe deux grands types d’explication pour ce phénomène :

• la modification des champs de contrainte à la pointe de fissure, • l’instabilité des microfissures pendant la propagation.

Nous détaillerons ces deux points dans cette partie de la recherche bibliographique.

1.5.1 Influence de la modification du champ des contraintes

à la pointe de fissure sur le trajet de fissure

La vitesse de propagation est souvent élevée quand la fissure se propage en mode fragile. Par conséquent, les champs de contrainte et de déformation sont influencés significativement par l’effet dynamique. Ce phénomène a d’abord été découvert par Yoff (1951). Il a aussi été montré dans les travaux de Craggs ( 1960) et Baker (1962) pour un matériau élastique isotrope et dans le travail de Achenbach (1975) pour un matériau élastique orthotrope. L’évolution angulaire des composantes du champ des contraintes en pointe de fissure peut être représentée par la variation de la contrainte circonférentielle ou de la contrainte principale maximale *. La Figure 1-29 montre l’évolution de ces deux types de contrainte en fonction de l’orientation θ par rapport au plan de fissure pour différentes vitesses de propagation de fissure (V). La direction de propagation est contrôlée par qui correspond à la contrainte d’ouverture. A faible vitesse de propagation, le maximum de se trouve à ( 0), la fissure se propage

donc sur son plan initial. Au fur et à mesure que la vitesse de propagation augmente, le maximum de se décale du plan de fissure ( 0). Par conséquent, la direction de

propagation change. La propagation rectiligne est favorisée quand la vitesse de propagation est inférieur à 0,6 soit 1800 y/ pour la propagation de fissure en clivage dans l’acier ferritique

(16MND5 par exemple). Cependant, la vitesse expérimentale maximale de propagation est de l’ordre de 1000 y/ dans l’acier ferritique (en clivage), soit 0,3 . Même à cette vitesse, nous

pouvons quand même observer la bifurcation. Cela montre que la modification du champ des contraintes à la pointe de fissure n’est pas suffisante pour expliquer la bifurcation de fissure.

Figure 1-29 : Evolution angulaire de Æôô et Æ„ pour plusieurs vitesses de propagation normalisées par õ ƒ„⁄√Šæ• pour les différentes vitesses des ondes de cisaillement (ö/ò}) (Freund, 1990b).

1.5.2 Influence de l’instabilité des microfissures sur le trajet

de fissure

En se basant sur les expériences sur des matériaux fragiles comme l’Homalite-100 et le polyester thermodurcissable, Ravi-chandar et al (1984) proposent que les microfissures autour de la fissure principale et l’interaction entre ces microfissures soient les deux facteur clés responsable du mode de propagation en dynamique. Ils doivent donc être pris en compte dans la détermination d’un critère de propagation.

D’après plusieurs auteurs (Ravi-chandar et al, 1984) (Ramulu et Kobayashi, 1985), la bifurcation de fissure est simplement d’un résultat de l’interaction entre les microfissures et les branches. Le scénario est schématisé dans la Figure 1-30. Les microfissures et les micro-branches sont créées dans la zone plastique à la pointe de fissure. Le développement de ces microfissures est piloté par l’instabilité, seulement quelques micro-branches peuvent se développer et les autres s’arrêtent. Les micro-branches sont initialement parallèles à la fissure principale, mais elles dévient progressivement de son plan initial.

Figure 1-30 : mécanisme de la bifurcation de fissure (Ramulu et Kobayashi 1985)

1.5.3 Evaluation de l’instabilité dans le trajet de fissure

Cotterell et Rice (1980) proposent d’utiliser la contrainte T pour évaluer l’instabilité dans le trajet de fissure. En effet, le champ des contraintes en pointe de fissure peut être décrit par une série de puissance, le premier terme représente la singularité du champ, il est en fonction de

1/√,, le second terme ne dépend pas de , et le troisième terme est proportionnel à √,.

#7 = *

√2],ß#7 + ¤=^#=^7+ N √, Équation 1-47

La contrainte T est parallèle au plan de fissure, elle intervient uniquement sur ^^ en 2D mais

elle un impact sur la contrainte hydrostatique, la contrainte principale et le taux de triaxialité des contraintes (Bauvineau 1996). Le signe de T influence la position et la taille de la zone plastique à la pointe de fissure en statique et en dynamique (Jayadevan et al., 2003) (Figure 1-31). Quand T est positif, la zone plastique est confinée et se positionne plutôt vers l’arrière de la fissure. Quand T est négatif, la zone plastique est étendue et se positionne plutôt vers l’avant de fissure. La taille de la zone plastique est peu affectée par la vitesse de propagation

quand la contrainte T est négative. Dans le cas contraire (T >0), la zone plastique augmente avec la vitesse de propagation de fissure.

Figure 1-31 : Illustration de l’influence du signe et de l’amplitude de la contrainte T sur la taille et la position de la zone plastique pour différentes vitesses de propagation normalisées par la vitesse des ondes

de cisaillement ö/ò}. (a) faible vitesse de propagation. (b) forte vitesse de propagation (Jayadevan et al., 2003)

Cotterell et Rice (1980) considèrent que la stabilité du trajet est liée à une propagation sans bifurcation. Le trajet est stable quand la valeur de T est négative et le trajet est instable quand T est positif.

Figure 1-32 : L’influence de la contrainte T sur le trajet de propagation (Cotterell and Rice, 1980) LI et al ( 2010) prouvent que la contrainte T reste négative pendant la propagation si sa valeur à l’amorçage est négative, c’est-à-dire que le trajet de fissure ne bifurque pas si la valeur de la contrainte T est négative à l’amorçage. Dans le cas contraire, si la contrainte T est positive à l’amorçage, cette valeur peut devenir négative pendant la propagation de fissure, c’est-à-dire que le trajet de fissure peut devenir stable même si à l’amorçage il est non-stable. Dahl (2012b) montre que la contrainte T est positive pour une fissure qui se propage en clivage sur une éprouvette CT et sur un anneau mécanique chargé en mode I. Or nous n’observons pas systématiquement la bifurcation de fissure sur ces essais.

1.5.4 Représentation numérique de l’instabilité dans le trajet

de fissure

Sumi (1985) modélise la bifurcation de fissure sur une éprouvette de type DCB sous chargement proportionnel. Dans la modélisation, la fissure se propage dans la direction sur laquelle, le facteur d’intensité de contrainte de cisaillement (KII) devient nul pour une infiniment petite avancée ((Gol’dstein et al, 1974)). L’auteur montre qu’il faut introduire une petite perturbation à la pointe de fissure au début du calcul afin d’obtenir la bifurcation de fissure. L’auteur introduit un faible angle, entre 3° et 8°, au premier pas du calcul, c’est-à-dire qu’initialement la fissure n’est pas sur le plan de symétrie Figure 1-33(a). Avec La petite perturbation à

l’amorçage, la fissure quitte son plan initial et la bifurcation de fissure se produit. Le trajet prédictif correspond bien à l’expérience.

Figure 1-33 : (a) Au premier pas du calcul, la fissure est décalée du plan initial d’un angle ô˜ sur une

distance de ǘ ; (b) résultat du calcul prédictif avec cette petite perturbation au premier pas du

calcul.(Sumi, 1985)

L’auteur utilise la même méthode pour prédire le trajet de fissure sur le même type d’éprouvette, mais cette fois-ci, il existe un trou sur le plan initial de fissure. Le résultat prédictif montre que la fissure s’éloigne du plan initial au début de propagation, mais elle revient sur sa direction initiale et s’arrête dans le trou (Figure 1-34). Ceci correspond à l’expérience.

En réalité, la petite perturbation vient de l’imperfection autour de la pointe de fissure, par exemple, un défaut ou un grain mal orienté à la pointe de fissure. Cependant, ce type de perturbation doit exister pendant tout le trajet de fissure, car il n’y pas de raison que l’imperfection du système n’existe qu’à l’amorçage. Il serait certainement intéressant de prendre cela en compte dans la simulation.

Figure 1-34 : Le trajet de fissure prédit sur une éprouvette de type DCB avec trou sur le plan initial (Sumi, 1985)

1.5.5 Conclusion

Il y a deux types d’explications pour les phéomènes de la bifurcation fissure. La première explication est basée sur la moditification des champs de contrainte à la pointe de fisssure quand la vitesse de propagation est élevée. Cepandant, la vitesse de propagation observée pendant les expériences n’atteint pas ce niveau de vitesse évoqué pour déclencher la bifurcation de fissure. La deuxième explication est basée sur la présence des microfissures à la pointe de fissure, qui, par interactions entre elles et avec la fissure principale, peuvent créer l’instabilité sur le trajet de propagation. De plus, plusieurs auteurs proposent d’utiliser la contrainte T pour évaluer s’il y instabilité dans la propagation.

En numérique, afin de créer le déséquilibre nécessaire pour obtenir la bifurcation de fissure, il faut souvent introduire une instabilité initiale dans la direction de propagation au début du calcul.

1.6 Méthodes numériques pour modéliser la propagation et l’arrêt