• Aucun résultat trouvé

v

Cette étude, conduite sur la montée en puissance des genres de l’imaginaire et les effets qu’ils véhiculent sur les individus et leur vie quotidienne, a nécessité un travail

50 Jean-Marie Schaeffer, « Préface », in: O. Caïra, Définir la fiction. Du roman au jeu d’échecs, Paris, Éditions

de l’EHESS, 2001, p. 12.

51 Olivier Caïra, ibid., p. 21. 52Ibid., p. 22.

empirique de grande importance, il s’agira ici d’embrasser tous les aspects de l’imaginaire en

tant que genre. Nous entrons au sein de notre démarche dans la perspective de sortir de la

dialectique sujet/objet pour analyser un ensemble. Il est important de noter qu’au sein de la sociologie, l’art apparaît comme faible mesure par rapport aux questions des inégalités,

violences, disparités qui sont beaucoup étudiées dans la discipline, la sociologie ne s’est donc

pas emparée de notre objet de recherche comme elle a pu le faire avec d’autres thématiques

telles que le travail ou les inégalités. Notre bibliographie s’appuie également sur les autres

détenteurs de savoir qui se sont intéressés de près à notre objet de recherche : les littéraires, les linguistes ou encore les philosophes. Tout en restant dans une démarche sociologique,

nous emprunterons les chemins qu’ont parcourus ces diverses disciplines pour analyser de

manière sociologique notre objet de recherche.

Après un travail d’investigation et d’analyse concernant ces genres spécifiques, il a été

nécessaire de choisir un corpus d’œuvres sur lequel s’appuyer. Nous analyserons donc, en

termes d’exemples, des « biens de culture » reflétant le marché de l’imaginaire dont

notamment les trois sagas les plus en vogue de la dernière décennie Le Seigneur des Anneaux de J. R. R. Tolkien (1892-1973), Harry Potter de J. K. Rowling et La saga du désir interdit dite Twilight (terme que nous emploierons tout au long de notre recherche) de Stephenie Meyer. Il est important de préciser que nous ne jugerons pas, dans cette recherche, de la valeur esthétique/littéraire des œuvres que nous avons choisies ni de leur légitimité, nous

ne réaliserons pas une sociologie littéraire de ces œuvres. Elles représentent les plus adulées

depuis l’entrée de notre société dans le second millénaire, c’est cette raison qui nous a

conduits à les intégrer à notre recherche. De plus, l’image des héros et des héroïnes qui les

composent possèdent une portée symbolique sociétale indéniable.

En dehors de ce corpus que nous avons analysé, nous avons également mené une enquête sur les Français et leur relation aux genres fictionnels de l’imaginaire. Dans ce cadre-ci, notre objectif était de dévoiler certaines grandes tendances liées à la lecture de romans mais également au visionnage de films et de séries télévisées. Avec cette enquête, nous avons

aspiré à obtenir une vision d’ensemble des genres de l’imaginaire auprès du public

francophone. Pour ce faire nous avons cherché à cerner qu’elle place occupe les genres de l’imaginaire dans la vie quotidienne des individus. Nous avons ainsi réalisé un questionnaire

que nous avons diffusé53. Dans la mesure où la thématique qui nous intéresse est la place de

l’imaginaire dans la vie de n’importe quel individu, le public concerné par cette enquête a été

très général, nous ne souhaitions pas interroger des fans de l’imaginaire mais bien une

population lambda, sans critères distinctifs. Ainsi, une fois le questionnaire élaboré et testé il a

été possible de le diffuser. Nous avons obtenu un échantillon représentatif54 de la population

française âgée de 15 à 54 ans de 350 observations55. Ce résultat n’est pas le seul que nous

avons obtenu, en effet, plus de 800 individus ont répondu à notre questionnaire mais l’écart

entre les hommes et les femmes, trop important, nous a conduit à utiliser et à analyser de prime abord notre échantillon représentatif. Nous ne laisserons pas les autres résultats de côté,

nous nous en servirons comme appui. L’analyse56 de cette enquête a pour but de saisir la

vision et l’intérêt de l’individu envers les genres de l’imaginaire. Afin d’accompagner cette

analyse quantitative, une série de diverses interviews57 a également été réalisée afin

d’entrevoir de manière bien plus précise l’attachement, le lien entre l’individu et l’imaginaire.

Nous nous sommes efforcés, tout au long de ces années de recherche à rester informés des actualités concernant nos thématiques. Nous avons ainsi réalisé une veille internet, que

nous nommons veille « imaginaire », en nous servant de l’outil mis à disposition par le moteur

de recherche Google : Google Alertes. Le principe de cette veille a été de définir une série de mots-clés dans le moteur de recherche, afin que ce dernier puisse rechercher à son tour toutes les actualités en rapport avec les termes choisis et ainsi nous envoyer automatiquement tous les jours par e-mail des articles internet ciblés. Nous avons étudié dix termes et groupes de

termes clés : « Bit-lit58 », « fantasy », « Harry Potter », « Imaginaire Sociologie », « le

Seigneur des Anneaux », « Vampires », « Science-fiction », « Sociologie Culture »,

« Sorcier », « Sortie Livres ». Grâce à ce procédé nous avons pu suivre toutes les actualités

concernant les genres de l’imaginaire, c’est pour cette raison que notre bibliographie va comporter également de multiples références à des quotidiens et hebdomadaires.

53 Le questionnaire a été créé via internet et l’outil Google drive nommé Google Form. Il nous a permis par la suite de diffuser notre enquête via un simple lien sur la toile mais également de l’imprimer et de la diffuser en

présentiel. La circulation du questionnaire a eu lieu entre le 14 janvier 2015 et le 14 juin 2015. Les résultats obtenus ont ensuite été insérés dans le logiciel sphinx pour analyse.

54 Cf. Annexe 2, p. 367.

55L’échantillon représentatif du public interrogé est composé de 174 hommes et 176 femmes âgés de 15 à 54 ans

et résident en France. Ils sont majoritairement employés (28.3%), cadres et professions intellectuelles supérieures (28%) et sans activité professionnelle (22.6%).

56 Cf. Annexe 3, pp. 368-381. 57 Cf. Annexe 5, pp. 391-416.

58 La bit-lit est un sous genre de la fantasy qui mêle fantasy urbaine et chick lit (roman écrit par une femme et

Notre recherche, organisée en trois parties de quatre chapitres, débutera par

l’exploitation détaillée des genres de l’imaginaire. Nous avons aujourd’hui pour vocation

d’étudier ce qui est ici et maintenant, « c’est dans le présent social que se manifeste la

présence de la socialité59 », mais nous allons tout de même nous permettre un détour

historique en analysant la naissance de nos trois genres majeurs. La fantasy, la science-fiction et le fantastique sont-ils trois genres bien distincts ? Finalement n’y a-t’ il pas aujourd’hui des genres en mouvements, s’entremêlant, s’interpénétrant ? Il aurait été bien trop réducteur de

penser qu’une infranchissable frontière délimitait ces trois genres, ce n’est pas le cas, ils sont

liés, ils s’entremêlent parfois les uns des autres. Nous aborderons dans cette première partie,

les racines des trois grands genres de l’imaginaire, de la période gothique où le fantastique a pris naissance, au déplacement du merveilleux en fantasy puis enfin à la science-fiction. Nous

consacrerons un chapitre à la grande entreprise de J. R. R. Tolkien, Le Seigneur des Anneaux,

œuvre qui a donné vocation aux auteurs contemporains de créer, eux-aussi, des mondes imaginaire complets et qui a donné la possibilité au cinéma de mettre en scène des univers de

ce genre. Nous ne prétendons pas ici rendre compte d’une étude encyclopédique des genres

littéraires ou cinématographiques, ce ne sera pas cet aspect qui motivera notre recherche. Nous cherchons à comprendre les effets de l’imaginaire sur les individus, les lecteurs, les

publics et pour ce faire il est important de saisir en premier lieu ce qu’est l’essence même de

notre recherche : les genres de l’imaginaire. Une fois cette base émise, nous nous attacherons

de manière approfondie à cet engouement, cette frénésie. Nous développerons en termes

statistiques la montée en puissance des genres de l’imaginaire tant dans le cinéma que dans la

littérature. Nous nous intéresserons de plus près aux fans et au rôle qu’est le leur dans cette locomotive à succès. Nous emprunterons, dans cette seconde partie, un passage obligatoire

par l’œuvre de J. K. Rowling, Harry Potter, qui a remis l’imaginaire sur le devant de la scène

culturelle mondiale. Enfin, nous analyserons plus en détails dans notre troisième partie, les

résultats de notre enquête quantitative, l’omniprésence des notions d’évasion, de mythes et de

héros. Nous étudierons ainsi pourquoi ces genres sont finalement devenus des machines à succès.