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Influence des défauts du bois sur son comportement mécanique

CHAPITRE 1: Etat de l’art

1.2 Le matériau bois

1.2.5 Influence des défauts du bois sur son comportement mécanique

1.2.5.1 Les nœuds

Les nœuds sont les parties des branches présentes dans le tronc de l’arbre. Lors du sciage du bois, la

trace des branches, de plus ou moins bonne qualité, sont visibles sur les planches. Les résineux se

distinguent des feuillus par une régularité des nœuds souvent groupés et séparés du bois sans défaut

[29, 30].

Un nœud modifie localement la direction du

fil du bois, il fragilise la pièce et réduit la

section effective de la pièce portante,

diminuant ainsi ses résistances mécaniques

(figure 9) [31]. Celles-ci sont aussi

influencées par la qualité du nœud, un nœud

dit « adhérent » sera mécaniquement moins

pénalisant qu’un nœud dit « mort ». De plus,

un nœud correspond également à des

variations locales de l’orientation des fibres

pouvant aller jusqu’à être perpendiculaires à

la direction du fil. Ceci induit souvent des

excentrements d’effort et localement des contraintes très élevées. Enfin, à l’endroit où les fibres

changent de direction autour des nœuds apparaissent des contraintes transversales pour une

sollicitation axiale. Ceci est particulièrement important pour les bois sollicités en traction parallèle

au fil [20].

SR b = R ati o d e si stan ce à la fl ex io n en fo n cti o n d e s n œ u d s

X=Ik/Ig avec Ik= somme des moments d’inerties des

nœuds présents sur la sectionde bois et Ig le moment d’inertie totale de la section (%)

SR b = R ati o d e si stan ce à la fl ex io n e n fo n cti o n d es n œ u d s ( % )

Figure 9: Influence des nœuds sur la résistance à la flexion

32

De ce fait, on remarque que la résistance du bois de structure peut être plus importante en

compression qu’en traction, généralement due à la sensibilité aux variations locales de la pente de

fil.

1.2.5.2 Influence de l’orientation du fil

De plus, certains arbres croissent avec une orientation principale des cellules formant une spirale

autour du tronc. Ce fil tors est courant pour certaines espèces (Pinus radiata, Caryocar glabrum) et

rare pour d’autres (Picea abies, Hymenae courbaril). Cette autre caractéristique, due à la croissance

du bois, affecte sa qualité et peut entrainer des déformations importantes lors du séchage [32].

Concernant les caractéristiques mécaniques, celles du bois dépendent de l’orientation de la

sollicitation par rapport à celle du fil dont le sens longitudinal présente les meilleures performances.

Ainsi, avec un bois contrefilé, les résistances mécaniques diffèrent le long de la pièce de structure

suivant l’angle du fil. Enfin, la résistance en traction est plus particulièrement affectée (réduite) par

l’augmentation de la déviation du fil suivant l’orientation de la sollicitation que la résistance en

flexion ou en compression d’après Baumann en 1922 [30]

1.2.5.3 Bois juvénile et bois de réaction

Il est à noter que les 5 à 20 premiers cernes d’accroissement possèdent des caractéristiques

différentes de celles du bois extérieur arrivé à maturité [33]. Ce bois appelé bois juvénile possède,

une masse volumique, une résistance et une élasticité plus faible , particulièrement chez les résineux

[33, 34]. Pour les feuillus tropicaux, certaines espèces forestières favorisent la croissance en hauteur

par rapport à la croissance en diamètre en réponse à une forte compétition interspécifique, elles

développent alors un bois juvénile plus rigide et souvent plus dense [35]

De plus, du fait que la croissance de l’arbre dépende de

l’environnement dans lequel il évolue, celui-ci peut, suite à

des perturbations extérieures, développer une inclinaison

du tronc. Via une action mécanique active, un bois

spécifique peut se former, connu comme bois de réaction.

Chez les feuillus, ce bois se forme sur la face supérieure à

l’inclinaison (bois de tension figure 10), a contrario, les

résineux le développe sur la face inférieure (bois de

compression). D’un point de vue mécanique, le bois de

Figure 10: Observation du bois de tension pour l’Eperua falcata (J. Ruelle)

33

réaction est sujet à d’importantes déformations axiales au séchage, et a tendance à se rompre plus

facilement (pas de phase plastique, rupture dès que la limite élastique est atteinte)

1.2.5.4 Influence de la densité

La masse volumique du bois constitue le paramètre physique le plus important dont dépendent la

plupart de ses propriétés mécaniques [15]. Bien évidemment, ce paramètre dépend énormément de

l’espèce du bois, de la largeur des cernes, de son humidité…

La masse volumique est directement dépendante de la porosité du bois définie comme la proportion

volumique de vide cellulaire [14]. En effet, un bois très poreux aura une masse volumique plus

faible qu’un bois peu poreux du fait que le premier est constitué de moins de matière ligneuse.

Enfin, les différences de densité entre les feuillus et les résineux sont aussi dues aux différences de

structure anatomique. Généralement, les cellules composant les feuillus ont des parois cellulaires

plus épaisses, et sont donc plus denses, que celles des résineux [36].

Plusieurs études ont montré que l’élasticité en flexion et la contrainte de rupture parallèle au fil sont

corrélées quasi linéairement avec la densité [19, 37]. En reprenant l’idée de Bodig [38], Guitard et

El Amri [39] ont rédigé des régressions permettant d’approximer les constantes d’élasticité des bois

dont la densité diffère de celle dite «standard » (0.65 pour les feuillus et 0.45 pour les résineux,

tableau 2).

Tableau 2: Equations correctives des modules d’élasticité en fonction de la densité pour les feuillus à H=12%

Dans ce tableau, la valeur des modules est exprimée en MPa et ces équations restent valables pour

des feuillus dont la densité est comprise entre 0.1 et 1.2.

En 1982, Bodig et Jayne [38] observent l’influence de la densité sur les propriétés mécaniques du

bois (figure 11) et les relient par l’équation suivante :

(4)

Avec:Y sont les propriétés élastiques, D est la densité du bois, a et b sont des constantes données

pour chaque essence de bois avec b>1.

De ce fait, il apparait évident que la limite d’élasticité augmente proportionnellement avec la

densité (figure 11).

34

Figure 11: Effet de la densité sur une propriété mécanique sur l’ensemble de 200 essences

Enfin, la densité du bois et indissociable à l’humidité de stabilisation du bois. En effet, elle est

utilisée dans un large panel de conditions atmosphériques entrainant des humidités de bois bien

différentes, la stabilisation des pièces de structure est variable, impliquant directement une variation

de la masse volumique et donc de ses résistances mécaniques [40].

1.2.5.5 Influence de l’humidité

Le caractère hygroscopique du bois a été souligné dans la partie générale du matériau ligneux,

présentant l’influence de l’humidité sur les déformations du bois. Dans le cadre de cette partie, il

s’agit de montrer l’influence reconnue du comportement hydrique sur les caractéristiques élastiques

[41] [39] et [13]. D’une façon générale, les résistances mécaniques du bois diminuent linéairement,

plus ou moins rapidement, jusqu'à leur stabilisation une fois que le Point de Saturation des Fibres

(PSF) est atteint [39, 42, 43].

Sur le plan pratique, Kollmann et Gerhards [20], Guitard et El Amri [39], ont établi des relations

permettant d’approximer les composantes élastiques en fonction de l’humidité à laquelle le bois est

soumis à sollicitations (tableau 3). Cependant, ce modèle reste proche de la réalité pour des

humidités comprises entre 6 et 20% [39, 44].

Tableau 3: Equations correctives des modules d’élasticité en fonction de l’humidité

[ ] [ ] [ ] [ ] [ ] [ ]

35

Soulignons, enfin, le fait que le taux d’humidité du bois est un paramètre important affectant

l’élasticité du matériau. En effet, Schlyter et Winberg ainsi que Hoffmeyer, ont montré que 1%

d’augmentation de la teneur en humidité du bois entraîne une diminution de 3% à 4% de la limite

élastique dans la direction longitudinale [43, 45].

1.2.5.6 Influence de la température

En général, la variation de la température a un effet similaire à celui de la variation de l’humidité.

En effet, les propriétés élastiques du bois diminuent avec l’augmentation de la température jusqu'à

ce que le point de fusion du bois soit atteint [38]. Dès 1967, Siimes remarque que pour une même

teneur en humidité, l’augmentation de la température diminue la résistance mécanique du bois [46].

Sulzberger, confirme cette observation en exposant des courbes de décroissance du module

d’élasticité de plusieurs essences de bois en fonction de la température [20]. Cet effet de la

température sur la résistance mécanique du bois se voit amplifié lorsque l’humidité, elle aussi,

augmente [28].

Enfin, et d’après Salamon en 1963 [42], il apparaît que la réduction des propriétés mécaniques due à

l’augmentation de la température soit plus faible pour un bois de plus grande densité [20]. Notons

par ailleurs, que la résistance à la traction est moins affectée par l’effet température du bois que les

autres sollicitations (flexion, compression).

1.2.5.7 Influence combinée de l’humidité et du temps

(effet mécanosorptif)

Il a également été démontré que l’effet mécanosorptif (variations cycliques d’humidité augmentant

le fluage du bois) réduit la durée de vie de ce matériau [47], [48]. En effet, en plus de l’influence de

l’humidité et de la température sur les propriétés mécaniques du bois, l’effet de la durée de charge

est à prendre en considération pour des produits destinés à la construction [49]. En effet, des tests

menés aux Etats-Unis ont montré que les valeurs de résistance de produits bois soumis à des

charges de longue durée sont 40% plus faibles que celles pour des bois soumis à des essais de

courtes durées en laboratoire [31] et peuvent augmenter en fonction de la qualité du bois (bois

d’œuvre ou sans défauts [50, 51]. Ceci est d’autant plus vrai que l’influence de la durée de charge

avec des variations cycliques d’humidité est corrélée à la section du bois étudié. Ces recherches

mènent à la conclusion que des bois de petite section sont plus affectés par ces effets de charges

(menant à la rupture) que les bois de plus grande section [45].

36

En plus de cela, le taux d’humidité a une influence notable sur les effets de durée de charge [18],

[27]. En effet, pour un taux de contrainte donné, les bois en flexion à fort taux d’humidité ont une

durée de vie plus courte que les bois plus secs [49]. Enfin, les bois traités en surface ou les poutres

en bois lamellé-collé d’un certain volume sont moins sensibles aux variations d’humidité que ne le

sont les bois non traités ou de faibles volumes [18].

En plus de la variabilité intrinsèque du bois (bois initial, bois final, bois juvénile et bois de réaction)

ce matériau hétérogène présente également une variabilité intra essence car dépendant du génotype

et de l’environnement ou l’arbre a grandi. Cette caractéristique engendre une variabilité sur les

caractéristiques physiques et mécaniques inter et intra espèces. De même, une variabilité

supplémentaire est ajoutée en fonction de la qualité du bois (présence de nœuds, orientation du fil,

présence d’aubier ou autres défauts) réduisant plus ou moins ses caractéristiques mécaniques. Afin

de pallier ces variabilités (outre celles en fonction de la direction du fil), une nomenclature d’essai

existe afin d’homogénéiser les caractéristiques mécaniques d’une même essence et permet de la

comparer à une autre. En calcul des structures, et du fait que des bois en dimension d’emploi ont

des caractéristiques mécaniques plus faibles que ceux des essais (notamment à cause de l’effet

mécanosorptif), les valeurs moyennées avec leurs déviations standards sont utilisées comme

référentiel ou référence. Enfin, pour la construction, des produits bois peuvent être reconstitués afin

de minimiser cette variabilité, en purgeant le bois de ces défauts par exemple.