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Lutter contre les inégalités économiques et la pauvreté des

2.3 Mise en contexte

2.3.1 Lutter contre les inégalités économiques et la pauvreté des

Afin de comparer les pays européens dans leur capacité à lutter contre la pauvreté,

nous analysons dans un premier temps les différents taux de pauvreté. Le taux de

pauvreté est défini comme la part des personnes appartenant à un ménage dont

un revenu disponible équivalent

7

est inférieur au seuil de risque de pauvreté, fixé

à 60 % du revenu disponible équivalent médian national après transferts sociaux.

Cette méthode relative permet de prendre en compte le niveau de vie des différents

pays. Les taux de pauvreté présentés ci-dessus sont issus de nos calculs sur la base

de données d’enquête EU-SILC

8

pour l’année 2015. Les statistiques de l’Union

européenne sur le revenu et les conditions de vie (EU-SILC) sont un instrument

destiné à recueillir des données actuelles et comparables sur le revenu, la pauvreté,

l’exclusion sociale et les conditions de vie. Les données sont recueillies au niveau

des ménages mais également au niveau individuel auprès des personnes de 16 ans

et plus.

Nous avons choisi de comparer trois groupes de population : la population totale

(hommes et femmes), les mères en couple et les mères célibataires de 20 à 64 ans.

L’étude de ces trois groupes permet premièrement de comparer les pays européens

entre eux. De plus, nous pouvons comparer les écarts au sein des pays en comparant

la pauvreté des parents par rapport à celle de la population totale et de faire ensuite

la différence entre les familles monoparentales (dont la très grande majorité sont

des mères célibataires) et des mères en couple. Il existe une très vaste littérature

qui montre que les mères célibataires sont un groupe particulièrement à risque de

pauvreté

9

. D’après ces papiers, plusieurs facteurs contribuent à la précarité des

mères célibataires, elles doivent en effet faire face seules à un risque élevé de stress,

7

L’échelle d’équivalence est calculée en utilisant l’échelle d’équivalence modifiée de l’OCDE.

Cette échelle attribue un poids à tous les membres du ménage : 1,0 au premier adulte; 0,5 à la

seconde et chaque personne subséquente âgée de 14 ans et plus; 0,3 pour chaque enfant de moins

de 14 ans. La taille équivalente est la somme des poids de tous les membres d’un ménage donné.

8

https://ec.europa.eu/eurostat/fr/web/microdata/european-union-statistics-on-income-and-living-conditions

9

Voir notamment Gornick et Jäntti, 2010; Brady et Burroway, 2012; Misra et al, 2012;

Mal-donado et Nieuwenhuis, 2015; W. Van Lancker et al., 2015; Kramer et al., 2016; MalMal-donado, 2017;

Bernardi et Mortelmans, 2018; Bradshaw et al., 2018; Geisler et Kreyenfeld, 2019.

Figure 2.1: Taux de pauvreté de la population totale, des mères en couple et des

mères célibataires (en %)

Source:Calculs propres sur données EU-SILC pour l’année 2015 pour 19 pays européens. Age 20-64 ans.

de problèmes de santé, de chômage et d’exclusion sociale. Les mères célibataires

subissent une double peine puisqu’elles disposent de moins de revenus et de moins

de temps qu’un couple avec enfants. En effet, elles ne bénéficient pas de la

protec-tion financière que peut apporter le revenu d’un partenaire et ont plus de difficultés

à trouver un emploi puisqu’elles ne peuvent pas compter sur la flexibilité que

pro-cure la présence d’un conjoint avec qui partager la garde des enfants et les tâches

ménagères.

L’un des résultats principaux du graphique 2.1 est la mise en évidence de la situation

précaire des mères célibataires. Dans tous les pays européens, les mères célibataires

ont un taux de pauvreté plus élevé que celui de la population totale et que celui

des mères en couple. Il existe cependant de grandes différences entre les pays. Le

taux de risque de pauvreté des mères seules est particulièrement élevé en Allemagne

(41,8%), en Hongrie (45%), en Lituanie (46,2%) et au Luxembourg (49%). Il est

plus bas aux Pays-Bas

10

(27,2%) et en Finlande (15,15%). En moyenne pour ces

19 pays européens, c’est plus d’une mère célibataire sur trois (34,8%) qui vit sous

le seuil de pauvreté.

10

Il est intéressant de noter qu’aux Pays-Bas, le niveau d’aides aux parents seuls est de 70%

du salaire minimum, majoré de différentes aides financières accordées aux parents (Nieuwenhuis,

2015).

Le risque de pauvreté des mères en couple est plus proche de celui de la population

totale, autour de 15% en moyenne. Les mères en couple sont particulièrement à

risque de pauvreté dans les pays du sud de l’Europe, à savoir en Espagne (27,1%),

en Italie (24,3%) et au Portugal (20,8%) ; le taux de pauvreté de la population

to-tale est également plus élevé dans ces pays. La situation de pauvreté des mères en

couple est meilleure dans les pays nordiques (Danemark (11,9%), Finlande (7,3%)

et Suède (11,8%)) ainsi qu’en Tchéquie (9,3%), aux Pays-Bas (11,1%) et en Slovénie

(11,7%).

Il est possible d’affiner les situations de pauvreté en tenant compte du nombre

d’enfants dans le ménage. Un nombre d’enfants plus élevé correspond à un risque

de pauvreté plus haut (Atkinson et Marlier, 2010; Maldonado, 2017). On retrouve

bien ce résultat sur les graphiques 2.2 et 2.3, il semblerait en effet que le fait d’avoir

plus d’enfants corresponde bien à un risque de pauvreté plus grand de toutes les

mères, qu’elles soient célibataires ou en couple, dans les 19 pays sélectionnés. Le

risque de pauvreté est néanmoins plus élevé pour les mères célibataires et ce quel

que soit le nombre d’enfants. Pour les mères seules de trois enfants, il est de 80% en

Tchéquie, 79% en Hongrie, 80,4% en Italie et 81% en Lituanie. Il est beaucoup plus

faible en Finlande (22,4%), au Royaume-Uni (31,3%) et en Autriche (35,4%). Les

mères célibataires ayant deux enfants sont en moyenne plus à risque de pauvreté que

celles avec un enfant (38,3% contre 30,4%). Mais ces chiffres cachent des différences

importantes entre les pays : en Allemagne, en Finlande, aux Pays-Bas, en Suède

et au Royaume-Uni les mères de deux enfants sont moins à risque de pauvreté que

celles avec un seul enfant, ce qui laisse suggérer l’existence de programmes d’aides

ciblés envers les familles de deux enfants dans ces pays.

Figure 2.2: Taux de pauvreté des mères célibataires selon le nombre d’enfants (en%)

Source:Calculs propres sur données EU-SILC pour l’année 2015 pour 19 pays européens. Age 20-64 ans.

Figure 2.3: Taux de pauvreté des mères en couple selon le nombre d’enfants (en %)

Pour les mères en couple, le graphique 2.3 met également l’accent sur la plus grande

précarité des mères de trois enfants et la situation plus proche entre les mères d’un

ou deux enfants. On peut remarquer que le risque de pauvreté est particulièrement

élevé pour les mères de trois enfants dans le sud de l’Europe (Espagne (47,6%),

Italie (41,6%), Portugal (51%)) et en Lituanie (60%) alors qu’il est plus réduit dans

les pays nordiques (Danemark (10,6%) et Finlande (10,9%)).

Enfin pour terminer cette partie sur les taux de pauvreté des mères en Europe, il

est intéressant de regarder le niveau d’étude des mères. En effet, plus le niveau

d’étude est important, plus le risque de pauvreté est faible (Atkinson et Marlier,

2010; Härkönen, 2018; Cantillon et al., 2001). Les graphiques 2.4 et 2.5 présentent

les taux de pauvreté pour les mères en couple et les mères célibataires selon deux

niveaux d’éducation : le niveau de deuxième cycle de l’enseignement secondaire et

post secondaire non-supérieur (délivré dans les lycées généraux, technologiques ou

professionnels en France) et le niveau d’enseignement supérieur (délivré en France

dans les établissements universitaires, écoles supérieures professionnelles et les écoles

d’ingénieurs). Les systèmes éducatifs européens sont très différents mais les données

de la base EU-SILC permettent de comparer des niveaux scolaires similaires dans

des systèmes hétérogènes.

Le risque de pauvreté est en moyenne plus de deux fois plus élevé pour les mères

avec un diplôme du secondaire pour celles ayant fait des études supérieures. Ce

sont en particulier les mères célibataires n’ayant pas fait d’études secondaires qui

sont le plus à risque de pauvreté, notamment en Allemagne (50,2%), en Hongrie

(54,5%) et en Lituanie (57,7%). Il est important de noter que le fait de faire des

études ne semble pas protéger de la pauvreté de la manière partout en Europe.

Ainsi en Irlande et en Lituanie, les mères célibataires ont respectivement un risque

de pauvreté de l’ordre de 30,7% et de 37,2%.

Figure 2.4: Taux de pauvreté des mères en couple selon le niveau d’éducation (en%)

Source:Calculs propres sur données EU-SILC pour l’année 2015 pour 19 pays européens. Age 20-64 ans.

Figure 2.5: Taux de pauvreté des mères célibataires selon le niveau d’éducation

(en%)

Pour conclure cette partie descriptive sur le taux de pauvreté des mères en Europe,

nous pouvons rappeler les enseignements essentiels de ces graphiques :

• Il existe de grandes différences de taux de pauvreté en Europe

• Il existe également de grandes différences de taux de pauvreté des mères en

Europe, on observe parfois un gradient Europe du Nord-Europe du Sud ;

• Les mères célibataires sont plus à risque de pauvreté dans tous les 19 pays

européens sélectionnés ;

• Il existe une corrélation entre le nombre d’enfants et le risque de pauvreté :

plus le nombre d’enfants augmente, plus le risque de pauvreté est grand. Il

est d’autant plus grand si les mères sont célibataires ;

• Les mères ayant fait des études supérieures ont un risque de pauvreté plus

faible que celles étant diplômées du niveau secondaire.

Le lien entre le niveau d’éducation et le risque de pauvreté peut être expliqué par

le fait d’avoir potentiellement un emploi mieux rémunéré avec un niveau d’études

plus haut. C’est pourquoi dans la partie suivante nous présentons les statistiques

descriptives des taux d’emploi des mères en Europe.

2.3.2 Favoriser l’articulation entre la vie privée et la vie