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Les mesures basées sur la fourchette bid-ask

1.1.1 La fourchette affichée

La fourchette bid-ask est une mesure intuitive du coût des transactions qui mesure le coût lié à l’achat d’un actif suivie immédiatement de sa vente. Comme nous l’avions défini auparavant, la fourchette St désigne le différentiel au moment t, entre le meilleur cours

acheteur At et le meilleur cours vendeur Bt :

St= At− Bt (2.1)

La fourchette bid-ask est proportionnelle au prix de l’actif, et pour pouvoir faire des comparaisons entre les actifs et entre les marchés, on peut utiliser la fourchette relative. Celle-ci se définit en pourcentage par rapport au prix moyen Mt :

Mt =

(At+ Bt)

La fourchette relative Strl est donc : Strl = St Mt = At− Bt Mt (2.3) La fourchette cotée est la mesure de l’illiquidité la plus connue. Sur un marché sans frictions, la fourchette bid-ask serait égale à 0, et le seul prix qui prévaudrait sur le marché à un moment donné est le prix de marché.

La fourchette bid-ask n’est toutefois adaptée que pour les ordres de petites tailles qui n’excèdent pas la profondeur du marché. En outres, en s’appuyant uniquement sur la fourchette, on ne peut jamais savoir l’état de liquidité d’un marché dont les prix bid et ask n’existent pas (comme les marchés de gré à gré par exemple).

1.1.2 La fourchette relative moyenne pondérée

La fourchette pour les ordres de grande taille peut être mesurée de la même manière que la fourchette St, mais en en exprimant les prix bid et ask en fonction du volume q.

Supposons que a(q) est le prix ask d’un ordre d’achat de taille q, a(q) est une fonction croissante de q. De la même manière, b(q) est le prix bid d’un ordre de vente, ou b(q) est une fonction décroissante de q. La fourchette pondérée par le volume est donc : St(q) =

at(q) − bt(q), et elle peut s’exprimer également par rapport au prix moyen :

Strl(q) = at(q) − bt(q) Mt

(2.4) Lorsque q est n’excède pas la profondeur de marché, la fourchette pondérée St(q) est

égale à la fourchette St. À mesure que le volume augmente, la liquidité offerte s’épuise,

les prix a(q) et b(q) divergent et Srl

t (q) augmente.

Toutefois, le calcul de la fourchette pondérée nécessite des données sur les ordres à cours limité sur le marché à différents moments. Or, ces données ne sont pas toujours disponibles. 1.1.3 La fourchette effective

La fourchette affichée reflète la liquidité disponible à un moment donné pour une transaction hypothétique. La fourchette effective désigne la différence entre le prix réel de la transaction et le prix de marché au moment où l’ordre a été exécuté.

Formellement, la demi-fourchette effective est définie comme suit :

Ste= dt(Pt− Mt) (2.5)

une vente). Mt est le prix sur le marché au moment de l’exécution. En termes relatifs, la

fourchette effective est égale à :

S∗et = dt

Pt− Mt

Mt

(2.6) La fourchette effective peut être assimilée à la composante de des coûts de transaction relative à l’impact sur le prix, puisqu’elle mesure la déviation du prix d’exécution réel par rapport au prix au moment la transaction.

C’est le cas aussi de dire que la fourchette effective augmente avec la taille de la tran- saction dans la mesure où les ordres de marché de grande taille sont exécutés à des prix moins favorables. Dans ce cas, on peut définir la fourchette effective en fonction de q, comme nous l’avions fait avec la fourchette relative. La seule difficulté qui se poserait, c’est lorsque une transaction de grande taille est fractionnée en plusieurs tranches. Ces tranches sont exécutées sur plusieurs périodes, et cela nécessite donc de comparer les prix d’exécutions avec les différents prix Mt à chaque moment. Calculer la fourchette effective

dans ce cas reviendrait à faire une reconstitution complète de l’opération, ce qui n’est pas si simple à faire.

Enfin, le prix de marché utilisé comme référence ne mesure pas forcément la valeur in- trinsèque d’un titre. Ce qui suggère que la fourchette effective ne capture pas la totalité du risque de liquidité.

1.1.4 La fourchette réalisée

La fourchette réalisée est différence entre le prix auquel les teneurs de marché achètent et vendent effectivement leurs titres. De ce point de vue, elle peut être considérée comme le profit théorique d’un fournisseur de liquidité. Pour calculer la fourchette réalisée, on soustrait de la fourchette effective la composante relative à l’impact sur le prix.

La raison d’être de la fourchette réalisée est d’établir la vraie rétribution obtenue par un fournisseur de liquidité qui se tient prêt à se porter contrepartie d’une transaction ini- tiée par un demandeur de liquidité. En effet, il serait incorrect d’affirmer que la fourchette affichée ou la fourchette effective constituent la rémunération d’un teneur de marché (four- nisseur de liquidité). Les ordres d’achat et de vente peuvent exercer une pression durable sur les prix, au détriment des fournisseurs de liquidité.

Pour illustrer ce point, supposons qu’un teneur de marché achète une action à 99 eu- ros alors que les meilleurs prix bid et ask sont respectivement de 99 euros et 100 euros. Lorsque le teneur de marché effectue des transactions, il réalise un profit de 1 euro sur

chaque action. Mais si, à cause des pressions de l’offre et de la demande les meilleurs prix bid et ask baissent, par exemple à 99.5 et 101.5 respectivement, son profit moyen est nul. Cet exemple montre que les fourchettes affichées ou effectives surestiment le profit des fournisseurs de liquidité lorsque les prix évoluent défavorablement.

La fourchette réalisée Sr

t se calcule comme la différence entre le prix de la transaction

Pt et le prix à un moment donné après la transaction (Mt+∆), où l’intervalle ∆ devrait

être suffisamment long pour garantir que le prix du marché s’ajuste pour refléter l’impact sur le prix. On définit Str comme :

Str= dt(Pt− Mt+∆) = dt(Pt− Mt) − dt(Mt+∆− Mt) (2.7)

Cette expression montre bien que la fourchette réalisée est égale à la fourchette effective moins la composante relative à l’impact sur le prix. Plus faible est l’impact sur le prix d’une transaction donnée, plus grande est la fourchette effective que le fournisseur de liquidité perçoit comme rémunération.

E[Str] = E[Ste] − E[dt(Mt+∆− Mt)] (2.8)

L’expression 2.8 montre que la fourchette moyenne réalisée est inférieure à la four- chette moyenne effective si E[dt(Mt+∆ − Mt)] > 0 , c’est-à-dire si la variation du prix

Mt à la suite d’une transaction est positivement corrélée avec la direction de l’ordre dt

(augmentation du prix pour un ordre d’achat, et diminution du prix pour un ordre de vente).

La valeur de la fourchette réalisée est sensible au choix du prix de référence post- transaction (c’est-à-dire à Mt+∆). En pratique, le marché a besoin de temps pour intégrer

l’information véhiculée à travers les transactions. Ainsi, le choix de ∆ dépend de la rapidité de l’intégration de cette information. Sur des marchés moins transparents, l’ajustement des prix prend plus de temps, et on devrait choisir un ∆ suffisamment élevé.

1.1.5 La mesure de Roll

Roll (1984)[291] présente une méthode d’estimation de la fourchette bid-ask basée uni- quement sur les prix de transaction. En exploitant l’idée de l’autocorrélation négative dans les variations des prix, Roll construit son estimateur grâce à la fonction d’autocovariance des rendements. Le modèle de Roll repose sur les hypothèses suivantes :

— La valeur fondamentale de l’actif suit une marche aléatoire :

Vt= Vt−1+ εt (2.9)

Où εt est un bruit blanc, tel que : E(εt) = 0, E(εtεs) = 0 pour t 6= s et V (εt) = σ2;

— La probabilité que le trader à t soit acheteur ou vendeur est de 1/2. P r(dt = 1) = P r(dt= −1) = 1/2 ;

— La probabilité que le trader en t soit acheteur est indépendante du fait qu’un trader précédent ait été un acheteur ou non : E(dtds) = 0 pour t 6= s ;

— La probabilité que le trader en t soit un acheteur est indépendante de εt: E(dtεt) = 0

. La direction des ordres de marché n’est pas corrélée avec les innovations de la valeur fondamentale.

— L’espérance des variations de la valeur fondamentale est nulle : E[Vt Vt−1] = εt= 0

On suppose que la fourchette S est constante dans le temps. Les prix ask et bid sont respectivement :

(

At= Vt+ S2

Bt= Vt− S2

(2.10) Le prix au moment t est égal à la valeur fondamentale plus ou moins la moitié de la fourchette selon que la transaction soit un achat ou une vente :

Pt= Vt+ dtS (2.11)

La variation du prix ∆Pt peut s’écrire comme :

∆Pt = ∆Vt+ ∆dt

1

2S = εt+ ∆dt 1

2S (2.12) Roll a montré qu’on peut estimer à partir de la covariance entre les variations de prix, la fourchette S : cov(∆Pt+1, ∆Pt) = S2 4 E[(dt+1− dt+ εt+1)(dt− dt−1+ εt)] cov(∆Pt+1, ∆Pt) = S2 4 E[(dt+1dt− d 2 t − dt+1dt−1+ dtdt−1] (2.13) Cov(4pt, 4pt−1) = −S2 4 (2.14) Roll = 2.p−Cov(4pt, 4pt−1) (2.15)

En cas de covariance positive, nous prenons les valeurs absolues avec un signe négatif ajouté (Harris (1990)[168]), Lesmond (2005)[232]). Hasbrouck (2009)[171] quant à lui, suggère de donner la valeur 0 à la fourchette estimée si la covariance est positive. Cepen- dant, il n’est pas clair si l’une ou l’autre de ces modifications ad hoc proposées fonctionnent bien dans des échantillons finis. De surplus, ces modifications ne sont théoriquement pas bien motivées.

En général, l’estimateur de Roll est plus précis lorsque l’intervalle de temps sur le- quel les rendements sont mesurés est court. Ces rendements peuvent être mesurés à une fréquence élevée (par exemple d’une transaction à l’autre) ou à une fréquence plus faible (le prix de clôture par exemple). Cependant, la précision de l’estimateur Roll dépend des hypothèses formulées par le modèle.

1.1.6 La mesure de Corwin et Schultz

L’estimateur high-low représente simplement l’écart relatif entre le prix le plus haut (high) et le prix le plus bas (low ) observés dans la journée :

HLt=

Ht− Lt

Ht

(2.16) Cet indicateur, malgré sa simplicité, pourrait fournir une indication sur la liquidité d’un actif. En effet, comme les prix high journaliers (resp.low ) sont presque toujours des ordres de vente (achats), le ratio des prix high/ low pour un jour reflète à la fois la variance du titre et sa fourchette Bid-Ask. Une faible valeur pour la mesure HL indique une forte liquidité.

Dans le même esprit, une mesure de la liquidité a été introduite par Corwin et Schultz (2012)[105] qui se servent des prix high et low en utilisant un intervalle de deux jours. L’intuition derrière leur mesure est que la variance est deux fois plus grande lorsque les ratios high-Low sont calculés sur deux jours, mais que la fourchette Bid-Ask reste inchangée. On peut donc estimer la fourchette bid-ask en éliminant la composante liée à la volatilité des prix. La fourchette peut donc être estimée en comparant les ratios High-Low sur un jour et ceux de deux jours d’intervalle :

CSt= (

2 + 1).(pβt−

γt) (2.17)

βtest donnée par la somme, sur deux jours consécutifs, du log-ratio au carré entre les

consécutifs, et le prix bas sur deux jours. Plus précisément, : βt= 0 X j=−1  lnHt+j Lt+j 2 (2.18) γt=  lnmax(Ht, Ht−1) min(Lt, Lt−1) 2 (2.19)

Une faible valeur pour la mesure de CS indique une forte liquidité.