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CHAPITRE I : CONTEXTE SCIENTIFIQUE

4. Les contaminants organohalogénés

4.3. Les Polybromodiphényles éthers (PBDE)

4.3.1. Structure chimique et synthèse

Le terme de PBDE (Figure 17) désigne une famille de composés organohalogénés de haut poids moléculaire de formule chimique C12H(10-n)BrnO, dans laquelle le nombre d’atomes de brome (n) peut varier entre 1 et 10. La numérotation des atomes de brome est la même que celle des PCB et les congénères sont identifiés selon le même système.

Figure 17 : Structure générale des PBDE.

Les polybromodiphényles éthers sont produits par bromation des diphénylethers en présence d’un catalyseur (Sellström, 1996). Dix groupes d’isomères sont ainsi obtenus (Tableau 12), soit en théorie 209 congénères, qui se distinguent par le nombre et la position d’atomes de brome fixés sur la molécule. Ce sont des caractéristiques structurales qui déterminent les propriétés physico-chimiques de chaque congénère de PBDE (solubilité, pression de vapeur, coefficient de partage octanol-eau) ainsi que leur pouvoir toxique.

Tableau 12 : Nombre d’isomères possibles de PBDE

Substitutions bromées Nombre d’isomères

Mono- 3 Di- 12 Tri- 24 Tetra- 42 Penta- 46 Hexa- 42 Hepta- 24 Octa- 12 Nona- 3 Deca- 1

Les PBDE ne se retrouvent pas naturellement dans l’environnement; ils sont généralement synthétisés sous la forme de mélanges, appelés pentabromodiphényléther commercial (ComPeBDE, qui sont surtout des mélanges de Tetra-, Penta- et Hexa-BDE), octabromodiphényléther commercial (ComOcBDE, qui contient principalement de l’Hepta-, Octa- et Hexa-BDE et d’éventuelles faibles quantités de Penta-, Nona- et Deca-BDE) et décabromodiphényléther commercial (ComDeBDE, dont les préparations actuelles contiennent presque entièrement du Deca-BDE et une faible quantité de Nona-BDE) (PISSC, 1994). Ces familles sont les plus communément produites ; en 1999, elles représentaient respectivement 6%, 12% et 82% de la production globale.

4.3.2. Utilisations

Les PBDE sont utilisés comme retardateurs de flamme (BFR), et comme produits ignifugeants. Le domaine d’application des retardateurs de flamme bromés (BFR) est aujourd’hui extrêmement large et varié :

→ Transport (voitures, bus, avions) : parties électriques et électroniques, revêtements textiles comme les housses de sièges

→ Construction : polystyrène, polyuréthane, peinture, mastic, éclairages, plastique utilisé pour l’isolation des tuyaux, isolation des toits

→ Industrie : dans divers produits de la chimie, fibres synthétiques, polymères, résines, colles, mousse de polyuréthane pour les meubles et les garnitures intérieures

→ Equipements électroniques : boîtiers et circuits imprimés d’ordinateurs, de télévisions, de chaînes HI-FI, de téléphones, de sèche-cheveux

Le DeBDE commercial est surtout utilisé dans le polystyrène résistant aux chocs faisant partie des boîtiers de l’équipement électronique, c’est également le seul PBDE commercial utilisé comme produit ignifuge dans les textiles servant au rembourrage. L’OcBDE commercial est principalement utilisé dans l’acrylonitrile-butadiène-styrène comme produit ignifuge dans l’enveloppe de l’équipement de bureau. Le PeBDE commercial est utilisé presque exclusivement dans la mousse souple de polyuréthane qui sert de capitonnage dans les meubles rembourrés (Wenning, 2002).

Dans les années 1990, la production annuelle de retardateurs de flamme était estimée à 600000 tonnes, dont un quart attribuable aux BFR (150000 tonnes) (Manchester-Neesvig et al., 2001). Près d’un tiers des BFR correspondent à des PBDE (50000 tonnes). Ces produits sont majoritairement recherchés en Amérique du Nord (40%), en Orient (30%), et en Europe (25%). Huit industries fournissent le marché mondial des PBDE ; elles sont situées en France, en Grande Bretagne, en Israël, au Japon, aux Pays-Bas, et aux Etats-Unis.

4.3.3. Propriétés physico-chimiques

Les PBDE sont des molécules très stables, non hydrolysables. Ils présentent notamment une grande résistance aux acides et aux bases, à la lumière, et aux réactions d’oxydoréduction.

Lorsque les PBDE sont soumis à la chaleur, ils sont susceptibles d’engendrer la formation de composés tels que les polybromodibenzofurans (PBDF) et de polybromodibenzodioxines (PBDD), dont la structure est proche de celle des polychlorodibenzodioxines (PCDD) et des polychlorodibenzofurannes (PCDF) réputés toxiques et potentiellement cancérigènes (Bieniek et al., 1989) (Figure 18).

Figure 18 : Mécanisme de formation de polybromodibenzofurannes (PBDF) et de polybromodibenzodioxines (PBDD) à partir du DecaBromo DiphenylEther (Bieniek et al., 1989).

4.3.4. Toxicité

Toxicité aigue :

Comme pour les PCB, la toxicité aiguë des PBDE, en particulier des mélanges ComPeBDE, ComOcBDE et ComDeBDE, est faible pour l'homme : les doses létales pour 50% des individus (DL50) sont supérieures à 1 gramme par kilogramme de poids corporel (De Boer et al., 2000).

Toxicité chronique :

En raison de leur similitude chimique avec les dioxines et les PCB, un large et croissant effort de recherche est réalisé concernant les aspects toxiques et la présence de PBDE dans l’environnement. Contrairement aux dioxines et aux PCB, les PBDE ne sont pas de forts inducteurs de l’activité « aryl hydrocarbon hydroxylase receptor » (Manchester-Neesvig, 2001). Ils ont cependant des conséquences sérieuses sur la santé tels que des effets au niveau des fonctions hépatiques, thyroïdiennes et oestrogéniques, ils sont également susceptibles de générer des perturbations au niveau du développement neuronal (De Boer et al., 2000). Ces substances sont, par ailleurs, reconnues comme étant d’importants perturbateurs endocriniens (De Boer et al., 2000).

4.3.5. Réglementation

Les importantes concentrations en PBDE mesurées dans les organismes et les tissus humains, ainsi que les risques toxiques que représentent ces substances pour l’homme, ont amené plusieurs gouvernements et entreprises à limiter l’utilisation et la production de ces produits. Dès le début des années 1990, l’Europe a commencé à réduire de façon volontaire l’usage de PBDE. Depuis 2004, deux des trois formes commerciales de PBDE (penta- et octa-BDE) sont bannies par l’Union européenne.

Comme dans le cas des PCB et des dioxines, la voie principale d’exposition de l’homme à ces contaminants est l’alimentation (Domingo, 2004). Cependant, aucune norme n’existe encore en Europe quant aux doses maximales admissibles pour les populations. Au Canada, une norme a été établie pour le PentaBDE, basée sur les effets neurocomportementaux observés chez des souris nouvellement nées : la dose maximale admissible pour l’homme est de 0,8 mg.kg-1 de poids corporel par jour

4.4. Bioconcentration / bioaccumulation / bioamplification des contaminants