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Les lacs, traceurs de changements environnementaux

Chapitre 1 : Potentiel des lacs pour une reconstitution paléo-environnementale

2. Approches méthodologiques et outils utilisés

2.1 Méthodes de terrain

2.1.1 Relevés bathymétriques

Le relevé bathymétrique a permis d’obtenir une carte des profondeurs des bassins lacustres. Cette étape est indispensable afin d’identifier les principales morphologies telles que des bassins déconnectés, la présence et l’extension des corps deltaïques au débouché du(es) affluents(s), ou encore la localisation du dépôt-centre. Cette dernière correspond à la zone d’accumulation maximum de sédiment dans le lac. La bathymétrie s’est avérée très utile pour mettre en évidence l’inclinaison des pentes du bassin et ainsi identifier les talus d’accumulation en bas de pentes. Les relevés bathymétriques ont été réalisés avec un écho sondeur de type Fishfinder de Garmin, associé à un GPS permettant le géo-référencement des mesures de profondeur d’eau. L’intervalle de temps a été paramétré à 2 secondes, ce qui correspond à une distance de l’ordre de 1 à 3 m entre les mesures, pour une navigation entre 3 et 6 km/h. Le quadrillage resserré permet de réduire les interpolations entre les points lors de la réalisation des cartes bathymétriques avec le logiciel Surfer 9 de Golden Software.

2.1.2 Sismique réfléxion

La sismique réflexion est une méthode de prospection géophysique basée sur l’émission d’une onde sonore depuis un radeau situé à la surface du lac puis sur sa réception par un géophone. Cette onde envoyée vers le fond du lac va être reflétée par les différentes densités de la couche sédimentaire en direction de la surface. Le géophone enregistre alors l’arrivée de l’onde à un temps donné après émission. Selon le temps de retour de l’onde et l’intensité de la réflexion, cette méthode permet de réaliser un profil de la couche sédimentaire étudiée en identifiant les réflecteurs principaux relatifs aux contrastes de densité. L’objectif de cette méthode est de cartographier la répartition et la continuité spatiale du remplissage sédimentaire. Elle permet également d’identifier des glissements en masse.

La sismique réflexion a été mise en œuvre avec la collaboration d’Eric Chaumillon (LIENs, La Rochelle) en septembre 2012 sur le site du lac du Lauvitel. Le profileur sismique utilisé est une IKB Seistec constitué d’un « boomer plate » associée à une ligne en cône. Ce type de matériel est dédié aux eaux peu profondes entre 1 et 100 m (Simpkin and Davis, 1993; Chaumillon et al., 2013), donc adapté à des lacs de montagne. La source sismique a été paramétrée à une fréquence de bande passante de 1 à 10 kHz et une source d’alimentation de 50 J. Elles permettent une résolution verticale de l’ordre de 20 cm. Le temps d’émission a été paramétré à 250 ms, ce qui correspond à l’acquisition d’une mesure tous les 0,2 à 0,4 mètres pour une vitesse de navigation de 3 à 6 km/h. Les données ont été acquises en couplage avec un GPS différentiel, situé sur la source, pour le géo-référencement précis des mesures. Les résultats ont été traités sur le logiciel Delph Seismic Software et interprétés lors d’un séjour au laboratoire LIENNs en 2013.

2.1.3 Suivi instrumental

Le suivi instrumental a pour but de comprendre le fonctionnement sédimentaire d’un système lacustre. Chaque site possède des particularités intrinsèques qui vont influencer le dépôt sédimentaire des particules dans le bassin. Dans le cas des transferts sédimentaires du bassin versant jusqu’au lac, le suivi nécessite de coupler un enregistreur des conditions météorologiques avec des enregistreurs situés dans la colonne d’eau permettant ainsi de suivre le processus de transfert jusqu’au dépôt dans le lac.

2.1.3.1 Station météo

Une station météo est composée au minimum d’un thermomètre et d’un pluviomètre afin de connaître la température ainsi que la date et l’intensité des précipitations au cours du temps.

L’ajout d’un appareil photo peut s’avérer très utile pour identifier les moments clés du suivi d’un lac de montagne, comme par exemple sa date de gel/dégel, le niveau du lac ou encore les changements de morphologie du delta lors d’événements ponctuels tels que l’occurrence d’une crue ou le déclenchement d’une avalanche. Le type de matériel utilisé est une centrale d’acquisition Campbell Scientific CR300 avec un pas de temps d’enregistrement d’1h, dont les données sont relevées au moins une fois par an.

Figure 2-7: Schéma du mouillage pour le suivi instrumental effectué sur le lac du Lauvitel

2.1.3.2 La colonne d’eau

L’état de la colonne d’eau est essentiel pour comprendre le fonctionnement physique du lac. En vue de suivre instrumentalement cette colonne d’eau, il est nécessaire d’immerger un mouillage (Figure 2-7). Ce dernier se compose d’un ancrage situé sur le bord du lac d’où est accroché une corde reliée à un corps mort situé au fond du lac. Au niveau de ce dernier, la corde passe par une poulie dont l’autre extrémité est maintenue à la verticale par une bouée. Les lacs étant situés dans un parc national, il a été nécessaire, dans un souci visuel, de ne pas faire dépasser la bouée à la surface. Cette contrainte permet toutefois, lorsque le lac gèle en hiver, que la bouée ne soit pas prise dans la glace et soit abimée, mettant en péril les différentes mesures et

la récupération des données. Les instruments de mesure sont accrochés sur la corde entre la poulie et le flotteur. Du bas vers le haut, le mouillage se compose d’un support situé au plus près du fond du lac, sur lequel est fixée une sonde multi-paramètres Ruskin RBR et une trappe à sédiment. La sonde possède des capteurs de turbidité, de température, de conductivité et de pression qui enregistrent une mesure avec un pas de temps de 30 minutes. La trappe à sédiment est composée d’un concentrateur de forme conique et d’un tube en plexiglass. Sur le reste de la ligne, des capteurs de température sont positionnés à intervalles réguliers permettant de relever la température de l’eau selon la profondeur en vue d’identifier les différentes masses d’eau. On notera que le site du Lac de la Muzelle possède en plus une sonde de mesure de la chlorophylle sous la surface du lac.

2.1.4 Prélèvements sédimentaires (carottages)

2.1.4.1 Carottage court

Chacun des sites a fait l’objet de carottages gravitaires courts, ceci dans le but de comprendre le fonctionnement hydro sédimentaire du système lacustre d’un point de vue spatio-temporel (Sturm and Matter, 1978). Ces carottages ont été effectués dans la zone de dépôt-centre, qui est la moins affectée par les glissements en masse, afin d’obtenir une succession la moins perturbée possible. D’autres parties du bassin lacustre ont fait l’objet de carottages courts, comme les zones proches des corps deltaïques parallèle à l’axe du delta pour comprendre l’extension latérale de chaque couche sédimentaire.

Les carottages courts ont été réalisés avec un carottier gravitaire UWITEC de diamètre 90 mm et 63 mm selon la quantité de matériel voulu. Cette méthode permet d’obtenir une séquence sédimentaire avec la meilleure conservation des structures, en vue par exemple d’avoir l’interface eau-sédiment la moins perturbée possible. Le lac de la Muzelle a en plus fait l’objet d’un carottage court avec martelage dans le but d’obtenir une séquence plus longue. Cette opération s’est effectuée sur les deux lacs depuis une embarcation et sur la surface du lac encore gelé de la Muzelle au printemps 2012 permettant une meilleure stabilité lors du carottage.

2.1.4.2 Carottage long

Le carottage long nécessite une quantité de matériel technique plus importante consistant en une plateforme de carottage de type UWITEC avec piston stationnaire. Le carottage se fait depuis une barge munie d’un tripode permettant de remonter les carottes sur la plateforme. Seul le lac de Lauvitel a été carotté avec cette méthode. Trois carottiers différents ont été utilisés (en 90 non chemisé, en 63 chemisé, et en 90 chemisé) pour prélever 16 sections de 3 mètres de long au total dans la zone de dépôt centre, qui ont été recoupées au laboratoire en vue de permettre une

meilleure manipulation lors des analyses. Lors de ce prélèvement, il a fallu six sites différents pour obtenir un recouvrement convenable. Ce recouvrement est nécessaire et consiste à décaler les carottes prélevées dans les différents trous d’environ 1 m de profondeur, afin d’obtenir la séquence sédimentaire en entier et combler ainsi l’interruption entre les différentes sections causée par la méthode de carottage. Ce dernier a été perturbé par de nombreux niveaux à graviers, blocs voire même à bois qui ont empêché la bonne progression du carottier dans le sédiment du lac.

Figure 2-8 : Schéma de carottage long du lac de Lauvitel, le zéro correspond à l’interface eau-sédiment.

2.1.5 Prélèvement sur le bassin versant

Dans le cadre de cette étude nous avons prélevé des échantillons provenant du bassin versant en vue de comparer la composition géochimique et la granulométrie avec les sédiments déposés dans le lac. Cette opération a pour but de déterminer les sources potentielles de sédiment et leur composition chimique. Dans un premier temps, les sédiments accumulés sur les zones d’entrée des ruisseaux dans le lac ont été prélevés sans distinction granulométrique. Dans un second temps, nous avons effectué dans le bassin versant du Lauvitel des tranchées pédologiques afin de caractériser les différences spatiales que l’on peut retrouver. Les sols peuvent être des contributeurs non négligeables du sédiment se déposant dans le lac. Le type de sol rencontré est lié à la présence de végétation et au type de substrat. Pour déterminer ces paramètres, nous avons effectué une description de la végétation environnante des tranchées et par ailleurs des mesures

de géochimie sur le terrain ont été effectuées à l’aide à l’aide d’un pistolet à fluorescence X (S1 Titan, Bruker) sur les roches retrouvées sur place.