A.6 Caractérisations électriques
A.6.1 Mesure de constante diélectrique
Principe de la mesure
Ce type de mesure n’était pas disponible à l’Institut Néel, nous avons donc décidé de mettre en place le montage
expérimental le permettant avec l’aide de Jacques Marcus et Bartosz Zawilski. En fait, il s’agit de mesurer la
capacité d’un condensateur plan, puisque celle-ci est reliée à la constante diélectrique via la relation suivante :
C =
0..S
d . (A.24)
Un condensateur est constitué d’un matériau diélectrique sous forme de lame (l’épaisseur est réduite au
maxi-mum) dont les deux grandes faces planes sont recouvertes d’électrodes.dest la distance entre les électrodes du
condensateur,S la surface de celles-ci,
0la permittivité du vide, et la constante diélectrique du matériau
for-mant le condensateur. La relationA.24est valable dans le cas où le condensateur est suffisamment plan, et que les
faces peuvent être considérées comme infinies, soit en pratique :S >> d
2. Il suffit donc de préparer le matériau
à étudier sous forme de lame et à recouvrir ses faces d’électrodes pour pouvoir en faire un condensateur, dont on
peut mesurer la capacité. La méthode retenue pour mesurer la capacité d’un condensateur est celle des 4 fils (voir
figureA.26), permettant ainsi d’éliminer la mesure de la résistance des fils.
F
IG. A.26:Schéma de principe de la méthode 4 fils de mesure de capacité d’un condensateur.
Une tensionV =V
0e
iωtde fréquenceωest appliquée sur le condensateur, via 2 fils, et le courantI =I
0e
iωt+φtraversant l’échantillon est mesuré via les deux autres fils, par un impédancemètre (LCR-meter commercial). Une
fois connusφet I
0, l’impédance complexe Z est calculée par l’appareil. Ce dernier nous laisse le choix quant
aux paramètres affichés. En effet, on peut obtenir le module de l’impédance|Z|, la phaseφ, le facteur de qualité
Q=
ImRe((ZZ))=tan(δ), le facteur de dissipationD= 1/Q, et selon le modèle électrique de l’échantillon qu’on lui
donne (capacité + résitance en série, ou parallèle), les capacités et résistances équivalentes. Le modèle choisi dans
notre cas est celui d’une capacité et d’une résistance en parallèle (figureA.27).
L’impédance équivalente vérifie :
1
Z =
1
R
p+jC
pω,
soit :
|Z|= q 1
1 R2 p+C
2 pω
2.
Or dans le cas d’échantillons isolants comme les oxides avec lesquels nous travaillont,R
p→ ∞, et donc :
F
IG. A.27:Schéma du modèle choisi pour nos échantillons : une capacité et une résistance en parallèle.
Seule la contribution de la capacité reste, le modèle est donc valable pour caractériser un condensateur. En fait,
une condition sur la fréquence de travail demeure, pour que le modèle soit valide. On doit avoirR
p>>
Cpω1, soit :
ω >> 1
C
pR
p.
F
IG. A.28:Réponses en fréquence de la partie réelle ’ (celle qui intervient dans l’expression de la
capacité) et imaginaire” (qui rend compte des pertes) de la permittivité.
La fréquence de la tension alternative appliquée aux bornes du condensateur-échantillon doit donc être
suffi-samment importante pour pouvoir mesurer une réponse purement capacitive. Une fréquence trop faible (< 1 kHz)
est de toute façon rédhibitoire dans la mesure où l’on peut avoir des effets extrinsèques polluant le signal, comme
indiqué sur la figureA.28. Une fréquence trop grande (> 1 MHz) n’est pas non plus conseillée car le système risque
de rentrer en résonance avec le circuit de mesure et la réponse de la constante diélectrique entre dans un domaine
où elle peut varier avec la fréquence et où les pertes ne sont plus négligeables (voir figureA.28).
Chapitre A - Techniques expérimentales
Montage expérimental
Le condensateur est réalisé à partir d’un échantillon monocristallin orienté et taillé en forme de lame, ou d’un
échantillon polycristallin pastillé (avec une épaisseur de pastille la plus fine possible) et fritté, recouvert sur ses
grandes faces d’un dépôt métallique jouant le rôle d’électrode. Le métal utilisé dépend du type de dépôt envisagé.
Pour l’argent, on utilise la pulvérisation cathodique, et pour l’indium, la méthode d’évaporation. Les 4 fils (2 sur
chaque électrode) sont collés aux électrodes au moyen de résine époxy contenant de l’argent (voir figureA.29). Un
autre type de porte-échantillon a aussi été fabriqué, afin de pouvoir changer plus facilement d’échantillon. Il s’agit
d’une plaque en bakélite recouverte d’une fine pellicule de cuivre, sur laquelle sont soudés à la base deux fils.
L’échantillon est posé sur la partie cuivrée, assurant le contact électrique avec une électrode, et maintenu (serré,
pincé) de l’autre côté par un plot relié à une autre plaque de cuivre plus épaisse et résistante, elle-même soudée
aux deux autres fils, et qui permet d’assurer le contact électrique tout en maintenant l’échantillon. C’est en fait une
sorte de "pince". La méthode des 4 fils est donc conservée, et il suffit de glisser le condensateur entre la plaque
cuivrée et le plot pour établir les contacts et mesurer la capacité.
Les câbles reliant le porte-échantillon à l’impédancemètre (HP 4284A) sont des câbles coaxiaux dont les
masses sont reliées entre elles, réalisant ainsi un blindage pour éviter de mesurer la capacités des câbles. Le
circuit de chauffage est réalisé avec un enroulement de fils de cuivre entourant la zone échantillon, tandis que la
température est déterminée par un thermocouple placé juste au niveau de l’échantillon. Ces deux éléments sont
reliés à l’électronique de régulation par des fils passant dans la canne de mesure. Au bout de la canne, la tête de
mesure (comprenant le porte-échantillon et le chauffage, comme sur la figureA.29) est fabriquée de façon à ce
qu’un dewar puisse la recouvrir, laissant l’ouverture en bas (quand la canne est en position de mesure, verticale,
tête en bas). Pour atteindre les basses températures, la canne est plongée directement dans une bouteille d’hélium.
Le dewar empêche la tête de mesure de se retrouver dans l’hélium liquide tout en assurant le transfert thermique.
F
IG. A.29:Photographies du montage expérimental de mesure de la capacité d’un échantillon. À
gauche est représentée le bas de la canne de mesure avec le chauffage recouvrant le
porte-échantillon. C’est par dessus le chauffage que l’on peut faire glisser le dewar permettant
de plonger dans l’hélium liquide. À droite est représenté un échantillon dont les électrodes
sont reliées par des fils au porte-échantillon.
seule-ment de mesurer les variations thermiques de la constante diélectrique, mais aussi d’éventuels effets
magnéto-diélectriques. Pour cela, on plonge (sans forcer) la canne de mesure dans un cryostat muni de bobines horizontales
pouvant créer un champ magnétique compris entre 0 et 6 T. L’avantage des bobines horizontales et qu’en faisant
tourner la canne autour de son axe, on modifie l’orientation de l’échantillon et donc la direction d’application du
champ magnétique par rapport au champ électrique
7. L’inconvénient réside dans la géométrie particulière associée
aux bobines dans le cryostat, qui limite le champ magnétique accessible. La précision de ce montage expérimental
est mesurée à environ 10
−13F.
Dans le document
Etude des Langasites magnétiques:<br />De la frustration magnétique au multiferroïsme
(Page 78-81)