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1 Productionparallèle . . . 93 2 Productionconjointe . . . 95 3 Equivalence pure . . . 106 4 Equivalence modifiée . . . 106 5 Redondance . . . 107 6 Complémentarité . . . 108 7 Supplémentarité . . . 109 8 Adaptation de la gestualité co-verbale dans une pratique à base français . . . 126 9 Utilisation de la LSF dans une pratique à base français . . . 127 10 Alternance des labialisations et des vocalisations dans les pratiques à base LSF . . . 129 11 Maintien de l’équivalence syntaxique dans les pratiques à base bilingue . . . 130 12 Alternance de la langue de base dans les pratiques à base bilingue . . . 131 13 Emergence d’une structure mixte dans les pratiques à base bilingue . . . 131 14 Production séquentielle de deux messages monolingues . . . 131 15 Extrait de transcription des énoncés bimodaux [Sepulchre-Manteau, 1997, 153] . . . 158 16 Extrait de transcription des énoncés bimodaux [Van den Bogaerde, 2000, 50] . . . 159 17 Discours supporté par le français . . . 163 18 Discours supporté par la LSF . . . 163 19 Discours bilingue bimodal . . . 164 20 Un discours multimodal . . . 165 21 Elaboration multimodale de la relation thème/rhème . . . 172 22 Elaboration bilingue de la relation thème/rhème . . . 173 23 Délimiter des unités propositionnelles en LSF dans une construction à proforme corporelle186 24 Délimiter des unités propositionnelles en LSF dans une construction à proforme manuelle 186

25 . . . 187 26 . . . 187 27 Exemple d’unités enchâssées . . . 188 28 Exemple d’unités juxtaposées . . . 188 29 Stratégies compensatoires langagières bimodales d’enfants sourds de GS face à l’item

cerf-volant . . . 369 30 Stratégies compensatoires d’enfants sourds de CP face à l’item cerf-volant . . . 369 31 Stratégies de rapprochement en langue d’enfants de CE2 face à l’item cerf-volant . . . . 369 32 Stratégies compensatoires face à l’item tournevis . . . 370 33 . . . 422 34 . . . 422 35 . . . 423 36 . . . 423 37 . . . 424 38 . . . 425 39 . . . 425 40 . . . 426 41 . . . 426 42 . . . 426 43 . . . 427 44 . . . 428 45 . . . 428 46 . . . 429 47 . . . 430 48 . . . 430 49 . . . 431 50 . . . 431 51 . . . 432 52 . . . 433 53 . . . 433 54 . . . 434 55 . . . 435

56 . . . 436 57 . . . 437 58 . . . 438 59 . . . 438 60 . . . 439 61 . . . 439 62 . . . 439 63 . . . 440 64 . . . 440 65 . . . 440 66 . . . 441 67 . . . 441 68 . . . 442 69 . . . 453 70 . . . 453 71 . . . 453 72 . . . 454 73 . . . 454 74 . . . 455 75 . . . 455 76 . . . 456 77 . . . 456 78 . . . 457 79 . . . 458 80 . . . 458 81 . . . 459 82 . . . 460 83 . . . 460 84 . . . 460 85 . . . 461 86 . . . 461 87 . . . 464

88 . . . 465 89 . . . 465 90 . . . 465 91 . . . 466 92 . . . 466 93 . . . 466 94 . . . 467

Introduction

Comme l’indique notre titre, notre approche de l’oralité de l’enfant sourd se situe à la croisée du bilinguisme et de la multimodalité, deux perspectives descriptives qui sont encore peu explorées dans le champ des recherches sur la surdité.

Ancrage du questionnement

L’oralité en contexte de surdité est façonnée par des querelles idéologiques. La question de la langue qui peut être considérée comme langue première de l’enfant sourd est à la base même du débat : la langue des parents pour certains – 90 % des enfants naissant dans des familles entendantes – la langue gestuelle pour d’autres, langue naturelle de l’enfant –i.e. celle qui est apprise spontanément et avec le moins d’effort [Vonen, 1996]. Ces querelles idéologiques se sont cristallisées sur les questions didactiques op-posant les partisans d’une éducation oraliste – privilégiant l’apprentissage du français – aux partisans d’une éducation bilingue – introduisant la LSF dans l’éducation des sourds. Au bout du compte, ces que-relles linguistiques et didactiques ont eu pour effet de figer l’appréhension du développement langagier et identitaire de l’enfant sourd sous deux figures monolingues :sourd oral vs sourd gestuel[Millet, 2003] ; plaçant ainsi les pratiques éducatives comme l’élément décisif de la trajectoire langagière et identitaire. Ce débat entretient ainsi, depuis près de 4 siècles, deux appréhensions monolingues du développement de l’oralité chez l’enfant sourd, une opposition qui a été, en partie, entretenue par les recherches.

Les recherches menées en contexte de surdité se sont, en effet, orientées dans deux directions oppo-sées pour étudier, en fonction du positionnement des chercheurs, exclusivement le développement de la langue vocale ou exclusivement le développement de la langue gestuelle. La parution de deux ouvrages consacrés aux avancées récentes des recherches dans ces deux directions témoigne de la réalité encore très actuelle de l’orientation monolingue des questions posées sur le développement de l’oralité chez l’enfant sourd – cf. Spencer & Marschark [2006]; Schicket al.[2005].

re-cherche obsédant et ont largement eu pour effet d’évincer la manière dont l’enseignement/apprentissage des langues à l’école interagit avec d’autres éléments de la biographie langagière de l’enfant sourd.

Or, nos travaux de master menés sur les pratiques communicatives de jeunes adultes sourds nous ont amenée à observer que, quel que soit le projet éducatif dans lequel ils ont été propulsés dans leur enfance, les locuteurs sourds recourent aux langues et aux modalités dans leurs interactions quotidiennes et se construisent ainsi comme des locuteurs bilingues à des degrés divers [Estève, 2006, 2007]. Ces observations empiriques sur les usages sociaux que les locuteurs sourds font des langues, nous ont amené à nous décentrer d’une appréhension monomodale et monolingue de leurs pratiques, pour appréhender les contours bimodaux et bilingues effectifs de leur compétence de communication.

Le bilinguisme en contexte de surdité alliant deux langues de modalités différentes – une langue vocale (ici, le français) et une langue gestuelle (ici, la LSF) – se caractérise par son essence multimodale du fait qu’il multiplie pour le locuteur les possibilités d’exploiter le discours. Chaque modalité peut, en effet, être utilisée dans ses dimensions verbales et non-verbales : gestes et signes dans la modalité gestuelle, onomatopées et mots dans la modalité vocale. Ces spécificités qui n’ont pas d’équivalent dans le bilinguisme de deux langues vocales nous ont donc amené à croiser les perspectives de description offertes par le champ de recherches sur le bilinguisme et sur la multimodalité, afin de rendre compte des dynamiques intra- et inter-modalités, qui émergent de la rencontre de deux langues de modalités différentes. Notre appréhension de lacompétence bilingue bimodales’inscrit donc dans une application effective du concept decompétence de communication[Hymes, 1984] incluant, au-delà du seul savoir linguistique, l’ensemble des composantes langagières de la compétence du locuteur dans une acception large du langage intégrant ses valeurs verbales et non-verbales [McNeill, 1992].

Ces réflexions préliminaires sur les contours du bilinguisme chez l’adulte sourd constitue l’ancrage dans lequel s’est tissée notre approche bilingue et multimodale du développement de l’oralité enfantine sourde. L’approche que nous proposons vise à se départir d’une focalisation sur les langues, pour appré-hender la manière dont l’enfant sourd se construit, à travers la bimodalité, comme sujet communicant et interagissant bilingue en devenir.

Nous proposons dans ce travail de cheminer en sens inverse de la majorité des recherches menées en contexte de surdité, en partant des réalités du terrain pour en proposer une réflexion théorique. Notre corpus a été recueilli dans des structures éducatives diverses – au projet éducatif bilingue, oraliste et intermédiaire entre ces deux pratiques, que nous avons appelé "mixte" – et permet, en dehors de tout pro-tocole pédagogique expérimental, de rendre compte de la manière dont les enfants sourds se développent langagièrement. Cette démarche constitue en elle-même déjà un premier parti-pris, qui a largement

fa-çonné nos réflexions sur la question de l’oralité enfantine sourde, pour les orienter dans une perspective davantage sociolinguistique que psycholinguistique. Notre perspective est, en effet, de rendre compte des parcours pluriels qu’adopte le développement de l’oralité enfantine sourde et d’accueillir ces trajectoires langagières comme autant de chemins légitimes – et à légitimer – du développement des compétences orales en contexte de surdité.

Parcours de la réflexion

Les trois parties autour desquelles s’articulent notre thèse portent sur des aspects étroitement imbri-qués des questions posées par une appréhension bilingue et multimodale du développement des compé-tences orales en contexte de surdité.

Pour la nécessité de la présentation, l’ancrage théorique de notre recherche fait corps autour de la pre-mière partie consacrée à la présentation de l’articulation des concepts phares de notre approche autour du tryptique multimodalité, bilinguisme et surdité. Des apports théoriques plus ponctuels sont apportés dans les deux autres parties, pour nourrir les analyses sur la socialisation scolaire (Partie 2) ainsi que sur le développement des habiletés discursives orales (Partie 3). Chacune des trois parties sera donc focalisée sur un aspect particulier de notre réflexion, bien que les outils d’analyses, la question de la socialisation et le développement des compétences orales s’entremêlent nécessairement.

La première partie retrace notre positionnement théorique dans le champ de recherches sur le bilin-guisme et sur la multimodalité. Le premier chapitre vise à situer les enjeux de notre approche bilingue et multimodale sur le développement de l’oralité chez l’enfant sourd, en l’état actuel des recherches me-nées en contexte de surdité. Nous préciserons en premier lieu la conception dubilinguisme sourddans laquelle nous nous ancrons en restituant ce concept dans une acception bimodale effective, incluant les deux langues dans la compétence de communication orale du locuteur sourd. Le croisement des pers-pectives de compréhension offertes par le bilinguisme et la multimodalité, nous permettra de préciser notre acception langagière de lacompétence bilingue bimodale. La multimodalité ayant peu été étudiée comme indice du développement langagier de l’enfant sourd nous nous proposerons de transposer les hypothèses sur le développement du langage chez l’enfant entendant – et tout particulièrement celles de Kita [2000] et McNeill [1992] – au développement de la bimodalité chez l’enfant sourd.

Le second chapitre présentera les outils que nous avons dû élaborer pendant nos travaux de master, en l’absence d’outils existants pour le bilinguisme en contexte de surdité, pour proposer une description

des pratiques des locuteurs sourds dans leurs aspects langagiers et bilingues. La typologie discursive des pratiques bilingues bimodales que nous avons étayée par la suite sera présentée en fin de chapitre.

Nous présenterons, dans le troisième chapitre, notre problématique et les hypothèses de notre re-cherche ainsi que notre corpus composé de deux volets : observations d’une classe accueillant des enfants aux projets éducatifs divers et tâches de productions orales recueillies auprès d’enfants de 5 à 12 ans – passation d’une tâche de dénomination lexicale (ELO, [Khomsi, 2000]) et d’une tâche de narration. Nous développerons également la première étape de réflexion préalable à la description de l’oralité enfantine sourde : l’élaboration d’une grille de transcription. L’approche bilingue et multimodale que nous propo-sons, nous a amenée à repenser la transcription distincte de la vocalité et de la gestualité, pour proposer une unité de segmentation globale des énoncés de l’enfant à même de prendre en compte les dynamiques langagières spécifiques à la multimodalité enfantine sourde.

La seconde partie aborde la question de la socialisation langagière de l’enfant sourd en se centrant plus spécifiquement sur l’espace scolaire, pour décrire les différents lieux d’interactions où l’enfant est amené à faire l’expérience du langage dans sa diversité.

Appréhender l’espace scolaire comme lieu de socialisation incite inévitablement à esquisser un por-trait des représentations sociales qui façonnent les attitudes des acteurs sociaux impliqués dans les par-cours de la socialisation langagière de l’enfant sourd. Comme le souligne Delamotte-Legrand [1997, 77] la socialisation langagière implique, en effet, «un ensemble d’inculcations qui concerne aussi bien les pratiques que les représentations et les attitudes langagières». Il s’agira, dans un premier chapitre, de dresser un portrait des représentations sociales qui façonnent la place des langues dans le développement de l’enfant sourd, à différentes étapes de sa socialisation langagière. Nous nous intéresserons à la ma-nière dont la place des langues et des modalités est définie dans les textes législatifs récents, en analysant tout particulièrement la manière dont la reconnaissance de la LSF comme langue à part entière dans la loi de 2005 a amené une redéfinition des projets éducatifs. Nous nous pencherons sur les représentations sociales qui façonnent le choix de langues effectué à l’annonce de la surdité, en analysant la manière dont les décisions prises par les parents interagissent avec les pressions extérieures – Instance médicale no-tamment – ou internes à la famille – entre parents et enfants. Nous nous centrerons plus particulièrement sur la façon dont les langues sont mises en opposition dans l’espace scolaire actuel. Nous verrons que ces cloisonnements jouent comme des phénomènes d’assignations langagières et identitaires, qui sont intégrés par les sourds eux-mêmes et fragilisent leur construction en tant que locuteurs bilingues.

Ce portrait nous permettra, dans un second chapitre, de mieux distancier les réalités du terrain scolaire des représentations sociales qui façonnent les regards portés sur ce lieu. Nous proposerons d’analyser les interactions quotidiennes, auxquelles l’enfant est confronté dans l’espace scolaire, comme des espaces interactionnels qui escortent son développement langagier. La perspective de notre recherche se trouve bien résumée dans cet extrait de Maxwell & Doyle [1996, 134] :

« The point is not to propose some new model for deaf education but to urge careful description of individual repertoires and sense-making efforts [...], to be aware that whatever ideology about language people hold, communicators are busy with their relationships, to be aware [...] that people will draw on the linguistic resources at hand to relate to others and make sense of their world. »1 [Maxwell & Doyle, 1996, 134]

Les analyses porteront sur des situations d’interactions recueillies en classe et hors de la classe, auprès d’une classe accueillant des enfants sourds aux projets éducatifs divers.

Le premier volet de ce corpus d’interactions recueilli en présence d’une enseignante spécialisée mai-trisant la LSF nous permettra d’avoir accès à la façon dont est renégociée la place des langues et des modalités pour assurer les interactions au sein du groupe classe, qui se compose d’enfants aux pro-jets éducatifs différents. Les interactions recueillies en présence d’autres intervenants (codeuse LPC et Educateur sourd) nous permettront de compléter le portrait de la place des langues dans des séquences didactiques focalisées sur l’enseignement/apprentissage d’une langue plus particulièrement.

Le second volet – émergeant d’un aléa du terrain – recueilli en présence d’une enseignante rem-plaçante non spécialisée propulsée dans cette classe pour la fin de l’année scolaire nous donne accès aux stratégies adaptatives mises en œuvre par les enfants sourds face à une enseignante entendante non locutrice de la LSF. Notre corpus se composant également d’interactions hors classe avec des pairs en-tendants, permettra d’analyser la réalité de la socialisation entre pairs.

L’analyse de ces contextes diversifiés sera mise en regard avec les interactions dans le groupe de pairs sourds, afin d’avoir plus finement accès à la manière dont les enfants sourds gèrent l’alternance de langues dans leurs interactions quotidiennes.

La troisième partie se centre sur le développement des habiletés orales de l’enfant sourd.

Les représentations sociales qui façonnent le regard porté sur la place des langues dans le développe-ment de l’enfant sourd a inévitabledéveloppe-ment des répercussions sur les pratiques d’évaluation. Nous tenterons

1. « La perspective n’est pas de proposer un nouveau modèle pour l’éducation des sourds mais de procéder à une description minutieuse des répertoires individuels et des stratégies adaptatives en étant conscient que quelle que soit leur idéologie sur les langues, les communicants sont pris dans leur relations sociales, qu’ils vont tirer parti des ressources linguistiques à portée de main, les lier à d’autres ressources et donner un sens à leur monde. » (notre traduction)

dans cette troisième partie de déconstruire les mythes qui escortent le développement de l’enfant sourd, en proposant une évaluation de leurs habiletés langagières effectives.

Dans un premier chapitre, nous nous centrerons sur l’analyse d’une passation d’un test d’évaluation du langage oral (ELO [Khomsi, 2000]) et plus particulièrement sur la tâche de dénomination lexicale. Ce test étant largement utilisé dans les milieux professionnels liés à la surdité – et notamment par les orthophonistes – nous permettra d’avoir accès à la manière dont les compétences orales des enfants sourds sont évaluées sur le terrain. Nous proposerons d’aller au-delà des limites du test, en analysant les stratégies effectives mises en œuvre par les enfants dans cette tâche de dénomination lexicale, ainsi que les contours langagiers effectifs des réponses.

Dans un second chapitre, nous proposerons de dresser un portrait des oralités enfantines sourdes en se basant sur l’analyse des pratiques langagières mises en œuvre dans la tâche de narration. Cette analyse nous permettra de cerner les multiples contours que revêt le développement de l’oralité chez l’enfant sourd.

Le troisième chapitre sera consacré à l’analyse des habiletés narratives des enfants sourds appré-hendées dans leurs dimensions langagières et bilingues. Cette analyse nous permettra de poser un autre regard sur les compétences orales de l’enfant sourd, davantage centré sur ses habiletés de symbolisation effectives, en tenant compte des acquisitions réelles dans chacune des modalités, qu’elles soient ou non systématisées en langue.

Dans le quatrième chapitre, nous explorerons les contours spécifiques de la bimodalité enfantine sourde en comparant des enfants sourds scolarisés en projet oraliste –i.e.non exposés à la LSF – et des enfants entendants de même âge et de même niveau scolaire.

Enfin, en conclusion, nous proposerons de dresser un portrait croisé des compétences lexicales des enfants sourds – telles qu’évaluées par le test – et des habiletés narratives de l’enfant sourd pour être à même de proposer un regard global sur le développement de l’oralité enfantine sourde.