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I.4 Physique et notions de base lors de la vaporisation dans un micro-canal

I.4.2 Transferts de chaleur

I.4.2.3 Mécanismes de transfert de chaleur

Dans le domaine de la vaporisation d’un fluide dans des films minces de liquide ou dans un ménisque étendu, de nombreuses études sur les transferts de chaleur ont été menées en particulier dans le domaine du développement des échangeurs diphasiques. Le champ de recherche concernant ce sujet est d’ailleurs très vaste tant au niveau des configurations géométriques que de celle des échelles. Etant donné que le cadre de notre étude concerne les micro-boucles à pompage capillaire, nous allons surtout nous intéresser aux travaux concernant le changement de phase liquide-vapeur à des échelles micrométriques.

La plupart des auteurs, quelle que soit la configuration géométrique, considèrent que l’interface est divisée en trois régions (fig.I.23) :

– le ménisque intrinsèque dans laquelle les forces capillaires dominent

– les films minces contrôlés à la fois par les forces capillaires, visqueuses et la pression de disjonction

la vaporisation du liquide, les transferts de chaleur étant limités dans la zone de film adsorbé par la résistance d’interface précédemment évoquée.

FIG. I.23: Vue schématique d’un profil de ménisque [41].

Configurations 2D Une configuration 2-D fait référence par exemple à la vaporisation d’un liquide sur une plaque plane ou dans un tube cylindrique (2-D axisymétrique).

Wayner et al. [42,43,44,45] ont réalisé de nombreux travaux concernant la vaporisation d’un liquide dans ce type de situations. Dans les années 1970, ils ont analysé les processus de transport au cours de l’évaporation d’un ménisque et d’un film adsorbé formés sur une plaque plane de verre surchauffée immergée dans du liquide.

Ils ont développé un modèle numérique qui prend en compte :

– les phénomènes interfaciaux, les effets de la courbure et de la pression de disjonction – la mécanique des fluides (équation de conservation de la masse et équation de conservation

de la quantité de mouvement)

– les transferts de chaleur en considérant deux résistances : celle du liquide (transfert purement conductif perpendiculairement à la plaque) et celle de l’interface liquide-vapeur

Ils ont observé que l’écoulement de fluide généré était dû aux forces capillaires dans le ménisque intrinsèque et au gradient de pression de disjonction dans les films minces. Ils ont également conclu

que la densité de flux qui passe dans les films minces était très importante mais que la longueur de cette zone n’était que de l’ordre de 1 µm. A contrario, la région du ménisque intrinsèque qui absorbe des densités de flux moins importante s’avère être mille fois plus étendue. Les auteurs ne discutent pas de la répartition du flux de chaleur entre les deux zones.

Park et al. [41] ont également développé un modèle numérique dans une configuration 2-D à savoir la vaporisation d’un fluide entre deux plans parallèles. Les hypothèses de leur modèle sont :

– l’écoulement est stationnaire, laminaire pour les deux phases liquide et vapeur – les deux phases sont incompressibles

– les propriétés thermophysiques du fluide sont constantes

– les termes convectifs sont négligeables dans l’équation de conservation de la quantité de mouvement

– la pression de disjonction est prise en compte

– les deux rayons de courbure de l’interface sont également pris en compte – les frottements pariétal et interfacial sont considérés

– la théorie de la lubrification dans la région des films minces est utilisée – les transferts de chaleur sont purement conductifs dans la phase liquide

La résolution de ce modèle montre une forme du profil des films minces en décroissance expo- nentielle. Les auteurs expliquent cette décroissance par le fait que le flux massique d’évaporation est plus important dans les films minces que dans la région du ménisque principal. En effet, le coefficient d’échange dans les films minces est très élevé comparé à sa valeur dans le ménisque principal. Cependant, du fait de la très faible longueur des films minces, l’essentiel du flux est dissipé dans la zone du ménisque intrinsèque (= ménisque principal). Un autre point intéressant concerne la longueur du ménisque étendu c’est-à-dire la longueur de la zone diphasique. Les ré- sultats concernant cette longueur montrent que plus le flux de chaleur appliqué augmente, plus la longueur diphasique diminue, et ce de façon exponentielle. Ce résultat est très intéressant concer- nant le dimensionnement de l’évaporateur d’une micro-boucle diphasique. En effet cela signifie que les longueurs maximales de la zone diphasique sont obtenues pour de faibles flux de chaleur. Par conséquent, le dimensionnement des micro-canaux de l’évaporateur, en particulier leur lon- gueur, doit se faire à faible flux pour éviter que les ménisques sortent de la structure capillaire jusque dans la ligne liquide et provoquent alors le désamorçage du système.

D’après ces travaux, il semble que le coefficient de transfert de chaleur est beaucoup plus important dans les films minces que dans le ménisque intrinsèque. Cependant, la longueur des films reste faible et ne permet pas par conséquent un échange important. L’idée serait donc d’essayer

polygonale sont utilisés.

Section polygonale Si la section droite du tube capillaire est de type polygonale, les films de liquide s’étirent grâce à la présence de coins.

En 1991, Wong et al. [46] ont développé un modèle numérique qui permet d’obtenir le profil 3-D d’un ménisque dans des capillaires de sections polygonales. Leur modèle est basé sur la relation de Laplace-Young étendue (Eq.I.17). La particularité de leur formulation réside dans le fait que leur fonction Π dans l’équation représente à la fois la pression de disjonction mais aussi la pression de conjonction selon l’épaisseur du film liquide. Cette fonction est la suivante (h et A représentant ici respectivement l’épaisseur du film de liquide et la constante de Hamaker) :

Π (h) = A h3 − Dsech 2 h w − 2  (I.20) Les paramètres D et w sont des paramètres ajustables, reliés par une relation de contrainte permet- tant d’obtenir l’angle de contact apparent souhaité.

Ils ont donc obtenu le profil 3-D du ménisque par une méthode de résolution aux différences fi- nies pour différentes sections polygonales (triangulaire, carré, rectangulaire, etc.) et pour différents angles de contact. Des visualisations expérimentales permettent de montrer une bonne adéquation entre les résultats numériques et expérimentaux. Par ailleurs, ils ont comparé leurs résultats sur la courbure moyenne qu’ils ont obtenus avec le calcul analytique disponible pour cette variable proposé par l’étude de Mason et al. [47]. La comparaison est très satisfaisante. Dans cet article, le ménisque est uniquement étiré sous l’action des forces de gravité. Il n’y a pas de vaporisation du fluide. En l’absence de transfert de chaleur, il apparaît donc qu’un canal de section polygonale permet d’obtenir l’extension des films de liquide dans les coins.

Beaucoup d’auteurs ont étudié le comportement d’une interface liquide-vapeur avec transferts de chaleur dans des micro-canaux de forme triangulaire dans le but en particulier d’étudier les perfor- mances des micro-caloducs. Certaines de ces études ont déjà été citées dans la paragrapheI.3.2. Cependant, la littérature dans ce domaine est très extensive.

Swanson et al. [48] ont analysé un ménisque dans une telle configuration. Le liquide, dont l’écou- lement est dû à la gravité, s’évapore dans l’atmosphère. Ils ont développé un modèle numérique dans le but d’étudier les effets de l’angle formé par les parois du canal triangulaire et du transfert de masse sur la morphologie du ménisque, l’écoulement du fluide et les transferts de chaleur. Les équations de Navier-Stockes et de l’énergie sont appliquées en considérant l’hypothèse de la lu- brification. Ils considèrent que les gradients de vitesse et de température dans la phase vapeur sont faibles et que la pression de cette phase est constante. Ils ont observé que le nombre de Nusselt

diminue lorsque l’angle formé par les parois du canal augmente. Ce comportement est dû à une augmentation de la différence de température entre la paroi et l’interface. Comme le maximum de la densité de flux de chaleur est concentré au niveau de la ligne triple, le fluide est pompé dans cette région mais la question de la répartition du flux entre les films minces et le ménisque intrinsèque reste ouverte.

Un modèle numérique 1-D a également été développé par Peles et Haber [49] concernant la vapori- sation d’un fluide dans un micro-caloduc de section triangulaire. Dans ce modèle un seul rayon de courbure pour l’interface est considéré et le micro-tube est vertical (la gravité est prise en compte dans l’équation de conservation de la quantité de mouvement). Leurs résultats montrent que la

FIG. I.24: longueur d’assèchement pour de l’eau en fonction du diamètre hydraulique et pour

différents angles [49].

longueur d’assèchement c’est-à-dire la longueur qui correspond au déplacement de la ligne triple (on dit qu’il existe alors une zone asséchée au niveau de l’évaporateur) augmente avec le diamètre hydraulique (fig.I.24) et que la longueur diphasique diminue lorsque le flux de chaleur augmente (fig.I.25).

Un autre résultat intéressant concernant la vaporisation d’un fluide toujours dans un micro- canal de section polygonale a été présenté par Morris [50]. Dans cet article, l’auteur considère un ménisque d’un fluide parfaitement mouillant. Les transferts de chaleur sont purement conductifs entre la paroi et l’interface. L’évaporation du ménisque induit un écoulement de fluide concentré au niveau de la ligne triple. Cet écoulement implique un changement de profil du ménisque dans cette région, ce qui crée un angle de contact apparent différent de l’angle statique. Ce modèle a

FIG. I.25: longueur diphasique pour de l’eau en fonction du flux de chaleur et pour différents angles [49].

permis d’établir une relation entre l’angle de contact apparent formé et le nombre capillaire qui est :

Θ = 3 Ca f

14

b (I.21)

avec f qui représente le ratio entre les différences de pression aux extrémités du ménisque et de l’écoulement induit [50], b une constante dérivant de la résolution du problème numérique, Ca le nombre capillaire.

D’après cet état de l’art, les travaux concernant le phénomène de vaporisation d’un liquide se font essentiellement dans le cadre des micro-caloducs. Même si le fonctionnement de ces systèmes est très proche des micro-boucles diphasiques à pompage capillaire, de nombreuses différences existent. En effet, dans le cas des micro-caloducs :

– le ménisque principal se situe dans la zone condenseur

– une zone adiabatique sépare la zone de la ligne triple de la zone du ménisque principal – dans la zone de l’évaporateur, le liquide se concentre dans les coins uniquement. – l’écoulement de la vapeur se fait à contre courant de l’écoulement du liquide

Ces différences impliquent que les transferts de chaleur peuvent être différents dans les deux sys- tèmes. Par ailleurs, dans le cas des micro-caloducs, le fait qu’il n’y ait que les films de liquide dans les coins peut justifier le fait de ne considérer qu’un seul rayon de courbure dans l’équation de Laplace (eq.I.14). Pour les micro-boucles, la présence du ménisque principal rend moins évidente

l’adoption de ce type d’hypothèse.