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Les problèmes des bois tropicaux et du climat

CHAPITRE 1: Etat de l’art

1.4 Le lamellé-collé dans les tropiques

1.4.2 Les problèmes des bois tropicaux et du climat

Le problème principal de la fabrication du lamellé-collé en bois exotique et dans une ambiance

tropicale chaude et humide est le collage. En effet, les technologies et les colles développées par les

pays industrialisés répondent à des critères d’utilisation en milieu tempéré. En milieu tropical, le

collage est une des étapes les plus délicates à réaliser à cause du taux d’humidité et de la

température ambiante élevés, de la densité des bois, des extractibles…

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En effet, le bois est un matériau hydrophile dont les caractéristiques mécaniques sont liées à

l’humidité. Cette affinité pose de nouveaux problèmes pour un assemblage par collage. En effet,

une humidité du bois élevée agit sur la viscosité de la résine en dispersant les particules adhésives

qui ne pourront se resserrer lors du collage, engendrant ainsi un joint défectueux [77-79]. A

contrario, une teneur en humidité trop faible accentuera l’absorption de la colle créant ainsi des

joints maigres. En plus de ce problème, les bois stabilisés en climat équatorial possèdent une

hygrométrie plus élevée que ceux des bois tempérés, séchés, utilisés pour la fabrication de

lamellé-collé. Ceci, en plus de leur teneur en humidité supérieure à celle acceptable par les colles (16%),

pose problème vis-à-vis des variations d’humidité que peuvent subir les produits finis [80]. Il est

vrai que ces variations engendrent des déformations pour ce matériau pouvant créer, si elles sont

bloquées, des contraintes élevées dans les assemblages. Ces contraintes doivent être minimisées afin

de ne pas altérer les résistances mécaniques des joints de colle, voire même d’éviter les

délaminations. Pour cela il est recommandé de stabiliser les bois avant le collage dans les conditions

climatiques d’utilisation et les différences hygrométriques entre les lamelles ne doivent pas excéder

3% [81]. Afin d’avoir une bonne uniformité de la teneur en eau des lames en climat tropical, un

séchage artificiel du bois suivi d’un ressuyage à l’air libre est recommandé [81]. Le séchage

artificiel permet l’uniformité hygroscopique et la stabilisation naturelle évite la création de

contraintes trop élevées [82].

Pour ce qui est de la température, elle influence principalement les caractéristiques des colles. En

effet, une température élevée (>30°C), entraîne une durée de vie limitée des adhésifs ainsi qu’une

polymérisation plus rapide de la colle, pénalisantes pour la fabrication car les temps d’assemblages

sont raccourcis [55].

L’utilisation de bois tropicaux pour la fabrication d’un produit collé amène d’autres problèmes liés

aux caractéristiques intrinsèques du matériau ligneux. En effet, la densité importante du bois, le

contrefil marqué, les extractibles, l’anisotropie élevée ont une grande influence sur le processus de

collage [62, 81].

En fonction des caractéristiques intrinsèques du bois, plusieurs étapes, avant et pendant le collage,

sont préconisées afin d’améliorer la résistance de l’assemblage voulu. Par exemple, des

recommandations possibles pour obtenir un collage correct sont regroupées dans le tableau 4, en

fonction de certaines caractéristiques pénalisantes.

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Tableau 4: Recommandations pour le collage de bois difficiles à coller [55]

Recommendations Dense Poreux Forte

rétractibilité

Carbonisation Présence de résine

ou matières grasses

Encollage double face

Augmentation de la viscosité de la

colle

Procédé à deux encollages

Augmentation du grammage

Augmentation de la température

d’encollage

Augmentation de la température de

séchage des lames ( >70°C)

Augmentation du temps

d’assemblage fermé

Augmentation de la pression de

serrage

Rainurage des faces longitudinales

Ponçage des lamelles avant collage

Réduction de la section des lames

1. Cas des bois denses (D

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>0,7) : Plus la densité est grande, plus les problèmes sont

nombreux. Les bois peu denses (Masse Volumique < 650 kg/m³ à 15% d’humidité), ne

posent en principe pas de problème pour le collage [83]. En revanche, avec une masse

volumique supérieure à 700 kg/m³, les problèmes sont nombreux et nécessitent des

traitements particuliers (tableau 4 [55]). Ces problèmes résultent du fait que l’eau contenue

dans la colle stagne dans le plan de collage, ne pouvant migrer vers les interstices

d’adhésion, affectant ainsi la mouillabilité du matériau et ralentissant le durcissement de la

résine [71]. Pour ces bois il est recommandé d’appareiller correctement les lamelles dont

l’épaisseur ne doit pas excéder 40mm [84].

2. Cas des bois poreux : Le principal problème est lié à la forte capacité d’adsorption du

support, ce qui risque de créer des joints maigres, présentant une faible adhérence [58].

Ainsi à porosité élevée, le grammage de la colle, la température de polymérisation et le

temps d’assemblage peuvent être augmentés [80]. De plus, certaines essences présentes des

porosités hétérogène (faible dans le duramen et forte dans l’aubier) pouvant créer des joints

de colle non homogène, surtout si l’aubier n’est pas distinct, ce qui est parfois le cas pour

des bois tropicaux.

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3. Cas des bois à forte rétractibilité : Dans le cas de fortes variations d’humidité, des études

scientifiques ([62], [81] et [85]) ont conclu que l’anisotropie du bois n’est pas un facteur si

contraignant que prévu. Toutefois, pour que l’étape de collage se passe correctement et pour

éviter l’apparition de craquelures dans les joints de colle, due à de fortes énergies libérées

par la distorsion des lamelles, la température de polymérisation peut être augmentée [80].

Cependant, afin de limiter des contraintes trop importantes dans les joints de collage, il a été

recommandé, par une étude menée sur le collage de bois africain, que l’anisotropie de

l’essence utilisée soit inférieure ou égale à 2 [81]. Cette limite permet d’éviter un trop grand

écart entre les retraits radial et tangentiel, qui ne s’expriment pas librement lors d’un

assemblage par collage. Dans cette même optique, pour la fabrication de lamellé-collé

panaché, les retraits des différentes essences utilisées doivent être assez proches les uns des

autres [85].

4. Cas des bois se carbonisant : En se carbonisant lors des étapes d’usinage (surtout si le bois

est siliceux ou contrefilé), le bois présente des irrégularités de surface avant encollage. De ce

fait, un mauvais contact des éléments à assembler peut survenir, créant ainsi des joints non

uniformes et un mauvais mouillage des surfaces.

5. Cas des bois résineux ou contenant des matières grasses : Un autre problème souvent

rencontré lors du collage de bois tropicaux est la présence des résines, migrant à la surface

du bois lors de son séchage [86]. Il en résulte un mouillage imparfait de la surface du bois,

empêchant l’affinité chimique entre le bois et la colle. Ces contaminants bouchent les pores

du matériau et empêchent donc la pénétration de l’adhésif [87, 88]. Pour cela, il est

préconisé de « cuire » le bois afin de limiter ces contaminations, lors de l’encollage [80].

Cette cuisson se fait par un séchage artificiel à haute température [89]. Poncer les lamelles

avant le collage peut aussi enlever les résines ou les contaminants. Bien évidemment,

l’encollage doit être réalisé dans la foulée afin d’éviter une nouvelle contamination de la

surface [42][90].

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Beaucoup de paramètres, développés plus haut, ont été étudiés ainsi que leurs influences sur le

collage. Mais d’autres peuvent influer négativement l’adhésion comme le contrefil. Il en résulte que

pour ce paramètre, une limite d’angle a été formulée. Coffin et al. en 1981 ont montré que des bois,

dont le contrefil a une pente supérieure à 10°, présentent des collages à résistance quasiment nulles.

Dans les années 80, des études ont été menées au Centre Technique Forestier Tropical de Nogent

sur Marne, soulignant l’influence de certains paramètres de collage sur la tenue des assemblages

avec des bois tropicaux. En agissant sur le grammage et la pression à appliquer pour le collage de

bois durs, les essais ont montré qu’il existe un optimum de pression (6 bars pour le Movingui

(Distemonanthus benthamianus)) au-delà duquel le grammage diminue du fait que la colle est

chassée des plans de collage par l’excès de pression (confirmant des études préalables de Carrutters

et Paxton, 1960, [91]). Pour de petites pressions, c’est la porosité du bois qui rentre en jeu,

expliquant ainsi les variations de grammage final en fonction des essences [63]. Cette même étude

montre aussi que, plus les bois sont denses plus la pression optimale est élevée. Ceci reste vrai si le

temps d’assemblage est lui aussi augmenté, sinon l’adhésif est chassé par la pression avant même

que la colle ne pénètre correctement dans le bois.

Dans le même temps, d’autres essais menés au Gabon sur des bois tropicaux africains ont conclu

que la fabrication de lamellé-collé structurel endémique est possible uniquement avec la colle

résorcine et en augmentant les paramètres de collage préconisés par le fabricant (Pression,

grammage, temps d’assemblage [81]). Cependant, avec l’évolution des technologies et des colles, la

résorcine n’est plus le seul adhésif utilisable pour la fabrication d’éléments structuraux. En effet,

depuis les dernière années, les colles de type urée-formol ont évolué et sont reconnues comme

suffisamment résistantes pour des emplois en structure (Mélamine Urée Formol).

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