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2.3.1 Observation du fonctionnement des équipes de travail

Nous présenterons maintenant nos différentes méthodes de collecte de données : observations, entretiens, analyses documentaires et questionnaires. Yin (1984) indique que l’observation directe et les entretiens structurés sont deux méthodes de collecte de

données complémentaires qui se prêtent bien à une analyse de cas multiples. Nous avons choisi quatre méthodes de collecte de données : l’observation directe non participante, les entretiens structurés, la distribution de questionnaires et l’analyse documentaire.

Nous avons d’abord procédé à une cueillette de données au moyen d’une observation directe non participante. En fait, nous avons observé le travail effectué par les membres des deux équipes de travail dans chaque usine, pendant deux demi-journées, à raison de trois heures par séance, pour un total de douze heures d’observation. « Les méthodes d’observation directe constituent les seules méthodes de recherche sociale qui captent les comportements au moment où ils se produisent sans l’intermédiaire d’un document ou d’un témoignage (Quivy et Campenhoudt, 1995 : 199). » L’observation non participante permet de recueillir des informations qui seront complétées ultérieurement lors des entretiens. Nous avons réalisé ces observations avec l’accord des membres des équipes de travail concernées, ce qui peut engendrer des comportements de travail plus disciplinés qu’à l’habitude, du fait de la présence d’un observateur externe. Néanmoins, ce même biais pouvant se retrouver dans les deux cas que nous avons observés, nos résultats ne devraient pas en être touchés.

Nous avons réalisé notre observation en nous servant d’une grille d’observation. Quivy et Campenhoudt (1995 : 202) soulignent les avantages de cette méthode, dont la saisie des comportements et des événements sur le vif : « Le recueil d’un matériau d’analyse non suscité par le chercheur et donc relativement spontané et la relative authenticité par rapport aux paroles et aux écrits […] ». À l’aide d’une grille d’observation détaillée, nous avons observé, en ayant l’accord des personnes concernées, le fonctionnement des équipes de travail. Cette grille a déjà été testée dans la recherche de Der Stepanian (1999). Elle est annexée à la fin de ce document et elle se présente sous la forme d’un tableau composé de cinq éléments clés répartis dans cinq colonnes distinctes : l’heure de l’observation, le nom de la personne qui a entrepris une démarche dans l’équipe de travail, le but de cette action, sa durée, et une colonne pour nos notes et commentaires personnels. Nous avons noté l’ensemble de nos observations immédiatement après avoir réalisé l’exercice. La grille d’observation nous a permis d’analyser les tâches des

équipiers, la rotation des tâches, l’entraide des membres de l’équipe, les procédures orchestrées lors de pannes ou de bris mécaniques et les périodes de travail et de repos des membres de l’équipe. Au total, chaque équipe de travail a été observée pendant au moins six heures, lors de deux périodes différentes dans le temps, afin d’éviter les biais conjoncturels.

2.3.2 Les entretiens semi-dirigés

Nous avons également utilisé des méthodes complémentaires à l’observation non participante proposées par Quivy et Campenhoudt (1995) :

« La méthode de l’entretien suivie d’une analyse de contenu est certainement la plus utilisée en parallèle avec les méthodes d’observation. Leur complémentarité permet en effet d’effectuer un travail d’investigation en profondeur qui, lorsqu’il est mené avec la lucidité et les précautions d’usage, présente un degré de rapidité satisfaisante (Quivy et Campenhoudt, 1995 : 203). »

Nous avons procédé à des entretiens semi-dirigés auprès des représentants patronaux (directeur des ressources humaines, directeur d’usine) et syndicaux (président du syndicat, délégué du département des pâtes). Notre grille d’entretien est composée d’une série de questions ouvertes sur la coopération patronale-syndicale et sur le fonctionnement des équipes de travail, dont la nature des tâches à effectuer, la formation des salariés, les procédures formelles relatives à l’affectation des tâches, la rotation et les horaires de travail, et l’étendue des responsabilités individuelles en ce qui concerne les opérations. Nous avons demandé à tous nos interlocuteurs la permission d’enregistrer les entretiens. De plus, nous avons garanti l’anonymat des informations recueillies. À l’aide de cette méthode de cueillette de données, nous espérons obtenir un niveau supérieur d’approfondissement et une souplesse qui permettront de récolter les témoignages et les interprétations des interlocuteurs, tout en respectant leurs propres cadres de référence (Quivy et Campenhoudt, 1995).

Nous avons utilisé la grille d’entretien créée pour la recherche par Der Stepanian (1999), en adaptant les questions au secteur des pâtes et papiers. Nous avons ajouté de nouvelles questions sur l’autonomie des équipes de travail et sur la coopération patronale-

syndicale. Ces grilles d’entretien sont présentées aux annexes I et II. Au départ, nous avons questionné les membres des équipes de travail sur leur satisfaction concernant le travail en équipe. Ces questions mesurent leur perception du fonctionnement de leur équipe de travail et elles permettent de recueillir des données sur notre variable dépendante. Compte tenu de la disponibilité des membres de l’équipe, nous avions prévu la distribution de questionnaires visant à évaluer le degré d’autonomie de l’équipe de travail et récupérer les questionnaires remplis à la fin du quart de travail. Nous avions prévu interviewer les chefs d’équipe, mais nous avons constaté l’absence de chefs d’équipe dans les deux cas étudiés. Nos questions portaient sur la procédure de nomination, sur son rôle auprès de l’équipe de travail, sur l’étendue de son pouvoir, sur la planification des objectifs à atteindre et sur la gestion du dynamisme interne de l’équipe. Nous voulions également évaluer le rôle du chef d’équipe auprès de la direction.

La grille d’entretien a surtout été utile pour les entretiens avec les représentants patronaux et syndicaux. A priori, nous voulions choisir exclusivement des représentants patronaux et syndicaux qui avaient connu la réorganisation et participé au processus de réorganisation du travail depuis le tout début, mais le taux de roulement du personnel nous en a dissuadé, et nous avons rencontré le directeur des ressources humaines, le directeur des opérations, le président ainsi que le vice-président et les délégués du syndicat de chaque usine étudiée. Nous avons d’abord cherché à identifier l’élément déclencheur de la réorganisation du travail. Nous voulions notamment trouver des informations sur le contexte de la réorganisation qui a conduit à l’implantation des équipes de travail. Les entretiens auprès des responsables patronaux et syndicaux portaient notamment sur le type d’encadrement des équipes de travail, sur leurs responsabilités mutuelles, sur l’évolution de la productivité depuis le début de l’implantation, sur les modifications apportées aux conventions collectives, sur les principaux problèmes de gestion associés au travail en équipe, sur les structures organisationnelles mises en place et sur la participation des membres du syndicat et des membres en général à la résolution de ces problèmes.

2.3.3 Analyse documentaire

L’utilisation des données documentaires est utile à la recherche (Quivy et Campenhoudt, 1995). Nous avons trié et analysé les informations trouvées dans les procès-verbaux des réunions patronales-syndicales, dans les comptes rendus des réunions des équipes de travail, dans les conventions collectives et les lettres d’entente en relation avec le travail en équipe. Le but ultime de cet exercice était de recueillir le maximum d’informations générales pour illustrer l’historique, les modalités de la coopération patronale-syndicale et le fonctionnement des équipes de travail. Nous mettrons en évidence l’évolution de ce processus, car notre variable indépendante a rapport à l’implantation et à l’évolution de la coopération patronale-syndicale. Nous avions souhaité analyser quelques documents de source patronale sur les informations économiques et financières, sur les procédés de production et sur les nouvelles technologies, mais ces données n’étaient pas disponibles.

2.3.4 Questionnaire administré aux membres des équipes de travail

Nous avons construit notre questionnaire en nous basant principalement sur les travaux de Bailey et Adiga (1997) qui s’intéressent au degré d’autonomie des équipes de travail. Nous avons légèrement adapté cet outil pour utiliser l’échelle de Likert tel que proposé par Daneau (2000), afin de capter les nuances dans la perception du degré d’autonomie. Nous pouvons considérer que ce questionnaire est valide et fiable, car il a déjà été prétesté lors des recherches de Daneau (2000) et de Riffaud (2004). Certains items y ont été ajoutés, par exemple, la prévention de la santé et sécurité qui, à notre avis, pourrait être une responsabilité transférée aux équipes. Le contenu de ce questionnaire est directement lié aux indicateurs de notre variable dépendante touchant le fonctionnement et l’autonomie collective des équipes de travail. Le contexte et les modalités d’administration de ce questionnaire sont présentés au chapitre 3.