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4 Méthodologie 68

4.2 Méthode d'analyse 78

4.2.1Le choix des méthodes

Il y a deux raisons principales pour lesquelles l'auteur a choisi la méthode de l’observation participante combinée avec des entretiens qualitatifs analysés selon les critères de la « grounded theory » :

Tout d’abord, l'auteur a choisi l'observation participante car elle est la méthode de base de l'anthropologie, et de plus, elle semble être la plus adaptée au contexte. Les analyses quantitatives peuvent apporter des éléments importants d'un point de vue statistique (voir par exemple, Bantos 2011), mais elles nous révèlent très peu de choses sur les vraies motivations qui font agir les personnes, et sur la différence entre les actes et les mots. C'est uniquement une bonne connaissance du milieu, qui augmente proportionnellement avec la durée du séjour à un endroit, qui permet de remettre les constats dans leur contexte local. Il faut s'adapter au rythme et aux activités locales, ce qui parfois n'est pas facile, étant donné que le rythme sur les îles va moins vite que dans le monde occidental et que le chercheur a des questions très pressantes. Néanmoins, la patience et une adaptation aux modes de communication locaux sont les seuls moyens de faire en sorte qu'il y ait assez d'espace pour expliquer à la population concernée la raison des recherches et leur donner assez de temps pour surmonter des méfiances éventuelles envers les chercheurs en général. Les temps de discussion et d'observation sont primordiaux (des deux côtés, du chercheur et de la population), ce temps est absolument nécessaire pour, par la suite, pouvoir interpréter des informations. C'est surtout dans l'interprétation des données que l'on peut facilement faire des erreurs, si on ne perçoit pas correctement les motivations des personnes concernées.

Cependant, l'auteur est bien conscient qu'il est en quelque sorte prétentieux de vouloir revendiquer de bien connaître le milieu, un problème qui se posera toujours pour un étranger. Tout en étant conscient que ceci est un des points faibles de

l'anthropologie, cette discipline a au moins reconnu que ce problème existe et qu'il est très difficile à résoudre. C'est dans l'autoréflexion et l'autocritique qu'il faut inclure ce fait.

Au deuxième niveau, ce travail de thèse sort de l'anthropologie. Par sa nature pluridisciplinaire, il doit également correspondre aux critères des sciences dures. D'où l'intérêt de choisir une méthode d'analyse qui, tout en restant qualitative, puisse également avoir un caractère quantifiable - telle que la grounded theory (voir par exemple Strauss et Corbin 1990). Elle est basée sur des entretiens qualitatifs, qui sont par leur caractère narratif, la meilleure méthode pour comprendre les visions et motivations locales. Les résultats sont, en vérifiant les différents pas dans l'analyse, largement compréhensibles pour chaque personne qui veut vérifier le contenu de ces recherches. Naturellement, il y a également des décisions prises sur le terrain qui relèvent du choix de l'anthropologue qui peut diriger les recherches dans une direction ou dans une autre, mais ceci est inhérent au caractère de la nature humaine et donne l'occasion de suivre des pistes inattendues qui peuvent se révéler importantes. Ici, on rejoint un des éléments de la grounded theory : on part d'une question de recherche (dans ce cas : « Comment est perçu le changement climatique sur les îles du Pacifique, notamment sur deux îles de type géomorphologiquement différent? ») et non pas d'une hypothèse - l'hypothèse se développe au fur et à mesure de la recherche et s'adapte à la réalité. Il s'agit donc d'une méthode qui s'approche du sujet de recherche dans un sens inverse à beaucoup d'autres méthodes. Consciente que le changement climatique est un sujet très flou et difficile à cerner, l'auteur s'est laissé guider par ces principes.

4.2.2L'analyse des entretiens qualitatifs

Des entretiens qualitatifs portant sur un ensemble de 99 personnes interrogées, ont été enregistrés (dont 52 en Polynésie Française et 47 à Wallis), soit 106 h d'enregistrement. Ces enregistrements ont été ensuite transcrits afin de pouvoir travailler le texte.

Le logiciel « atlas.ti »24 était l'outil de choix pour l'analyse de ces données, il est

conçu pour analyser des données qualitatives. L'approche est basée sur les principes de la grounded theory qui permet une gestion des données qui s'approche des méthodes quantitatives, tout en restant fidèle aux principes de l'analyse qualitative.

L'analyse se fait sur trois niveaux hiérarchiques :

1. Citation 2. Code

3. Code Family

Ad 1 Citation

Les transcriptions ont été téléchargées dans ce logiciel.

La première étape consiste à identifier des passages dans les entretiens qui ont une signification dans le contexte du sujet de recherche.

Ad 2 Code

Ensuite, ces passages sont marqués et il leur est attribué un code qui exprime l'idée générale du passage. Au fur et à mesure que les idées principales (codes) commencent à se répéter, on attribue alors des codes déjà créés aux passages. On procède ainsi avec tous les entretiens transcrits, tout en développant de nouveaux codes au fur et à mesure que l'analyse se fait.

Dans cette base de données, 116 codes ont été créées pour le terrain de Wallis, 138 pour Rangiroa (voir liste des codes en annexe). Pour l'ensemble des transcriptions, 1209 citations ont été retenues pour l'analyse.

Figure 9 : Capture de l'écran lors de l'attribution des codes avec atlas.ti (Worliczek 2012)

Ad 3 Code Family

Ces citations ont ensuite été regroupées selon leur pertinence dans un code défini. Le plus souvent, un sujet a été évoqué à travers un code donné, et plus on peut estimer qu'il est pertinent (groundedness). A un niveau supérieur, l'auteur a défini des « familles de codes » (code families) qui regroupent les codes autour de certains thèmes.

Exemple :

Code Family : sable

Codes (17) : [CdE] [conscience environnementale] [foncier : maître du terrain] [intérêt collectif vs. intérêt individuel] [maisons : matériau] [Motus] [mur : négatif] [mur : positif] [murs vs. enrochement] [remblai] [sable mort/vivant] [sable : alternatives] [sable : prélèvements] [sable : réglementation] [sable : source de revenu] [système économique] [vision long terme vs. court terme]

Quotation(s) : 325

On voit donc que dans la « code family » sable (à Wallis), 17 codes sont regroupés qui touchent tous au sujet. A ces 17 codes, 325 citations ont été attribuées. Entre ces codes, on peut ensuite établir des relations (par exemple le « système économique » fait

du sable une « source de revenu », voir chapitre 6.1.1.3 « Le sable comme source de revenu »).

C'est sur cette base que l'auteur a pu tirer ses conclusions.

Les notes de l'observation participante et des entretiens non enregistrés ont été intégrées et croisées avec les résultats de l'analyse des entretiens enregistrés. Ils ont permis d'affiner et d'approfondir des théories et de découvrir des fausses pistes.

Il a également été réalisée une petite enquête quantitative dans des écoles primaires des deux terrains, ce qui sera expliqué dans le chapitre 7.1.2 « Le projet « cyclones » aux écoles primaires ».

Dans le texte suivant, l’auteur a souvent utilisé des phrases comme « les habitants de Rangiroa ont constaté » ou « la population considère ceci comme… ». Des avis divergents existent évidemment, et les constats ne peuvent pas être représentatifs pour la population entière. Il est important de souligner qu’il s’agit des tendances que l’auteur a identifié dans ses analyses des constats des informateurs, sans pour autant exclure la possibilité que certains habitants ne partagent pas cet avis ou cette vision.

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