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Mécanismes de la plasticité synaptique hippocampique

1) Le Potentiel Post tétanique.

Le Potential Post-Tétanique (PPT) correspond à une augmentation transitoire très forte du potentiel post-synaptique lors d’une stimulation électrique de forte fréquence (100-200Hz). L’induction du PPT est nécessaire pour induire une bonne LTP. Si les mécanismes impliqués ne sont pas encore complètement connus, il est connu que la PPT met en jeu une forte entrée de calcium présynaptique médiée par un courant dépolarisant prolongé. Cette entrée de calcium va favoriser l’exocytose rapide de vésicules de neurotransmetteurs. Ces vésicules sont situées proches de la fente synaptique et font parties d’une catégorie de vésicules appelées les « vésicules prêtes à relarger » (ou Readily Releasable Pool ou RRP en anglais). Plus précisément, la forte entrée de calcium va fortement activer la Calmoduline (CaM) qui va interagir avec MLCK pour activer la myosine 2, un moteur moléculaire favorisant l’adressage des vésicules à la fente synaptique, augmentant à terme le relargage de neurotransmetteurs à la synapse (figure 49).

2) La Potentialisation à long terme

Elle a été caractérisée pour la première fois chez le lapin par Bliss T & Lomo T en 1973. Différents protocoles sont utilisés pour l’induction d’une LTP, on peut citer la libération de glutamate par photostimulation (G. Ellis-Davies ; 2019179) mais le plus courant consiste en la stimulation « Theta Burst », une stimulation de courte durée à haute fréquence (HFS : 100Hz) simulant une stimulation électrique synchrone des fibres étudiées.

Suivant le protocole utilisé, l’âge de l’individu et les synapses étudiées, les processus biologiques sous-tendant la LTP et la LTD peuvent varier (Grover TM., Teyler TJ. 1990180) ainsi que leur conséquence (KE. Sorra & al. ; 1998181, DJ. Watson & al. ; 2016182). Notamment, l’induction d’une LTP via les fibres moussues passe par des mécanismes présynaptiques impliquant les canaux calciques voltage dépendants et la voie cAMP/PKA (Nicoll RA. Schmitz D. ; 2005183). A l’inverse, induire une LTP sur les fibres des SC va recruter des récepteurs ionotropiques NMDA et AMPA et enclencher des modifications post-synaptiques telles que l’activation de la Ca2+ /CaM-dépendant protein Kinase II (CamKII) (Wang H & al. ; 2016) (Figure 50 et C.S. Rex & al.; 2009184). Cette dernière est la forme de LTP la plus étudiée car il s’agit d’un modèle approprié pour l’étude de la mémoire associative.

Figure 50: A : Activation et collaboration de la CamKII avec le cytosquelette d’actine dans une épine dendritique lors de l’induction de la LTP. B : Evolution de plusieurs paramètres telles que la concentration intracellulaire locale en Ca2 , la phosphorylation de CamKII ou le volume de l’épine dendritique. Tirée de K Okamoto & al.; 2009. C : Schéma des cascades d’activation des principales voies impliquées dans la dynamique des épines

L’activation répétée du récepteur NMDA par du glutamate va provoquer un fort influx de Ca2+ intracellulaire, phosphorylant la CamKII qui va activer deux voies moléculaires : d’abord la voie RhoA/Rac/Cofiline dans l’épine et les environs qui aboutit à la polymérisation des filaments de F-actine, provoquant le bourgeonnement de l’épine dendritique (phase d’initiation qui dure moins de 5 minutes). Puis la voie cdc42 confinée à la tête de l’épine responsable du maintien des nouveaux filaments d’actine générés (la phase de maintien qui dure plus de 30 minutes.) (CS. Rex & al. ; 2009184, H. Murakoshi & al. ; 2011185, Figure 50).

Comme présentée dans la partie résultats, la relation I/O présente une forte tendance à la diminution à 8 mois dans les collatérales de Schaffer Spg11-/- comparées aux WT, bien que non significative. Cette perte de la relation I/O peut être due à une perte de fibres et/ou à une perte d’excitabilité de ces fibres. S’il nous est difficile de conclure quant à l’existence d’une hypoexcitabilité des collatérales de Schaffer, il est bon de rappeler que l’hippocampe des souris Spg11-/- est atrophié, mais comme précisé dans la partie résultats, la pente du fEPSP ne semble pas modifié, ce qui suggère que la perte de LTP observée n’est pas due à une faible excitabilité.

3) La Facilitation à court terme

Elle a été caractérisée pour la première fois sur des jonctions neuromusculaires de grenouilles (Feng. 1940, Eccles & al. ; 1941). Elle rend compte de la capacité d’une synapse à présenter un PPSE plus fort après deux stimulations présynaptiques rapprochées dans le temps (on parle alors de « paired-pulse facilitation ». Les mécanismes sous-tendant ce phénomène ne sont pas encore bien définis, mais plusieurs hypothèses ne s’excluant pas sont disponibles (SL. Jackman & WG. Regehr ; 2017186). Notamment, la facilitation à court terme impliquerait des éléments majoritairement pré-synaptiques:

_ Modèle du calcium résiduel : le calcium présynaptique intracellulaire résiduel de la première stimulation pourrait toujours être présent lors de la deuxième stimulation, favorisant la fusion des vésicules de neurotransmetteurs, directement via Syt ou via des tenseurs de facilitation capables de lier le calcium tels que Syt7 ou NCS1 (Yamada and Zucker ; 1992187, Craxton ; 2010188).

_ Modèle de l’élargissement de la pointe (spike broadening) : les canaux potassiques peuvent toujours être inactivés lors de la deuxième stimulation, élargissant le deuxième potentiel d’action. Cela peut survenir notamment dans des synapses très spécialisées telles que les fibres moussues (Jackson & al. ; 1991, Geiger and Jonas, 2000189).

_ Modèle de la facilitation du courant calcique : Le Calcium résiduel de la première stimulation pourrait se fixer sur les protéines telles que NCS1 ou la Calcium/Calmoduline qui vont eux-mêmes se fixer aux canaux calciques de type P/Q pour accentuer la future entrée d’ions calcium lors de la deuxième stimulation (Lee & al. ; 2003190, Diaz-Rojas & al. ; 2015191, Nanou & al. ; 2016192). _ Le modèle du Tampon Calcique qui rejoint l’hypothèse du calcium résiduel en mettant en jeu la présence de protéines tampon du calcium capables de le fixer. Ces protéines tampon joueraient bien leur rôle lors de la première stimulation, empêchant le calcium de trop recruter Syt1. Lors de la seconde stimulation, les protéines tampons du calcium sont saturées et la nouvelle entrée de calcium va recruter syt1 et favoriser la fusion des vésicules de neurotransmetteurs (Klingauf & Neher ; 1997193, Matthews & Dietrich ; 2015194).

La dépression à long-terme, comme dit plus haut, définit la capacité des synapses à réduire leur efficacité. Dans l’hippocampe, elle est typiquement induite par des stimulations basse fréquence répétées, (en général 1-5Hz pendant 600-900 secondes, parfois en paired-pulse) menant à une faible activation des récepteurs NMDA, provoquant un faible influx de calcium qui va activer des phosphatases déphosphorylant les récepteurs AMPA, les menant à leur endocytose (Figure 51 et RM. Mulkey, RC Malenka ; 1992195, RM. Mulkey & al. ; 1993 & 1994196,197). Il est bon de noter que l’activation des récepteurs NMDA n’est pas nécessaire pour l’induction de la LTD car l’influx

léger de Ca2+ intracellulaire peut survenir par d’autres moyens, notamment l’activation des récepteurs métabotropiques au glutamate (mGluR) ou les canaux calciques voltage dépendants. Les mécanismes par lesquels la LTD mène à la réduction voir à la suppression d’une épine ne sont pas encore complètement connus, mais il pourrait s’agir d’une activation du genre pro-apoptotique. L’influx de calcium intracellulaire provoqué par l’activation du récepteur NMDA peut provoquer un relargage de cytochrome c par les mitochondries locales, engageant la voie pro-apoptotique via l’activation de la caspase 3 et menant à une augmentation des protéolyses et de l’endocytose des récepteurs AMPA. Le protéasome et les Inhibiteurs de protéines apoptotiques (IAPs) permettent de limiter ce processus à l’épine dendritique concernée (M. Sheng, A. Ertürk. 2014198, Figure 51).

Figure 51: Schéma des voies moléculaires localisées dans les épines dendritiques lors de l’induction d’une LTD. Tirée de M Sheng & al.; 2014