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5.2 Structure de bande ´ electronique d’une monocouche de graph` ene

5.2.2 Limite continue

Lorsqu’on s’int´eresse aux propri´et´es de transport, on consid`ere des excitations ´electroniques debasse ´energie (i.e. des excitations dont les ´energies caract´eristiques sont petites devant la

largeur de bande ∼ |t|). On va donc se focaliser sur le voisinage des points de Dirac : on d´ecompose le vecteur d’onde k sous la forme k = ±K + q o`u |q|  |K| ∼ 1/a. On a donc |q|a  1 ce qui permet de faire un d´eveloppement limit´e de γk. En introduisant la vitesse de Fermi donn´ee par :

vF =

3|t|a

2~ , (5.11)

on peut ´ecrire le Hamiltonien effectif au premier ordre en |q|a : Hef f,ξ q = ξ~vFq · σ = λ~vF  0 qx− iqy qx+ iqy 0  , (5.12)

o`u σ sont les matrices de Pauli et ξ = ±1 l’indice de vall´ee : ξ = +1 correspond au point K, et ξ = −1 au point K’. L’´equation 5.12 est une ´equation de type Dirac. Il faut souligner le fait que le Hamiltonien effectif au premier ordre ne tient pas compte des sauts aux deuxi`emes plus proches voisins ni des corrections de recouvrement car ces termes sont d’ordre deux en |q|a. La relation de dispersion autour des points K et K’ va maintenant s’´ecrire :

q,ξ= λ~vF|q| (5.13)

o`u vF = 1.1 × 106 m.s−1 (t ≈ 2.5 eV [55], [56]).

Plusieurs remarques peuvent ˆetre faites concernant cette relation de dispersion : – Cette relation est lin´eaire en |q|.

– Elle ne fait pas intervenir la masse ; les ´electrons se comportent comme des particules relativistes sans masse se propageant `a la vitesse vF qui joue alors le rˆole de vitesse limite

dans le graph`ene.

– Elle est sym´etrique de part et d’autre de l’´energie nulle (comme il a ´et´e dit pr´ec´edemment, `

a l’ordre 1 on n´eglige le terme tef f qui est `a l’origine de l’asym´etrie ´electron-trou).

– La relation de dispersion ne d´epend pas de la vall´ee consid´er´ee car elle est ind´ependante de ξ. La d´eg´en´erescence de vall´ee subsiste donc pour les excitations de basse ´energie. – En dessous des points de Dirac, la bande est compl`etement remplie en ´electrons et la

bande situ´ee au dessus est remplie de trous ( i.e. compl`etement vide d’´electrons). – De par sa forme (Figure 5.4), on appelle souvent cette relation de dispersioncˆone de

Dirac.

Les spineurs (fonction d’onde `a deux composantes) qui sont les ´etats propres du Hamiltonien 5.12 s’´ecrivent sous la forme :

Ψk,ξ=+1= 1 √ 2 1 ±eiφ(k) ! , Ψk,ξ=−1= 1 √ 2 1 ±e−iφ(k) ! , (5.14)

Figure 5.4 – Relation de dispersion dans une monocouche de graph`ene.

o`u φ(k) est le d´ephasage d’une composante par rapport `a l’autre.

Le passage de la vall´ee K `a la vall´ee K’ consiste `a inverser le rˆole des deux sous-r´eseaux A et B. On peut r´e´ecrire le Hamiltonien effectif et la fonction d’onde en repr´esentation de spineur `a quatre composantes : Hef f,ξk = ~vFτz⊗ k · σ , Ψk =     ΨA k,+ ΨB k,+ ΨB k,− ΨAk,−     , (5.15) avec τz⊗ σ =  σ 0 0 −σ  . (5.16)

Dans cette repr´esentation, les deux premi`eres composantes de la fonction d’onde corres- pondent aux composantes au point K et les deux derni`eres `a celles au point K’.

Deux jeux de matrices de Pauli interviennent dans le Hamiltonien effectif. On a ainsi deux

pseudo-spins qu’il faut bien distinguer : l’isospin de sous-r´eseau et l’isospin de vall´ee. Le

premier, repr´esent´e par les matrices σj, relie lespin up `a une composante sur un sous-r´eseau

et le spin down `a la composante sur l’autre sous-r´eseau. L’isospin de r´eseau n’est qu’une

cons´equence indirecte de l’existence des deux sous-r´eseaux. Enfin, le second ensemble de matrices de Pauli est repr´esent´e par les matrices τj et a pour origine la d´eg´en´erescence de vall´ee. Seule la

composante sur z intervient dans le Hamiltonien.

Dans chaque vall´ee d’´energie, les particules ont une chiralit´e : dans la vall´ee K, les ´electrons ont une quasi-impulsion p telle que σp/p = +1 alors que dans cette mˆeme vall´ee, l’impulsion des trous v´erifie σp/p = −1. A l’inverse, dans la vall´ee K0, la chiralit´e est invers´ee : σp/p = −1 pour les ´electrons et σp/p = +1 pour les trous. L’isospin de r´eseau provoque l’accumulation par les ´electrons d’une phase de Berry ´egale `a π sur une trajectoire ferm´ee dans l’espace des phases car p est colin´eaire `a σ.

La chiralit´e des porteurs de charge est `a l’origine de propri´et´es nouvelles compar´ees `a des semi-conducteurs conventionnels. La premi`ere propri´et´e dont nous allons parler est l’absence de r´etrodiffusion. Consid´erons un potentiel de diffusion ´elastique dˆu `a une impuret´e Vimp. Nous allons

de plus supposer que ce potentiel ne peut pas provoquer de diffusion entre les deux vall´ees : il s’agit de diffusion intra vall´ee. L’impulsion, p, est conserv´ee ainsi que l’indice de vall´ee, ξ. L’unique degr´e de libert´e restant est l’angle θ de diffusion. On note |p, ξi et |p0, ξ0i respectivement les ´etats

initiaux et finaux, la probabilit´e de diffusion s’´ecrit [57] :

En particulier, on peut montrer que la probabilit´e de diffusion sous l’angle θ = π est nulle : P (π) = 0. Cette relation implique qu’un potentiel de diffusion ´elastique intra vall´ee ne peut pas provoquer de r´etrodiffusion des ´electrons dans un feuillet de graph`ene.

La deuxi`eme propri´et´e que nous allons aborder est l’existence d’une conductivit´e finie non nulle lorsque le dopage est nul. Comme nous le verrons au Chapitre 7, on peut modifier le dopage d’un feuillet de graph`ene d´epos´e sur un isolant par effet de champ (c.f. page 115). En modifiant la tension de grille, on d´eplace le niveau de Fermi dans le feuillet. Quand le niveau de Fermi co¨ıncide avec la position du point de Dirac, la conductivit´e du feuillet ne tend pas vers z´ero mais reste `a une valeur finie. Les valeurs de ce minimum de conductivit´e report´ees dans les premiers travaux exp´erimentaux ´etaient toujours proches de 4e2/h sugg´erant l’existence d’un valeur universelle. Les premiers calculs th´eoriques concernant le minimum de conductivit´e [58] d’un ruban de graph`ene ballistique (L, W ≤ l o`u l est le libre parcours moyen) semblaient confirmer l’existence d’une valeur universelle. Pour ce calcul, l’approche de Landauer-B¨uttiker a ´et´e employ´ee : la conductance d’un ruban court et large de graph`ene est vue comme la somme des transmissions de chaque mode de propagation ´electronique. Au niveau du point de Dirac, la transmission est finie et la conductivit´e tend vers la valeur de 4e2/πh. Les travaux exp´erimentaux qui ont pu ˆetre publi´es dans les ann´ees

suivantes ont confirm´e l’existence d’un minimum de conducitivt´e mais ont montr´e dans le mˆeme temps que la valeur observ´ee n’´etait pas syst´ematiquement la mˆeme.

Enfin, la derni`ere propri´et´e que nous allons discuter est le paradoxe de Klein. Consid´erons une barri`ere de potentiel ; pour une particule non-relativiste, celle-ci a une probabilit´e non nulle de traverser la barri`ere par effet tunnel. Toutefois, le coefficient de transmission d´ecroit exponentielle- ment avec la hauteur et la largeur de la barri`ere. Dans le cas d’une particule ob´eissant `a l’´equation de Dirac, la probabilit´e de transmission d´epend peu de la hauteur de la barri`ere et elle s’approche de la valeur 1 lorsque la hauteur augmente [59]. Pour une barri`ere infiniment haute, la transmission devient parfaite. Il s’agit de l’effet tunnel de Klein.