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2. L'éthique arguédienne: une réponse à la problématique du Pérou

2.2. Le refus de rupture

2.3.1 Les polarités de l'identité culturelle nationale

Les études folkloriques et ethnologiques de José María Arguedas ont non seulement nourri son oeuvre de fiction, elles l'ont modelée et lui ont conféré un visage spécifique et original. Il serait malaisé de reprendre tous les récits; nous nous concentrerons sur Los ríos profundos et Todas las sangres pour mettre en évidence les passages les plus marquants de cet apport qui soulignent le phénomène de transculturation dont souffrent les héros arguédiens, en quête d'une identité culturelle stable, dans un processus de métissage houleux.

D'ores et déjà, une remarque s’impose : l'oeuvre d'Arguedas, exalte les notions de mobilité et de fluctuation. Les personnages subissent des transformations brusques et se caractérisent en ce qu'ils sont immergés dans une réalité et un environnement qui les dépasse, les dérange et les bouscule. D'où leurs réactions conflictuelles s'enchaînant l'une l'autre, face à cette réalité mouvante et imprévisible dans laquelle ils cherchent, de toutes leurs forces, à s'insérer.

A ce niveau d'appréhension du phénomène de la transculturation, citons Carlos Pacheco qui replace la perspective d'élargissement du champ culturel qu’a développé Arguedas, qui, elle non plus, n'a pas toujours été comprise à l'époque de la production littéraire de l'écrivain. De plus, à l'intérieur du cheminement éthique du penseur qu'est Arguedas, s’opposent deux visions du monde, la traditionnelle et la moderne:

"Presentar el problema de la binariedad y el conflicto de las culturas quechua y occidental y postular el modelo de una posible síntesis transculturadora, única vía aceptable de solución a ese problema, fueron los propósitos que orientaron su existencia y lo consumieron en vida. Hoy cuando, acentuados los conflictos socioculturales y políticos, el Perú y el continente todo continúan debatiéndose entre la modernidad y la tradición, en busca de su ser genuino, parece oportuno revisar este proyecto".251

Le fait de choisir non seulement la langue espagnole, mais aussi le genre du roman d'origine occidentale, comme moyen d'expression et comme genre artistique, est en soi un aveu du désir d'être reconnu par le système social dominant, que l'auteur accepte donc implicitement comme tel, ne serait-ce que pour faire entendre sa vision d'un Pérou représentatif de toutes ses composantes. C'est ce que Pacheco souligne, en insistant sur la genèse du phénomène d'acculturation en Amérique Latine:

"Esta idea de transculturación había sido propuesta en 1940, por Fernando Ortiz. El antropólogo cubano comienza por enfatizar en su trabajo las limitaciones del término aculturación, comúnmente usado como influencia de una cultura superior sobre otra supuestamente menos desarrollada. A partir de allí, define la transculturación, como un intercambio bidireccional que afecta en todo caso a las dos o más culturas que entren en contacto. En Cuba y América Latina en general, este fenómeno adquiere tal importancia, según Ortiz, que sobrepuja en trascendencia todo otro fenómeno histórico. De esta forma, el de transculturación deviene cardinal y elementalmente indispensable para comprender la historia de Cuba y, por análogas razones, la de toda América en general".252

A travers toute l'oeuvre arguédienne, nous retrouvons les valeurs fondamentales du monde andin que constamment affirme notre auteur : le sentiment de fraternité, de cohésion et de solidarité, lié à la structure communautaire ainsi qu'à la tradition folklorique et mythique, comme source de régénération éthique, porteuse d'un avenir pacifié. Ces valeurs confrontées à l’apport hispanique et occidental repensé mais non nié constituent les clés de voute du métissage culturel et de la création littéraire d’Arguedas.

Quand nous parlons d'identité culturelle des héros arguédiens, que ce soit celle de l'enfant - héros autobiographique, jusqu'à celle du héros "choral" de Todas las sangres - il nous faut nous pencher sur ce terme d'identité pour mieux le cerner. Nous allons nous référer à un groupe qui s'est réuni au Centre de recherche interdisciplinaire de Vaucresson, autour du thème d'une approche dynamique des

251Carlos Pacheco: "El proyecto transculturador de José María Arguedas", in Escritura, VIII, 15, Caracas, enero-junio, 1983, p. 111.

"stratégies" qui permettent de définir l'identité culturelle. Nous citerons donc en français des auteurs ayant traité ce thème.253

Dans le terme d'identité, il faut tout d'abord définir la constitution du Moi, considéré comme noyau originel de l'identité basique de l'individu. Goffman, insiste sur la mouvance des identités plurielles, par rapport au Moi, vecteur de continuité essentielle pour la structure de la personnalité:

"Peut-on concevoir le moi comme une sorte de noyau profond de la personne, noyau qui peut s'occulter, lors de certaines interactions sociales, derrière l'expression des rôles que le Moi est amené à assumer? Cette approche suppose une certaine distance entre les identités qu'arbore l'acteur social et l'essence de son Moi, ou si l'on veut, l'existence de deux sortes d'identités, l'identité existentielle et profonde qui fait la continuité de la personne, et l'ensemble des différentes identités qu'elle fait siennes au cours de sa vie".254

Si l'on comprend que le sentiment d'identité se constitue en fonction du regard d'autrui, il est bien entendu très ardu de savoir quelle est la conscience que l'individu se forge de sa propre identité, sans compter que, pour la percevoir, il faut constamment se référer aux données socio-historiques et artistiques de l'environnement propre à chaque culture, car celles-ci conditionnent la formation de l'identité individuelle.

Il ne s'agit donc pas uniquement d'une identité, mais bien plutôt d'un "faisceau" d'identités, selon les rôles que joue l'individu au sein de la société. Si nous pensons à Ernesto, dès Los ríos profundos, nous constatons combien sa propre perception de lui-même, comme son évolution au sein de la société dans laquelle il vit, est en constante évolution et subit des fluctuations considérables.

Fils de blanc, projeté dans un internat, dans une ville inconnue, Abancay, Ernesto va tisser d'abord des liens d'amitié avec Antero, fils d'un grand propriétaire terrien blanc ainsi qu'avec un fils d'Indiens, Palacitos tous deux hispanophones et "quechua hablantes". Si le héros Ernesto, oscille entre leurs deux univers en raison d’un objet typiquement métis, le zumbayllu, il va s'identitfier progressivement à l'univers andin en exclusivité à travers les valeurs véhiculées par ce dernier.

Le modelage de l'identité d'Ernesto se créera à partir de zones de revendication sur le plan émotionnel, telle la joie de participer aux chants et aux danses indiennes, qui lui rappellent son enfance d'une part, et d'autre part, sa capacité à participer à des actes courageux, comme celui où "les chicheras" répartissent le sel aux "colonos" les plus pauvres d'Abancay. Tandis que son aptitude à exprimer ses sentiments lui est conférée par son écriture, qui lui vient de son

253 Stratégies identitaires traite de la problématique de l'identité et a fait l'objet d'une étude collective: 1) les stratégies identitaires des acteurs sociaux par J. Kasterszein. 2) Stratégies identitaires et minorités par I. Toboada-Leonetti. 3) Identité et gestion de la disparité culturelle par C. Camilleri. 4) Le processus de dévalorisation de l'identité et les stratégies identitaires par H. Malewska Peyre. 5) Les mécanismes des stratégies identitaires par A. Vasquez. 6) Identité subjective et interaction par E.-M.Lipiansky.

appartenance au monde hispanique, ce qui le met en porte à faux vis à vis des Indiens, lui, un blanc, et le place "hors du cercle", de quelque côté qu'il s'appréhende.

Son regard intérieur double va éloigner Ernesto des uns et des autres et le confiner dans une solitude rarement brisée, si ce n'est par certains gestes amicaux qui symboliseront son identification irréductible au monde andin. Ainsi, lorsque la peste fait rage, le don par Palacios de deux pièces d'or lui signifiera l'amitié et la considération profondes que lui porte ce fils d'Indien, alors que l'éloignement progressif d'Antero, qui lui avait tout d'abord offert le zumbayllu, lui confirmera son appartenance à l'univers andin qui a abrité et protégé son enfance.

Ainsi Ernesto présente-t-il une identité qui s'édifie en fonction des différentes données qui s'offrent à son champ d'expérience, qu'il assimile peu à peu. C’est ce que relève très justement J. Kastersztein:

"Comme on le voit, l'identité est entre autres choses, un traitement permanent de la disparité, par laquelle et, simultanément, contre laquelle, elle s'édifie: la gestion de la disparité culturelle, n'est donc en rien une opération inédite, mettant en jeu des mécanismes exceptionnels. Elle est seulement plus difficile, en principe, du fait que les différences, dans ce cas, ont des chances d'être plus souvent des oppositions plus marquées qu'à l'ordinaire".255

A la fin du roman, l'éloignement d'Antero, fils de grand propriétaire terrien, ainsi que le rapprochement entre celui-ci et Gerardo, lui aussi blanc, et fils de commandant à Lima, signifiera pour Ernesto sa distanciation définitive d'avec l'univers hispanique, et son adhésion indéfectible au monde andin, représentatif des valeurs communautaires dont est issu Palacitos, et auquel Ernesto s'identifie douloureusement.

Néanmoins, au cours de ce long processus d'identification, nous constatons qu'Ernesto n'est jamais en porte-à-faux avec sa conscience intime et son adhésion au système de valeurs qu'il respecte. La constante andine est maintenue envers et contre tout. Mais le prix qui en résulte est lourd pour Ernesto, car si l'unité de sens est préservée, la valeur qu'il s'attribue est forcément entamée, d'où les phases cycliques d'auto-dévalorisation, de dépression suicidaire, en alternance avec des phases d'exaltation hors du commun. Signalons ici l'avis de J. Karstersztein, quant aux deux principaux axes sur lesquels se structurent l'identité culturelle:

"Les deux grands défis auxquels les individus sont prioritairement sensibles en situation de morcellement culturel sont bien les atteintes à leur unité de sens et à la valeur qu'ils s'attribuent. Ce sont là, pour ainsi dire, les deux inducteurs les plus fréquents de leurs réactions identitaires et stratégies de préservation, et qui ne se confondent pas".256

nt bien que mal, à préserver son unité de sens, et ne se remet nullement en question, préservant ainsi la continuité de son identité existentielle. Les blessures

255Carmel Camilleri: Op. cit., p. 87. 256Ibidem, p. 88.

reçues relèvent de l'humiliation subie en voyant maltraiter les êtres aimés, mais lui-même parvient à croître dans ce milieu conflictuel sans trop de dommage. Néanmoins, il nous faut nous rapporter à la définition d'Erikson sur l'identité culturelle, pour apprécier le cheminement que représente le processus constitutif de cette dernière, fondée essentiellement sur la considération, qui en est le principe déterminant: l'enfance offrant le champ essentiel d'assimilations successives et de tentatives d'identification aux différents champs d'expérience plus ou moins revendiqués au cours de l'adolescence. D’où cette définition:

"Elle surgit de la répudiation sélective et de l'assimilation mutuelle des identifications de l'enfance ainsi que de leurs absorptions dans une nouvelle configuration qui, à son tour, dépend du processus grâce auquel une société (souvent par l'intermédiaire des sous sociétés) identifie le jeune individu en le reconnaissant comme quelqu'un qui avait à devenir ce qu'il est, et qui, étant ce qu'il est, est considéré comme accepté(1972, p.167). L'acceptation de la communauté finit d'achever cette construction, de façon que l'identité finale, fixée au terme de l'adolescence, renferme toutes les identifications signifiantes, mais le transforme aussi de façon à en faire un tout raisonnablement cohérent et spécifique".257

Avec Ernesto, nous assistons aux tribulations d'un tout jeune adolescent à la recherche de ses filiations avec son double patrimoine culturel, dont le quechua qui toujours l'absorbe.

Tous les événements contribuent à lui faire percevoir les attaches et la profondeur des liens qui l'unissent aux Indiens qui l'ont élevé. Néanmoins, sa capacité d'observation aiguë, sa mémoire et son imaginaire seront des bases assez larges pour permettre à l'adolescent de ne pas se sentir perdu et de réaliser ce - va - et vient indispensable avec l'enfance, afin de pouvoir ajuster sa propre réaction à une situation extérieure donnée.

A l'intérieur d'une identité personnelle structurée, deux pôles dessinent les deux tendances de celle-ci, d'une part "le pôle ontologique", d'autre part, "le pôle pragmatique". Hanna Malewska-Peyre, insiste quant à elle, sur l'importance des valeurs éthiques et culturelles, dans la formation du noyau identitaire, participant à la continuité de la personne:

"Tout en admettant que l'identité est un processus dynamique, une gestion du changement et de la continuité constamment négocié (ce qui évoque l'approche de Lipiansky), nous insisterons, comme Erikson et à un moindre degré C. Camilleri, sur la continuité de la personne. En parlant de la continuité de la personne, C. Camilleri, évoque le pôle ontologique de l'identité qui représente la constance de certains éléments (idées, attitudes), à l'inverse du pôle pragmatique dont la fonction est l'adaptation aux situations. Pour ma part, je dirais que les valeurs éthiques et culturelles me paraissent partie intégrante de l'identité, et que ces éléments qui contribuent au sens de l'identité se révèlent relativement stables. Ceci nous ramène à la distinction entre les éléments plus centraux et les éléments plus périphériques de l'identité".258

257Ibidem, p. 11.

Une fois encore, nous constatons que le "pôle ontologique" semble être le plus important chez Ernesto:

Rappelons-nous: l'arrivée de l'armée à Abancay et le désir d'accueillir cette dernière, de s'en faire accepter, ainsi que de plaire aux jeunes filles d'Abancay, sans savoir, par ailleurs, comment s'y prendre.

Le refus de s'adapter en s'humillant est une constante chez les adolescents. Nous remarquons la faiblesse du "pôle pragmatique" chez Ernesto, alors que chez Antero, lors de son altercation avec Gerardo; nous constatons, à l'inverse, une fragilité du "pôle ontologique".

Les réactions des adolescents, de par les sursauts émotifs plus fréquents, mettent en évidence un processus continuel d'adaptation et d'assimilation de facteurs extérieurs, ce qu'Ernesto évite par survalorisation du "pôle ontologique", comme adhésion non démentie aux valeurs éthiques et culturelles essentielles pour lui à la constitution et à la continuité de son moi.

Il nous faut donc souligner, en marge des personnages principaux la place privilégiée qu'Arguedas accorde dans son chapitre VI, au zumbayllu, de même qu’à la musique des huaynos, lesquels vont cristalliser le processus de transculturation au profit de la vision andine, à laquelle l'écrivain donne une place prioritaire dans Los ríos profundos:

"El puesto privilegiado que cabe a la canción en las operaciones transculturadoras queda así evidenciado: salva el pasado tradicional (indio) y permite la libertad creativa (chola) del presente".259

L'atmosphère de Los ríos profundos tisse un écheveau labyrintique, à travers les fils ténus des événements significatifs de ce délicat problème de transculturation, constituant ce réseau de relations mobiles et mouvantes qui est la caractéristique du roman, où finalement l'exclusion elle-même est contenue dans un processus d'échange et de réciprocité ascensionnelle; de là un charme tenace et tout ensemble douloureux.

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Le phénomène de transculturation a également lieu dans Todas las sangres en suivant la progression des personnages adultes, tout en reliant leurs projets à leurs actions. C'est le cas des deux fils de don Andrés Aragón de Peralta, ainsi que de Rendón (qui représente le métissage réussi). Tous les personnages véhiculent en eux les germes de la transculturation au sein d'une société en pleine mutation, élaborant de nouvelles valeurs, au détriment d'une hiérarchie quasi féodale, qui fait obstacle à son avenir.

Dans Todas las sangres les personnages principaux, ainsi que les autres d'ailleurs, subissent le phénomène de transculturation bien que celui-ci ne se

situe pas au même niveau que dans Los ríos profundos. Nous analyserons les deux frères, don Bruno et don Fermín, à travers leur prise de conscience de la mutation qui s'opère au sein de la société dont ils sont les principaux acteurs. Ensuite nous nous pencherons sur Rendón, chez qui le processus très intériorisé ne favorise pas l'explicitation, mais se laisse découvrir à travers la continuité et la consistance de ses actes envers sa communauté d'origine, que, tel un Moïse, il conduit à bon port.

Si nous prenons don Fermín, aux prises avec sa caste d'origine, acceptant avec difficulté l'exploitation de la mine, nous voyons, à travers la violence de sa réaction et à travers son monologue intérieur, son adhésion au versant hispanique, synonyme de progrés et de modernisation, qui selon lui est l'unique facteur important dans un pays sain et productif:

"No volveré más a San Pedro de Lahuaymarca. Buscaré otra mina. Con los millones que tengo me enfrentaré a los consorcios del mundo entero (...). En la costa donde los indios van como desperdicios de las comunidades huyendo de las haciendas. Nada de minas en los pueblos con brujería y fanatismo... No sé como he de hacerlo. Pero el indio debe desaparecer. En la oscuridad de un pasado extraño. En ellos está metido el Ande con su turbamulta de misterios y con fuerza. El misterio es lo contrario de la técnica y del progreso".260

Nous avons ici, don Fermín l'industriel qui rêve de métamorphoser les Indiens en occidentaux, et de réaliser un pays, le Pérou, industrialisé, moderne, homogène, sur le mode nationaliste, sans présence étrangère, d'une part, et sans passé indien, d'autre part.

Aussi bien don Fermín que don Bruno auront recours à cette identité réactionnelle, où l'imaginaire permet au rêveur d'être le réalisateur de son rêve et de s'inscrire, par là même, dans une sorte d'identité polémique, que don Bruno adoptera, quant à lui, à plusieurs reprises, au cours du roman.

Ainsi le rôle de transculturation, est remis en question par les deux frères qui s'affrontent, mais qui - chacun selon sa propre orientation - tentent une ouverture en cherchant l'assimilation d'éléments différents, à partir des lois et des coutumes en vigueur. Ces deux hommes sont aussi les acteurs de leur histoire, et ils voudraient transformer, chacun à sa manière, l'équilibre des identités sociales au sein du Pérou.

Notons qu’en revendiquant les caractéristiques de la minorité indienne, don Bruno réalisera un "renversement sémantique", qui relève d'une autodéfense typique du groupe minoritaire:

"Ce processus, fait remarquer Taboada-Léonetti, de renversement sémantique, de retournement des valeurs est l'une des stratégies les plus fréquentes de défense devant l'assignation d'une identité minoritaire; elle apparaît souvent comme le premier signe de prise de conscience du fait que la dévalorisation de l'identité individuelle - et collective puisqu'elle atteint tous les membres du groupe défini par cette identité - est la conséquence d'une situation sociale de discrimination et de domination".261

260José María Arguedas: Todas las sangres, p. 305-6. 261Carmel Camilleri: Op. cit., p. 69.

Dans le cas de don Bruno, Vicenta va être le facteur déclenchant de la conscience de sa véritable position : grâce à son affection don Bruno prendra la pleine mesure de son attitude envers les Indiens; son amour pour Vicenta, métisse elle-même, le conduira vers les autres plus défavorisés, ainsi que vers son fils, issu d'une union qu'il n'osait plus imaginer.

Ainsi don Bruno parviendra à un élargissemnt de sa compréhension du monde andin, que Vicenta et Rendón, les deux artisans de cette prise de conscience, contribuent à lui révéler comme partie inhérente de sa propre identité.

Rendón, pour sa part, conscient de la tâche énorme qui lui incombe en tant que leader des Indiens, des métis et de tous ceux qui ont été formés par l'idéal