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CHAPITRE II : MATERIEL ET METHODES

1. Protocole d’échantillonnage

1.2. Influence de facteurs ontogéniques sur la contamination en PCB et les signatures

(Articles 3 et 4)

La bioaccumulation des PCB et les signatures isotopiques du carbone et de l’azote sont influencées par différents facteurs physiologiques et écologiques (croissance, reproduction, migration). Afin d’appréhender ces processus, ces paramètres ont été suivis pendant deux ans

(2003-2004) sur deux populations d’araignées de mer, l’une prélevée à Antifer (Baie de Seine) et l’autre en Mer d’Iroise (Figure 21).

Figure 21 : Zones d’échantillonnage des deux populations d’araignées de mer étudiées. 1.2.1. Description des populations de Maja brachydactyla

- Maja brachydactyla en Mer d’Iroise

Au cours des deux premières années de leur vie, correspondant à la phase juvénile, les araignées se cantonnent dans des « petits fonds » par 5 à 15 mètres de profondeur à proximité de la côte. En Mer d’Iroise, l’anse de Bertheaume (AB, Figure 22) abritée des plus fortes houles d’ouest et sud-ouest est l’un de ces secteurs qualifiés de nourricerie. Un herbier de

Zostera marina s’y développe sur quelques hectares et constitue la zone centrale de cette

nourricerie. Les juvéniles de première et deuxième années y passent l’hiver à demi enfouis dans le sable au milieu des rhizomes. Au cours du printemps, les mues se succèdent et les individus se déplacent alors vers les substrats mixtes de sables et roches.

Après leur mue terminale, les nouveaux adultes (2-3 ans) rejoignent les secteurs occupés par les adultes plus âgés revenus à la côte pour la ponte. Le Rocher du Corbin (RC, Figure 22) est un de ces sites côtiers où les adultes de Maja brachydactyla se rencontrent au printemps-été par des profondeurs de 10 à 15 mètres. Secteur peu abrité, il est caractérisé par des substrats rocheux, et par un peuplement riche avec une abondante faune endogée de polychètes et de sipunculiens notamment ; une épifaune composée de nombreuses espèces

carnivores (crabes, étoiles de mer..) y trouve une nourriture abondante et facile d’accès. Cette zone est également caractérisée par de vastes champs de macrophytes telle les laminaires.

En automne-hiver les araignées adultes migrent vers les eaux du large et les échantillons nécessaires à cette étude ont été prélevés près de l’île de Sein (ZL, Figure 22). Au cours de cette migration les araignées traversent les fonds sédimentaires et espèces associées très diversifiés de la Mer d’Iroise. D’abord une large bande de graviers sableux hétérogènes qui par 30 à 60 mètres fait le lien avec le vaste plateau rocheux prolongeant à l’ouest la Presqu’île de Crozon ; la roche y est dépourvue de macroalgues, la faune fixée est abondante, et les crustacés suspensivores (Pisidia longicornis) et carnivores ainsi que les oursins herbivores sont les groupes d’invertébrés mobiles dominants. Enfin, les araignées vont passer l’hiver sur des fonds d’environ 60 mètres au nord ouest du plateau rocheux de l’île de Sein où les sédiments caractéristiques sont les graviers propres et les graviers biogènes. Sur ces fonds une épifaune sessile fixée sur les plus gros graviers et débris coquilliers se surimpose à la faune de l’interface et à l’endofaune riche en bivalves. La chaussée rocheuse de Sein semble être la limite Sud de l’espace migratoire de cette population. Ainsi au cours d’un trajet entre la nurserie à la côte et la zone d’hivernage au large, les araignées vont rencontrer au moins six biotopes différents avec, évidemment, des proies différentes. Les espèces mais également les groupes trophiques de ces proies vont ainsi varier au cours des saisons et plus largement de la vie des individus de la population de la Mer d’Iroise.

AB RC ZL AB RC ZL

Figure 22 : Faciès sédimentaire et communautés benthiques associées en Mer d’Iroise (Raffin, 2003). AB = Anse de Bertheaume, nourricerie des araignées de mer juvéniles ; RC = Rocher du Corbin correspondant à la zone côtière des adultes ; ZL = zone au large des adultes.

- Maja brachydactyla en Baie de Seine

En Baie de Seine, la population d’araignée se situe plus particulièrement dans la partie orientale, au Nord-Ouest de la côte joignant le Cap de la Hève au Cap d’Antifer. La phase juvénile s’y effectue à la côte sur des fonds de moins de 10 mètres, principalement dans le Nord immédiat du terminal pétrolier d’Antifer (ZCJ, Figure 23). Les fonds biosédimentaires de ce secteur ont été décrits par Gentil (1976). Les éléments ci-dessous sont adaptés de la carte actualisée publiée par Gentil et Cabioch (1997). Il s’agit de sédiments fins sableux envasés auxquels est associée une macrofaune benthique dont l’espèce leader est le petit bivalve Abra alba. Le reste de la communauté est composé essentiellement par une faune

endogée de polychètes tubicoles et errantes (Nephthys hombergii), d’échinodermes (Echinocardium cordatum, Acrochnida brachiata), de bivalves et de crustacés, espèces qui sont des proies potentielles pour les araignées.

Dès que les fonds atteignent 20 mètres, les sédiments deviennent légèrement plus hétérogènes mais restent sous influence pélitique, le flux de particules fines issues de l’Estuaire de la Seine restant encore très fort. Cependant, à la hauteur d’Antifer, il s’agit plutôt d’une étroite bande de transition de peu d’importance nutritionnelle pour l’araignée en cours de migration. En effet très rapidement le sédiment change radicalement, devenant très grossier, à la fois vers le large au Nord Ouest et le long de la côte au Nord Est. Il s’agit d’une communauté de cailloutis et graviers, unité biosédimentaire majeure qui occupe la plus grande partie des fonds de la Manche centrale, au Nord du Cotentin. C’est dans cet ensemble que la population d’araignées adultes va séjourner aussi bien pendant sa phase côtière (ZCA, profondeur 10-20 mètres), que celle au large (ZLA, profondeur 30-40 mètres). L’espèce dominante, accessible également aux araignées est l’échinoderme Ophiothrix fragilis, et des petits crustacés comme Pisidia longicornis. Des gastéropodes constituent une fraction importante de l’épifaune mobile (Gibbula tumida, Buccinum undatum), mais l’épifaune sessile est également diversifiée. Une large bande de graviers plus ou moins ensablés s’étend à l’Ouest de ces cailloutis. L’ophiure Ophiothrix fragilis y est toujours dominante, le reste du peuplement présentant une forte affinité avec la communauté des cailloutis plus ou moins graveleux.

ZLA ZCJ ZCA ZLA ZCJ ZCA

Figure 23 : Faciès sédimentaire et communautés benthiques associées en Baie de Seine (Gentil et Cabioch, 1997). ZCJ = zone côtière des araignées de mer juvéniles, correspondant à la nourricerie ; ZCA = zone côtière des adultes ; ZLA = zone au large des adultes.

1.2.2. Stratégie d’échantillonnage

Au printemps-été 2003 et 2004, des araignées juvéniles mâles et femelles ont été prélevées tous les mois en Mer d’Iroise et en Baie de Seine. Concernant les individus adultes, des échantillonnages ont été réalisés régulièrement à fois au large et à la côte pour les deux secteurs géographiques (Tableaux 15 et 16)

Tableau 15 : Récapitulation des prélèvements réalisés en Mer d’Iroise en 2003 et 2004 (♂ = individu mâle ; ♀ = individu femelle) : AB = Anse de Bertheaume ; RC = Rocher du Corbin ; ZL = zone au large)

Mois de prélèvement Nombre d’individus Type de prélèvement

Mars (AB) 13 ♂ + 10 ♀ Plongée scaphandrier

Avril (AB) 3 ♂ + 5 ♀ Plongée scaphandrier

Mai (AB) 10 ♂ + 9 ♀ Plongée scaphandrier

Juin (AB) 14 ♂ + 12 ♀ Plongée scaphandrier

Juillet (AB) 7 ♂ + 12 ♀ Plongée scaphandrier

Individus juvéniles

Septembre (AB) 2 ♂ + 5 ♀ Plongée scaphandrier

Février (ZL) 15 ♂ + 13 ♀ Pêche au casier/filet

Avril (RC) 10 ♂ + 12 ♀ Plongée scaphandrier

Juin (RC) 8 ♂ + 14 ♀ Plongée scaphandrier

Août (RC) 10 ♀ Plongée scaphandrier

Individus adultes

Décembre (ZL) 7 ♂ + 3 ♀ Pêche au casier/filet

Tableau 16 : Récapitulation des prélèvements réalisés en Baie de Seine en 2003-2004 (♂ = individu mâle ; ♀ = individu femelle). (ZCJ = zone côtière des araignées de mer juvéniles, correspondant à la nourricerie ; ZCA = zone côtière des adultes ; ZLA = zone au large des adultes).

Mois de prélèvement Nombre d’individus Type de prélèvement

Mai (ZCJ) 5 ♂ + 6 ♀ Plongée scaphandrier

Juin (ZCJ) 5 ♂ + 2 ♀ Plongée scaphandrier

Juillet (ZCJ) 2 ♂ + 1 ♀ Plongée scaphandrier

Août (ZCJ) 5 ♂ + 7 ♀ Plongée scaphandrier

Individus juvéniles

Septembre (ZCJ) 4 ♂ + 5 ♀ Pêche au casier/filet Mars (ZLA) 6 ♂ + 6 ♀ Pêche au casier/filet

Avril (ZCA) 4 ♂ + 4 ♀ Plongée scaphandrier

Mai (ZCA) 4 ♂ + 7 ♀ Plongée scaphandrier

Juin (ZCA) 3 ♂ + 11 ♀ Plongée scaphandrier

Juillet (ZCA) 1 ♂ + 4 ♀ Plongée scaphandrier

Août (ZCA) 6 ♂ + 2 ♀ Plongée scaphandrier

Individus adultes

Novembre (ZLA) 5 ♂ + 7 ♀ Pêche au casier/filet

Pour chaque individu, le sexe, l’âge, la taille (Lc en cm), le poids frais (en g) ainsi que le stade de maturité ont été déterminés. L’hépatopancréas, le muscle, les gonades (individus femelles adultes uniquement) ont été systématiquement prélevés et stockés à -20°C dans des piluliers en verre (grillés/tarés) avant analyses. L’analyse de 16 congénères de PCB a été réalisée sur le muscle, l’hépatopancréas et les gonades (femelles) de chaque individu (laboratoire DCN-BE-CO, Ifremer centre de Brest). Des mesures isotopiques ont été faites sur

le muscle, l’hépatopancréas et les gonades de certains individus (laboratoire Scottish Crop, Ecosse).