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3. Partager son regard sur le monde : l’exemple de Marion Gambin

3.3. Une médiatisation spontanée

Marion Gambin travaille régulièrement pour la presse. Causette, Libération, Le Monde,

Paris-Match, l'Etudiant, Flammarion, The Good Life… ont déjà fait appel à ses services pour

Figure 11 : Revue de presse sur le site FTL. Figure 12 : article de presse publié le 27/01/2015 sur blog mariongambin.tumblr.com

Figure 13 : article de presse partage sur la page Facebook FTL, 27/01/2015

Figure 14 : article de presse partagé sur la page Facebook de Marion Gambin, 27/01/2015

Paul Wombell, TRIBUNE | France(s) Territoire Liquide selon Paul Wombell : la genèse d’un projet, OAI13, 8 juin 2014.

des reportages ou des portraits. A l’instar de Laura Bonnefous, elle informe ses communautés de ses récentes publications via Facebook ou son blog, en publiant des photos des supports, accompagnés d’un commentaire informatif mais spontané, associé parfois à des remerciements : « André Choulika pour Les Echos week-end c'est sorti la semaine dernière ! » (figure 1) ou « Mieux vaut tard que jamais… Mon expo "Nos vieux jours heureux" au Château d'Eau était en ouverture des pages Culture du Causette de mars ! Merci Magali Corouge pour la publi et ce sympathique texte ! » (figure 2).

Mais sa spécificité résiderait plutôt dans l’usage qu’elle fait de Facebook pour annoncer ses projets ou ses prochaines publications. Une partie de sa communication sur le réseau social est basée sur des effets d’annonce.

Prenons un exemple : Marion Gambin réalise assez régulièrement des reportages à l’étranger pour la magazine The Good Life. Depuis quelques mois, ces reportages font l’objet d’un petit « teasing » avant la sortie du magazine. A chacun de ses derniers séjours, la photographie a posté un album de quelque photos sur Facebook assortie d’un texte souvent enjoué : « Et hop un petit tour en Italie pour The Good Life ! A paraître en septembre… » (figure 3), « Back home, avec en cadeau un sublime survol des Alpes ! Mes photos accompagnées des textes de Natacha seront dans le The Good Life de cet été, sortie début juillet ! » (figure 4) ou encore « Direction Venise pour The Good Life ! »

Elle procède de la même manière pour annoncer la préparation d’une nouvelle série de photographies sur sa page Facebook ou son blog : elle présente une sélection d’images (figure 5) ou une mosaïque de bouts d’images (figure 6). L’expression « Work in progress » revient assez fréquemment.

Contrairement à Micky Clément ou à Laura Bonnefous, Marion Gambin affiche clairement la dimension commerciale du métier de photographe, en proposant la vente de ses tirages, ou ses services en tant que photographe de mariage, via ses sites Internet. Ce parti-pris s’explique vraisemblablement par sa pratique de la photographie, qui entre plus dans le champ du documentaire et donc de la presse, que dans celui de la photographie artistique.

Figure 3 : post Facebook du 14/07/2016 Figure 4 : post Facebook du 7/05/2016

Figure 5 : Annonce de la série en cours « Habiter » sur Facebook, post du 24 mars 2014.

Figure 6 : Annonce de la série « Nos vieux jours heureux » sur le blog mariongambin.tumblr.com.

Elle se différencie également de ses confrères par la spontanéité de ses commentaires sur les réseaux sociaux, relatant ses voyages, ses publications voir des événements plus personnels. Ce ton, qui pourrait paraître manquer de professionnalisme, induit chez l’internaute une relation de proximité avec la photographe, et ce faisant, un lien indiscutable.

Synthèse

L’analyse des pratiques de médiation et de médiatisation de ces trois « jeunes photographes » - Micky Clément, Laura Bonnefous et Marion Gambin - nous démontre combien la formation, le parcours des photographes mais également leur sensibilité et leur appétence à communiquer avec leurs publics peuvent influer sur leurs choix. Néanmoins, leurs pratiques de médiation et de médiatisation sont toutes conditionnées par leurs univers de photographe, leur capacité à conceptualiser, à créer du discours, et à se constituer un réseau et des publics. Leurs pratiques se différencient de leurs prédécesseurs car elles s’affranchissent, dans une certaine mesure, de l’intermédiation des acteurs des marchés de la photographie (agent, galerie…), notamment grâce à Internet et aux réseaux sociaux. Pour autant, ces intermédiaires demeurent incontournables pour les « jeunes photographes », car ils constituent un réseau influant dans l’écosystème professionnel et auprès des publics.

CHAPITRE 3 : L’identité numérique professionnelle des « jeunes

photographes » : de la communication à la médiation.

Au vu du nombre toujours plus important de photographes professionnels - il s’est accru de 37% entre 1995 et 2010202 - et d’une pratique amateure en expansion, il est de plus en plus en difficile, pour un « jeune photographe » professionnel, de se distinguer, de se faire connaître, et d’être reconnu par les professionnels du monde de la photographie et les publics. Il ne suffit plus désormais d’avoir du talent, et quelques relations, pour « trouver sa place ». Il faut désormais savoir faire son autopromotion, sans pour autant négliger l’intermédiation des marchés de la photographie, et plus largement de l’art, ce qui nécessite des savoir-faire bien différents de ceux de la photographie.

Depuis quelques années, des éditeurs203 se sont emparés de cette question, en proposant aux photographes des ouvrages aux titres explicites : Artiste photographe : se former,

construire son portfolio et vivre de ces oeuvres204, Photographe 3.0 : Optimiser sa présence

sur le Web et créer une dynamique commerciale efficace205 ou encore Vivre de ses photos:

Et si le marketing était la clé ?206. Souvent focalisés sur les aspects pratiques du métier, le commercial et le marketing, ces ouvrages s’attardent peu sur les questions stratégiques, ce que nous allons tenter de faire dans cette dernière partie, en nous appuyant sur les analyses produits dans les chapitres 1 et 2 de ce mémoire, ainsi que sur nos entretiens.

1. Se connaître en tant que photographe, construire son discours et son