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Lien avec les séries

Dans le document Mesure et Intégration (Page 111-120)

Le thème général de cette section est que la somme d’une série peut être in-terprétée comme une intégrale par rapport à la mesure de comptage.

Soit X un ensemble quelconque. Nous considérons sur X la tribu PpXq et, sur PpXq, la mesure de comptage µ. Dans ce cadre, toute fonction f : X Ñ R est mesurable, et toute partie deX est mesurable. Nous n’allons donc pas nous intéresser à la mesurabilité dans ce qui suit.

6.7.1 X est fini

Dans ce cas, toute fonction est une fonction étagée. Nous avons donc : a) Sif ľ0, alorsf “ř

xPXfpxqχtxuest une représentation admissible. Il s’ensuit que

ż

f “ ÿ

xPX

fpxq.

b) Si f est de signe quelconque, alors f a une intégrale si et seulement si f ne prend pas en même temps les valeurs˘8, et dans ce cas

ż f “

ÿ

xPX

fpxq (justi-fier, en partant def “f`´f´).

c) f est intégrable si et seulement sif n’a que des valeurs finies (justifier).

6.7.2 X “ N

Dans ce cas, nous pouvons identifier une fonction f : N Ñ R à une suite panqnľ0.

Le résultat qui suit fait echo à la proposition6.43.

6.46 Proposition.

a) Sif ľ0, alors ż

f “ ÿ

n

an.

b) f est intégrable si et seulement si ř

nan est absolument convergente, et dans ce cas

ż

f “ÿ

n

an. c) Sif a une intégrale, alorsř

nanexiste et ż

f “ÿ

n

an. d) Siř

nanexiste, alorsf n’a pas nécessairement une intégrale.

Intégrale 6.7 Lien avec les séries

Démonstrations

Démonstration de la proposition6.46.

a) SoitAn:“ t0, . . . , nu ÕN. Nous avons (justifier, en utilisant la proposition6.35d) et

f est intégrableðñles intégrales def˘sont finiesðñles sériesÿ

n

panq˘

sont convergentesðñla sérieÿ

n

|an| “ ÿ

n

ppanq`` panq´qest convergente.

Si tel est le cas, alors ż

c) Sif a une intégrale, alors l’une des intégrales ż

f˘est finie. Supposons par exemple ż

nanconverge (série alternée), alors que ÿ

(vérifier). Par conséquent,f n’a pas d’intégrale (justifier). CQFD

6.7.3 X est dénombrable

Dans ce cas, il existe une bijectionΦ :NÑX. Posonsg :“f˝Φ :NÑR.

6.47 Proposition. L’intégrale ż

X

f existe si et seulement si l’intégrale ż

N

g existe.

En cas d’existence, nous avons ż

Petru Mironescu Mesure et intégration

Démonstrations

Démonstration de la proposition6.47. Il suffit de montrer l’égalité des intégrales dans le cas où f ľ0(justifier).

SoientAn :“ t0, . . . , nu,Bn :“ ΦpAnq. AlorsAn Õ Net, de plus,Bn Õ X (vérifier), d’où (justifier, comme dans la proposition6.46)

ż

La deuxième égalité de l’énoncé découle de la proposition6.46c). CQFD

6.7.4 Sommation par paquets et convergence commutative

Dans cette partie, X est dénombrable et Φ : N Ñ X est une bijection. Nous supposons toujours quef :X ÑRa une intégrale.

Nous considérons une partition deX,X “ \nAn, avec lesAnd. d. d. (chaque Anest un « paquet »).

6.48 Proposition(Sommation par paquets).

a) Nous avons

6.49 Définition (Série commutativement convergente). Une série ř

nan est com-mutativement convergentesi, pour toute bijectionϕ: N ÑN, la somme de la série ř

naϕpnqexiste et est égale àř

nan. ˛

6.50 Proposition(Série commutativement convergente).

a) Une série à termes positifs est commutativement convergente.

b) Une série absolument convergente est commutativement convergente. ˛

†. Il n’est pas demandé que la série soit convergente.

Intégrale 6.8 Pour aller plus loin

Démonstrations

Démonstration de la proposition6.48. Il suffit de considérer le cas oùf ľ0(justifier).

a) est un cas particulier de la proposition6.35c).

b) découle de la section6.7.1.

c) Justifions, par exemple, la première égalité.

SoitAn:“ tpm, nq; mPNu. AlorsN2 “ \nAn. Nous trouvons (proposition6.48a))

Nous concluons en combinant (6.22) et (6.23). CQFD

Démonstration de la proposition6.50.

a) La proposition6.47donne ż

N

f “ ż

N

f˝ϕ. Nous concluons grâce à la proposition6.46.

b) découle de a) (justifier). CQFD

6.8 Pour aller plus loin

6.8.1 Caractérisation des fonctions Riemann intégrables

Nous avons investigué dans la section6.6le lien entre l’intégrale de Riemann ou généralisée d’une fonction continue et son intégrale par rapport à la mesure de Lebesgueν1.

L’intégrale de Riemann est définie pour des fonctions qui ne sont pas néces-sairement continues. Dans ce cadre, nous avons le résultat suivant.

6.51 Théorème(Critère de Lebesgue). Soitf :ra, bs ÑR. Nous avons : a) f est Riemann intégrable surra, bssi et seulement si :

1. f est bornée.

2. L’ensemble de points de discontinuité def estν1-négligeable.

b) Si f est Riemann intégrable, alors f est Lebesgue λ1-intégrable sur ra, bs et ż

Petru Mironescu Mesure et intégration

Rappelons queλ1 est la complétée de la mesure de Lebesgueν1.

Pour la preuve complète de ce théorème, voir Natanson [16, section V.4] ; voir également Taylor [19, Proposition 3.10]. Nous montrons ici une partie de celui-ci : 6.52 Proposition. Sif : ra, bs Ñ Rest unefonction Riemann intégrable, alorsf est Lebesgue intégrable et

Démonstration. Nous pouvons supposerf ľ0. En effet, sifest Riemann intégrable, alorsfest bornée et il suffit de montrer l’égalité des deux intégrales pour la fonctionf ´m ľ 0, avecm minorant def(justifier).

Nous utilisons les notations de la preuve de la proposition6.42. Soitσune division dera, bs et soitsσlasomme de Darboux supérieure

sσ :“

Nous associons àsσla fonction fσ :ra, bs ÑR, fσ :“ gĺf ĺhet (en utilisant le théorème de convergence monotone et l’exercice6.36)

ż

Intégrale 6.8 Pour aller plus loin

nous obtenons quef “g “hsurra, bszAet en particulierf “ g λ1-p. p. Il s’ensuit quef est λ1-mesurable (proposition4.19a)).

Par ailleurs, commef “ g λ1-p. p. et l’intégrale ż

ra,bs

g dλ1existe, il s’ensuit que l’intégrale ż

g dλ1(proposition6.19c)).

Finalement, en utilisant ce qui précède et(6.24), nous obtenons que ż

La réciproque de cette proposition est fausse : même pour une fonction bor-née, l’intégrabilité au sens de Lebesgue n’entraîne pas celle au sens de Riemann ; voir l’exercice, classique, qui suit.

6.53 Exercice. Soitf :r0,1s ÑR,f :“χQXr0,1s.

a) Montrer quef est bornée et intégrable par rapport àν1(et doncλ1).

b) Soitσune division der0,1s. Montrer quesσ “0etsσ “1.

c) En déduire quef n’est pas intégrable au sens de Riemann. ˛

6.8.2 De l’intégrale vers la dérivée

Si f : ra, bs Ñ R est continue et si nous posons Fpxq :“ żx

a

fptqdt, @x P ra, bs(intégrale de Riemann ou Lebesgue), alors, d’après le théorème de Leibniz-Newton,F est dérivable etF1 “f. Sifn’est plus continue, nous avons le résultat suivant.

6.54 Théorème (Théorème de différentiation de Lebesgue). Soit f : ra, bs Ñ R Lebesgue intégrable. PosonsFpxq:“

żx Voir par exemple Stein et Shakarchi [18, section 3.1].

6.8.3 De la dérivée vers l’intégrale

Un corollaire du théorème de Leibniz-Newton est que siF est dérivable avec f :“F1 continue, alors (*)Fpxq “Fpaq `

żx a

fptqdt,@xP ra, bs.

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Petru Mironescu Mesure et intégration

Pour généraliser (*), nous pouvons affaiblir la condition sur f en demandant queF soit dérivable p. p. (par rapport à la mesure de Lebesgue) et que sa dérivée f soit Lebesgue intégrable.

Sous ces hypothèses, (*) n’est pas nécessairement vraie. Prenons, par exemple, Fpxq:“

#

0, si0ĺxĺ1{2

1, si1{2ăxĺ1. AlorsF est dérivable sauf en1{2et sa dérivée vaut 0p. p., mais (*) n’est pas satisfaite (vérifier). Plus généralement, (*) est fausse siF n’est pas continue (car le membre de droite de (*) l’est).

Même en ajoutant la condition de continuité deF, les hypothèses surF1 sont trop faibles. En effet, il existe une fonction continue F : r0,1s Ñ R telle que Fp0q “ 0, Fp1q “ 1etF1pxq “ 0pour presque toutx. Pour l’existence d’une telle fonctionF (« l’escalier du diable » ou « escalier de Cantor »), voir l’exercice6.56.

En revanche, si nous imposons la condition plus forte de dérivabilitépartout, alors nous avons le résultat suivant, dû à Lebesgue.

6.55 Théorème (Théorème de Leibniz-Newton généralisée). Soit F : ra, bs Ñ R continue surra, bset dérivableen tout pointdesa, br. SiF1 est Lebesgue intégrable, alorsFpxq “Fpaq `

żx a

F1ptqdt,@xP ra, bs. ˛

Rappelons que, si F est dérivable, alors F1 est borélienne et donc Lebesgue mesurable. Pour la preuve du théorème6.55, voir Natanson [16, section IX.7] et Rudin [17, Theorem 7.21].

6.56 Exercice (Ensemble de Cantor maigre et escalier du diable). Si I “ ra, bs est un intervalle compact de R, alors nous notons Irl’union des deux intervalles obtenus en enlevant de I l’intervalle ouvert qui a le même centre que I et dont la longueur est un tiers de celle deI. Exemple : siI “ r´3,3s(de centre0), alorsIr“ r´3,´1s Y r1,3s.

De manière équivalente, siI “ ra, bsalorsIr:“ ra, a` pb´aq{3s \ ra`2pb´aq{3, bs.

Nous construisons par récurrence une suitepCjqjľ0décroissante d’ensembles comme suit :

1. C0:“ r0,1s.

2. SiCj s’écrit comme une union finie d’intervalles fermés d. d. d. :Cj “ \m`“1I`, alors Cj`1 est défini commeCj`1 :“ \m`“1Ir`.

Notons que, par construction,Cj Ă r0,1sest un compact non vide et queCj`1 ĂCj. a) PosonsUj :“ r0,1szCj. Montrer queCj est une union de2j intervalles compacts d. d.

d. et queUj est union de2j´1intervalles ouverts d. d. d.

b) Calculerν1pCjq,jPN.

c) PosonsC:“ Xjľ0Cj. Montrer queCest non vide et calculerν1pCq.

Pour j ľ 1 fixé, notons, dans l’ordre de gauche à droite, les intervalles compacts de la question a) qui donnent Cj :Cj “ ra1, b1s \. . .\ ra2j, b2js. Nous avons donc

Intégrale 6.8 Pour aller plus loin

Uj “sb1, a2r\. . .\sb2j´1, a2jr. Nous définissons Fj :r0,1s Ñ Rpar récurrence surj, comme suit :

(i) F0pxq:“x,@xP r0,1s.

(ii) Fjpxq:“ pFj´1pb`q `Fj´1pa``1qq{2sixP rb`, a``1s,@`“1, . . . ,2j´1.

(iii) Fjp0q “0etFjp1q “1.

(iv) Fj est affine surra`, b`s,@`“1, . . . ,2j´1.

d) Montrer que |Fj`1pxq ´Fjpxq| ĺ 1{p3¨2j`1q,@x P r0,1s, @j ľ 0. En déduire qu’il existeF :r0,1s Ñ r0,1stelle queFj ÑF uniformément.

e) Montrer queFp0q “0etFp1q “1.

f) PosonsU :“ r0,1szC. SiI Ă U est un intervalle ouvert, montrer queF est constante surI.

g) En déduire :

i) QueF est continue surr0,1set dérivable surU.

ii) QueFn’est pas constante, mais queF1pxq “0pourν1-presque toutxP r0,1s. ˛

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Chapitre 7

Les grands théorèmes

7.0 Aperçu

Nous travaillons dans unespace mesuré, avec desfonctions mesurables.

Le thème général de ce chapitre est la permutation de lim et ż

sous des hy-pothèses plus faibles que celles du théorème de convergence monotone, qui sont 0ĺfnÕf. Le but ultime étant de ne supposer ni la positivité, ni la monotonie.

En ne supposant plus la convergence monotone, donc uniquement sous les hypothèsesfn ľ0etfn Ñf, nous n’avons plus l’égalitélim

n

ż fn

ż

limn fn, mais uniquement l’inégalité

ż

limn fn ĺlim inf

n

ż

fn. (7.1)

C’est inégalité est un cas particulier dulemme de Fatou, théorème7.1. L’impor-tance de ce résultat est en premier lieu théorique : il permet d’obtenir sans effort les principaux résultats de permutation entrelimet

ż

, dont le plus célèbre est le théorème de convergence dominée (de Lebesgue)7.2.

À son tour, le théorème de convergence dominée permet d’étudier les pro-priétés desintégrales à paramètre(s). Pour prendre un exemple concret, soit

Fptq:“

ż8 0

sinptxq 1`x2 dx.

†. La limitelim

n

ż

fn n’existe pas, en général ; c’est la raison de l’apparition de lalim inf dans (7.1).

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