• Aucun résultat trouvé

4° Autres marqueurs de CSC du sein et associations de marqueurs

Bien que les travaux utilisant les marqueurs CD24/CD44, ALDH et SP représentent une très grande majorité de la littérature des CSC du sein, quelques autres marqueurs ont été proposés pour identifier et isoler ces CSC, souvent en association avec les phénotypes les plus courants.

CD133/prominin1

La protéine de surface CD133/prominin1 est un marqueur utilisé couramment pour isoler les CSC du glioblastome et du cancer colorectal, entre autres (Charafe-Jauffret et al, 2009a). Son utilisation dans le glioblastome a été proposée pour la première fois en 2004 par Singh et al., qui ont montré que 100 cellules CD133+ de glioblastome ou médulloblastome injectées à des souris NOD/SCID peuvent former des tumeurs hétérogènes, tandis que les cellules CD133- ne forment pas de tumeurs (Singh et al, 2004). La valeur clinique de CD133 dans le sein a été examinée par quelques études, parmi lesquelles celle de Zhao et al., qui concluent à son intérêt dans la prédiction du pronostique des cancers triple-négatifs (Zhao et al, 2011). Dans les études in vitro, CD133 est généralement utilisé en association avec d’autres marqueurs de CSC. Ainsi, Croker et al. ont étudié le pouvoir métastatique de cellules triées à partir de lignées cancéreuses mammaires humaines en fonction de leurs phénotypes ALDH, CD24, CD44 et CD133 (Croker et al, 2008). Leurs travaux montrent que les cellules de type ALDH+/CD44+/CD24- et ALDH+/CD44+/CD133+ se divisent plus vite, forment plus de colonies, sont plus invasives in vitro, et sont plus métastatiques in vivo que les cellules de type ALDH+/CD44-.

CD201/PROCR

Le récepteur de surface PROCR est un marqueur de cellules souches embryoniques, neurales, hématopoïétiques et folliculaires (Ivanova et al, 2002). Dans le sein, ce marqueur serait étroitement associé à l’expression de la protéine CD44. Ainsi toutes les cellules CD44+ sont également PROCR+, d’après l’étude de Shipitsin et al., qui démontre les similarités

67

moléculaires existant entre les cellules cancéreuses de type CD44+/PROCR+ et les cellules souches normales (Shipitsin et al, 2007). Les cellules CD44+/PROCR+ présentent en outre une signature moléculaire composée de gènes impliqués dans la mobilité cellulaire, l’invasion, l’apoptose et le remodelage de la matrice extra-cellulaire. Cette signature est validée en clinique et corrélée à un mauvais pronostique, mais indépendante de l’expression du récepteur ER et du grade tumoral.

Différents marqueurs, signatures de tumeurs hétérogènes ?

Comme vu précédemment, un grand nombre de marqueurs de CSC du sein ont été proposés depuis une dizaine d’années, et il existe des arguments en faveur de chacun de ces marqueurs. Faut-il alors considérer que ces différents marqueurs sont le reflet de l’hétérogénéité des tumeurs du sein et que la diversité des phénotypes proposés résulte de la diversité des sous- types de cancer du sein existant ? C’est l’hypothèse émise par Hwang-Verslues et al., à partir du phénotypage de différentes lignées mammaires et tumeurs primaires humaines, selon les marqueurs CD24, CD44, CD133, PROCR, ABCG2, ESA et ALDH (Hwang-Verslues et al, 2009). Cette étude soulève plusieurs points intéressants. D’une part, les marqueurs CD24- /CD44+ et ALDH+ les plus couramment utilisés pour étudier les CSC du sein ne seraient pas forcément adaptés à tous les sous-types de cancers du sein, et le marquage PROCR+/ESA+ permettrait en général d’identifier les cellules les plus tumorigéniques. D’autre part, l’hétérogéneité des phénotypes observés serait le reflet de différentes lignées cancéreuses originaires de plusieurs cellules cancéreuses ayant proliféré indépendamment, et qui cohabiteraient au sein d’une même tumeur. Plus récemment, différents auteurs ont postulé que les marqueurs présent dans la tumeur reflèterait l’identité de la cellule cancéreuse d’origine et le sous-type cancéreux (Ricardo et al, 2011; Visvader, 2011) (figure 23). Ainsi, les cellules CD24-/CD44+ signeraient les carcinomes basaux issus de la cancérisation de cellules mammaires indifférenciées, tandis que le phénotype ALDH+ permettrait d’identifier les tumeurs basal-like et HER2+ originaires de la cancérisation de progéniteurs luminaux. Enfin, le phénotype CD24+/CD44- serait une signature de tumeurs luminales A (Ricardo et al, 2011; Schmitt et al, 2012).

68

Figure 23 : Association entre les sous-types moléculaires de cancers du sein, la transition épithéliale-mésenchymateuse et l'expression des marqueurs de CSC

(Adapté de Schmitt et al, 2012)

Finalement, l’étude de Lehmann et al. contredit clairement les travaux sur les différents marqueurs de CSC (Lehmann et al, 2012). Ces auteurs ont dérivé deux lignées cellulaires à partir de deux tumeurs primaires, et ont cultivé ces lignées sous forme de couche adhérente ou de mammospheres. Pour une des deux lignées seulement, les cellules cultivées en mammospheres sont plus tumorigéniques in vivo que les cellules adhérentes, tandis que pour l’autre lignée les tumorigénicités sont équivalentes. Les lignées les plus tumorigéniques ne sont enrichies ni en cellules CD24-/CD44+, ni en cellules ALDH+, ni en cellules SP. De plus, il n’y a pas de surexpression dans ces cellules des facteurs Oct3, Sox1, Sox2 et Nanog, bien qu’une légère surexpression des facteurs d’EMT Snail2 et Twist1 et des facteurs KLF4 et Notch3 soit détectée. Ces auteurs concluent à l’invalidité des marqueurs de CSC proposés, et statuent sur l’existence de marqueurs de CSC encore non déterminés, ainsi que sur l’importance des facteurs environnementaux dans la modulation des phénotypes de CSC. Il est toutefois intéressant de souligner le faible nombre de tumeurs utilisées pour cette étude, ainsi que l’absence de précisions quant à l’origine histopathologique de ces tumeurs, qui a pu influencer les résultats comme vu précédemment.

69