• Aucun résultat trouvé

Chapitre I : Etat de l’art sur les dépôts de tantale

I. 3.2 - Mécanisme de réduction en une étape

Chamelot et al. et Polyakova et al. ont critiqué l’approche de Senderoff, car, selon eux, il n’y a aucune preuve de la formation de l’intermédiaire Ta(II) [Chamelot 1994; Chamelot 2002] [Polyakova 1994].

Deux hypothèses différentes ont été formulées pour tenter d’expliquer la présence du deuxième plateau de réduction en se basant sur des résultats obtenues en voltampérométrie cyclique de la réduction du sel de tantale et sur les analyses en diffraction de rayons X des couches déposées. Chamelot et al. ont expliqué la présence du deuxième pic de réduction par l’utilisation d’une électrode de référence gainée avec de l’alumine. L’alumine est attaquée par les fluorures (F-) ce qui peut générer des ions O2- qui se complexent à leur tour avec le sel TaF72- et forment des oxyfluorotantalate TaOxFy. Ainsi, la réduction de l’oxyfluorotantalate en oxyde de tantale est responsable de l’apparition de la deuxième étape de réduction. Cette hypothèse se base sur les résultats de l’expérience où l’ajout de l’oxyde de sodium Na2O a été réalisé générant ainsi des ions O2- dans le bain électrolytique. L’évolution des pics de réduction a ainsi été suivie en fonction de la quantité ajoutée de ce composé. Ces résultats seront discutés plus en détails ultérieurement [Chamelot 1994].

Une autre explication est proposée par Decroly : des espèces métalliques réduites peuvent se redissoudre. En effet, une partie du dépôt métallique a été enlevée soit par agitation soit à cause du poids du dépôt. La masse ainsi enlevée a été redissoute dans le bain électrolytique et les ions tantale se sont complexés avec d’autres composés donnant de nouvelles espèces. Une partie de ces dernières s’est oxydée à l’anode et une partie s’est re-réduite à la cathode. Ces expériences ont été réalisées en utilisant le mélange électrolytique KF / K2TaF7.[Decroly 1968].

Pour la formation du tantale, Chamelot et al. ont proposé le mécanisme de réduction en une seule étape par échange direct de 5 électrons selon l’équation I.5 et la Figure I. 2.

24

Figure I. 2 Voltampérométrie cyclique du sel K2TaF7 dans le mélange eutectique LiF-NaF à 800°C ; l’électrode de travail est une électrode d’argent et la vitesse de balayage est de 0,1V.s-1. Le rapport molaire oxygène-tantale est de 0,196 [Chamelot 2002].

Pour valider leur approche sur la formation d’espèces oxofluorures de tantale en présence d’ions oxydes O2-, Chamelot et al. ont ajouté, comme indiqué précédemment, une source d’oxygène à l’aide de l’oxyde de sodium Na2O aux bains électrolytiques. L’ajout d’oxyde de sodium Na2O en faibles quantités conduit à la formation des espèces monooxofluorures de tantale TaOF52- ou TaOF63- en réagissant avec le sel de tantale K2TaF7 selon les réactions suivantes :

équation I. 6 TaF72- + O2- ↔ TaOF52- + 2F- équation I. 7 TaF72- + O2- ↔ TaOF63- + F-

Pour une concentration élevée en oxyde de sodium, une espèce dioxofluorure de tantale TaO2F43- se forme à partir de TaOF52- selon la réaction suivante :

équation I. 8 TaOF52- + O2- ↔ TaO2F43- +F-

Les deux monooxofluorures de tantale, TaOF52- ou TaOF63-, se réduisent en TaO à un potentiel inférieur à celui de l’ion TaF72- selon les réactions suivantes :

25

équation I. 9 TaOF52- + 3 e-↔ TaO + 5F

E = -0,28 V (vs Pt)

équation I. 10 TaOF63- + 3 e-↔ TaO + 6F-

Enfin, le dioxofluorure de tantale TaO2F43- se réduit en Ta(III) selon l’équation :

équation I. 11 TaO2F43- + 2 e-↔ Ta(III) E = -0,5 V (vs Pt)

Figure I. 3 Voltampérogramme à onde carrée de la réduction K2TaF7 dans le mélange eutectique LiF-NaF à 800°C avec une fréquence de 36Hz; l’électrode de travail est une électrode d’argent.

a. [K2TaF7] = 7,23*10-5 mol.mL-1 : le rapport molaire oxygène-tantale est de 0,196 ; b. [K2TaF7] = 9,71*10-5 mol.mL-1 : le rapport molaire oxygène-tantale est de 0,566 ; c. [K2TaF7] = 9,71*10-5 mol.mL-1 : le rapport molaire oxygène-tantale est de 1,17 [Chamelot 2002].

L’effet de l’ajout du monooxyde de sodium (Na2O) est illustré par les trois graphiques de la Figure I. 3 qui montre la variation de la densité de courant des trois pics de réduction en fonction de la quantité de Na2O ajoutée.

a. A B b. A B C c. B C

26

Selon les auteurs, le pic A correspond à la réduction de l’ion TaF72- en tantale métallique par échange de 5e- (Figure I. 2 et équation I. 5), le pic B est celui de la réduction des deux monooxofluorures de tantale TaOF52- (équation I. 9) et/ou TaOF63- (équation I. 10) en TaO par échange de 3e- et le pic C correspond à la réduction du dioxofluorure de tantale TaO2F4

3-en Ta(III) par échange de 2e- (équation I. 11). Lorsqu’une faible quantité de Na2O est ajoutée à l’électrolyte, (Figure I. 3. a), le pic B présente une faible intensité et le pic C est absent : seul le pic A témoigne de la réduction du tantale sous forme métallique. Lorsque la quantité de Na2O devient plus élevée, l’intensité du pic A diminue, alors que celle des deux pics B et C augmentent comme il est observé dans la Figure I. 3. b. et la Figure I. 3. c. Les auteurs expliquent ces phénomènes par le fait que les ions O2- provenant de Na2O réagissent avec l’ion TaF72- selon les deux réactions décrites dans l’équation I. 6 et l’équation I. 7 et se réduisent selon les deux réactions représentées dans les équations I. 9 et I. 10 par échange de 3 électronsau potentiel du pic B. La totalité de l’espèce TaF72- ayant réagi avec les ions O2- lors de l’ajout d’une quantité plus importante de Na2O le pic A disparaît alors sur la Figure I. 3. c. Comme il a été déjà décrit précédemment, TaO est formé selon les réactions données par l'équation I. 9 et l’équation I. 10. Ce mécanisme réactionnel a aussi été proposé par Lantelme

et al. [Lantelme 1992] dans les milieux de sels fondus chlorés. Selon Chamelot et al. [Chamelot 2002], le monoxyde de tantale TaO n’a pas été détecté mais la présence de creux à la surface du dépôt peut être la conséquence de la formation de bulles d’oxygène par réduction du TaO en Ta métallique selon la réaction suivante :

équation I. 12 TaO ↔ Ta +1/2 O2

Dans ce cas, le tantale métallique serait formé par un mécanisme de réduction à deux étapes à partir du monooxofluorure de tantale TaOF52-.

Dans le tableau ci-dessous (Tableau I. 2), sont données les différentes espèces d’oxydes de tantale et d’oxofluorures de tantale et de niobium détectées dans des milieux sels fondus. Les techniques de détection sont aussi données dans ce tableau ainsi que quelques commentaires des auteurs.

27 Espèces détectées Degré d’oxydation Mélange électrolytique Technique de détection Commentaires Reference TaOF63- +5 K2TaF7-KCl-KF Méthodes

spectroscopiques

Amosov et al.

d’après

[Chamelot 1994]

NbOF52- +5 K2NbF7 avec sels fluorés Spectroscopie Raman On peut supposer la formation de TaOF52- à partir de TaF72- dans des sels fluorés selon Chamelot Von Barner et al. d’après [Chamelot 1994] TaOF52- +5 K2TaF7-KCl-KF K2TaF7 -KCl-NaCl

Electrochimie Des complexes qui se réduisent à des potentiels plus bas que le TaF72- (non oxydé) Kostantinov et al. d’après [Chamelot 1994] Lantelme et al. [Lantelme 1992] TaO Ta2O +2 +1 Bains électrolytiques contenant des quantités élevées d’ions oxydes DRX [Lantelme 1992] NbO +2 K2NbF7 -KCl-NaCl DRX Espèces intermédiaires dans la formation du Nb métallique Chemla et al. d’après [Chamelot 1994]

Tableau I. 2 Résumé des composés oxofluorures de tantale et de niobium et des oxydes de ces deux éléments détectés lors de la réduction électrochimique en fonction des milieux électrolytiques et des techniques de détection.

28

Les oxydes de niobium sont aussi montrés dans ce tableau pour comparer aux oxydes de tantale. Le niobium, métal réfractaire ayant souvent des mécanismes de réduction semblables à ceux du tantale, les composés d’oxofluorures de niobium nous guident sur les composés oxofluorures de tantale qui peuvent se former lors de l’utilisation du tantale.