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Conclusion partielle

Chapitre 2.3. Méthodologie de l'analyse des lacs insulaires

2.3.3 Méthodologie de l'analyse biologique

Identifier les différents organismes vivants peuplant les milieux aquatiques constitue un des indicateurs fondamentaux de l’état de santé d’un écosystème. La composition faunistique et floristique d’un milieu résulte de l’ensemble des facteurs écologiques qui le conditionnent (climat, régime hydrologique, composition physico-chimique des eaux, morphologie du site, influence anthropique…). Ainsi ces indicateurs biologiques sont des compléments intéressants aux indicateurs physico-chimiques car ils intègrent les impacts sur la faune et la flore et permettant de voir l’évolution des écosystèmes à différentes échelles de temps. La particularité de l’observation

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des espèces faunistiques et floristiques dans un espace insulaire repose sur la question de l’endémisme149, avec le développement d’espèces spécifiques possédant un comportement et des caractéristiques propres. De plus, le contexte tropical humide favorise le développement d’écosystèmes riches qui font de ces îles de véritables réservoirs de biodiversité.

2.3.3.1. Espèces faunistiques.

Parmi les espèces recensées, il faut différencier les espèces terrestres (oiseaux, rongeurs, animaux divers), et les espèces aquatiques (poissons et invertébrés) ; chacune nécessite des techniques d’observation adaptées.

L’observation des espèces terrestres se base sur une technique de recensement régulier afin d’établir un état des lieux ponctuel des écosystèmes. Les espèces terrestres sont recensées par des organismes spécialisés (Office National des Forêts, Conservatoire des Mascarins…) mais aussi diverses associations (SEOR150, SREPEN…) grâce à des techniques d’observation (comptages) ou de piégeage qui permettent d’établir ou non leur présence. Les recensements ainsi effectués, il est possible de vérifier l’évolution des groupes afin d’établir des mesures de protection en cas de diminution dangereuse ou des mesures de limitation face à une prolifération incontrôlée. Ne disposant pas des éléments techniques permettant d’effectuer des captures d’espèces terrestres comme les oiseaux ou certains mammifères de petites taille, nous avons donc effectué des observations lors des visites de terrain, aidé en cela par un référentiel faunistique151. Nous baserons donc l’essentiel de l’analyse de ces espèces terrestres sur les observations de terrain et les conclusions des divers organismes spécialisés en ce domaine. Ces espèces terrestres constituent la partie visible des écosystèmes et suscitent donc l’intérêt des touristes qui viennent les observer dans leur milieu naturel. Ainsi l’avifaune observable sur l’Etang Saint Paul de La Réunion est l’une des plus exceptionnelle de l’île ; elle attire des amateurs de tout l’océan Indien. Ces oiseaux constituent un patrimoine fondamental et une identité pour l’île dont certains oiseaux comme le paille en queue ou le papangue (photo.13) sont devenus des symboles (dessins, sculptures, bijoux…) pour les populations locales. Cependant ces espèces terrestres ne représentent qu’une part réduite de notre recherche qui va se centrer essentiellement sur le monde aquatique.

149 Demangeot.J, 1999, p285-285

150 Site de l’association http://www.seor.fr

151 Blanchard.F, 1999

Photographie 13 : Un papangue Cliché IRT

Les espèces aquatiques constituent de véritables marqueurs des écosystèmes aquatiques mais leur sensibilité face aux dégradations des écosystèmes varient selon les groupes observés. Ne disposant pas des moyens matériels pour effectuer des observations en milieu aquatique, notre travail se basera, pour La Réunion et Mayotte, sur les méthodologies et les conclusions152 des diverses institutions compétentes dans ce domaine (Office de l’Eau, Université de La Réunion, Conseil supérieur de la Pêche…) mais aussi certaines associations spécialisées comme l’ARDA (Réunion). Pour la situation de l’île Maurice, les rapports du Ministry of Environment and Sustainable Development serviront de base de travail. L’étude va bien sûr classiquement distinguer les populations aquatiques vertébrées (principalement les poissons) des populations invertébrées (principalement les macro-invertébrés).

Pour les populations aquatiques vertébrées, la population piscicole constitue un marqueur très visible des écosystèmes avec la présence de certaines espèces caractéristiques. Le protocole d’observation de ces espèces en cours d’eau est basé sur la technique des pêches électriques réalisées par des organismes spécialisés (DIREN, Conseil supérieur de la pêche…) qui établissent des relevés sur des portions de cours d’eau pour en connaître la biodiversité. Un matériel spécifique constitué d’une perche alimenté par une batterie. Le courant de faible intensité générée a pour effet d’étourdir les poisons qui sont ensuite récupérés dans une épuisette ou un filet situé en aval. De telles pratiques de pêche ne sont autorisées qu’à des organismes comme le Conseil supérieur de la pêche (CSP) mandatés pour effectuer des recensements et retirer les espèces nuisibles. Pour l’observation des lacs, l’ensemble des techniques et protocoles d’observation cités précédemment doivent être adaptés. Les techniques de pêche électriques utilisées en cours d’eau ne sont pas applicables dans un lac où les profondeurs peuvent atteindre plusieurs dizaines de mètres. Dans le cadre de plans d’eau vidangeables, la connaissance des espèces piscicoles et des principaux crustacés est possible ainsi que la maîtrise de leur population ; en revanche, pour un lac naturel,

152 Keith P, Vigneux E, Bosc P, 1999

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seuls quelques prélèvements, manuels ou par une pêche au filet, offrent la possibilité d’évaluer les effectifs du lac. Les espèces relevées permettent une notation du cours d’eau grâce à l’IPR (Indice Poissons Rivière)153. Cependant cette grille de notation établie à partir des espèces françaises métropolitaines ne correspond pas aux espèces présentes dans les espaces ultra-marins. Il est donc nécessaire d’adapter cette technique pour proposer une nouvelle grille de référence ; en cela l’ARDA154 et le CNRS propose de nouvelles techniques.

Concernant les populations d’invertébrés, plus particulièrement les macro-invertébrés (supérieurs à 500µm, c’est à dire visibles à l’œil nu), qui sont les points de départ des chaînes alimentaires aquatiques. Ces micro-organismes sont très sensibles à la qualité de l’eau, la présence ou la disparition de certains taxons traduit une variation de la qualité des eaux155. Le recensement des macro-invertébrés s’effectue grâce à la technique des IBGN156 (Indice Biologique Global Normalisé) qui permettent d’effectuer des prélèvements en milieu lentiques parmi les divers faciès présents (végétaux, cailloux, sables…). A partir des taxons identifiés, il est possible d’établir une notation caractérisant la portion du cours d’eau. En milieu benthique, la technique des IBGN se confronte à certains problèmes. Les prélèvements sur les berges sont toujours possibles mais se trouvent difficile à effectuer lorsque la profondeur s’accroît, s’offrant alors qu’une vision partielle le l’écosystème lacustre. Les travaux de Goulan.V157 sur les plans d’eau réunionnais offrent des solutions pour les prélèvements en profondeur, en particulier avec le recours d’une benne d’Ekman.

L’analyse des macro-invertébrés se basera donc sur les résultats de cette étude mais sur les travaux plus actuels menés par l’Office de l’Eau.

Photographie 14 : Macroinvertébrés caractéristiques des plans d'eau de La Réunion Cliché Goulan, 2001

2.3.3.2. Espèces floristiques.

L’observation et l’analyse des espèces floristiques permet de caractériser les paysages, ils traduisent les interactions entre les Hommes et leur environnement et constituent l’identité d’un territoire. Les paysages en particulier dans le domaine tropical renferment de même une grande diversité d’espèces végétales qui définissent sa biodiversité et son intérêt environnemental.

L’identification des espèces et la compréhension de leur rôle au sein de l’écosystème conduit à établir des liens d’interdépendance ou de conflits entre les espèces, indispensables à tout acte de gestion. Dans le sud-ouest de l’océan Indien, la dimension insulaire accroît la spécificité de ces espèces végétales avec la présence de certaines espèces endémiques158 dont les caractéristiques sont propres au territoire observé. Les travaux de Cadet.T159 pour La Réunion et l’île Maurice ont servi de points de départ sur connaissance de ces écosystèmes et l’actualisation de ces travaux permettent d’appréhender les évolutions actuelles du fait de la présence d’espèces exotiques envahissantes.

158 Cadet.T, 1977

159 Cadet, T, 1981

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Ainsi la préservation des paysages est un enjeu face aux menaces diverses pesant sur les écosystèmes (pollutions, urbanisation, incendies…).

La méthodologie d’analyse des espèces floristiques va croiser les observations de terrain effectuées tout au long de notre cycle de recherche et les conclusions des organismes de gestion comme la DREAL (ex-DIREN) en charge de ces zones faunistiques sensibles. Ce travail s’est décliné à deux échelles, tout d’abord à petite échelle par l’intermédiaire de carte et de photographies aériennes pour identifier les grandes strates végétales dans lesquelles se situaient les lacs insulaires puis à plus grande échelle par des visites de terrain pour identifier certaines espèces plus spécifiques. Le travail à petite échelle a débuté par l’analyse de supports cartographiques160 puis l’observation de photographies aériennes (Géoportail, Google Earth). Le recours à des photographies aériennes qui ont été géoréférencées a permis d’identifier certaines strates de végétation à petite échelle.

Ce premier travail a été affiné par la suite par des visites de terrain qui ont permis d’identifier d’autres strates de végétation visibles qu’uniquement à grande échelle. Les diverses visites de terrain accompagnées d’un GPS ont permis de géolocaliser certaines espèces remarquables (espèces endémiques) afin d’établir une cartographie de ces espèces à des fins de valorisation touristique (création de parcours pédagogique et de sentiers de découverte des espèces endémiques des lacs insulaires du sud-ouest de l’océan Indien). Nous avons pu aussi compléter notre étude en partie par des travaux complémentaires réalisés par des organismes spécialisés (ONF, DREAL…) comme dans le cadre du Grand Etang de La Réunion161. Cependant la réalisation d’une carte de la végétation lacustre pose des problèmes techniques du fait de l’accès difficile à certaines zones. La contrainte majeure est l’aspect marécageux de certaines parties du lac qui empêchent l’accès par la marche à pied. Cette contrainte a été fréquente pour les lacs côtiers comme l’Etang Saint Paul, l’Etang de Bois Rouge à La Réunion ou même certains deltas de lacs. Le contournement de cette contrainte serait le recours à la navigation mais l’usage d’embarcations sur certains plans d’eau (réservoirs ou réserve naturelle) est soumis à autorisation. Etant donné que la majorité de ces zones humides disposent d’une réglementation spécifique du fait de leur intérêt écologique, ces autorisations n’ont pu être obtenues. La localisation de certaines espèces aquatiques s’est donc fait par observation depuis les berges, ce qui peut expliquer certaines marges d’erreur. Enfin la saisonnalité de certaines espèces aquatiques, favorise leur retrait durant une partie de l’année, de même que les épisodes pluvieux exceptionnels peuvent provoquer leur arrachement comme cela fut

160 Atlas de la La Réunion, 2003, p30-34

161 DIREN, 2006

le cas pour les jacinthes d’eau de l’Etang Saint Paul (espèces envahissantes) dont une grande partie fut évacuée suite à un épisode pluvieux exceptionnel en novembre 2009 et une rupture brutale du cordon littoral. Néanmoins ces espèces exotiques envahissantes évoluent vite et les mesures effectuées à une saison peuvent connaître des évolutions fortes. Pour pallier les contraintes citées précédemment, nous avons eu recours au principe des toposéquences (fig.42) proposées par le Conservatoire des Mascarins pour les masses d’eau réunionnaises. Cette technique permet à partir de visites de terrain et d’une schématisation de la zone humide, d’identifier les principales strates végétatives présentes. Ce type d’analyse correspond à un « instantané » des formations végétales sans avoir la nécessité d’une géolocalisation précise dont la pérennité de mesure est réduite. Il est ainsi possible aux néophytes de s’approprier cette cartographie des espèces végétales et de pouvoir rapidement comparer des masses d’eau entre elles.

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Figure 45 : Méthodologie de l'étude des paysages lacustres