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Chapitre 2 Cadre conceptuel

4.5 Les Works ou les travau

4.5.3 L’ordre rituel

sont incompatibles avec la prise du Daime (annexe 5), mais également des médicaments dont l’interaction avec le breuvage peut conduire à des états de santé préoccupants. Aussi, les effets secondaires de vomissement ou de diarrhée dus au sacrement sont perçus comme une purge des énergies négatives. D’autre part, la ritualisation du corps s’opère aussi par la notion de firmeza (fermeté, l’endurance) prônée par les enseignements de Mestre Irineu. En fait, la firmeza est un but à atteindre en soi; elle fait partie du développement du soi recherché dans la tradition daimiste. Les rituels du Santo Daime requièrent une endurance particulière du corps qui se départit des énergies négatives tout en chantant les hymnes et dansant. Cette firmeza est une technique corporelle pour reprendre les termes de Mauss (1936), puisqu’elle discipline à quelques égards les corps en l’entrainant à subir un assainissement (purge) et une amélioration du Soi pour s’ouvrir au sacré, au pardon, à la bienveillance et à l’amour de soi et des autres. Aussi, nous abondons dans le sens de Mossière qui voit le corps « comme une entité ajustable et malléable, ouverte à des possibilités d’amélioration par le respect de procédures religieuses et sociales précises » (2011 : 137). La fermeté daimiste inscrit le corps dans un processus de discipline et d’apprentissage dans le but de faire progresser son Soi afin de devenir un être à l’image du Christ. La ritualisation du corps par l’uniforme, la discipline et l’apprentissage du corps constituent l’un des éléments clés de l’ordre rituel établi dans la tradition du Santo Daime, mais il ne s’agit pas là du seul comme nous allons le voir.

4.5.3 L’ordre rituel

Chaque rituel qu’il soit religieux ou non observe un ordre particulier. Dans le culte du Santo Daime, l’ordre rituel est un sujet ayant fait l’objet de nombreuses

recherches, il convient cependant d’y porter une attention particulière afin de nous informer sur le caractère collectif et normatif que le rituel revêt dans son implantation canadienne. Dawson, d’ailleurs, analyse l’ordre rituel daimiste à travers le concept de régulation des corps de Foucault lequel estimait que l’ordre se créait et se maintenait par des « régulations symboliques » de l’espace et du temps (1992 : 45). Ainsi, l’auteur explique que toute règlementation de l’espace physique où se déroule le rituel régule le corps du participant inévitablement. Au-delà de cette règlementation physique et spatiale, des idéaux hiérarchiques et normatifs opèrent dans l’espace rituel. Aussi, l’affectation des individus à des places précises et à des rôles spécifiques les inclut dans ce processus de régulation symbolique. En ce sens, Couto (2004) estime que l’orthopraxie des daimistes sous-tend leur soumission à l’Empire Juramidam (Imperio Juramidam) qu’est l’astral. Aussi, selon l’anthropologue l’efficacité du rituel tient dans la stricte observance de ces principes par les fidèles (Couto 2004 : 395). Nous avons par ailleurs constaté à plusieurs reprises l’orthopraxie dont les membres de l’église daimiste québécoise faisaient preuve lors des répétitions des hymnes. Certains hymnes étaient étudiés et chantés plusieurs fois afin d’obtenir soit un unisson harmonieux soit une la tonalité d’un vers par exemple. La précision de l’entonnement des hymnes suscitait une attention particulière chez les daimistes observés. Ceci étant, de notre côté, nous concevons les rituels daimistes à travers les principes de communitas et de societas que Turner (1990) définit comme une tension entre la contre structure et la structure. En effet, les églises daimistes disposant du droit à l’usage rituel du Daime, démontrent une cohésion sociale notoire durant l’ingestion du breuvage. En fait, l’action individuelle que le Daime opère sur le participant permet de renforcer la collectivité en vivant l’expérience de la communitas à

travers le processus de liminalité; soit lorsque ceux-ci passent d’un état d’individu ancré dans le monde des incarnés à celui de la communion avec l’astral étant le monde des désincarnés. La situation particulière des églises et des groupes daimistes du Canada possède un point commun : celui de la lutte pour la légalisation. Certains vont fonctionner contre la structure mise en place par l’état régulant les corps à ne pas user de leur sacrement et vont créer une contre structure dont les limites physiques et temporelles seront transcendées lors de l’ingestion du thé. Émergera alors une cohésion sociale interne agissant en parallèle de l’ordre et des normes établis par cet état. Vivre la communitas pendant les rituels du Santo Daime régit finalement l’ordre symbolique et hiérarchique de l’église avec à la tête de celle-ci les êtres de l’astral chapeautant les membres allant de la Madrinha, dans notre cas, aux fidèles les plus expérimentés puis aux néophytes. Mais quel est donc cet Empire de Juramidam? De quel patrimoine spirituel parle-t-on exactement? Et si les adeptes acceptent de se soumettre, quelle en est la raison?

4.6 Le patrimoine des entités spirituelles et la guérison

Ce que nous nommons patrimoine spirituel regroupe les entités avec lesquelles les fardados ont des interactions et travaillent. Le terme travailler ici connote un échange entre les êtres divins venus de l’astral et les incarnés dans l’espace rituel ou parfois ailleurs comme nous pourrons le voir dans le chapitre 5. Aussi, cet échange favorise la circulation des énergies, le nettoyage de mauvaises énergies et par conséquent la guérison. Le patrimoine daimiste est vaste et l’astral contient des entités originaires de plusieurs traditions. En effet, puisque le Santo Daime est une religion syncrétique, elle présente des êtres des traditions catholiques ou chrétiennes avec des saints comme le