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Le recrutement des participants a tenu compte des deux principes fondamentaux du processus d’échantillonnage en recherche qualitative suggérés par Pirès (1997) : la diversification (en choisissant les individus les plus divers possibles) et la saturation empirique (le phénomène par lequel le chercheur juge que les derniers entretiens ou

observations n’apportent plus d’informations nouvelles qui puissent justifier la poursuite de la cueillette du matériel empirique).

Par ailleurs, le choix de se diriger vers les unités hébergeant des garçons s’est basé sur deux constats. Premièrement, au moment des démarches préliminaires à la collecte des données (début 2007), les principales études publiées sur la prévalence de consommation des jeunes desservis par le CJ (LeBlanc, 1994; Régie régionale de la santé et des services sociaux et les Centres jeunesse de Québec, 1995) ne décrivaient pas la consommation en fonction du sexe, en dépit d’utiliser des échantillons mixtes. Toutefois, les statistiques qui décrivent les jeunes de la population générale ont permis de faire ressortir certaines différences entre les filles et les garçons, la prévalence de consommation chez ces derniers étant légèrement plus élevée et leur usage d’alcool et de cannabis plus fréquent et abusif (Guyon & Desjardins, 2005)11. En plus, l’inclusion des

filles impliquerait d’introduire des variables additionnelles pour l’analyse des motivations et des services offerts, ce que nous voulions éviter afin de faciliter la saturation des données et d’assurer une plus grande fiabilité des conclusions de cette étude.

Nous présenterons séparément les critères d’échantillonnage qui ont été utilisés pour les entrevues et pour les observations.

2.3.1 L’échantillonnage pour les entrevues

Tous les participants à l’étude devaient être capables de s’exprimer couramment en français afin de faciliter l’analyse des données et d’éviter l’ajout d’une variable culturelle. De plus, les critères d’inclusion pour les jeunes garçons ont été:

11 Quelques mois après le début des démarches pour la collecte des données, l’article de Laventure et ses

collègues (2008) démontrait que les profils de consommation de SPA des filles et des garçons desservis par les CJ du Québec étaient comparables.

2.3.1.1 Âge

La recherche visait les jeunes âgés de 14 à 18 ans. En effet, nous considérons que les jeunes mineurs les plus âgés possèdent une meilleure conscience de leur propre expérience ou une capacité d’autoréflexion que les plus jeunes n’ont peut-être pas encore acquise. Ils peuvent posséder aussi une trajectoire de consommation plus longue que leurs pairs plus jeunes. En outre, ceux-ci sont considérés comme étant plus à risque pour la consommation de psychotropes (Hansen & O’Malley, 1996).

2.3.1.2 La consommation de substances psychoactives

Préalablement à l’entrevue, les jeunes devaient avoir répondu à l’instrument de dépistage de la toxicomanie utilisé dans les CJ, la DEP-ADO (Grille de dépistage de la consommation problématique d’alcool et de drogues chez les adolescents et adolescentes; Landry, Tremblay, Guyon, Bergeron, & Brunelle, 2004).

Le but principal de la DEP-ADO est d’identifier les jeunes qui ont une consommation abusive d’alcool et/ou de drogues afin de les orienter vers les services appropriés. Les études de validation de ce questionnaire ont été complétées pour les jeunes de 14 à 17 ans. Les sept questions qui composent la grille touchent : la consommation de diverses substances au cours des 12 derniers mois et des 30 derniers jours, l’âge du début de la consommation régulière, le boire excessif, l’injection de substances et un certain nombre de conséquences reliées à la consommation. L’instrument fournit un score en 3 catégories qui permet de définir le niveau de risque du jeune et la pertinence d’une intervention : feu vert (aucun problème évident de consommation); feu jaune (le problème est en émergence, une intervention précoce serait souhaitable); feu rouge (le problème est évident, une intervention spécialisée est nécessaire).

La présente étude n’a pas pour but d’analyser les DEP-ADO des jeunes participants. Cet instrument a servi seulement à l’identification des jeunes qui ont été invités à réaliser l’entrevue. Étant donné que nous nous intéressons aux jeunes qui présentent une

consommation problématique ou à risque de le devenir, seuls ceux ayant obtenu un score qui indique la présence d’un problème en émergence (feu jaune) ou évident (feu rouge) ont été retenus pour les entrevues. Nous avions pris la décision de ne pas faire passer eux-mêmes le questionnaire aux jeunes étant donné que les informations obtenues préalablement à la collectte des données indiquaient que l’usage de la DEP-ADO était très répandu en CJ et que cet outil serait donc disponible à l’intérieur de la majorité des dossiers des jeunes. En fait, l’identification des jeunes s’est avérée plus compliquée que prévu. Contrairement aux informations reçues, la DEP-ADO ne se retrouvait pas dans la plupart des dossiers des jeunes, ce qui compliquait le choix des participants aux entrevues. Cette difficulté a toutefois été relativement bien contournée puisque, grâce à l’aide des éducateurs, la chercheure a pu localiser certaines DEP-ADO valides. Sinon, les éducateurs ont fait passer cette évaluation aux jeunes pendant la période des observations dans l’unité.

2.3.1.3 Le placement

Les jeunes devaient être placés en CJ sous le cadre de la LPJ (unités ouvertes et de dynamique élevée) ou LSJPA (unités fermés) pendant une période minimale d’un mois. Nous avons évité d’interviewer les jeunes en placement depuis moins d’un mois afin de leur garantir un certain temps d’acclimatation à l’environnement et à l’équipe de professionnels de l’unité. La plupart des jeunes participants à l’entrevue étaient placés dans les unités où les observations participantes ont eu lieu, à l’exception de cinq.

Ces cinq jeunes étaient placés dans des unités pour jeunes contrevenants fermées semblables aux unités fermées observées. Ils ont été rencontrés à la fin de la collecte des données. À ce moment, tous les jeunes hébergés dans les unités observées qui remplissaient les critères d’inclusion et qui étaient volontaires avaient déjà été interviewés. Toutefois, nous voulions enrichir encore plus les données. Ces jeunes ont été choisis avec l’aide des éducateurs parce qu’ils avaient obtenu des scores particulièrement élevés à la DEP-ADO et que ce profil de consommation était sous- représenté dans notre échantillon initiale de jeunes contrevenants. En outre, ces jeunes

étaient plus âgés que la plupart de nos participants, ce qui offrait un autre critère de diversification à l’échantillon. Ainsi, en dépit du fait que leur unité ne faisait pas partie des unités observées, et puisque ces jeunes démontraient un intérêt à nous rencontrer en entrevue et que le chef de service a autorisé leur participation à l’étude, ils ont été ajoutés à l’échantillon.

En plus, un critère d’exclusion a été considéré pour le recrutement des jeunes. Il s’agit de leur condition de santé mentale. Les jeunes qui présentaient, pendant la période des observations, des symptômes psychotiques ou des crises dépressives majeures n’ont pas été retenus pour les entrevues.

2.3.2 L’échantillonnage pour les observations participantes

Initialement, cette étude ciblait uniquement les unités globalisantes où les jeunes sont placés sous le cadre de la LPJ. Toutefois, après deux mois d’observation dans ces unités, nous avons remarqué que l’exploration d’autres milieux de vie dans le CJ pourrait enrichir considérablement la qualité des données. En fait, contrairement à l’impression générale partagée par les professionnels du CJ selon laquelle environ 80% des jeunes en protection de la jeunesse auraient des problèmes de consommation, dans les premières unités observées, seuls 45 % des jeunes répondaient à nos critères d’échantillonnage pour les entrevues.. Par ailleurs, après trois mois dans les unités globalisantes, l’observation des expériences d’intervention des éducateurs semblait atteindre la saturation compte tenu de la similitude des procédures employées dans ces milieux. Ainsi, nous souhaitions une plus grande variété de données concernant non seulement la consommation des jeunes, mais aussi leurs expériences de placement. Les travaux antérieurs de notre équipe de recherche (Brunelle et al., 2002; Tétrault, Brochu, Cousineau, & Sun, 2007) ayant déjà documenté la consommation problématique des jeunes contrevenants, nous avons alors émis l’hypothèse que l’intensité de l’encadrement utilisée dans ces milieux d’hébergement apporterait une nouvelle perspective d’analyse. Ainsi, deux unités fermées pour jeunes contrevenants ont été sélectionnées, ainsi qu’une unité de protection de la jeunesse avec un niveau

d’encadrement plus élevé (unité de dynamique élevée) situées dans un autre site du CJM.

La même logique au niveau des critères d’inclusion et d’exclusion pour les entrevues a été conservée. Les unités participantes devaient donc héberger des jeunes de 14 à 18 ans. La sélection des unités participantes a été faite par les membres de la direction du CJ qui, conscients de nos critères d’inclusion, se sont préoccupés de bien évaluer la disponibilité et l’ouverture des équipes d’éducateurs à la présence intensive d’une chercheure dans leurs milieux. Il importe de mentionner qu’étant donné l’intérêt de cette étude pour les interventions en toxicomanie menées en CJ, l’animation du Groupe de réflexion sur les drogues (GRD) est devenue un critère de sélection des unités participantes utilisé par la direction du CJM. Le GRD était la seule activité structurée ciblant la consommation de SPA animée en CJ, et commençait à être implantée dans trois des cinq unités participantes. Pour les jeunes des unités globalisantes, l’activité était disponible depuis quelques années, une ou deux fois par an sur une base volontaire.