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LE MARIAGE RELIGIEUX DES ESCLAVES

Dans le document LES ESCLAVES CHRÉTIENS (Page 137-151)

I

La famille n'existait pour les esclaves que dans les limites et sous les conditions imposées par la volonté des maîtres. Nulle loi pour assurer la durée à leurs unions, nulle loi pour empêcher ces unions de se con-dure en violation des droits les plus sacrés de la nature : promiscuité, fragilité, licence, voilà ce que fut le mariage pour l'esclave antique.

Le christianisme, en élevant le mariage à la dignité de sacrement, et en ouvrant aux esclaves l'accès de tous ses sacrements, modifia pour eux cette situation.

Appelés, comme tous les autres fidèles, à devenir, selon l'expression de saint Augustin, les pères et les mères du peuple de Dieu1, les esclaves purent, dans les maisons chrétiennes, se marier dans le Seigneur, c'est-à-dire contracter des unions solides, honorées, empreintes, à leurs propres yeux et aux yeux de leurs maîtres, d'une dignité surnaturelle. Le mariage d'une humble servante, vis-à-vis de laquelle, selon la loi romaine, il n'y avait pas d'adultère, devint, selon la loi ecclésiastique, l'égal de celui de la matrone, si sévèrement protégé par le droit civil. Pour le mariage comme pour toutes les choses qui touchaient à la vie de l'âme, il n'y eut pas, dans la société chrétienne, de différence entre l'homme libre et l'esclave, tous étant un dans le Christ et le Christ étant un en tous.

Ainsi fut affirmée, dès le début de la société chrétienne, l'indépendance du mariage religieux. Pas de mariage pour l'esclave, dit la loi romaine ; un mariage aussi stable et aussi sacré pour l'esclave que pour l'homme libre, répond la loi ecclésiastique, proclamant par là qu'en cette matière elle est distincte du droit civil et vraiment souveraine. De même l'Église, obéissant aux paroles de Jésus-Christ2 et suivant l'enseignement formel de saint Paul3, déclara le mariage indissoluble, se plaçant ainsi en opposition avec la loi civile, qui permettait le divorce.

On comprend quel fut, à l'égard de l'esclave, l'effet de cette attitude de l'Église.

Pourquoi la loi romaine ne voulait-elle pas que le contubernium de l'esclave devint un véritable conjugium ? Parce que l'esclave est essentiellement un être sans droits. Or le mariage confère aux époux des droits l'un sur l'autre et sur leurs enfants : cela est contraire à l'idée même de l'esclavage. Le christianisme, en donnant à l'esclave la faculté de contracter le mariage religieux, le tire de cet état d'être sans droits, qui l'assimilait presque à l'animal, pour lui rendre la dignité de la personne humaine ; et, en déclarant indissoluble tout mariage, il enlève au maître, si celui-ci est chrétien, la faculté de rompre à son gré les unions contractées par ses esclaves ; il donne à l'esclave d'un maître païen le droit et même le devoir de ne pas obéir, en cette matière, aux ordres qu'il recevrait ; de se considérer, même séparé de force, comme l'époux de son premier conjoint ; de refuser d'en accepter un autre. En dépit de tous les commandements des maîtres, il applique aux esclaves comme aux personnes libres cette solennelle parole de l'apôtre : A ceux qui sont unis par le mariage,

1 S. Augustin, De virginitate, 1.

2 S. Matthieu, V, 31, 32 ; S. Marc, X, 11 ; S. Luc, XVI, 18.

3 I Cor., VII, 10, 11.

j'ordonne, non pas moi, mais le Seigneur, que la femme ne quitte point son mari, ou, si elle le quitte, qu'elle demeure sans époux... Et de même, que le mari ne répudie point sa femme1.

En un mot, il rend à l'esclave, en cette matière comme en tant d'autres, la puissance de dire non, c'est-à-dire l'attribut essentiel de la personne libre.

Qu'on ne s'étonne pas si, dès le ter siècle, les esclaves se convertirent en si grand nombre au christianisme. Les esclaves n'étaient pas tous, comme ceux mis en scène par le Querolus, tellement énervés qu'ils eussent perdu jusqu'au désir de la liberté : la plupart, au contraire, s'efforçaient de devenir libres, et, s'ils n'y pouvaient réussir, essayaient au moins de reproduire dans leur vie une image de celle de l'homme libre. De là ces nombreux collegia qu'ils instituaient entre eux, et où ils avaient des élections, des dignités, des conseils, tout l'appareil d'une petite république ; de là ces anneaux qu'ils portaient au doigt à l'imitation des hommes libres, et dont ils dissimulaient avec tant de soin sous un revêtement d'or le métal grossier que la loi les obligeait de choisir2 ; de là des efforts pour donner à leurs unions les apparences du mariage légal, comme cette quasi-dot que la femme esclave se constituait quelquefois sur son pécule3 : de là encore l'affectation touchante avec laquelle beaucoup de couples esclaves, au lieu du nom servile de contubernales prenaient celui plus honoré, et réservé aux personnes libres, de conjuges. Il existe, dit Orelli, plus de six cents inscriptions funéraires dans lesquelles des esclaves contubernales emploient le nom honnête d'époux4. Ils essayaient ainsi de reproduire, dans leur vie destituée de tout droit réel, une ombre de la véritable vie sociale et domestique : pareils à cette captive de race royale qui, pour tromper ses regrets, avait construit sur un petit coin de terre un vain simulacre de Troie perdue et toujours rêvée :

... parvam Trojam, simulataque magnis

Pergama, et arentem Xanthi cognomine rivum5.

Le christianisme donnait aux esclaves plus que des apparences ; il leur restituait des droits réels, les remettait en possession de leur conscience et de leur personne ; il faisait d'eux, sous une multitude de rapports, et sur tous les sujets fondamentaux de la vie humaine, les égaux des libres ; en matière de mariage, il leur rendait des unions consacrées, protégées, indissolubles. Ils retrouvaient ainsi dans la société surnaturelle des chrétiens tous les droits que la société civile leur déniait. Ils y puisaient de plus la force de répondre par un refus à tout ordre qui aurait tenté de violer en eux ces droits recouvrés. Quoi d'étonnant si tout ce qui, parmi les esclaves, n'était pas entièrement corrompu, avait conservé l'aspiration naturelle vers l'égalité, la liberté, l'amour honnête et durable, se précipita vers le christianisme consolateur et réparateur ?

Rien n'est remarquable comme la sollicitude de l'Église primitive pour la pureté et la régularité de la vie de famille chez les esclaves.

1 I Cor., VII, 10, 11. — S. Grégoire le Grand qualifie de crime énorme, tantum nefas, la séparation violente de deux esclaves mariés, et menace des censures ecclésiastiques l'évêque qui l'avait soufferte dans son diocèse. Ép. III, 12, ad Maximianum.

2 Pline, Hist. nat., XXXIII, 6.

3 Si serva servo quasi dotem dederit... Ulpien, au Dig., XXXIII, III, 39.

4 Orelli, 2846. cf. Paul, Ulpien, au Dig., XXXIII, II, 14, § 3 ; VII, 12, §§ 7, 33.

5 Virgile, Énéide, III, 348.

Elle imposa d'abord aux maîtres un devoir nouveau, inconnu de l'antiquité païenne : le respect de ceux qui leur sont soumis. On a bien des fois cité le mot de M. Guizot : L'Église catholique est une grande école de respect ; cela fut vrai dès les premiers siècles. Clément d'Alexandrie parle des égards que l'on doit avoir pour les mœurs et la vertu des esclaves, en termes qui, de son temps, devaient paraître incompréhensibles à quiconque n'était pas chrétien. Il faut, dit-il, dans sa maison avoir le respect des parents et des esclaves ; dans la rue, de ceux que l'on rencontre ; aux bains, des femmes1 ; dans la solitude, de soi-même ; en tout lieu, du Verbe divin qui est en tout lieu2. Ce respect des esclaves, selon Clément d'Alexandrie, doit être poussé si loin que, dans la crainte d'enflammer leur imagination, il conseille aux maîtres qui sont mariés de ne pas embrasser leur femme en présence de ceux-ci3. Cette délicatesse extrême, excessive, montre bien quelle était la profondeur du mal contre lequel le christianisme se sentait pressé de réagir.

Au devoir de ne pas scandaliser les esclaves, Clément d'Alexandrie en ajoute un autre : surveiller sévèrement leurs mœurs. On ne doit pas souffrir, dit-il, que les suivantes d'une femme vertueuse se livrent à des paroles ou à des actes déshonnêtes : leur maîtresse doit les corriger... Car la conduite vicieuse de l'esclave rejaillit sur la maîtresse ; son indulgence pour de légères fautes engage à en commettre de plus graves ; en pardonnant des actions honteuses, la maîtresse parait n'en pas avoir horreur4.

Ce soin des mœurs des esclaves doit aller jusqu'à la contrainte : saint Jean Chrysostome a sur ce point un curieux passage. Un homme chaste et doux, dit-il, ayant en sa possession une esclave lascive, lui impose des limites, des mesures, lui défend de sortir du vestibule, d'approcher des passants, quelquefois même lui attache des entraves aux pieds, afin de guérir son intempérance5.

Ces maximes avaient passé dans la discipline de l'Église, telle que nous la voyons résumée dans le recueil des Constitutions apostoliques. J'ai dit au commencement de ce chapitre, et plus en détail dans un autre, quel était le sort des unions d'esclaves : nulle loi ne les reconnaissait, nulle disposition pénale n'en réprimait les écarts, pour elles l'adultère, l'inceste même n'existaient pas. Contre les désordres inséparables d'une telle situation (les inscriptions nous les révèlent) l'Église se montrait implacable : imitant la conduite de saint Paul à l'égard de l'incestueux de Corinthe, elle retranchait de sa communion les esclaves qui vivaient dans l'adultère ou dans une liaison plus coupable encore. Tel me parait le sens de ce passage des Constitutions : Le chrétien et la chrétienne esclaves, vivant ensemble dans le désordre, doivent ou se séparer, ou être rejetés de l'Église6. On ne peut entendre autrement ce texte, qui pris à la lettre semblerait dire que le mariage n'était pas possible entre esclaves, interprétation absurde, repoussée par tous les documents de l'antiquité chrétienne.

1 Allusion aux bains communs aux deux sexes qui étaient en usage à cette époque. Sur les efforts des meilleurs empereurs et du christianisme pour détruire cette coutume immorale, voir le commentaire de Godefroi sur le livre IX, titre III, loi 3, du Code Théodosien.

2 Clément d'Alexandrie, Pædagogium, III, 5.

3 Clément d'Alexandrie, Pædagogium, III, 12.

4 Clément d'Alexandrie, Pædagogium, III, 11.

5 S. Jean Chrysostome, In Genesim, Homilia, XXXVI, 4.

6 Const. apost., III, 34.

Au contraire, les mêmes Constitutions font à l'esclave un devoir de se marier légitimement : elles font au maître une obligation de favoriser le mariage de ses esclaves. Si l'esclave a un maitre chrétien, et si ce maître, sachant que son esclave vit dans le désordre, ne lui donne pas une femme, si de même il ne donne pas un mari à la femme esclave, qu'il soit excommunié1. Et quelques lignes plus haut : Si l'esclave admis au baptême a une femme, ou si la servante a un mari, qu'on leur enseigne à se contenter l'un de l'autre ; s'ils ne sont pas mariés, qu'ils apprennent à ne plus vivre dans l'impureté, mais à s'unir par un légitime mariage2.

A la fin du IVe siècle, saint Jean Chrysostome imposait aux maîtres le même devoir : avec sa vive imagination il se représente une maîtresse frappant une de ses esclaves, et l'apostrophe en ces termes : C'est une honte de frapper une femme. — Mais si elle vit dans le désordre ? — Marie-la. — Suis-je donc sa gardienne ? — N'a-t-elle pas la même âme que toi ?3

Quand les écrivains chrétiens parlent ainsi de marier les esclaves, il ne s'agit pas, dans leur pensée, d'une liaison fortuite et passagère, comme celles que laissait se nouer et se dénouer la tolérance des maîtres païens, mais bien d'un véritable mariage religieux, d'un mariage légitime, selon l'expression répétée deux fois par les Constitutions, du sacrement que saint Paul a proclamé grand4 et dont saint Ignace a dit : Il convient que les fiancés et les fiancées se marient devant l'évêque, afin que les noces se fassent selon le Seigneur, non selon la cupidité5. Les Pères du IVe et du Ve siècle ont écrit des pages bien éloquentes sur le respect dû à la vertu des esclaves : on sent dans leurs livres et dans leurs discours l'impatience généreuse que leur causait la vue d'une société où le christianisme avait triomphé, mais où, dans les détails de la vie et des mœurs, dans les lois mêmes, le paganisme avait conservé une grande partie de sa puissance. Saint Jean Chrysostome attaque dans un de ses sermons les cérémonies licencieuses qui, de son temps, accompagnaient les noces : il réprouve surtout les chœurs de jeunes filles et de jeunes gens qui chantaient en l'honneur des époux d'impurs épithalames. Allant au devant de l'objection : Mais, direz-vous, ces chanteuses ne sont pas des jeunes filles de naissance libre et de bonne famille. Vous êtes donc d'avance d'accord avec mes paroles. Car si ces choses étaient honnêtes, vous laisseriez d'autres jeunes filles s'y livrer. Et vous le permettez à celles-ci, parce qu'elles sont pauvres ! Est-ce qu'elles ne sont pas vierges, et leur chasteté n'est-elle pas précieuse ?... Et si vous me répondez que vous choisissez pour ces choses des jeunes filles esclaves, je ne m'arrêterai pas devant cette réponse : car il ne fallait pas laisser faire cela à des esclaves. Là est la source de tous les maux : nous n'avons aucun souci de nos esclaves : nous disons : C'est un esclave, c'est une servante, quoique, tous les jours, on entende ce mot de l'apôtre : Dans le Christ Jésus il n'y a ni esclave ni libre6.

Les Pères du IVe et du Ve siècle s'efforcent surtout de combattre l'idée toute païenne qui met entre l'adultère de la femme et celui de l'homme une différence, la première étant considérée comme coupable moralement et légalement quand

1 Const. apost., VIII, 32.

2 Const. apost., VIII, 32.

3 S. Jean Chrysostome, In Ep. ad Ephes. 4, Homilia XV, 3.

4 Ad Ephesios, V, 32.

5 S. Ignace, Ad Polycarpum, 5.

6 S. Jean Chrysostome, In I Cor. Homilia III, 6, 7.

elle est infidèle à son mari, celui-ci, au contraire, ayant toute licence de devenir infidèle à sa femme, pourvu que son amour ne s'adresse qu'à des esclaves ou à des courtisanes. Lactance, saint Ambroise, saint Grégoire de Nazianze, saint Jérôme, saint Jean Chrysostome, saint Augustin, s'élèvent avec éloquence contre cette distinction, que favorisait la tolérance des lois civiles. Si quelqu'un est marié, dit Lactance, il ne peut entretenir de liaison avec une autre femme, soit esclave, soit libre : car nous ne suivons pas ici le droit civil, qui considère comme adultère l'épouse infidèle à son mari, et laisse impunie l'infidélité de celui-ci1. Que personne, dit saint Ambroise, ne se flatte de la vaine tolérance des lois humaines. Toute infidélité est adultère, et ce qui est défendu à la femme n'est pas permis au mari... De telles passions détruisent l'amour conjugal, favorisent l'insolence des femmes esclaves, divisent les époux, donnent de l'audace à la concubine, enlèvent au mari toute pudeur2. Ne m'objectez pas, s'écrie saint Jean Chrysostome, les lois qui traînent en prison les épouses coupables d'adultère et ne punissent pas les maris qui ont séduit leurs esclaves : moi, je vous citerai la loi de Dieu, qui punit de même le mari et la femme, et appelle du même nom la faute de l'un et de l'autre3. Je vais vous montrer, dit-il ailleurs, comment jugent non-seulement les gens du peuple, mais même ceux qui ont dû être les plus sages, ceux qui ont fait les lois... Si quelqu'un dérobe un vêtement, coupe une bourse, on lui déchire les côtes, souvent on le punit de mort ; mais celui qui blasphème Dieu n'est pas accusé par la législation civile, et si un homme marié séduit une esclave, cela ne paraît rien ni au législateur, ni à beaucoup4.

Personne n'a traité ce sujet, alors si délicat et si brûlant, en termes plus forts que ne le fait saint Augustin dans un de ses sermons au peuple d'Hippone. Une coutume perverse et universelle fait loi aujourd'hui : elle est presque acceptée par les femmes elles-mêmes, qui se figurent que les mêmes choses peuvent leur être défendues et être permises aux hommes. Elles ont entendu raconter qu'une femme a été traduite devant le tribunal, parce qu'on l'a surprise avec un esclave : elles n'ont jamais entendu parler d'hommes poursuivis pour une liaison avec une fille esclave : et cependant le péché est le même... Direz-vous pour vous excuser, continue l'évêque : Je ne m'adresse pas à l'épouse d'autrui, mais à mon esclave ? Vous mériteriez que votre femme vous répondit : Je ne trompe pas mon mari avec l'époux d'autrui, mais avec mon esclave ! Et ici l'évêque, comme effrayé d'une telle parole, trace le tableau touchant de la douleur et de la patience d'une épouse chrétienne. Non, s'écrie-t-il, qu'il n'en soit pas ainsi ! Elle souffre, mais elle ne vous imite pas... Le Christ parle aux honnêtes femmes, dans le secret de leur cœur : il leur dit des choses qu'un indigne mari ne peut entendre : il leur parle au dedans, il s'entretient avec elles et les console comme ses filles. Saint Augustin se tourne de nouveau vers les hommes, il leur reproche la vanité de leurs jugements : Vous avez horreur des faux témoins : vous appelez ravisseur celui qui convoite le bien d'autrui : et si quelqu'un se vautre dans la fange avec ses esclaves, on l'aime, on lui sourit, son péché devient matière à plaisanterie5... Vous dites : J'ai pour concubine non une femme mariée, pas même une courtisane, mais mon esclave : est-ce que je ne puis faire

1 Lactance, Div. Inst., VI, 3. Cf. Epitome Div. Inst., 66.

2 S. Ambroise, De Abraham., I, 4 ; Cf. II, 11.

3 S. Jean Chrysostome, In illud : Propter fornicationem, etc., Homilia I, 4.

4 S. Jean Chrysostome, In I Cor. Homilia XII, 4, 5.

5 S. Augustin, Sermo IX, 4, 9.

dans ma maison ce qui me plaît ? Je dis, moi : Vous ne le pouvez pas. Ils vont en enfer, ceux qui vivent ainsi1.

Si les lois et les mœurs païennes ne considéraient pas comme adultère la liaison d'un homme marié avec une fille esclave, elles ne donnaient pas davantage ce' nom à la violation par les maîtres de l'union conjugale de leurs esclaves. Ici encore les Pères de l'Église se séparent avec une grande énergie des préjugés immoraux qui de la société païenne avaient passé, à la faveur de la paix, dans la société chrétienne encore mal affermie. Ils proclament bien haut que porter le trouble et la honte dans l'humble ménage des esclaves unis par le mariage chrétien est aussi coupable que si une telle action s'adressait aux personnes les plus élevées en dignité. A leurs yeux, le mariage des esclaves est aussi sacré, aussi véritable que celui des personnes libres. La maison de chaque homme est une cité, dit saint Jean Chrysostome... il y a là aussi une hiérarchie : le mari a pouvoir sur la femme, la femme sur les esclaves, les esclaves sur leurs épouses, les hommes et les femmes sur leurs enfants2. Il est impossible de reconnaître plus clairement la validité du mariage des esclaves, et les droits qui en découlent. Que vous ayez séduit une reine, continue-t-il, ou que vous ayez séduit

Si les lois et les mœurs païennes ne considéraient pas comme adultère la liaison d'un homme marié avec une fille esclave, elles ne donnaient pas davantage ce' nom à la violation par les maîtres de l'union conjugale de leurs esclaves. Ici encore les Pères de l'Église se séparent avec une grande énergie des préjugés immoraux qui de la société païenne avaient passé, à la faveur de la paix, dans la société chrétienne encore mal affermie. Ils proclament bien haut que porter le trouble et la honte dans l'humble ménage des esclaves unis par le mariage chrétien est aussi coupable que si une telle action s'adressait aux personnes les plus élevées en dignité. A leurs yeux, le mariage des esclaves est aussi sacré, aussi véritable que celui des personnes libres. La maison de chaque homme est une cité, dit saint Jean Chrysostome... il y a là aussi une hiérarchie : le mari a pouvoir sur la femme, la femme sur les esclaves, les esclaves sur leurs épouses, les hommes et les femmes sur leurs enfants2. Il est impossible de reconnaître plus clairement la validité du mariage des esclaves, et les droits qui en découlent. Que vous ayez séduit une reine, continue-t-il, ou que vous ayez séduit

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