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10.3 Etude de la dissipation en r´ egime d’effet Hall quantique dans BL006

10.3.2 Exp´ eriences

La figure 10.18 repr´esente l’´evolution de la r´esistance longitudinale mesur´ee `a trois densit´es diff´erentes (−1.8, −2 et −2.2 × 1012 cm−2) dans le plateau ν = −4 en fonction du courant et

aux deux temp´eratures d’´etude : T = 0.35 K et T = 1.5 K. Nous n’avons pas utilis´e de courants sup´erieurs `a 300 µA afin de ne pas endommager l’´echantillon. On remarque l’augmentation abrupte de Rxx pour des courants de l’ordre du microamp`ere ; la conductivit´e longitudinale augmente de

fa¸con exponentielle. En se donnant un crit`ere sur la valeur de Rxx, on peut d´eterminer la valeur

du courant critique, c’est `a dire la valeur du courant au del`a duquel on a rupture de l’effet Hall quantique. Les valeurs d´etermin´ees graphiquement avec le crit`ere R = 1 Ω sont donn´ees dans le tableau 10.5 et repr´esent´ees sur la figure 10.19 en fonction du facteur de remplissage. La premi`ere remarque que l’on peut faire est que les courants critiques `a T = 0.35 K sont un peu plus ´elev´es qu’`a T = 1.5 K. Ensuite, `a chaque temp´erature, le courant critique ´evolue lin´eairement avec ν : plus on s’´eloigne du centre du plateau plus la rupture de l’effet Hall quantique est atteinte rapidement. On retrouve ici le r´esultat observ´e dans des h´et´erostructures GaAs/AlGaAs ([137] et Figure 10.19-b)) en ce qui concerne l’´evolution du courant critique en fonction du facteur de remplissage. Toutefois, nos observations ne comportant que des points `a ν < −4, nous ne pouvons dire si la d´ependance

est sym´etrique de part et d’autre de ν = −4. Enfin, les pentes aux deux temp´eratures semblent identiques sur la figure 10.5-a). Avec la largeur de l’´echantillon (4.6 µm), on peut calculer la densit´e de courant critique ; elle est de l’ordre de 0.2 A/m ce qui est du mˆeme ordre de grandeur mais l´eg`erement plus faible que les valeurs observ´ees dans des h´et´erostructures GaAs/AlGaAs beaucoup plus larges (c.f. Figure 10.5-b)) [137].

T=0.35 K

T=1.5 K

a)

b)

Figure 10.18 – R´esistance longitudinale pour trois densit´es sur le plateau ν = −4 en fonction du courant dans l’´echantillon BL006 (B = 18.5 T) : en a), `a T = 0.35 K et en b), `a T = 1.5 K. Les ´echelles sont logarithmiques pour favoriser la lecture.

nS (1012 cm−2) T = 0.35 K T = 1.5 K

−1.8 1.35 µA 1.24 µA

−2 1.06 µA 0.93 µA

−2.2 0.76 µA 0.59 µA

Table 10.5 – Courants critiques aux deux temp´eratures de l’´etude.

a)

b)

Figure 10.19 – En a), ´evolution du courant critique en fonction du facteur de remplissage dans l’´echantillon BL006 ; en bleu les valeurs `a T = 0.35 K et en orange les valeurs `a T = 1.5 K. En b), courant critique en fonction de l’induction magn´etique dans un semi-conducteur conventionnel (courbe tir´ee de [137]).

La figure 10.20 repr´esente la r´esistance transverse R28,14 dans la mˆeme gamme de courant

(de 200 nA `a 300 µA) `a T = 0.35 K. Ce n’est pas la mˆeme r´esistance de Hall que celle que nous avons mesur´e `a l’aide du pont de comparaison. Connaissant les valeurs de Rxxet de RHaux

diff´erents courants, on peut calculer la conductivit´e longitudinale en fonction du courant pour les densit´es nS = −1.8 × 1012 cm−2, nS = −2 × 1012 cm−2 et nS = −2.2 × 1012cm−2. L’´evolution de

la conductivit´e longitudinale en fonction du courant aux deux temp´eratures est repr´esent´ee sur la figure 10.21.

a) b)

Figure 10.20 – R´esistance de Hall sur le plateau ν = −4 en fonction de la tension grille `a diff´erents courants dans l’´echantillon BL006 (T = 0.35 K et B = 18.5 T).

T=0.35 K T=1.5 K

a) b)

Figure 10.21 – Conductivit´e longitudinale pour trois densit´es sur le plateau ν = −4 en fonction du courant dans l’´echantillon BL006 (B = 18.5 T) : en a), `a T = 0.35 K et en b), `a T = 1.5 K. Les ´echelles sont logarithmiques pour favoriser la lecture.

Ces observations faites `a deux temp´eratures diff´erentes mettent en ´evidence pour les trois densit´es un changement de comportement illustr´e figure 10.22. Au voisinage du courant critique, on a un changement de la pente qui est diff´erent pour les deux temp´eratures.

Il n’est pas possible d’ajuster la conductivit´e par des m´ecanismes VRH car la d´ependance n’est pas en exp(−(I0/I)1/2). Par contre, nous avons pu ajuster, `a T = 1.5 K, le comportement de

la conductivit´e en fonction du courant `a l’aide de la formule suivante : σ = σ0+ σ00exp  − I0 I  (10.19)

Les valeurs issues des ajustements sont donn´ees dans le tableau 10.6. Un terme du type I0/I peut ˆetre mis sous la forme :

I0 I = eRHI0 eRHI =eRHI0 eVH (10.20)

a)

b)

c)

Figure 10.22 – Comparaison des conductivit´es longitudinales aux deux temp´eratures en fonction de l’inverse du courant dans l’´echantillon BL006 `a B = 18.5 T : en a), `a nS = −1.8 × 1012 cm−2, en b), `a

nS = −2 × 1012 cm−2 et en c), `a nS = −2.2 × 1012 cm−2. Les

´

echelles sont logarithmiques pour favoriser la lecture et la partie faible courant est `a droite.

nS (1012 cm−2) σ0(e2/h) σ00(e2/h) I0 (µA)

-1.8 5.2 × 10−5 0.26 7

-2 7.8 × 10−5 0.28 5.6

-2.2 2.3 × 10−4 0.35 4.2

Table 10.6 – Valeurs des param`etres pour les ajustements de la conductivit´e `a T = 1.5 K.

c’est `a dire sous la forme d’un rapport entre deux ´energies caract´eristiques ; le d´enominateur, eVH,

est l’´energie d’une particule de charge e dans un potentiel ´electrique VH. Nous allons comparer

le num´erateur, eRHI0, `a l’´energie caract´eristique correspondant `a la diff´erence d’´energie entre le

niveau de Fermi au facteur de remplissage ν et le niveau de Landau d’indice supp´erieur Eg,th(ν).

Pour le cas qui nous concerne dans la bicouche BL006, rappelons que l’on ´etudie la transition entre :

– les niveaux 0 et 1 qui sont confondus, d’´energie nulle et de d´eg´en´erescence 8 ; – et le niveau d’indice −2, d’´energie√2~ωc (c.f. page 99) et de d´eg´en´erescence 4.

Ainsi, dans l’hypoth`ese simple o`u l’´energie varie de mani`ere lin´eaire avec ν sur le plateau, cette ´energie caract´eristique est :

Eg,th(ν) = √ 2~ωc 2 (1 + ν + 4 2 ) = √ 2~eB 2m∗ (1 + ν + 4 2 ) pour − 6 < ν < −4 (10.21) Pour une bicouche (m∗= 0.033me) sous une induction magn´etique de 18.5 T, on a : Eg,th(ν)[meV ] ≈

91.4/2(1 + (ν + 4)/2).

Eg,thet eRHI0= Eg,exp(ν) sont repr´esent´es en fonction de ν sur la figure 10.23. Les valeurs

extraites des ajustements sont tr`es proches des valeurs th´eoriques. En outre, on remarque que les valeurs de σ00 ≈ 0.3e2/h pour les trois densit´es. Cette valeur proche de e2/h est attendue dans

l’hypoth`ese d’un m´ecanisme d’activation [30].

Figure 10.23 – Ecarts en ´energie extraits des fits de la conductivit´e en fonction du facteur de remplissage `a T = 0.35 K. En traits pointill´es, on a fait figurer les ajustements lin´eaires et on a introduit des barres d’incertitude sur ν.

Pour expliquer le comportement de la conductivit´e, on peut envisager un effet de chauffage des ´electrons du type exp(−Eg,th/kBT ). A T = 1.5 K et nS = −1.8 × 1012 cm−2, on aurait

exp(−Eg,th/kBT ) ≈ 2.8 × 10−139 ce qui n’est pas en accord avec ce que l’on observe. De plus, un

effet de chauffage signifierait que la temp´erature ´electronique effective est kBTef f = eVH. Cette

relation impliquerait des temp´eratures ´electroniques tr`es importantes, par exemple 9600 K pour un courant de 10 µA. En particulier, ces temp´eratures tr`es ´elev´ees seraient `a l’origine de m´ecanismes ´

electrons/phonons qui modifieraient la relation lin´eaire entre temp´erature et tension. Enfin, un dernier argument permettant de rejeter l’effet de chauffage est le suivant : s’il y avait un fort effet de chauffage expliquant toute la conductivit´e, on n’observerait pas de diff´erence entre les deux temp´eratures, ce qui n’est pas le cas.

Pour terminer cette analyse de la conductivit´e, nous allons aborder le sujet des valeurs `a faible courant. Les valeurs `a faible courant `a T = 0.35 K sont corrompues par des effets de charge hyst´er´etiques ce qui explique la dispersion des points. A T = 1.5 K, il n’y a pas de dispersion et les valeurs de conductivit´e sont plus ´elev´ees : on peut raisonnablement penser que l’on mesure correctement Rxx. Ces effets de charge ne permettent pas de comparer, au travers d’une th´eorie

VRH, les valeurs `a T = 0.35 K et T = 1.5 K. Par exemple, on ne peut pas d´eterminer de valeur pour T0 sauf, peut ˆetre sur les bords du plateau. Toutefois, nous pensons que c’est bien le m´ecanisme

de VRH qui donne la conductivit´e `a bas courant mais il est masqu´e par ces effets de charge. En conclusion de cette partie, rappelons les ´el´ements importants :

– l’´energie caract´eristique que l’on extrait des ajustements de la conductivit´e `a T = 1.5 K est en accord avec la diff´erence d’´energie th´eorique entre le niveau de Fermi et le niveau de Landau d’indice sup´erieur

– la conductivit´e limite σ0semble la mˆeme pour les trois densit´es

– `a T = 0.35 K, la conductivit´e change de comportement