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Les pressions d’ablation peuvent être déterminées expérimentalement par des essais de choc laser sur cibles monomatériau, par mesure de la quantité de mouvement transmise à la cible avec un pendule, par utilisation de jauges extensométriques ou par vélocimétrie de la surface libre de la cible [91]. Ces tech- niques peuvent s’appliquer aussi bien en régime direct qu’en régime confiné. Les mesures par jauge Quartz ont montré leurs limites pour la mesure de pressions d’ablation supérieures à 4 GP a. En effet, la limite d’élasticité du Quartz étant de 4 GP a, la loi de Hooke ne s’applique plus au delà et la restitution de la pression s’en trouve affectée. En ce qui concerne les jauges électromagnétiques (EMV), la génération de perturbations par le plasma dégrade la qualité de la mesure de pression [92] [93]. Enfin l’utilisation de jauges piézoélectriques (PVDF) s’avère plus fiable, leur précision étant essentiellement influencée par la calibration du système extensométrique. Toutefois, la plupart des mesures de pression effectuées au cours des études citées précédemment ont été effectuées par vélocimétrie. Cette méthode présente notam- ment l’avantage d’être sans contact, et ne nécessite pas de calibration. On s’intéresse donc dans cette sous-partie aux différentes techniques couplées à la mesure de vitesse de surface libre pour déterminer la pression d’ablation appliquée par le laser. La mesure de pression par vélocimétrie de la surface libre est uti- lisée dans de nombreux travaux pour caractériser les chargements induits par laser [70,82,91]. Le principe est d’utiliser la courbe de vitesse de surface libre de la cible pour remonter au profil de pression appliqué en face avant. Cette méthode est basée sur plusieurs hypothèses : la bonne connaissance du comporte- ment du matériau sous choc et l’utilisation d’une impulsion laser de forme calibrée (Créneau, Gaussienne, Triangle). Le matériau identifié comme le "matériau étalon" type est l’aluminium, pour des raisons his- toriques. On verra cependant dans cette thèse que de nombreuses questions subsistent sur l’influence des variations du comportement matériau sur la propagation des chocs et des résultats de vitesse en face arrière.

3.1.1 Approche mécanique-analytique

Une première approche analytique basée sur l’équation 1.9 et dérivée des expressions de Rankine- Hugoniot permet d’identifier la valeur maximale de la pression d’ablation (Pabl,max), directement à partir

du premier pic de vitesse en face arrière (Voir la thèse de L. Tollier pour plus de détails [91]). Cette mé- thode sera définie comme approche mécanique-analytique pour la distinguer de la description analytique de l’interaction laser-matière, abordée plus loin. Cette expression est applicable aux métaux dont le com- portement mécanique sous choc peut être assimilable à un comportement élasto-plastique parfait. ρ0 est

la densité initiale du matériau considéré, C0 la vitesse du son dans ce matériau, s le paramètre matériau

régissant l’accroissement de la vitesse du choc avec la vitesse matérielle, vexp,max la vitesse maximale du

pic de vitesse en face arrière, Y0 la limite d’élasticité initiale et δP l’atténuation entre la face avant du

matériau, où est appliquée Pabl et la pression débouchant en face arrière (Figure 1.21). Le terme 23Y0 vise

à corriger Pabl,max au regard de l’élasto-plasticité du matériau.

Pabl,max= ρ0.(C0+ s. vexp,max 2 ). vexp,max 2 + 2 3Y0+ δP [GP a] (1.9)

Figure 1.21 – Représentation schématique du principe de mesure de vitesse de surface libre Le terme vexp,maxest déterminé expérimentalement, comme exposé sur la Figure1.22. La précision sur

cette valeur dépend du système de mesure de vitesse utilisé. Les paramètres ρ0, C0 et s peuvent être obte-

nus dans la bibliographie relative au matériau étudié. Sinon, il est possible d’accéder à ces paramètres par des études expérimentales spécifiques, notamment pour le paramètre s. Pour des matériaux bien référencés tels que l’aluminium, la connaissance de ces termes est fiable. La valeur de Y0 est sujette à beaucoup plus

d’incertitudes. En effet, elle dépend du matériau considéré et varie fortement selon les éventuels éléments d’alliage. Les traitements thermo-mécaniques tels que l’écrouissage, le laminage ou le recuit ont également une influence considérable sur ce paramètre. Enfin, certaines études ont mis en évidence l’effet de la vitesse de déformation sur la limite élastique du matériau, impliquant des variations de Y0 avec les pressions et les

intensités induites. Le terme d’atténuation δP peut être déterminé en réalisant des mesures de vitesses sur des échantillons d’aluminium de différentes épaisseurs par choc laser à iso-pression. Dans cette expression, on fait l’hypothèse que ce terme est constant avec la vitesse de déformation. Or, l’atténuation est pour partie due à l’atténuation hydrodynamique et pour une autre partie due à l’atténuation du pic de pression par les détentes élastiques. Il est donc possible que des variations de δP surviennent selon les niveaux de pressions induits dans le matériau, notamment si le comportement élasto-plastique du matériau ou la forme d’impulsion sont mal appréhendés.

Figure 1.22 – Signal de vitesse en face arrière obtenu sur aluminium pur - 250 µm - Impulsion Gaussienne - Irradiation directe - Imax = 66 GW/cm2 [91]

Cette approche permet donc d’accéder à Pabl,max sur la base d’un nombre d’essais expérimentaux as-

sez restreints, sous réserve d’utiliser un matériau connu. Néanmoins, la variabilité de certains paramètres matériaux enjoint à la prudence en ce qui concerne la précision sur Pabl,max. De plus, on remarque que

cette méthode ne permet pas d’accéder au profil temporel de pression (Pabl(t)).

3.1.2 Approche mécanique-numérique

Une seconde approche, dite mécanique-numérique, consiste à utiliser un code mécanique pour déter- miner le profil de pression d’ablation (Pabl(t)), à partir du profil de vitesse expérimental de surface libre

(vexp(t)) de la cible. La démarche est initialisée en appliquant un profil de (Pabl,0(t)) typique du régime

d’interaction laser-matière utilisé (Figure 1.23).

Figure 1.23 – Schéma de la méthode mécanique-numérique pour la détermination de Pabl(t)

En régime direct, l’initialisation peut se faire par une forme temporelle Pabl,0(t) similaire à celui de

l’intensité laser I(t). On renseigne ensuite dans le code mécanique les paramètres du modèle matériau correspondant à la cible utilisée pour l’expérience. Le calcul génère un profil de vitesse de surface libre numérique (vnum(t)), qui doit être comparé à vexp(t). Si les deux profils de vitesse obtenus ne sont pas

rations jusqu’à ce que les signaux vnum(t) et vexp(t)convergent. Lorsque les deux signaux de vitesse ont

convergé, on peut alors considérer que le profil Pabl(t) est représentatif du chargement induit par l’inter-

action laser-matière.

L’intérêt de la méthode mécanique-numérique est de pouvoir déterminer non seulement Pabl,max mais

aussi Pabl(t). Si le profil d’initialisation Pabl,0(t) est bien caractérisé, on peut alors définir Pabl(t) avec

un nombre restreint d’itérations. Dans le cas contraire, la définition d’un seul profil de chargement peut nécessiter un nombre important de calculs. Cette méthode semble donc difficilement applicable à la défi- nition du chargement dans des conditions d’irradiations (forme, modulations, durée, confinement) variées. En revanche, en opérant sur une installation à profil d’intensité temporel fixé et stable, cette méthode permet de définir une loi Pmax = f (Imax) permettant de prédire les chargements appliqués en fonction

des intensités.

Une comparaison de la méthode mécanique-analytique et de la méthode mécanique-numérique a été réalisée en régime confiné par eau dans des conditions d’irradiation similaires. Les résultats de cette com- paraison sont présentés sur la Figure 1.24.

Figure 1.24 – Comparaison des courbes Pabl,max = f (vmax) obtenues sur aluminium 500 µm avec la

méthode mécanique-analytique (bleu) et la méthode mécanique-numérique (magenta) - L’écart entre les deux (vert) est également représenté.

On remarque que les deux méthodes donnent des résultats sensiblement identiques, hormis les résultats obtenus dans des gammes de pressions plus élevées qui présentent des écarts relatifs de l’ordre de 15 % entre les deux méthodes. Cette différence est assimilable à la variation de l’atténuation hydrodynamique avec le niveau de pression qui est prise en compte dans les équations d’état des modèles numériques, à la différence de la méthode mécanique analytique qui définit δP comme constant.