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7.2.1

Interf´erences d’une couche mince

Les m´ethodes de d´etection privil´egi´ees pour des objets de si petite taille (l’´epaisseur d’une monocouche de graph`ene n’est que de 0.34 nm) sont les m´ethodes de microscopie en champ proche telles que la microscopie `a force atomique (AFM) ou la microscopie par effet tunnel (STM). Malheu- reusement ces deux approches ne permettent pas de sonder de grandes surfaces tout en conservant

la r´esolution n´ecessaire `a la distinction monocouche/bicouche. De mani`ere presque surprenante, la microscopie optique permet de faire le rep´erage et l’identification des syst`emes g´en´er´es par exfoliation sur couche mince de SiO2 [63].

En tenant compte du caract`ere ondulatoire de la lumi`ere, l’intensit´e totale de deux sources coh´erentes voisines ´emettant chacune une onde monochromatique de longueur d’onde λ va s’´ecrire : I = |A1|2+ |A2|2+ 2A1A2cos ∆φ , (7.1)

o`u Ai sont les intensit´es lumineuses ´emises par chaque source et ∆φ = φ1− φ2 est le d´ephasage

entre les deux ondes consid´er´ees. Lorsque ce d´ephasage est un ´egale `a 0 [2π], l’intensit´e totale est sup´erieure `a la somme des intensit´es individuelles ; on parle d’interf´erences constructives. A l’inverse, si le d´ephasage est un multiple de π [2π], on parle d’interf´erences destructives. Dans la pratique, l’image d’interf´erence que l’on peut observer est constitu´ee de franges sombres et brillantes.

Prenons l’exemple d’une couche mince dont l’´epaisseur est voisine de la longueur d’onde de la lumi`ere visible et dont l’indice optique, n1, est diff´erent de celui de l’air et du mat´eriau situ´e en

dessous (Figure 7.3). On appelle angle d’incidence l’angle entre l’onde incidente et la normale `a la surface. Pour un angle d’incidence θ quelconque, la diff´erence de phases entre les deux rayons est : ∆φ = 4πeλ n2

1/

q n2

1− sin

2θ. Si la source est polychromatique, chaque onde donne lieu `a un syst`eme

d’interf´erence. En particulier, l’angle selon lequel les interf´erences sont constructives diff`ere d’une longueur d’onde `a une autre. On assiste alors au ph´enom`ene d’irisation : de part et d’autre de la tˆache centrale, il y a d´ecomposition du spectre visible. On voit alors distinctement les longueurs d’onde pr´esentes dans le spectre ´emis par la source.

θ

n

1

n

2

n

1

n

2

n

1

n

2

e

(a)

(b)

(c)

n=1

n=1

n=1

Figure 7.3 – Sch´emas des trajets lumineux dans une couche mince d’´epaisseur e, (a) et (b) pour une incidence quelconque, (b) en rouge che- min optique parcouru entre les deux interfaces et en vert chemin optique parcouru par le rayon r´efl´echi en surface ; (c) incidence normale.

Dans le cas d’une incidence normale (θ = 0), le d´ephasage se r´e´ecrit : ∆φ = 4πn1e λ .

Ainsi, pour une ´epaisseur donn´ee, toutes les longueurs d’onde telles que λ ' 4n1e subissent des

interf´erences destructives alors que les longueurs d’onde telles que λ ' 2n1e subissent des in-

terf´erences constructives. L’oeil per¸coit le syst`eme selon la couleur correspondant `a la longueur d’onde la mieux r´efl´echie ou, le cas ´ech´eant, un m´elange des couleurs correspondant aux longueurs d’onde les mieux r´efl´echies.

La Figure 7.4 repr´esente les spectres de r´eflexion mesur´es sur trois ´echantillons avec des ´

Figure 7.4 – Spectres de r´eflectance obtenus au CEA sur les trois types de substrats utilis´es pendant la th`ese ; les ´epaisseurs de SiO2 sont

diff´erentes : en vert 90 nm, en orange 295 nm et en rouge 500 nm. Les couleurs ont ´et´e choisies afin de correspondre au mieux aux couleurs r´eelles per¸cues par l’oeil

(r ' 0.1) pour une ´epaisseur donn´ee alors que d’autres longueurs d’onde sont bien r´efl´echies (r ' 0.4). De fait, les substrats ayant une ´epaisseur de 90 nm de SiO2sont per¸cus de couleur verte,

ceux ayant une ´epaisseur de 295 nm de couleur orang´ee et enfin les substrats ayant une ´epaisseur de 500 nm de couleur rouge.

n

1

n

2

(a)

(b)

n=1

(λ)

(λ)

e

SiO

2

:

Si :

graphène : nG

air :

d=0.34 nm

Figure 7.5 – (a) Sch´ema des trajets lumineux en incidence normale en pr´esence d’une feuille de graph`ene. (b) Mod`ele `a trois couches pris en compte pour le calcul du contraste.

7.2.2

Observation de monocouches atomiques

La particularit´e des feuilles de graph`ene est d’ˆetre des syst`emes suffisament fins et trans- parents pour ajouter un chemin optique sur le trajet des rayons lumineux sans les absorber compl`etement. Localement, la couleur d’interf´erence est modifi´ee par rapport au substrat ”nu” (sans feuilles de graph`ene).

Pour expliquer le contraste que l’on observe sur la Figure 7.6, on peut utiliser le mod`ele g´eom´etrique illustr´e sur la Figure 7.5-(b). Les relations de continuit´e du champ ´electromagn´etique aux diff´erentes interfaces permettent de calculer l’intensit´e r´efl´echie par un tel syst`eme selon une loi de type Fresnel. L’indice optique d’un feuillet de graph`ene est g´en´eralement nG≈ 2.6 [63], [64].

et sans (nG= 1) graph`ene :

C = I(nG = 1) − I(nG) I(nG= 1)

(7.2) est non nul. Il est donc possible d’observer des syst`emes de feuilles de graph`ene avec un simple mi- croscope optique et ce jusqu’`a l’´epaisseur minimale de la monocouche. En effet, l’indice de r´efraction d’une monocouche de graph`ene peut ˆetre mod´elis´e par une partie r´eelle (terme de r´efraction) et une partie complexe (terme d’absorption) [64]. En particulier, ce dernier ´etant non nul, la feuille de graph`ene absorbe une partie de la lumi`ere. Par des mesures de transmission sur des ´

echantillons d´epos´es sur grille, l’absorption d’une monocouche dans le domaine visible est ´egale `a πα, o`u α ≈ 1/137 est la constante de structure fine.

Figure 7.6 – Photographie d’une monocouche de graph`ene obtenue avec le gros- sissement x100 et diaphragme. La zone de couleur orange sombre correspond `a la monocouche d´epos´ee sur substrat ayant 300 nm de SiO2

Pendant la th`ese, les observations ont ´et´e faites `a l’aide d’un microscope optique muni d’objectifs Le¨ıca et d’une cam´era CCD permettant l’enregistrement num´erique de photographie. En outre la cam´era CCD nous a permis d’optimisations certains param`etres lors de l’observation (isolation de certains pixels, temps d’exposition, . . .). Observ´es avec un faible grossissement (x10), on constate la pr´esence de micro-grains de graphite sur la surface des ´echantillons apr`es retrait de l’adh´esif. A plus fort grossissement (x20 - x50), on peut observer des tˆaches de couleur l´eg`erement diff´erente par rapport `a celle du substrat. Ces petites tˆaches correspondent `a des feuillets de graph`ene. On peut alors optimiser les r´eglages du microscope (focalisation, temps d’exposition, ouverture du diaphragme,. . .) et utiliser de plus forts grossissements afin de mieux voir la ou les feuilles. Selon l’´epaisseur de l’oxyde (7.7), on remarque que le contraste g´en´er´e par une monocouche n’est pas le mˆeme ; facilement visibles sur 90 nm et 285 nm, les monocouches sont plus difficles `a voir sur des substrats ayant 500 nm d’oxyde.

En outre, le contraste ´evolue en fonction de la longueur d’onde. Pour une ´epaisseur donn´ee, les monocouches g´en`erent du contraste aux longueurs d’onde qui subissent une r´eflexion maximale. Si l’image compl`ete issue de la cam´ra CCD est d´ecompos´ee selon les trois types de pixels (R pour ”Red”, G pour ”Green” et B pour ”Blue”), les trois images en nuances de gris pr´esentent des contrastes diff´erents au niveau de la feuille de graph`ene (Figure 7.8). Par exemple pour une monocouche d´epos´ee sur 285 nm de SiO2, on remarque que la feuille est invisible sur les pixels

bleu de la cam´era (Figure 7.8-(b)) alors qu’elle est nettement visible sur les pixels vert et rouge (Figures 7.8-(c) et (d)).

Enfin, des mesures par transmission optiques dans le domaine du visible ont pu mettre en ´

evidence le fait que l’absorption varie de mani`ere lin´eaire avec le nombre de feuilles [65] : une bicouche absorbe 2 × πα, une tricouche 3 × πα, etc. . .. De plus, l’absorption est uniforme sur la

(a)

(b) (c)

Figure 7.7 – Photographies de trois monocouches sur trois ´epaisseurs d’oxyde diff´erentes : (a) 90 nm, (b) 285 nm et (c) 500 nm.

(a)

(b) (c) (d)

Figure 7.8 – (a) Photographie d’une monocouche sur 285 nm d’oxyde et images extraites des pixels de la CCD : (b) pixels bleus, (c) pixels verts et (d) pixels rouges.

gamme des longueurs d’onde du visibles. De fait, il est possible de d´eterminer le nombre de couche d’un syst`eme par analyse du contraste optique en r´eflexion ou en transmission.