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Chapitre 2 Cadre conceptuel

4.5 Les Works ou les travau

4.5.2 Le matériel rituel et le corps ritualisé

se sent mieux, il réintègre alors sa place. Si chaque participant tient une place particulière, le matériel rituel respecte d’autant plus un ordre précis.

4.5.2 Le matériel rituel et le corps ritualisé

La tradition du Santo Daime utilise un matériel rituel assez conséquent. Tout objet a une place déterminée et une fonction particulière. Cela se retrouve même avec l’uniforme que portent les fardados imposant ainsi une ritualisation du corps. Cela dit, concentrons-nous d’abord sur le matériel sacré utilisé par l’église daimiste québécoise. La salle louée porte les stigmates d’une salle de danse soit d’immenses miroirs sur deux pans de murs. À chaque rituel, ces murs sont couverts de tentures de style indien et des portraits en toile de Iemanjá (Orixá déesse de l’océan), des icônes du Christ et de la Vierge Marie notamment. Au coin gauche de la pièce sont disposées une table d’appoint et une statue de Bouddha, un élément important déterminé par l’église daimiste québécoise (celui-ci ne se retrouve pas dans les autres églises). Une console est placée plus loin derrière la table centrale. Celle-ci peut être conçue comme un autel d’une église catholique où l’eucharistie serait distribuée. Les églises brésiliennes et celles autorisées à faire usage du Daime déposent les jarres de thé sur cet autel. Suivant un Padrinho ou une Madrinha, le thé sera distribué respectivement aux hommes et aux femmes. Le matériel rituel le plus important se trouve sur la table centrale avec une croix de Caravaca38 assez

conséquente (environ de quarante-cinq à cinquante centimètres); quatre bougies représentant le soleil, la lune, les étoiles et les êtres divins. Les portraits photographiques

38 La croix de Caravaca est une croix à deux tiges, la seconde tige symbolise la seconde venue de Jésus sur

de Mestre Irineu et Padrinho Sebastião sont disposés sur la table ainsi que des fleurs fraiches. L’église daimiste québécoise entrepose également des cristaux qui, dans les traditions chamaniques, possèdent des pouvoirs énergétiques puissants. Cet élément est également une volonté de l’église, car dans la tradition, les pierres et les cristaux ne sont pas utilisés.

La culture rituelle du Santo Daime s’impose également au corps du membre. Ainsi, l’uniforme est de mise pour chaque travail. Pour le travail de Concentração, la farda bleue est de mise. Les femmes portent une longue jupe bleu marine et une chemise blanche à manches courtes agrémentée d’un nœudpapillon bleu-marine et de l’étoile de Salomon du côté droit ou gauche comme nous le disions plus tôt. L’église daimiste québécoise avait décidé de ne pas porter la couronne qu’elle estime inutile. Les hommes portent des pantalons à pince bleus une chemise blanche à manches courtes, et également un nœud papillon bleu-marine et l’étoile de Salomon. En accord avec ses guides et les membres de son église, la Madrinha souhaite réformer les uniformes qui sont parfois difficiles à porter. La farda branca (uniforme officiel blanc) est composé d’un jupon, d’une jupe longue blanche, d’une couronne, de bracelets, le tout est bien trop lourd à porter pour une femme. Ainsi, bientôt ces tenues seront changées pour des tenues plus légères et plus simples. La Madrinha estime par ailleurs que les uniformes ont beaucoup changé depuis le début, alors même que Mestre Irineu était encore vivant. Par conséquent, le Mestre et les autres êtres divins ne devraient pas être offensés par ces changements. La tradition daimiste d’églises brésiliennes notamment ritualise le corps avec l’ingestion du sacrement. Le corps des participants est alors entièrement inclus dans le rituel par la préparation antérieure et la diète à suivre. En effet, de nombreux aliments

sont incompatibles avec la prise du Daime (annexe 5), mais également des médicaments dont l’interaction avec le breuvage peut conduire à des états de santé préoccupants. Aussi, les effets secondaires de vomissement ou de diarrhée dus au sacrement sont perçus comme une purge des énergies négatives. D’autre part, la ritualisation du corps s’opère aussi par la notion de firmeza (fermeté, l’endurance) prônée par les enseignements de Mestre Irineu. En fait, la firmeza est un but à atteindre en soi; elle fait partie du développement du soi recherché dans la tradition daimiste. Les rituels du Santo Daime requièrent une endurance particulière du corps qui se départit des énergies négatives tout en chantant les hymnes et dansant. Cette firmeza est une technique corporelle pour reprendre les termes de Mauss (1936), puisqu’elle discipline à quelques égards les corps en l’entrainant à subir un assainissement (purge) et une amélioration du Soi pour s’ouvrir au sacré, au pardon, à la bienveillance et à l’amour de soi et des autres. Aussi, nous abondons dans le sens de Mossière qui voit le corps « comme une entité ajustable et malléable, ouverte à des possibilités d’amélioration par le respect de procédures religieuses et sociales précises » (2011 : 137). La fermeté daimiste inscrit le corps dans un processus de discipline et d’apprentissage dans le but de faire progresser son Soi afin de devenir un être à l’image du Christ. La ritualisation du corps par l’uniforme, la discipline et l’apprentissage du corps constituent l’un des éléments clés de l’ordre rituel établi dans la tradition du Santo Daime, mais il ne s’agit pas là du seul comme nous allons le voir.

4.5.3 L’ordre rituel

Chaque rituel qu’il soit religieux ou non observe un ordre particulier. Dans le culte du Santo Daime, l’ordre rituel est un sujet ayant fait l’objet de nombreuses