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Conclusion partielle :

Chapitre 3.1. Analyse morphologique des lacs insulaires du sud-ouest de l'océan Indien

3.1.3. Les caractéristiques des émissaires

Les émissaires correspondent aux cours d’eau sortant du lac, ils caractérisent le passage du lac au cours d’eau. La forme des émissaires lacustres conditionne en partie l’influence du plan d’eau sur le réseau hydrographique aval. Les émissaires lacustres présentent des formes très variables selon la nature du lac et sa situation.

Pour les lacs d’origine naturelle, l’émissaire correspond à un point plus bas au sein de la contre-pente permettant l’évacuation des eaux. Il fonctionne ainsi comme un « trop-plein » naturel fixe capable d’absorber aussi des volumes d’eau plus importants liés à des crues. Dans le cadre des lacs naturels observés, la présence d’émissaires naturels s’est avérée rare car l’essentiel des lacs intérieurs (majoritairement des lacs de cratère) ont un fonctionnement endoréique. Les seuls émissaires naturels observés (photo.20), l’ont été sur les lacs côtiers. Ces émissaires sont donc extrêmement réduits en taille (quelques dizaines de mètres) et soumis à des influences croisées (lacs, mers). Dans ces conditions, il est difficile de mesurer l’impact du lac sur son émissaire. Nous allons malgré tout proposer une analyse de ces émissaires naturels en différenciant les lacs côtiers des lacs intérieurs.

Pour les lacs côtiers, les influences lacustres et maritimes se trouvent donc mêlées. Le cordon littoral séparant le lac de la mer peut se rompre ou être rompu par l’Homme à tout moment, provoquant une vidange partielle et subite du lac. La fermeture du cordon littoral suite au processus des marées va permettre la formation d’un nouveau cordon et certainement d’un nouvel émissaire.

Cette situation s’est déjà provoquée pour les plans d’eau du Gol et de Saint Paul à La Réunion lors de vidanges soudaines ou de l’ouverture prématurée du cordon par des engins de travaux publics face au débordement du lac lors d’importants épisodes pluvieux.

Photographie 20 : L’émissaire naturel de l’Etang Saint Paul (Réunion)

Ensuite dans le cadre des lacs intérieurs, où les émissaires sont absents, favorisant un réseau endoréique, le lac fonctionne comme une cuvette fermée. De telles situations s’expliquent par le fait que le lac se situe dans une dépression close (type cratère ou vallée obturée) empêchant la formation de tout émissaire, ce qui est le cas pour le lac Dziani à Mayotte ou le Grand Etang à La Réunion. La principale problématique de cette situation est l’évacuation des volumes d’eau accumulés, ces derniers profitent le plus souvent d’un substrat favorable et faillé pour s’infiltrer avant de réapparaître vers d’autres points bas sous d’autres formes (sources, résurgences…). Le suivi de telles infiltrations est délicat et demande un marquage isotopique des eaux pour mettre en évidence leur cheminement. Dans le cadre du Grand Etang de La Réunion174, plusieurs millions de mètres cubes disparaissent ainsi tous les ans alimentant certainement la rivière des Marsouins située en contrebas.

Au contraire des lacs naturels, les lacs d’origine anthropique présentent tous des émissaires mais dont leur fonctionnement est fortement artificialisé. La digue constituant la contre-pente dispose de divers aménagements permettant d’évacuer l’eau accumulée dans le plan d’eau (fig.50).

Ainsi la structure des réservoirs se rapproche de celle observable dans les grandes régions d’étangs

174 Banton.O, 1985

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françaises. La digue dispose en son point le plus bas d’un exutoire correspondant au point de vidange. Ce canal d’évacuation des eaux de fond est obturé par un mécanisme de mobile permettant la vidange partielle ou totale du réservoir. Les différents types de mécanismes de vidange influencent directement les rythmes de l’émissaire.

Figure 50 : Structure d’un lac- réservoir, l’exemple de la Mare aux Vacoas (Maurice)

Il existe 2 grands types de mécanismes de vidange. Le plus répandu est le système dit de la « pelle » ou vanne de fond qui correspond aux mécanismes les plus anciens avec un canal obturé par un panneau en bois ou en métal (photo.21). Ces systèmes classiques ont été repris et modernisés sur les réservoirs les plus modernes comme les Midlands à Maurice. L’ouverture s’effectue manuellement par un système de crémaillère. Un tel mécanisme est largement répandu du fait de sa facilité à la mise en œuvre et leur solidité. Cependant il existe aussi de nombreux inconvénients : dans un premier temps l’absence d’écoulement d’eau lorsque le mécanisme est fermé entraînant des assèchements de l’émissaire, dans un second temps l’obturation fréquente du canal par accumulation de sédiments, et enfin l’obligation de vidange par le fond entraînant un transfert important de sédiments en aval. Le second mécanisme rencontré est celui dit du « moine », il correspond à une colonne d’eau séparée en deux par des parois mobiles (photo.22). Le retrait des séparations permet de réguler le niveau et de limiter les évacuations des eaux de fond. Il dispose de

l’avantage énorme de maintenir un écoulement en aval et influence dans une moindre mesure l’émissaire. Ce système disposant de prises d’eau complémentaires aux prises de fond, il permet un brassage des eaux. Le mécanisme de moine peut aussi être utilisé comme déversoir de surface mais si cela n’est pas sa fonction première. L’inconvénient majeur d’un tel dispositif réside dans sa fragilité, avec un risque important de rupture des parois de séparation, obligeant le cas échéant à vidanger tout le plan d’eau.

Photographie 21 : Exemple de pelle de vidange Cliché Mathelin, 2011

Photographie 22 : Exemple d'un système de moine Cliché Mathelin, 2011

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Ces mécanismes de vidange sont complétés par des déversoirs de surface (dans le cas des vannes de fond) adaptés à la taille du réservoir et des déversoirs de crues, à écoulement exceptionnel dont le gabarit dépend du bassin d’alimentation (photo.23). Ces déversoirs de surface connaissent des rythmes d’écoulement irréguliers sur l’année. En effet, en période de basses eaux (niveau du déversoir de surface n’étant pas atteint), il n’y a pratiquement pas d’écoulement. Dans ces configurations, seule une dérivation permet le maintien d’un écoulement en aval. Dans le cadre d’un mécanisme de type moine, ce type de dispositif connaît un écoulement en période de hautes eaux ou de crue. On constate ainsi que l’ensemble de ces aménagements influence fortement le fonctionnement de l’émissaire en aval, tant en matière quantitative que qualitative.

Photographie 23 : Déversoir de surface et de crue du réservoir des Midlands (Maurice) Cliché Mathelin, 2013

Les lacs insulaires du sud-ouest de l’océan Indien, d’origine naturelle ou anthropique, influencent leurs émissaires lorsque ceux là existent. Une réflexion sur les interactions entre le lac et son aval sera envisagée dans les parties suivantes.

Chapitre 3.2. Analyse des comportements hydrologiques des lacs insulaires du